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Citations de Andrew Sean Greer (79)


J’ai ouvert les rideaux et j’ai vu par la fenêtre la lumière froide du soleil couchant sur le monde. Et surtout : les premiers flocons. Une autre promesse tenue. Installée dans mon lit, j’ai regardé tomber la neige. L’heure de dormir. Et viendrait aussi, comme toujours : demain.
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Il se souvient (à tort) d’une phrase que Robert lui a dite il y a longtemps : « L’ennui est la seule tragédie véritable pour un écrivain ; tout le reste est question d’inspiration. » Robert n’a jamais rien dit de tel. Les moments d’ennui sont essentiels aux écrivains ; ce sont les seuls dont ils disposent pour écrire.
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-C'est étrange, non, d'avoir presque cinquante ans ?
Il me semble que je viens seulement de comprendre comment être jeune.
-Exactement ! C'est comme la dernière journée dans un pays étranger. On sait où prendre un café, boire un verre, manger un bon steak... Et puis on doit partir. Et on ne reviendra jamais.

Pages 205/206
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Pendant les quinze dernières années, Arthur Mineur est resté célibataire. Et cela, après avoir vécu de nombreuses années avec le poète Robert Brownburn, plus âgé que lui : ce fut comme un tunnel d’amour, où il s’était engouffré à vingt et un ans, et dont il avait émergé vers trente ans, ébloui par la lumière du dehors. Où en était-il alors ? Il y avait perdu la première étape de sa jeunesse, comme aurait échoué la première étape du lancement d’une fusée qui serait retombée, à court de carburant. Et voici qu’arrivait la seconde. Et la dernière. Il se jura alors de ne l’offrir à personne ; il en profiterait. Et il en profiterait tout seul. Pourtant, comment vivre seul mais ne pas être seul ?
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« Nous croyons connaitre ceux que nous aimons. Nos maris, nos femmes. Nous les connaissons, nous nous identifions à eux, parfois, séparés lors d’une soirée en bonne compagnie, nous nous surprenons à exprimer leurs opinions, leurs goûts culinaires ou littéraires, à raconter une anecdote qui ne sort pas de notre mémoire mais de la leur.
Nous observons leurs tics dans la conversation ou au volant, dans la manière de s’habiller et celle d’effleurer leur café avec un morceau de sucre qu’ils regardent virer du blanc au brun avant de le lâcher dans la tasse, satisfaits. Mon mari faisait cela tous les matins et je l’observais, j’étais une épouse vigilante.
Nous croyons les connaitre. Nous croyons les aimer. Mais ce que nous aimons ce révèle n’être qu’une traduction approximative, notre propre traduction d’une langue mal connue.
Nous tentons d’y apercevoir l’original le mari ou la femme véritables, mais nous n’y parvenons jamais. Nous avons tout vu. Mais qu’avons-nous vraiment compris ?
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- Dites-moi, j’espère que vous faites bon usage de votre jeunesse.
- Je ne sais pas.
- Eh bien, vous devriez la gaspiller.
- Comment ça ?
- Vous devriez aller à la plage comme vous le faites aujourd’hui, vous défoncer, vous enivrer, avoir des tas d’aventures sexuelles. J’estime que la chose la plus triste au monde, c’est un jeune de vingt-cinq ans qui discute de la Bourse. Ou pire, des impôts ! Ou encore de l’immobilier, nom de Dieu ! Ça, c’est rigoureusement tout ce qui reste comme sujet de conversation quand on a quarante ans.
p. 99
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Il se demande à quel moment leurs conversations avaient commencé à ressembler à celles d'un roman traduit.
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"Pas une heure, pas un jour où Arthur Mineur ne ressente de la peur. Peur de commander un cocktail, de prendre un taxi, d’enseigner à une classe, d’écrire un livre. Peur de tout cela, et de presque tout dans la vie. C’est étrange quand même : comme il a peur de tout, tout lui parait difficile. Effectuer un voyage autour du monde n’est pas plus terrifiant que d’acheter un paquet de chewing-gums. A chaque jour sa dose de courage."
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A l'époque, il me semblait que le mariage était comme une douche dans un hôtel : on la règle à la bonne température, à ce moment-là quelqu'un derrière le mur ouvre son robinet d'eau chaude et on reçoit un paquet d'eau glacée, on remet du chaud et on entend le voisin pousser un cri, il remet du chaud et ainsi de suite jusqu'à ce qu'on trouve un compromis tiède, supportable pour l'un et l'autre.
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Les gens se font une idée des années cinquante. Ils parlent des jupes ballon décorées d'un caniche en laisse, des grèves de transports routiers, d'Elvis ; ils parlent d'une jeune nation, d'une nation innocente. Je ne sais pas pourquoi ils se trompent tellement ; ce doit être un dérapage de la mémoire, car tout cela est venu plus tard, à mesure que le pays se transformait. En 1953, rien n'avait changé.
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Nous croyons connaître ceux que nous aimons.
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J'écris une histoire de guerre. Je ne l'avais pas prévu. Au début, c'était une histoire d'amour, l'histoire d'un mariage, mais la guerre s'y est incrustée partout, tel un verre brisé en mille éclats. Non pas une histoire ordinaire de combattants, mais de ceux qui ne partirent pas à la guerre. Les lâches et les planqués..
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Nos regards se croisèrent, car l'un et l'autre nous avions fait une chose surprenante, nous avions échappé au temps pendant un instant, ce qui la seule définition du bonheur que je connaisse.
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Arthur Mineur est le premier homosexuel à vieillir. C'est du moins ce qu'il ressent, dans des moments comme celui-ci. Là, dans cette baignoire, il pourrait avoir vingt-cinq ou trente ans, être un beau jeune homme, nu dans un bain. Et jouissant des plaisirs de la vie . Mais comme ce serait horrible si quelqu'un le surprenait tout nu aujourd'hui! La moitié du corps tout rose, le sommet du crâne tout gris: on dirait ces vieilles gommes à double usage, pour effacer d'un côté le crayon et de l'autre l'encre d'un stylo. Il n'a jamais vu un homo de plus de cinquante ans, exception faite de Robert. Tous ceux qu'il a rencontrés avaient plus ou moins la quarantaine, mais il n'a jamais vu personne survivre au-delà: ils sont morts du sida, ceux de cette génération. Et celle de Mineur a souvent l'impression d'être la première à explorer les contrées qui s'étendent au delà de cet âge.
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Pendant qu’il patiente, une jeune femme en robe de lainage marron pollinise l’un après l’autre des groupes de touristes, avec les mouvements circulaires d’une sorte d’oiseau-mouche vêtu de tweed. Elle se penche sur un bouquet de chaises, pose une certaine question et, mécontente de la réponse, s’élance à tire-d’aile vers un autre groupe.
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À propos, pour information : le bonheur, c'est pas des conneries.
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Les moments d'ennui sont essentiels aux écrivains ; ce sont les seuls dont ils disposent pour écrire
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La vie d’Arthur Mineur avec Robert avait pris fin à peu près au moment où il finissait de lire Proust. Ç’avait été l’une des expériences les plus splendides et les plus désarmantes de la vie de Mineur – Marcel Proust, j’entends –, et les trois mille pages d’À la recherche du temps perdu lui avaient bien pris cinq étés avant qu’il parvienne à leur terme. Et ce cinquième été, alors qu’il était allongé dans la maison d’un ami à Cape Cod, un après-midi, arrivé aux deux tiers du dernier volume, tout d’un coup et sans qu’il s’y attende, il lut le mot : FIN. Il tenait encore, dans sa main droite, peut-être deux cents pages de plus, mais elles n’étaient pas de Proust ; c’était un tour cruel que lui jouait l’éditeur, avec des notes et une postface. Il se sentit floué, roulé, privé d’un plaisir qu’il avait mis cinq ans à préparer. Il retourna de vingt pages en arrière ; il tenta de retrouver l’enchantement de sa lecture. Mais c’était trop tard ; cette joie possible était perdue à jamais.
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Elle parle de sa jeunesse. Elle parle du temps où elle était la propriétaire. Elle sort une photographie écornée, en noir et blanc, celle d’un couple occidental assis (l’homme aux cheveux argent, la femme très chic coiffée d’une toque) et il reconnaît la pièce où il a pris le thé. Elle dit que la jeune fille qui sert le thé, c’est elle, et que l’homme est un Américain célèbre. Suit une pause assez longue, à mesure que lentement, précautionneusement, comme un plongeur en eau profonde finit par réapparaître à la surface, il reconnaît l’homme et s’exclame :
— Charlie Chaplin !
De joie, la vieille dame ferme les yeux.
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— Qu’est-ce que tu as préféré ?
Il le lui dit, et elle eut une expression amusée :
— Le jardin ? Quel jardin ?
Le garçon avait été attiré non pas par les trésors sacrés, mais par une vitrine contenant une ville miniature, où un œilleton lui permettait de voir, comme peut le faire un dieu, telle ou telle scène dont chacune était élaborée avec une si grande précision de détails qu’il lui semblait observer le passé à travers un télescope magique. Et de toutes les merveilles contenues dans cette vitrine, la plus grande était le jardin, avec sa rivière qui semblait couler, remplie de carpes mouchetées de taches orange, avec les buissons de pins et les érables, et une petite fontaine faite à partir d’une tige de bambou (en réalité pas plus grande qu’une épingle à nourrice !) qui oscillait sans cesse, comme si elle faisait couler goutte à goutte sa charge d’eau dans le bassin de pierre qui se trouvait à sa base. Le jardin enchanta le petit Arthur Mineur pendant des semaines ; il marcha dans la cour, chez lui, parmi les feuilles brunes, à la recherche de sa petite clé d’or. Il finirait assurément par trouver la porte de ce jardin enchanté.
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