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Citations de Anne Calife (97)


Passent des couples agglutinés, échangeant des baisers feuillus et je me suis soudain sentie si seule. Terriblement seule. Et dingue, dingue à se couper la tête, à se trancher les chevilles pour faire cesser la douleur. La rosée mouille mes mains nouées tandis que les larmes roulent sur mes joues.
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En toute lucidité,je peux le dire à celles qui tombent amoureuses. La passion et une grave erreur.

On croit aimer:on aime pas.On ne fait que contempler le gouffre au fond de soi.
Et,il se trouve que le bien-aimé s’emboîte parfaitement dans l’abîme.Mais ne la comble pas.

L’abîme demeure .
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Silence de l'absence.
Cela fait une sale vacarme, l'absence ,un tapage nocturne et diurne qui empêche de vivre, de dormir,de rire , de dormir.
De vivre tout court.
Envoyer-recevoir, recevoir-envoyer: résonne,vide et creuse et creuse et la boite. Rien à l'horizon

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C'est en puisant dans la raison que fleurissent les fleurs blanches et révulsées de l'art.
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L'art n'est que le plus beau profil du réel.
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Dans un état second, j’enduis le pain glacé d’épaisses couches de beurre. Mon cœur s’accélère.Non, non, ne mange pas cette tartine, ne mords pas dedans .Tu vas le regretter, tu vas le regretter amèrement.
Retenue par les fils tendus de la voix, j’hésite, mâchoire ouverte, tartine au bord de la lèvre inférieure. Toute ma vie se tend dans cette attitude. Je peux encore refuser de mordre le pain.
Un éclat de rire aigu me parvient du salon. Le rire se transforme en long sifflement, non, c’est trop douloureux. Mes gencives se sont enfoncées dans l’épaisse couche de beurre froid.
Un plaisir insolent m’a submergé. Un plaisir ignoré jusque là. Tout le gris a disparu. La tartine est avalée en une bouchée. Encore. Encore. Deux, trois, quatre, larges tranches se succèdent. A chaque fois, la même jouissance.
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Tout part de l'humide pour rejoindre l'humide: voilà notre destinée. Nous sommes biodégradable.
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Oublier tout ?
Peut-on seulement ?
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Et je me dis que les mots servent peut-être à gagner du temps, à raccourcir les choses. Un explication comme une autre.
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Oh, ces coups accordés durant l'attente! Enceinte, on rêve, grosse, amollie; on attend rien de précis, alanguie. Soudain, un coup... Un seul suffit. Un choc à l'intérieur de soi. Précis, sec. Brutal comme un meurtre, doux comme un battement d'aile de paillon, " je suis là, je suis là!" dit le coup de pied. Une partie de soi, qui n'est pas à soi, dans le bas ventre. A peu près comme un sexe d'homme.
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– Les roses de serre ne sentent rien, parce qu’elles n’ont jamais connu le soleil.
Je levai la tête ; je ne m’attendais pas à tomber sur un sourire, les détenus n’en font pas souvent. Jamais je ne l’oublierai.
Autour se dessinaient des plis qui le vieillissaient ; à l’intérieur, des dents écartées qui le rajeunissaient.
Alors que la plupart des prévenus portent un jogging, des baskets, lui était vêtu d’un pantalon de toile beige. Les manches longues de son sweet-shirt bleu suivaient ses gestes lents.
Il jeta un œil noir sur les roses, enroulées drues comme des tourbillons de coquille d’escargot.
– En roses, je m’y connais. Dehors, j’étais horticulteur.
Il prononçait les « r » en les roulant un peu, comme des cailloux frottés. Puis j’entendis : « J’ai mal au ventre. »
Et fus à nouveau infirmière.
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Bien entendu, je déteste les fumeurs. Non, c'est faux. Je les plains, pauvres infirmes, cruellement amputés d’un guide infaillible. Le cigare du Doc m'ennuyait beaucoup.
Je charriais son odeur froide mais cuisante jusque chez moi ; elle franchissait toutes les limites, même celles du sas de décompression.
Je n’osais le lui dire, pas plus que je ne voulais user de ces désodorisants artificiels qui martèlent le nez de leur unique « fraise-fraise-fraise » en notes trop sirupeuses, pas assez vertes, ou encore ce « vanille-vanille », « muguet-muguet », trop réguliers, trop uniformes.
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Au bout de cinq ans d’hôpital, je ne supportais plus ces malades qui entraient, sortaient sans cesse, leur façon de sauter sans prévenir d’un service à un autre. J’aurais voulu quelque chose de plus fixe, stable.
Je quittais donc l’hôpital pour travailler en pénitentiaire. Là, au moins, je savais quand mes malades entraient, sortaient. Cage de pierre où l’on place les prévenus, la maison d’arrêt se situait en périphérie de la ville, au milieu des bandes vertes des champs.
Alentour s’y créait une sorte d’espace respectueux, comme si le temps s’arrêtait. Effectivement, il s’y arrêta.
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Toute petite, j'aimais déjà les prisons. À cinq ans, je tartinais de miel fondu les fonds des bouteilles transparentes pour attirer les abeilles. Le brun des cartons, je le doublais de vert en larges feuilles de salades pour accueillir des escargots. Là, j'aimais à veiller à leur nourriture, contrôler réserve d'eau et température de l'air.
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J’userai, abuserai du mot odeur. « Effluves » suggère plutôt le sillage, le mouvement ; « senteur », « bouquet », définissent davantage les fleurs ; « arôme », le goût ; « fragrance », le parfum.
Parmi les millions de substances reconnues, perçues, c’est celle de la peau, que je préfère entre toutes. À l’affût, mes narines tentent de capter cet élixir précieux, savant mélange de texture, de fossettes, plis et vibrations. Oh, la peau, son odeur…
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Ce sera la seule chose que je conserverai de cette correspondance, une liste de surnoms, notés sur un fichier Excel. Je n’en ai retenu qu’une centaine mais j’en aurai eu des milliers, autant que de mails et d’émotions.
Entre tous, je préférai celui de « ronce » (ma), pour ce qu’elle a de spontané dans la nature, son jaillissement naturel, ce tout donné. Il a raison. Pour exister, pour survivre, il faut être capable d’accepter l’incontrôlable, l’illogique, l’incohérence.
Du chaos que tout prend racine. Du chaos de mes mails que tout commença.
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Avec des émotions aussi violentes, le vouvoiement a cessa très vite. On commença à s’écrire tous les jours. Télépathie de mails ? Nos messages se croisent souvent, en général vers onze heures ou cinq heures. Il écrit de son domicile ou du journal.
A 19 heures, tout s’arrête : il rentre chez lui, quitte son bureau, je ne sais pas très bien. Je sais seulement que je ne peux rien espérer au-delà du soir, et du vendredi. Tant pis, si j’attends. Le prochain mail n’arrivera que lundi, vers onze heures.
Pourtant, je continue à écrire, bille folle lancée dans les rouages d’un flipper. Sans discontinuer, vendredi-samedi-dimanche, sans limites d'heures, 19-21-22 heures, j’écris.
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-Ecrivez, avait-t-il dit, après avoir jeté son « adresse mail », comme on jette, dédaigneux, une pièce en or, « écrivez : on s’entendra mieux ».
Je soupire. Ai-je le choix ? Ai-je envie d’affronter, trente ans plus tard, le hic de l’informatique ? Je soupire encore, et contemple perplexe, très perplexe, l’icône de la boîte de réception : cette enveloppe blanche, timbre rouge à droite, ce couple de flèches pointues la ficelant, ne me disent rien qui vaille.
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Pour oublier, j’ai repris le travail lent, méticuleux de l’écriture. Tous les matins, je dois me confronter au chantier chancelant du roman. Parfois, je me demande si je ne m’épuise pas à construire ainsi « roman » après « roman », comme « maison » après « maison ».
Mais, si je n’emboîte pas des phrases, si je ne visse pas des chapitres uns dans les autres, j’ai le sentiment atroce de tourner en rond, comme une cinglée, portant à bout des bras des brouettes emplies de briques, de mortier que je ne sais où déverser. Plus facile, de ne pas se poser de question et d’écrire tous les jours.
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Établir une organisation dans ce désordre. Se donner des instructions, des règles. J’emprunte dans le bureau de mon père une machine à écrire. Je tape mon adresse sur l’enveloppe. Maintenant, il va falloir concevoir la lettre. À l’encre rouge de préférence, le ton semblera plus impératif. Date, puis titre de civilité. J’hésite, « Chère Maud » ou « Mademoiselle » ? Plutôt « Mademoiselle ». Après tout, je ne suis pas censée me connaître.

La lettre contient une série d’instructions dans des domaines très variés : scolarité, hygiène, rangement, et même alimentation. Des notes minimales en maths et français me sont imposées. Ma penderie doit être plus ordonnée. Tous les matins, sauf le dimanche, le réveil doit sonner à cinq heures afin de réviser mes leçons.
Enfin, le pain est supprimé de l’alimentation : un bourrelet a été remarqué sur mon ventre. Pas de formule de politesse, je n’en mérite pas.
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