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Critiques de Alice Kaplan (47)
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En quête de L'Étranger

A peine la dernière page lue, j'ai besoin de vous le partager... Un acte très égoïste parce que c'est ma façon de poursuivre la praline qu'a été En quête de L'Étranger d'Alice Kaplan.



J'ai deux Merci à distribuer avant d'aller plus loin! Le premier est pour mon mari. Merci Amor mio pour ton Amour des mots et de la littérature. Merci pour nos échanges et ceux autour d'Albert Camus! Merci de m'avoir partager, fait découvrir un de tes livres préférés, L'Étranger, et de m'accompagner dans mes réflexions nées depuis!



Je dois aussi un immense Merci à Daniel Nazon! Merci de m'avoir fait part de l'existence de cet essai! Merci de m'avoir fait découvrir Alice Kaplan, une autrice avec un style agréable et qui a su me rendre son travail captivant! Captivant au point que j'ai redouté le point final tant j'en veux encore... Merci!



Alice Kaplan au lieu d'écrire une énième biographie de l'auteur, a décidé de s'inscrire dans ce qui j'espère se fera de plus en plus, dans une voie inauguré par un auteur Michael Gorra. Michael Gorra avec son Portrait of a novel. The making of an American masterpiece ., s'attache à faire la biographie de l'œuvre Portait de femme de Henry James. Plutôt que de porter l'attention sur la personne qui a écrit, l'attention est portée sur l'oeuvre.



Alice Kaplan à l'image de Michael Gorra va nous donner les éléments importants de la vie de Camus qui permettront de comprendre comment est né petit à petit L'Etranger dans l'esprit de Camus. Cette genèse est importante et est complétée aussi par un vrai travail de détective pour comprendre quels sont les éléments qui ont nourrit sa réflexion pour arrêter ses choix dans la construction du fond et de la forme de l'Étranger.



On y découvre comment la quasi surdité de sa mère et de son oncle ont influencé le style de Camus pour l'Étranger, on y découvre les faits qui ont inspirés les scènes marquantes et pourquoi entre tous, ceux-ci plus que d'autres ont retenus son attention... Mais Alice Kaplan ne s'arrête pas là! Elle retrace aussi le parcours du combattant qui a entouré la publication de cet œuvre, de son accueil dans un premier temps en France et du rôle joué par son ami Pia, mais aussi Malraux, Sartre et tant d'autres. Puis viendra aussi la publication dans un second temps dans le monde anglo - américain où The Stranger ravira les Américains et The outsider, les Anglais. Une particularité élucidé par Alice Kaplan et qui va bien au-delà du timing entre traduction et édition.



Alice Kaplan ne s'arrête pas là. La biographie pourrait se terminer dans cette historicité... Mais l'autrice s'attache aussi à montrer l'évolution de l'attachement de Camus à son oeuvre et la naissance de l'indépendance de celle - ci face à son créateur... S'y rajoutera l'évolution des centres d'intérêt des lecteurs et donc les nouvelles approches de l'appropriation de L'Étranger auprès de ceux-ci. Après les questions existentialistes, viendront celles nées de la décolonisation...



Tout ce travail est porté par une écriture agréable et claire d'Alice Kaplan. Ce qui lui permet de nous embarquer dans son "Enquête" jusqu'à la dernière page et de nous redonner par la même occasion une envie de relecture de L'Étranger de Camus à la lumière de son essai mais aussi de continuer à découvrir cet auteur avec d'autres de ses écrits dont on sait qu'ils ont été en lien avec L'Etranger ou qu'ils ont bénéficié de l'évolution d'Albert Camus depuis...
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En quête de L'Étranger

Le livre d’Alice Kaplan « Recherche de l’Etranger » est le récit de la création et de la vie du roman d’Albert Camus « L’étranger ». C’est écrit dans un style simple et clair par cette universitaire américaine qui a fait une recherche assez époustouflante et qui la restitue dans une langue remarquable.

On suit de très près le lent travaille de maturation qui conduit Camus à la rédaction de ce roman qui a tant fait parler de lui et qui reste encore plein de lecture possible, signe des grands chefs d’œuvre.

On apprend les influences, notamment de certains écrivains américains et les conseils de ses proches comme Jean Grenier, Pascal Pia et l’on apprend tout ce que sa vie lui a permis de noter et de mettre dans ce roman : un voyage à Marengo à l’hospice pour l’enterrement de la mère de sa belle-sœur, la vie des petits gens à Alger, l’expérience de son père lors d’une exécution capitale, sa propre expérience des tribunaux…. Et on en apprend aussi sur le fameux crime sur la plage et sur sa réécriture sur les conseils d’André Malraux.

Alice Kaplan nous apprend tout sur les tribulations du manuscrit pendant cette période de guerre jusqu’à son acceptation par les Éditions Gallimard grâce notamment à André Malraux mais aussi à Pascal Pia et d’autres. Elle nous montre comment le roman a été accueilli, comment beaucoup de critiques ont considéré qu’il s’agissait d’une œuvre au ton nouveau et qui allait marquer son temps. On peut lire toutes les critiques parues à l’époque jusqu’ à celle remarquable de Jean Paul Sartre qui est l’un de ceux qui ont le mieux analysé ce roman.

On assiste ensuite en détail à la diffusion de l’œuvre et à sa traduction, notamment en Amérique et en Angleterre avec les erreurs de traduction et les deux titres choisis en Angleterre et aux EU : « The Stranger » et « the Outsider »

Intéressants développements aussi sur la transposition, notamment par Visconti, de l’étranger au cinéma et enfin d’excellents développements sur le roman de Kamel Daoud Meursault contre enquête.

Enfin le livre se termine par le récit de ce qui s’est réellement passé sur la plage d’Oran .On apprend ,enfin, le nom et l’histoire réelle de l’arabe.

Le seul manque de ce livre est l’analyse de la réception de Camus et ,notamment de étranger , en Algérie.Il y a sur cette question,pourtant importante que très peu de choses.
Lien : http://jpryf-actualitsvoyage..
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En quête de L'Étranger

Une biographie magnifiquement documentée de l'oeuvre de Camus.
Lien : http://www.telerama.fr/criti..
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En quête de L'Étranger

« On ne pense que par image. Si tu veux être philosophe, écris des romans » Camus, Carnets.



Passionnant ! C’est vraiment le mot qui me vient à l’esprit au sujet de cet essai que je viens de terminer sur le livre d’Albert Camus : L’Étranger.

Un énième commentaire de texte ? Non, pas du tout ! Le projet d’Alice Kaplan est simple : écrire une biographie, non de l’auteur mais du livre lui-même. Autrement dit, en raconter sa genèse et le suivre pas à pas : de sa création à sa publication bien compliquée en 1942 sous l’Occupation nazie jusqu’aux premières et parfois très surprenantes réactions du public.

En 1937, Camus rédige un roman intitulé "La Mort heureuse" : un certain Patrice Mersault tue un ami puis le vole. Les personnages et les lieux sont nombreux. L’écrivain s’interroge sur la condition humaine et la beauté des hommes et du monde. Il envoie le manuscrit à Jean Grenier, son ancien professeur de lycée, qui le critique sévèrement au point que le jeune homme s’interroge sur son avenir d’écrivain.

Qu’à cela ne tienne, Camus le réécrit, remaniant l’intrigue mais ce roman ne cesse de lui échapper, comme s’il n’était pas le sien.

A côté, sous forme de notes, un autre roman prend forme : Camus imagine que son personnage de "La Mort heureuse" raconte l’histoire d’un condamné à mort : « Je le vois, cet homme. Il est en moi. Et chaque parole qu’il dit m’étreint le cœur. Il est vivant et respire en moi. Il a peur avec moi. » dit Patrice Mersault. (le u de Meursault ne viendra que plus tard et son origine reste assez mystérieuse)

Et là, dans les propos d’un premier personnage, est en train de naître un second personnage qui s’incarne progressivement dans l’esprit de son auteur.

En avril 1937, Camus écrit dans un carnet : « Récit - l’homme qui ne veut pas se justifier. L’idée que l’on se fait de lui est préférée. Il meurt, seul à garder conscience de sa vérité - vanité de cette consolation. »

Il semble que l’idée du livre vienne d’éclore. Les choses se mettent en place.

En juin 1937, il imagine les visites d’un prêtre.

Il prend ici et là de quoi nourrir son roman : l’enterrement de la grand-mère de sa belle-sœur qui logeait dans un asile de vieillards à Marengo deviendra matériau narratif. Le réel se fait fiction.

Par ailleurs, Camus souhaite revoir la forme et il note dans ses carnets des principes d’écriture : « La véritable œuvre d’art est celle qui dit moins », « Pour écrire, être toujours un peu en deçà dans l’expression (plutôt qu’au-delà). Pas de bavardages en tout cas. »

Enfin, à l’automne 1938, sur un des carnets, on peut lire quelques lignes que l’on connaît bien « Aujourd’hui maman est morte. Ou peut-être hier, je ne sais pas. J’ai reçu un télégramme de l’asile. « Mère décédée. Enterrement demain. Sentiments distingués. » Ça ne veut rien dire. C’est peut-être hier… »

Mais Camus a besoin d’argent : son salaire de 1000 francs versé par l’Institut de physique du globe n’est pas suffisant. Atteint de tuberculose, il ne sera pas autorisé à passer l’agrégation de philosophie. Or, un certain Pascal Pia, frais débarqué de Paris et souhaitant lancer un nouveau journal, le recrute immédiatement. Camus a vingt cinq ans et vit séparé de son épouse. Il devient rédacteur en chef du journal Alger républicain.

En tant que journaliste, il assiste à de nombreuses audiences judiciaires, affaires de violences voire de meurtres et observe le jeu étrange de la justice.

Au printemps 1939, il sait que son narrateur va tuer un Arabe : les conflits entre Arabes et Européens sont nombreux dans cette Algérie colonisée et les journaux en sont le reflet.

Par ailleurs, l’écrivain lit les polars américains et notamment Le facteur sonne toujours deux fois de James M. Cain : ce n’est pas tant l’intrigue qui le séduit que le point de vue adopté. La narration se fait à la première personne du singulier. Les phrases sont courtes, sans aucune analyse ni subjectivité. Une espèce de style minimaliste qui va enchanter Camus.

En juillet 1939, alors qu’il est en vacances à Oran, on lui raconte que deux Arabes étant allés marcher sur une plage réservée aux Européens, une bagarre a éclaté, épisode qui rappelle le crime de Meursault sur la plage.

Il commence à écrire "L’Étranger" l’été 1939.

Fin 1939, on peut lire dans son carnet : « Cette histoire commencée sur une plage brûlante et bleue, dans les corps bruns de deux êtres jeunes - bains, jeux d’eau et de soleil… »

On sent que les matériaux sont là autour de lui, qu’il ne reste plus qu’à les mettre en forme, à les emboîter. Cette œuvre est désormais en lui. Il dira plus tard, alors qu’on l’interroge sur la création de son œuvre : « Quand j’avais trouvé les trucs, je n’avais plus qu’à l’écrire. » Finalement, c’est à Paris en 1940 où il deviendra, grâce à Pia, secrétaire de rédaction à Paris-Soir qu’il rédigera l’essentiel de son texte, dans une chambre de l’hôtel du Poirier, rue Ravignan, à Montmartre.

Tout lui est étranger dans cette ville où il vient d’arriver et cette sensation lui permet peut-être de mieux exprimer sa pensée philosophique : « Que signifie ce réveil soudain - dans cette chambre obscure - avec les bruits d’une ville tout à coup étrangère ? Et tout m’est étranger, tout, sans un être à moi, sans un lieu où refermer cette plaie. Que fais-je ici, à quoi riment ces gestes, ces sourires ? Je ne suis pas d’ici - pas d’ailleurs non plus. Et le monde n’est plus qu’un paysage inconnu où mon coeur ne trouve plus d’appuis. »



Cette « biographie » du livre fourmille de détails dont je n’ai tiré que quelques exemples qui permettent de comprendre comment cette œuvre a pris forme lentement, remplaçant un autre roman, resté lui, à l’état de manuscrit.

La seconde partie de ce vrai travail de chercheur porte sur la publication de l’œuvre dans une France occupée : encore une aventure incroyable et des rebondissements qui font froid dans le dos…

J’ai vraiment eu l’impression d’assister aux premières loges à la naissance d’un des grands chefs - d’œuvre du XXe siècle.

"En quête de L’Étranger" est donc un essai riche, très documenté, écrit dans une langue simple et qui prend la peine d’expliquer très clairement certains points historiques, ce qui rafraîchit la mémoire et replace l’œuvre dans son contexte. Des cartes viennent même concrétiser le parcours du manuscrit en 1940-41.

Vraiment passionnant ! Un vrai roman !


Lien : http://lireaulit.blogspot.fr/
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En quête de L'Étranger

Voici racontée la vie de Camus à l'aune de son plus célèbre ouvrage, l'Etranger. A moins que ce ne fût l'inverse!

Cet ouvrage nous plonge dans les affres de la production littéraire. D'Alger à Paris occupé, il nous retrace le lent et difficile accouchement d'un ouvrage qui va, à sa manière, révolutionner le genre littéraire et annoncer l'avènement d'une philosophie à laquelle est promis un bel avenir, la philosophie de l'absurde.



Ecrit par une universitaire américaine, professeur à l'université Yale, on sent que l'auteure maîtrise incontestablement son sujet. Elle est allée jusqu'à mener sa petite enquête pour tenter de retrouver l'homme qui inspira le personnage de l'arabe, assassiné par Meursault sur la plage.



Le récit, très bien documenté, peut cependant paraître un peu scolaire notamment quand Alice Kaplan se livre à de véritables commentaires de textes qui ne sont pas loin de nous rappeler nos cours de français du lycée. Elle va parfois si loin dans l'exégèse littéraire que l'on se demande si l'auteur y a pensé lui même!



A mon sens, le livre est destiné avant tout à deux catégories de lecteurs: ceux qui vouent une adoration béate à l'Etranger, et qui seront réellement enchantés de découvrir tout le cheminement intellectuel de Camus et les éléments de sa vie qui ont inspirés son roman.



Mais également destiné aux écrivains en herbe, qui, je pense, trouveront très intéressante cette description si approfondie de l'univers de la création littéraire (la jalousie des amis, le tâtonnement de l'écrivain, les problèmes soulevés par les traductions, le lourd tribut à payer au métier d'écrivain, malheur et solitude selon les propres mots de Camus).



Pour les lecteurs qui ne rentreraient pas dans ces deux catégories, l'ouvrage pourrait paraître toutefois un peu trop substantiel par rapport à leurs attentes.

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En quête de L'Étranger

Plein phare sur l’Etranger….



Alice Kaplan dans En quête de l’Etranger propose une biographie étonnante !

Non pas celle de l’auteur de l’œuvre lui-même mais celle de son roman ‘‘L’Etranger’’

Un roman qui à sut traverser le temps tout en gardant son intérêt auprès des lecteurs.



Albert Camus y est décrit comme un homme complexe, qui se cherche lui-même et le style de son écriture. Il est sans cesse à la recherche de la perfection.

Malgré la grave maladie qu’il porte, la tuberculose, il va continuer à avancer dans la vie. Il va changer de métier plusieurs fois, voyagé, aimé, connaitre la déception et l’humain.

Ainsi il notera tout dans un carnet et peu à peu va se dessiner les prémisses de son célèbre roman, l’étranger, sans qu’il n’en prenne conscience lui-même.



Alice Kaplan a su recueillir les différents moments de la vie de l’auteur qui ont influencés les étapes de l’élaboration de son roman. Les passages du roman y sont reliés et éclaire le lecteur telle une lampe torche le roman de Camus.

Le documentaire d’Alice Kaplan donne l’impression au lecteur d’assister à la création de cette œuvre de référence.



Remplit d’événements marquant et d’histoires intéressantes, ce récit apporte au lecteur une autre vu du roman et de son auteur.



Un documentaire magnifique qui se lit comme un roman grâce à la plume et le style fluide de l’auteur.



En quête de l’Etranger, d’Alice Kaplan, édition Gallimard, septembre 2016, 316 pages.

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En quête de L'Étranger

On est au cœur même de la création du roman et de tous les facteurs qui concourent à sa création. De la situation personnelle de l'auteur au contexte politique et historique, Alice Kaplan nous plonge dans cette époque troublée entre une France coloniale à bout de souffle et la montée hitlérienne à ses portes et bientôt sur ses terres.

L’Étranger écrit, voici le temps de l'édition du livre. L'auteur nous décrit alors le monde de l'édition sous l'occupation, de ses acteurs et de ses actions, entre petits arrangements avec l'occupant et actes de résistance.

Enfin le livre est édité, commence alors le temps des critiques, souvent dures, jamais indifférentes. Petit à petit L’Étranger se lit, se diffuse, s'étudie. Il fait l'objet de multiples débats, de détournements, jusqu'à devenir une arme de défense de quelques illuminés devant la justice.

En tant qu'américaine, l'auteur n'oublie pas non plus de nous narrer des étonnantes anecdotes de traduction de ce roman titré « The Stranger » aux États-Unis et « The Oustider » en Angleterre.



Alice Kaplan propose une véritable épopée littéraire qu'on lit avec passion et qui nous fait (re) découvrir ce livre dont la vie palpitante n'est pas prête de s'achever.

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En quête de L'Étranger

A quel moment naît « L'Etranger » ? Camus achève et signe la première mouture de son manuscrit fin avril 1940. Le livre paraît deux ans plus tard le 21 avril 1942, premier tirage aux éditions Gallimard (4400 exemplaires). Faut-il voir dans une première tentative romanesque abandonnée, « La Mort heureuse », les prémices du roman ? Jean Grenier, son mentor, qui désavoue une telle tentative est tout juste un peu moins sévère ensuite pour le manuscrit de « L'Etranger ». Le début de l'essai esquisse la genèse du livre dans les années d'apprentissage de Camus, militant, journaliste, écrivain, homme de théâtre, entre 1934 et 1939, ses premiers projets d'écriture. Cinq années d'une jeunesse algérienne décisive précédant la guerre. En octobre 1939 il s'apprête à quitter l'Algérie et l'idée d'un deuxième roman s'est déjà immiscée peu à peu dans le projet philosophique d'un cycle sur l'absurde incluant « Le Mythe de Sicyphe » et « Caligula » sur lequel il a commencé à travailler. Ce roman c'est "L'Etranger" qui, on le découvre ici, ne peut être réduit à l'illustration romanesque du dessein philosophique.



A l'origine il y a Mersault, sans « u », comme Patrice Mersault de « La Mort heureuse » et "L'Etranger" aurait pu s'appeler "L'indiférent". Alice Kaplan explore la progression d'une idée en germe chez son auteur ; la naissance et la formulation ensuite d'un style approprié, puisant à diverses sources, littéraire (James M. Cain) et même cinématographique (Le Schpountz). Les protagonistes, le manuscrit et le livre prennent corps, le découpage s'élabore, l'intention s'affine mais quelque chose de plus inattendu s'interpose. Cette part irréductible et autonome de la création qu'Alice Kaplan réussit fort bien à circonscrire dans les notes de Camus : le roman « veut » naître. La chercheuse retrace une aventure politique et philosophique, éditoriale aussi, mais celle surtout d'une création littéraire personnelle très singulière où elle fait entrer le lecteur « par-dessus l'épaule de l'écrivain », à la manière d'un reportage, en une succession rythmée et continue de chapitres assez courts, tous plus passionnants les uns que les autres. La force de l'essai est d'être au contact direct de l'oeuvre dans une proximité et une fidélité constante aux textes et à la pensée de Camus – Carnets, correspondances et notes, conférences, abondamment cités (Bibliographie commentée et appareil de notes conséquent à la fin).



Hésitations, difficultés, rechutes tuberculeuses. Mise en oeuvre d'une écriture, certitude qu'elle peut exister. Premier chapitre écrit sous le soleil d'Oran au début de 1940 puis le reste bouclé dans la grisaille et la solitude de Montmartre, dans la petite chambre parisienne de l'hôtel Poirier. « Alger Républicain » a fermé ses portes. Les Allemands occupent bientôt la France. Après l'achèvement du manuscrit commence son aventure éditoriale. Deux ans de tribulations pendant lesquels Camus fera un bref passage à "Paris- Soir", puis entrera à "Combat". On découvre  "L'Etranger" comme jamais. Un roman "très sonore", ensoleillé et rude, qui fait concevoir différemment "l'autisme" de Meursault, mieux saisir l'obsession de la peine de mort chez Camus ou l'anonymat de  "l'Arabe" ; "la tendre indifférence du monde" finale y prend tout son poids. Les mois d'errance de l'écrivain et de son manuscrit dans la France coupée en deux empoignent, on y entend Malraux, Grenier, Pia, Paulhan ou Jean-Paul Sartre. On perçoit l'écho de Belcourt, des rues d'Alger dont la chronique coloniale est aussi terriblement judiciaire. De ce livre qu'il pensait "tout tracé en lui" Camus désirait qu'il soit réservé à un cercle restreint de lecteurs mais consentira après sa « nobelisation » en 1957 à une édition poche grand public. le livre comporte soixante traductions - "The Outsider" pour les Anglais, "The Stranger" pour les Américains - et Meursault est devenu aussi célèbre que son auteur, recouvert des innombrables interprétations et lectures qui ont été données de lui et sur lesquelles Alice Kaplan s'attarde - lecture existentialiste notamment ou lecture politique.



C'est avant tout la biographie de "L'Etranger" que cet essai propose, l'examen des conditions de sa maturation est une quête sur le sens de ce livre dans l'oeuvre de l'écrivain et pour lui, plus spécifiquement, plus intimement j'ose dire. Un beau portrait de Camus apparaît, né sur les bords de la méditerranée et pétri de sa culture, engagé, fiévreux et résistant, créateur instinctif, s'autorisant enfin à devenir écrivain sans l'approbation de Jean Grenier, à écrire "sans appel". Toutes sortes de curiosités, littéraire et historique, documentaire et biographique, philosophique et critique peuvent être satisfaites ici. Si l'histoire intellectuelle et matérielle des manuscrits du livre, l'histoire de la réception critique du roman d'une rive à l'autre de la méditerranée et de part et d'autre de l'atlantique sont véritablement passionnantes, je retiens in fine que par « L'Etranger » Camus trouve les raisons d'être l'écrivain qu'il veut être. Très belle et très enrichissante recherche qui recèle d'autre part une réflexion profonde et stimulante sur l'énigmatique Meursault dont la « vérité négative » et les « énergies contradictoires » continuent de susciter des débats de part et d'autre de la Méditerranée, plus de soixante-dix ans après (« Meursault, contre-enquête », Kamel Daoud, 2014). Meursault dérange toujours, alors vive Meursault. Lecture qui se clôt en beauté par un voyage d'Alice Kaplan à Oran et sur une note optimiste réservant quelque surprise au lecteur. Je recommande absolument ce regard américain sur un roman si emblématique.





























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En quête de L'Étranger



La quête de L’Etranger n’est pas un nouveau livre consacré à l’analyse, à « l’introspection » de ce premier roman de Camus, (La Mort heureuse , roman « inabouti » fut édité après son décès .)

Pour Alice Kaplan, brillante universitaire, c ’est effectivement une longue quête, une recherche minutieuse pour recueillir tous les éléments, tous les indices, toutes les anecdotes, qui vont constituer la structure, la trame, le squelette, la matière même de

« L’Etranger ».

Elle a compulsé d’abondantes biographies consacrées à Albert Camus, elle a consulté aussi de nombreux ouvrages en lien avec l’environnement de Camus aussi bien en Algérie (Alger, Oran…) qu’en France ( Paris, le Panelier…) ceux qui parlent des paysages plongés dans la lumière éblouissante de l’été algérois, ceux des crépuscules gris, des jours d’insouciance, de guerre, de mort, de maladie … Elle a collecté d’autres détails précieux en se rapprochant d’éminents camusiens, de Catherine Camus en la rencontrant à Lourmarin, de Marcelle Mahasela qui était alors la responsable du fonds Camus à la Méjanes à Aix-en-Provence…

Elle va mettre en exergue les expériences, les mauvaises comme les bonnes, les échecs de sa vie, ses tourments, tout ce qui a alimenté, véritablement et subtilement le roman. C ’est une compilation un peu similaire que Camus lui-même consignait dans ses cahiers, les moments tragiques ou comiques, les lectures, les films, l’actualité prégnante d’alors, et qui, au fil du temps allait donner vie et nourrir ses personnages, peindre le décor de l’action, trouver le ton qui convient, pour en faire de subtiles combinaisons, des connexions et aboutir enfin à ce roman.

Si pour certains L’Etranger reste encore et toujours abscons, cette lecture pourrait ouvrir des horizons pour mieux comprendre la personnalité Camus et en filigrane, celle de Meursault.

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En quête de L'Étranger

Paru en 1942, L'Etranger d'Albert Camus transcende les générations et les modes littéraires

et suscite toujours la même fascination comme si toute une part du livre gardait son mystère et résistait à toute interprétation. Dans son ouvrage, Alice Kaplan se centre sur la genèse du roman et traque les premiers signes, les notes originelles annonciatrices du futur roman. Elle nous en montre la lente gestation, le mûrissement progressif en collant au plus près à la vie de Camus. Si bien que le travail de création, l'écriture par bonds, rejets et repentirs, les possibles sources d'inspiration semblent s'enlacer étroitement aux éléments biographiques. C'est sans doute la partie qui, étrangement, m'a le moins intéressée car j'ai eu l'impression que l'auteur perdait parfois de vue son projet initial, une "biographie de L'Etranger", au profit d'une biographie de Camus. Certes les deux sont nécessairement liées, mais cette approche externe de l'oeuvre m'a paru manquer d'originalité et de rigueur, en ce qu'elle s'éloigne du propos central.



En revanche, tous les éléments qu'a rassemblés Alice Kaplan quant aux différentes réceptions du roman selon les époques et les pays sont véritablement passionnants car on y frôle l'énigme d'un style. La mise en évidence des difficultés de traduction, par exemple, nous fait toucher du doigt l'essence du roman de Camus et ce qui se joue entre le choix des mots et les diverses significations qui en surgissent. L'analyse des échos contemporains du roman de Camus, en musique par Robert Smith ou en littérature par Kamel Daoud, apporte d'autres points de vue et enrichissent la lecture de L'Etranger. Il y a là quelque chose de profondément émouvant qui touche à la notion d'immortalité.

Un avis en demi-teinte, donc, pour cet essai d'Alice Kaplan : des débuts relativement ennuyeux mais une suite captivante qui m'a beaucoup appris !

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En quête de L'Étranger

Journaliste, militant, écrivain, homme de théâtre, amant, brièvement époux, fils de sa mère, enfant de son quartier miséreux: à vingt-cinq ans, Camus a déjà tenu bien des rôles. Pas une seule fois «le même visage pour deux êtres». Tout le problème est là, affirme l'auteure. C'est ce qui rend difficile les recherches, impossible des conclusions et délicate la description. De Camus, mais aussi et surtout des personnages du roman en question.

Aujourd'hui encore, «l'Etranger» reste à déchiffrer, chacun y allant de son interprétation. La littéraire, la politique, la sociale, la philosophique,… Et, même les (re-)lectures mutltipliées ne résoudront pas le problème. Cela est, sans doute, très lié à la personnalité même de son auteur, lui-même un homme assez «compliqué». En fait, simplement un «artisan de la littérature» qui a «foi dans les vertus du remaniement» et qui, à l'inverse de Sartre, a plus de talent que de génie (ils sont qualifiés, les deux, d'«ennemis intimes»: Camus avait soutenu, dans un article que Sartre est plus un philosophe qu'un romancier... et Sartre avait déclaré que Camus est bien meilleur romancier qu'il n‘est philosophe...). Le démarrage est difficile. Il a beau ciseler des phrases splendides, le roman ne parvient pas à se modeler. Il travaille à partir de souvenirs d'enfance et de jeunesse, de lectures passées, de spectacles vus, de petits bouts de papier, de rencontres, d'autres manuscrits, d'images et de pensées couchées sur le papier... Il travaille, en fait, et c'est ce que fait ressortir l'auteure de l'essai (qui a entrepris, en «détective manquée», une longue enquête sur le terrain à Alger et à Oran), comme le «grand reporter de presse» et le correspondant judiciaire qu'il a été à ses débuts. A l'écoute de son ressenti, de son environnement et des réalités sociétales... tout particulièrement les conflits latents ou révélés entre les communautés européenne (surtout la classe ouvrière des Européens d'Alger... les «petits blancs d'Algérie») et «arabe». Avec un peu, un tout petit peu, d'aversion pour la violence coloniale.



Heureusement, l'effort apporte toujours un gain quel qu'il soit. Et, peu à peu, «L'Etranger» va devenir un roman écrit... «sans le savoir», un livre «trouvé en lui»... sur le cadavre d'un autre projet, abandonné en cours de route, au stade de manuscrit, «La Mort heureuse»... et en passant par un essai sur l'absurde, «Le mythe de Sisyphe». L'idée d'une œuvre de fiction qui se trouverait à l'intérieur du créateur, attendant d'être découverte, est un «élément clé du crédo moderniste en général et de la poétique de Camus en particulier... Proust décrit cette même idée dans «Le Temps retrouvé...».

Avis : Sacré Camus, il n'arrête pas (comme son roman), sinon de passionner, du moins d'attirer. Une analyse fouillée et de grande qualité... et une autre théorie (celle-ci, à mon avis, «anecdotique» et littéraire, s'intéressant bien plus à la vie européenne de l'époque, à Alger, Oran et Paris, qu'au contexte colonial... encore que, peut-être, A. Camus n'avait pas osé dépasser la «ligne rouge» permise par sa communauté «pied-noir») sur la question. Il est vrai, que l'«on ne fait pas la même lecture de «L'Etranger» selon que l'on est américain, français ou algérien» (K. Daoud)... ou selon que l'on est étudiant, enseignant, écrivain, critique, historien... ou... A lire et, surtout, ne vous découragez pas devant la masse de détails.

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En quête de L'Étranger

Alice Kaplan nous livre une biographie de Camus avec comme ligne directrice la conception, la maturation, l’écriture et la publication de « l’Etranger », premier livre publié de l’auteur.

J’ai beaucoup aimé voir les doutes et les critiques qui ont poussé Camus à remiser son premier livre et à se plonger dans l’écriture de l’Etranger.

Le cheminement que va faire le manuscrit de l’Etranger pour être publié dans la France occupée, passer la censure allemande et collaboratrice est très intéressant à lire tout comme de voir les différentes critiques, positives ou négatives que ce manuscrit a inspiré aux proches de Camus et aux auteurs contemporains.

Néanmoins, je trouve que cet essai fait 50 à 70 pages de trop : à trop s’étaler sur la question, l’attention finie par s’émousser. J’ai eu beaucoup de mal avec les notes : d’abord je n’ai pas apprécié de devoir à chaque note me reporter à la fin du livre, plutôt que d’avoir les notes en bas de page ; ensuite j’ai trouvé ces notes la plupart du temps inadaptées. A chaque fois que je m’attendais à avoir une précision sur ce qui avait généré le renvoie à la note, je me suis retrouvée face au titre d’un livre et de son auteur. J’aurais préféré une explication, avant que la source ne soit citée car je ne vais pas lire 15 livres pour avoir des explications. Du coup, très vite, j’ai cessé d’aller voir les notes car ces deux défauts étaient pour moi trop gênants.

A plusieurs reprises, j’ai lu que « En quête de l’Etranger » était la biographie de l’œuvre. Je ne suis pas d’accord. D’une part parce que pour moi on explique une œuvre mais on n’en fait pas une biographie, d’autre part parce que j’en ai plus appris sur Camus, sur ses difficultés, ses aspirations, son caractère que sur l’œuvre en elle-même.

Pour autant, après avoir lu cet essai, je pense que je ne vais pas lire l’Etranger, en tout cas pas dans un avenir proche. Voir le livre ainsi résumé en long, en large et en travers, la fin dévoilée, les divers développements aussi, m’ont fait perdre l’envie de le lire. Et contrairement à ce que pense Alice Kaplan, tout le monde n’a pas lu ce livre dans le milieu scolaire. Peut-être aurai-je du le lire avant de me plonger dans cet essai.

La « vraie » identité de « l’arabe » m’a semblée de trop. Peut-être que Camus s’est effectivement inspiré de ce fait divers là pour créer le personnage de « l’arabe », mais s’il a décidé de ne pas lui donner de nom, de le réduire à sa nationalité, pourquoi dénaturer ses choix en cherchant à toute force à identifier l’homme ? Lui ou un autre, cela change-t-il le sens du roman et de l’acte commis ? A trop vouloir expliquer, analyser, on finit par obtenir l’effet inverse de celui recherché et, au lieu de donner envie de se plonger dans le roman, on en détache les lecteurs qui se retrouvent avec un livre vidé de sa substance à force d’être mâché et régurgité.
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Intelligence avec l'ennemi. Le procès Brasill..

C’est un texte remarquable ! Saluons la performance. Alice Kaplan est une universitaire et connaît son travail. Elle ne laisse rien au hasard, explore toutes les pistes afin de donner un portrait très complet de Robert Brasillach mais aussi de son avocat Jacques Isorni et du procureur Marcel Reboul.

Pourtant, il existe un réel défaut dans cet ouvrage, défaut qui m’a embarrassé tout le long de ma lecture. C’est un peu comme être convié dans un lieu exceptionnel alors qu’une migraine ne cesse de vous tarauder.

Ce travers est un certain manquement à la déontologie de l’historien : Alice Kaplan n’est pas, à mes yeux, irréprochablement impartiale. Robert Brasillach a écrit et dirigé l’hebdomadaire "Je suis partout" , où il a exprimé fréquemment et satiriquement ses idées pro-nazies. Cependant, les termes d’accusation énoncés lors de son procès sont limpides : il ne s’agissait pas de le juger pour ses opinions, il a été condamné pour trahison.

Or notre professeur ne cesse de revenir sur les opinions fascisantes de Brasillach. Elle décortique, tel un légiste, ses idées pour n’en retenir au final qu’une seule : son antisémitisme ! Elle l’analyse, l’examine, le dissèque, le résume jusqu’à ne garder que ce côté de sa personnalité et de conclure qu’il a été fondamentalement antisémite, le reste n’étant qu’accessoire.

Un historien n’a pas à se laisser dominer par ses convictions ou ses points de vue ! La faiblesse d’Alice Kaplan se trouve bien là et c’est dommage !
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Intelligence avec l'ennemi. Le procès Brasill..

Alors que les combats des alliés contre l'Allemagne nazie avaient toujours lieu, Robert Brasillac à été le seul auteur marquant à avoir été condamné à mort pour intelligence avec l'ennemi et à avoir été exécuté. Pour tous les autres soit la peine à été commué, soit la sanction était légère en comparaison, comme cela a été la cas pour  Louis Ferdinand Céline. 

L'auteur, une américaine, profite de sa nationalités pour dépassionner un sujet ou les controverses sont nombreuses. 

Dans son dossier de grâce Camus demande qu'il ne soit pas exécuté. Simone de Beauvoir elle ne signera pas cette demande. 

Qu'est ce qui a conduit Brasillac, brillant normalien a finir comme cela ? Surtout qu'il n'est pas juger pour judéophobie, ni pour incitation a la haine mais pour trahison. C'est ce que tente d'expliquer Alice Kaplan en présentant le personnage dans son contexte et celui de l'époque collaborationniste ainsi que dans celui de l'immédiate libération de Paris (certaine parties de la France  sont encore occupée). Elle n'oublie pas la personnalité de son défenseur, ni des jurés. De plus elle a eu accès au dossier de demande de grâce et nous livre son interprétation du refus de cette dernière. C'est a mon avis le point le plus sujet a controverse, elle ne tient pas assez compte des prétentions littéraires du Général, pour qui il est incompréhensible qu'un auteur puisse trahir son pays    C'est un livre passionnant qui démystifie le sujet et qui pose les bonnes questions, comme celle de la postérité de l'œuvre de Robert Brasillac. 

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Intelligence avec l'ennemi. Le procès Brasill..

Le sujet de ce document est la vie de Brasillach, écrivain et journaliste français pendant puis après l’occupation allemande. Cet homme, reconnu par ses pairs, écrit des romances mièvres et des articles dans « Je suis partout ». C’est un rédacteur loin d’être sentimental quand il dénonce des gens ou demande à ce que les enfants juifs soient emmenés avec leurs familles en déportation. Il sera un des premiers accusés lors des procès de l’épuration.

Alice Kaplan décrit en détail le contexte social et politique de l’époque, par exemple sur quels registres les magistrats vont jouer pendant le procès, les équilibres entre les communistes et les gaullistes, l’émergence de nouveaux journalistes comme Camus et son journal Combat, la place des écrivains dans la société …

Passionnant de bout en bout mais fait froid dans le dos aussi
Lien : http://objectif-livre.over-b..
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Intelligence avec l'ennemi. Le procès Brasill..

Une autrice qui plus historienne se doit de rester neutre lorsqu'elle relate des faits du moins c'est ce que je pense . Dans ce livre Alice Kaplan ne l'est visiblement pas . Son livre semble écrit uniquement à charge et elle n'a pas réellement compris Brasillach . Il fut certes fasciste mais pas nazi . Il admira toujours Mussolini et beaucoup moins Hitler et puis affirmer que la Belgique était fasciste comme l'Italie ou l'Espagne en citant le cas Degrelle et Rex alors que celui-ci ne fut que l'espace de 11 mois en mesure d'intervenir réellement sur le plan politique est une grossière erreur .

Elle semble également obsédée par la vie sexuelle de Brasillach et sa possible homosexualité la rendant responsable de ses prises de position politique.

Pour découvrir Brasillach je conseille plutôt de lire Pascal Louvrier et son "Brasillach l'illusion fasciste" ou "Brasillach écrivain, mal-aimé des Lettres françaises" de Pierre Somville qui sont bien plus impartiaux .
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Intelligence avec l'ennemi. Le procès Brasill..

Livre d'une historienne qui a mené un travail de fond extrêmement documenté, contextualisé et réfléchi. Dans le même temps, Alice Kaplan pose des problématiques, rassemble les pièces de ces problématiques mais ne donne pas de réponses affirmatives ou infirmatives. Et pour cause...le cas Brasillach est quelque peu tordu, tortueux et reste encore très interrogatif. En revanche, Alice Kaplan donne des clefs que chacun.e peut s'approprier et avec se forger une idée, une conviction voire une prise de position assumée.

Le procès de Brasillach pose la question de ce qu'on appelle en droit l'intelligence avec l'ennemi. Il ne porte pas sur l’antisémitisme et son influence criminelle et grave sur les événements et les périls montant depuis la fin de la Ière Guerre. Pour cause ? A l'époque du procès Brasillach nous sommes en janvier 1945, les procès de Nüremberg arrivent en novembre 1945. Aussi, les notions notamment de crimes contre l'Humanité, l'antisémitisme avéré et mise en oeuvre des vaincus n'est pas encore la préoccupation. Par ailleurs, la France est quelque peu gênée aux entournures sur cette question à cause du régime de Vichy mais pas que. Nous sommes dans le contexte de l'Epuration judiciaire avec reprise en main de la justice par les institutions car l’épuration extra-judiciaire portait les ferments d'une guerre civile latente, larvée en France. De même, la France est un pays considéré comme vainqueur mais tellement paradoxal, contradictoire car avec une période qui pour le moment il faut minimiser : le régime de Vichy. Construction du mythe de la France résistante, qui a été livrée à l'Occupant, avec la complicité (peut-être nécessaire) d'un état fantoche. Nous ne sommes pas dans la configuration d'une Angleterre. Donc le procès Brasillach c'est toute cette époque . C'est ambigu, alambiqué, trouble, troublée, euphorique, coupable en silence etc...Alors pourquoi lui a-t-été fusillé et pas les autres comme un Céline qui en plus s'enfuit ? Moi je poserai une autre question : si Drieu de la Rochelle ne s'était pas suicidé,aurait-il aussi été fusillé ? Et si oui comme pour Brasillach, quelle influence sur le sort d'un Céline par exemple (et d'autres ) ?

Le livre d'Alice Kaplan c'est toute ces questions et analyse sans parti pris, sans réponses sentencieuse.

Enfin, le livre se lit comme une vraie chronique policière et judiciaire. Cela ne verse pas dans l'intellectualisme. Ce n'est pas ronflant. C'est direct, juste et analytique.
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Intelligence avec l'ennemi. Le procès Brasill..

Formidable livre, plein d'intelligence d'une historienne Américaine !

C'est vivant, documenté, vraiment un grand plaisir de lecture.

On peux juste se poser la question : pourquoi aucun Français n'a écrit un tel livre ? La peur du sujet ? sans doute...
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Intelligence avec l'ennemi. Le procès Brasill..

Documentaire très riche en références, bien documenté, et gardant un recul certain vis à vis du "mythe" Brasillach et de sa récupération politique.



Vie et oeuvre de Brasillach, normalien brillant mais fasciste, polémiste acerbe, journaliste collaborateur et pro allemand, écrivain à la personnalité atypique. Ayant mis tout son talent au service de la puissance allemande occupante.



Rappel de la période de l'Epuration, des nombreux procès de cette période, et, bien sur, analyse du procès de Brasillach: protagonistes, enjeux, déroulement marqué par la "prestation" de brasillach, impressionnante de sang froid, mais qui ne lui sauvera pas la vie, par les réquisitions du talentueux Marcel Reboul et la défense habile d'Isorni, qui plaidera par la suite en faveur de Pétain et de Laval.



Question de fond: la plume suffit elle a trahir? Existe-t-il un "crime de plume" contre l'humanité?



Dans quelle mesure un écrivain trahit-il son pays (puisque ce n'était pas l'antisémitisme de Brasillach qui était au coeur du procès, mais la trahison de la France - le régime de vichy ayant entre-temps était déclaré illégal)? Grandeur quasi religieuse de Mauriac qui mettra toute sa force en vue d'un "pardon chrétien" des intellectuels collaborateurs, intransigeance de Camus qui réclamera justice.



Plus largement, beaucoup de questions sont soulevées sur le role des institutions (y compris la magistrature), de la presse, sous vichy - le symbolisme des procès politiques qui s'ensuivirent, sur la naissance du mythe de Brasillach et son exploitation par l'extreme droite française - a la recherche d'un nouveau souffle.



Et on apprécie la rigueur intellectuelle de l'auteur qui a l'élégance de ne pas formuler de réponse. Un ouvrage réellement intéressant.
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Intelligence avec l'ennemi. Le procès Brasill..

« Le procès Brasillach », un document passionnant sur le procès de cet écrivain pour trahison et intelligence avec l’ennemi. Brillamment documenté, cet essai nous permet de revisiter une période méconnue (en tout cas pour moi) de la 2e guerre mondiale, celle de l’après-guerre et de l’épuration.

Cet ouvrage se lit presque comme un roman à suspense, avec un personnage central, fil conducteur, Robert Brasillach, et toute une galerie de personnages – le procureur général, l’avocat de la défense, le président de la cour – autant d’acteurs dont dépend l’issue de l’histoire et surtout le sort de Brasillach, sa vie même. Au-delà de l’histoire, ce livre pose au lecteur de vraies questions quant à la responsabilité de l’écrivain : les mots sont-ils plus ou moins puissants, dangereux et condamnables que les actes ?

Le portrait qui émane de Brasillach, en dehors de toute considération politique, morale ou idéologique, reste malgré tout celui d’un homme « digne », fidèle à sa cause, aussi ignominieuse fut-elle, fidèle à lui-même, celui d’un homme responsable, qui n’a pas fui, qui fut jugé et condamné à mort, quand d’autres eurent la vie sauve.

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