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Critiques de André du Bouchet (7)
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Une tache

On entame la lecture de du Bouchet comme on entre en religion. Cela demande un acte de foi et une ascèse à toute épreuve. Pas question d'esthétique - du moins dans le sens traditionnel-, ni de sens du beau à proprement parler.

S'il y a métaphore, c'est seulement celle de l'instant présent, celle de la lecture de la page, de la surface où s'ébattent les caractères, les mots et les interstices, les vides ? les blancs ?, qui les séparent.

S'il y a rime et rythme c'est bien dans ce dialogue entre mots et silence, entre caractères noirs sur papier blanc, dans cette improbable structure de l'espace de l'écrit.

Espace, le mot est lancé. C'est ce que la parole du poète crée: de l'espace. Intangible, immatériel mais présent pour que les signes, la tache, puisqu'il y en a bien une - un mot dans le titre mais aussi bien un signe peint sur la page de garde (de Tal Coat excusez du peu) - pour que la tache prenne corps et délimite sa présence au sein de l'indifférencié.

C'est une écriture exigeante, comme hachée, qui s'interrompt et se recoupe pour mieux cerner l'indiscernable.

Si on peut rapprocher cette poétique de celle de Mallarmé et de son "coup de dés", c'est évidemment par l'utilisation de la page et du blanc mais aussi dans la quête, par essence jamais aboutie, d'une beauté, une vérité pure où le sens serait distinctement défini, précisément délimité et le langage poétique déviderait ses significations métaphoriques mais dans une présence bien réelle, matérielle, tangible devrait-on dire quoiqu'à peine perceptible, fuyante, disparue avant que d'être.

Une écriture quantique en quelque sorte.



Une poésie à lire et relire à tête reposée en tout cas tandis que moi, après une telle critique, je vais prendre deux aspirines ;-)

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L'ajour

Critique d'art, traducteur et écrivain, André du Bouchet est un des auteurs les plus marquants de la poésie contemporaine.

Je suis allé à la rencontre de son oeuvre avec l'Ajour, recueil qui réunit plusieurs de ses textes, proses ou poèmes, écrits entre 1972 et 1995.



Pourquoi le nier, l'écriture d'André du Bouchet n'est pas simple d'accès. Dès les premières pages, elle surprend, déroute, car elle n'offre que peu de repères et de points d'ancrage au lecteur. Il est difficile de saisir toute sa complexité.

On sent cependant une constante dans son écriture, celle d'une expérimentation des potentialités du langage, celle d'un style où la part formelle est totalement inséparable de l'expérience sensible.





« cela

n'est pas peu aimer

comme

répondre



Jusqu'à la poussière qui ne fractionne

pas



déborde



aimée du soleil. »*





Tous les textes d'André du Bouchet semblent fragmentaires, lacunaires et dénués de tout rythme. Ici, la langue semble s'être égarée, ou du moins elle paraît se rapprocher au plus près de ce qui lui échappe.





«… entre les lignes, déjà… au plus haut immergé ( le

silence ) pour le porter au plus haut , dans ce que la tête

plus haut aura nommé oubli… la fraîcheur de

l'oubli… »**





Lire du Bouchet, c'est comme reconnaître, en lecteur déconcerté, que tous les mots, même s'ils proviennent de lui, peuvent être défaits par le silence. La poésie est un excès de langage qui chez André du Bouchet vient butter contre ses propres limites. La poésie est chez lui comme privée de sa capacité à percevoir, à rendre compte du réel, elle est comme dessaisie d'elle-même.



C'est pourtant en ce lieu de vide, d'ignorance du poème que nous pouvons nous remémorer et reprendre souffle, éprouver de nouveau notre langue et puiser tout un passé qu'il nous faut recomposer. Lire André du Bouchet, c'est retrouver la source de toute poésie.





« avoir



et pour

un mot uniquement





creusé

jusqu'à l'eau





fine. »***







(*) extrait de « le surcroît » - page 121

(**) extrait de « Poussière sculptée » - page 65

(***) extrait de « le surcroît » - page 112
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Dans la chaleur vacante - Ou le Soleil

Mort il y a 10 ans, André Du Bouchet constitue une figure majeure de la poésie contemporaine (voir le numéro double de la revue Europe Juillet 2011 spécial Du Bouchet). Il aura véritablement fait éclater le vers, influencé en cela par Le Coup de Dés de Mallarmé, les poèmes en escalier de Reverdy, les audaces cubistes et surréalistes.

Ce qui fait de lui un grand, c'est que son écriture, au bout du compte, ne ressemble à nulle autre, se reconnait parmi cent.

On ne lit pas un poème de Du Bouchet comme on lirait n'importe quel poème. Il faut le respirer, le laisser entrer en vous, le penser, laisser les mots se dire au-delà de tout ce blanc sur la page. C'est une poésie qui se mérite et qui n'a pas fini de faire parler d'elle, pour le plus grand bonheur des défenseurs de la poésie!

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Dans la chaleur vacante - Ou le Soleil

« Une glose obscurcit ou éclaire. » (p. 207.)



C’est ainsi qu’André du Bouchet conclut son opus de poèmes intitulé « Ou le soleil » (1968), qui fait suite, dans cet ouvrage, à l’opus « Dans la chaleur vacante » (1961). A t-il-voulu, à travers ces mots conclusifs, délivrer à son lecteur une clé pour l’aider à donner sens, à rebours, aux mots qu’il s’est efforcé de poser, de disposer à travers une configuration spatiale soigneusement étudiée ? Il est vrai que, de prime abord, ces mots peuvent étonner, surprendre, dérouter un lecteur béotien par leur ésotérisme.



Il semble être question d’une marche qu’entreprend le poète. Il semble être accompagné (par une femme ? sa femme ?) et se plaît à dire que cette route ne se déploie pas sur un chemin. Il est question de lumière, de soleil, de chaleur, de feu, de jour, mais aussi de nuit. De nouveau résonne, dans l’esprit du lecteur, le point de capiton habilement posé par le poète dans sa phrase conclusive. La route sur laquelle le poète nous invite à cheminer est jalonnée d’étapes : ainsi, André du Bouchet a pris soin de penser le déploiement spatial de ses mots : chaque recueil, titré, est bien structuré, découpé en différentes parties, portées, là aussi, par des titres aux résonances énigmatiques. Ces derniers, d’ailleurs, se font l’écho d’une exigence de forme, d’une découpe, tels : « Fraction », « Nivellement » ou « La lumière de la lame ».



André du Bouchet se plaît à mettre en tension les éléments de divers paradoxes, le plus saillant figurant dans la dialectique entre « la lumière » et « l’ombre » que souligne le point de capiton final. Le poète emporte donc son lecteur sur un chemin que les pas ne portent pas, un itinéraire balisé, jalonné par des mots que le sens semble avoir déserté. Nous invite-t-il à une errance, mieux encore à ce qu’on pourrait nommer une forme d’« itinérance » ? Mais le (un) sens importe-t-il, au final ?



L’ésotérisme du propos m’a d’emblée séduite. J’ai été touchée par la disposition spatiale des mots dans chaque page, les retours à la ligne incongrus, par les champs lexicaux récurrents : la chaleur / le froid, le soleil, le feu, le jour, la nuit, la montagne, les murs, les pierres, la faux, la route, le chemin, le glacier, …



La meule de l’autre été scintille. Comme la face de la terre qu’on ne voit pas.

Je reprends ce chemin qui commence avant moi. (p. 87. « Face de la chaleur – Battant »)



Voilà des mots qui semblent davantage résonner sous l’angle de signifiants. C’est apparemment ce que le poète souhaitait, ainsi qu’il le souligne dans « Image parvenue à son terme inquiet » (1984), au détour d’une superbe phrase qui parvient à dire, de manière poétique, le rapport arbitraire qui unit le signifiant au signifié :



Ce feu qui, sans même adhérer au terme qui le désigne, ne tient pas en place (qu’on le nomme froid, aussi bien…). (p. 111.)



Même si, à travers ses jeux de mots, André du Bouchet semble avoir voulu déconnecter signifiants et signifiés, il a su créer, à mes yeux, de belles images suggestives. La petite phrase qui suit dit bien, pour moi, combien la projection dans un avenir, qui n’est que conjecture au moment où elle se déploie, peut être porteuse d’inquiétude :



Demain – déjà, comme un nœud dans le jour. (p. 123.)



Une lecture exigeante, âpre, à l’image de l’écriture du poète, qui m’a d’emblée séduite et touchée.



« Une glose obscurcit ou éclaire. » (p. 207.)

souligne André du Bouchet au terme de son œuvre.

Le présent commentaire est lui aussi tissé de mots qui s’efforcent de dire un sentiment de lecture, de lecteur. De quel côté, ombre ou lumière, se situera mon propos pour le lecteur potentiel de cette œuvre ? Je fais le pari que cette question est par trop manichéenne…
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Dans la chaleur vacante - Ou le Soleil

Ce recueil de poèmes est un mystère. Ces ruptures, ces suspens dont la plume de l'auteur emprunte à la nature, à l'espace ou même au corps humain est une manière énigmatique et unique dans la poésie, ce qui la rend incroyablement belle et touchante.
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L'Emportement du muet

L'écriture semble naître du tableau, de la peinture abstraite. Références à Pierre Tal Coat, hommage même, traversée du travail du peintre par la poésie. Parallèlement à la lecture picturale, la question de la parole. Comme si face au voir ou au dire s'établissait le même rapport: une rupture, un éblouissement, une disparition suivie d'une reprise, avancée, progression. Déplacement - de quoi ? Traversée d'une expérience, qui prend parfois une dimension spirituelle. Mais le plus souvent se dit dans le rapport à l'espace, à la matière, géométriquement. En mouvement, en grande souplesse. Délié qui donne le sentiment d'amplitude et rétrécissement. C'est cette plasticité empruntée au registre de l'oeuvre picturale qui marque.
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Une lampe dans la lumière aride : Carnets 194..

L'écriture d'André du Bouchet frappe par sa clarté tour à tour silencieuse et fracassante.
Lien : http://www.telerama.fr/criti..
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