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Critiques de Audrée Wilhelmy (52)
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Blanc résine

Lorsque l’on a été particulièrement séduit par une lecture, la crainte émerge de trahir les émotions ressenties par le filtre de nos propres mots, qui devront tenter de les reproduire.



C’est le cas pour Blanc résine. Pourtant les premières pages sont vertigineuses, mots inconnus, repères volontairement flous entre rêve et réalité, et déjà cependant la sensation d’une fascination naissante pour le personnage. Elle, qui ne recevra aucun nom de ses vingt-quatre mères mais se nommera dès que les premiers mots franchiront ses lèvres pour devenir Daã.



Un autre destin hors norme s’impose en parallèle. Celui de l’enfant plus blanc que neige, privé de sa mère à peine né. L’enfant albinos grandit dans le décor gris-noir de la mine, promis à en parcourir les galeries, pour secourir les multiples accidentés.



Les deux chemins, celui de la femme qui sillonne bois et prés en quête de plantes qui guérissent et celui de l’homme pâle se croiseront un jour, et de l’union de leur différence adviendra le meilleur ou le pire…



C’est un coup de coeur, de ceux qui ralentissent la lecture pour s’imprégner de chaque phrase, en se laissant porter par l’atmosphère parfois onirique parfois réaliste et violente.



L‘écriture joue avec les sens, les contrastes de couleur, les odeurs et les sons, créant des espaces poétiques originaux.



Peu importe de ne pas saisir le sens précis de certains mots, (un lexique est proposé en fin de récit, mais n’est pas indispensable). Le son des mots est suffisant pour qu’il ne soit pas nécessaire de visualiser la plante ou l’animal qu’ils désignent, et certains termes se font évidence (comme l’ina maka que l’on traduit rapidement comme la terre-mère).



Le récit est porté par la force de deux personnages, étranges et marginaux, et riches de leur différence. Ils sont l’envergure d'êtres mythiques, porteurs de messages et défiant les obstacles multiples sur leur route.





Publié en 2019 au Québec, c’est un roman qui pourrait rejoindre mes livres pour une île déserte.



Je remercie Grasset et Netgalley.


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Les sangs

Ayant récemment fait l'acquisition de cet ouvrage pour la petite médiathèque dans laquelle je travaille, c'est le bandeau apposé sur la couverture "Barbe Bleue raconté par ses femmes" qui m'a attiré et poussé à découvrir cet ouvrage. J'aime les contes et je voulais savoir comment celui-ci était tourné, ou retourné et découvrir l'envers du décor, même si je savais que cela n'avait aucun rapport avec le conte original mais la curiosité a été la plus forte.



Féléor Rü est un homme extrêmement riche, vivant dans un manoir, héritage d'une longue lignée, qui aurait pu attirer nombre de ces dames, mais il est également très séduisant. Du moins, chez lui se dégage quelque chose qui attire ces dames, "un-je-ne-sais-quoi" qu'il a, en plus de sa fortune. Aussi, au travers de ces portraits de femmes, sept au total, toutes très différentes les unes des autres, qui ont succombé u charme de ce dernier, et qui se racontent dans un journal que celui que l'on surnomme "L'ogre" leur a demandé de tenir, comment elles en sont venus à l'aimer, au point de ne désirer qu'une chose : mourir de ses mains à lui. C'est leur cadeau, leur extase et elles en jouissent d'avance. Puis, il y a ensuite la version de celui qui tue, par jouissance, pour leur faire plaisir à elle, les honorant ainsi qu'elles meurent grâce et pour lui ! Il sera fait exception d'une seule d'entre elle mais je ne vous dirai ni qui elle elle ni pourquoi il ne voulait pas la tuer, elle. Qu'avaiyt-elle de différent ? Se pourrait-il qu'une fois au moins dans sa vie, ce personnage immonde ait réellement ressenti de l'amour, celui avec un grand A qui, au contraire, voudrait que l'on fasse tout pour protéger l'être aimé et la garder en vie au péril de la sienne ?



Un roman dérangeant, qui m'a fortement remuée mais qui m'a également envoûtée tant il est bien écrit (peut-être parfois trop car j'ose dire qu'une scène en particulier m'a presque donnée la nausée, mais là encore, je ne m'étendrai pas plus car peut-être est-ce moi, une fois de plus, qui suis trop sensible ?). Une auteure à suivre mais un avis mitigé, entre fascination et dégoût pour cette lecture-là,, que je ne peux néanmoins que vous inciter à découvrir afin que vous vous fassiez votre propre opinion et me dites si j'ai eu tord ou raison de m'indigner pour si peu...
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Blanc résine

Minushiss, Petite, ma résine, Ina Maka souffle des mots doux à mes oreilles. Elle me berce dans ses bras-branches et je sens ses cheveux rivière inonder mon visage.

J’ouvre les yeux sur la taïga, je nais au monde dans la forêt boréale au cœur du peuple innu.

Daã est mon nom, celui que j’ai moi-même choisi à la demande de mes vingt-quatre mères. Ma pureté, ma beauté vient de la résine qui coule dans mes veines, je suis terre nourricière, je suis terre en colère dévastatrice.

Lui c’est Laure, l’enfant de la Kohle Co, sorti du ventre noir de la mine et de sa mère morte en couches. Laure est blanc, plus que blanc, presque transparent, il est albinos, il est unique.

Notre rencontre a été un choc, le choc de nos blancs, sa peau transparente, ma résine translucide, le noir de sa mine et de la blancheur de mon paysage de neige.

Pour résumer ce roman incroyable, je n’aurai qu’un mot magique !

Le premier chapitre désarçonne, j’ai perdu mes repères, je me suis laissé porter sans être sûre de comprendre ce je lisais. Peu importe, l’auteure en profite pour nous engloutir sous terre dans les galeries de la Khole Co, après avoir emprunté le train de l’enfer le Sort Tog qui semble se faufiler dans les entrailles de la terre. Les premiers chapitres se lisent en apnée, terrassé par la violence et la brutalité de ce conte-monde.

Quelle plume ! Avec maestria, Audrée Wilhelmy nous fait pénétrer dans un monde minéral parsemé de descriptions de nature writing saisissantes de beauté.

Je ne mettrai pas cinq étoiles car dans sa deuxième partie, loin de la mine, le récit perd en puissance et m’a semblé plus convenu, et je n’y ai pas retrouvé la magie envoutante des premiers chapitres.

Une auteure à suivre, que je vous invite à découvrir pour un grand choc et un saisissant voyage.

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Les sangs

Aimer à mort, un bizarre mélange de conte, d’érotisme et d’horreur…



Une sorte de Barbe-bleue, dont les femmes ont des instincts de mort et qui confient leur âme dans leur journal…



Sept portraits de femmes, toutes très différentes, de la jeune servante à la danseuse étoile, en passant par l’herboriste qui expérimente les aphrodisiaques, la bourgeoise plantureuse et fatiguée ou encore la superstitieuse qui a peur de la folie.



Une belle écriture que celle de cette jeune auteure, une originalité de forme aussi, mais malgré ces qualités indéniables, la thématique qui associe plaisir, douleur et mort ne m’attire pas vraiment.

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Blanc résine

Au fil des fêtes païennes célébrées à l'équinoxe de printemps, de l'automne, du solstice d'été et de l'hiver nous partageons la vie de deux être aimés, qui au cœur de la forêt vont se découvrir. Blessée c'est lui qui est venu à son secours : " J'ai retrouvé la parlure des hommes en apprenant celle de Laure Hekiel. Après dix jours de sommeil, quatre ans de sols durs et de langues animales, j'avais perdu dans les oreilles, dans la gorge, les idiomes de mes mères. "



Étrange communion de deux personnages si différents, Daa, qui a pour fratrie mammifère, les religieuses qui l'ont recueilli à la mort des siens, qui ne fait qu'un avec sa terre nourricière, parlant le langage des arbres, des plantes et des animaux et puis Laure, lui très jeune orphelin de mère, et surnommé Blanche-neige par les enfants, de part la couleur si pâle de sa peau, et qui va mettre les chances de son côté pour essayer de se libérer d'un destin trop fatale.



Une plume rare, un roman puissant, surprenant, oui il m'a fallu quelques pages pour entrer dans l'état d'esprit de cette enfant Daa, de pénétrer son univers si singulier. Et puis très vite par la suite, je me suis fondue en elle, me laissant guider par une personnalité envoutante pour découvrir la nature comme peu d'êtres humains peuvent encore la vivre !



C'est le premier roman que je lis de cette auteure et déjà j'ai l'envie de retourner dans son univers. Je lisais à propos de son œuvre, " qu'il y a des connexions souterraines entre les différents univers, lieux et personnages qui se tissent d’un récit à l’autre. " Alors il me faut aller plus loin, car véritablement elle m'interpelle !



#Blancrésine #NetGalleyFrance
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Les sangs

Pourquoi je l’ai choisi:



Je ne sais pas résister aux contes revisités….

Les personnages:



Mercredi, Constance, Abigaelle, Frida, Phelie, Lotta, Marie: Toutes ses femmes nous offrent leur dernier cri, leur dernier souffle, leur dernier message avant la fin…Il ne fait bon vivre aux cotés de Féleor, mais elles l’ont fait et se sont délectées de chaque seconde….Jusqu’à la dernière, avec un plaisir certain….



Ce que j’ai ressenti:



On sent comme une espèce de fascination dans ses pages. C’est quasi hypnotique. On ne peut quitter ce monde, ses femmes, on est happé par les mots, électrisée par leurs consentements…On franchit une frontière entre conte et thriller, folie et raison, affabulations inavouables et désirs assouvis, la ronde qui se joue dans ses lignes nous entraine au sein de l’esprit féminin et de leurs secrets penchants….



J’ai beaucoup aimé frôler leurs esprits troublés, leurs tendances destructrices envers elles mêmes, tout en adorant jusqu’à l’obsession cet homme. J’ai senti toute la Passion qui les anime, même si elle peut être fatale, il n’en reste pas moins qu’on sent une intensité d’amour absolu et d’abandon ultime. C’est beau cette façon d’aimer, sans contrainte, à l’infini, jusqu’à la Mort…..Les femmes se donnent corps et âme, et nous prenons en pleine face leurs désirs, leur volupté, et une grande partie de fantasmes impudiques….



La forme d’écriture était surprenante, et bien agréable. Chaque porte franchie nous délivre une femme plus ou moins attachante, mais ce recueil de Sangs est quand même dérangeant dans sa nature, mais une belle ode à la femme en général par sa poésie très contemporaine. Cette version revisitée de Barbe Bleue est une jolie réussite!!!!


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Les sangs

J’ai adoré cette adaptation de Barbe Bleue par Audrée WILHELMY : pas tout à fait thriller, pas complètement érotique non plus, c’est avec brio que l’auteure nous conte l’histoire d’un homme que ses femmes successives aiment à mourir.

Sept femmes, sept récits d’elles, narrant ce qui s’est vraiment passé dans le château de cet homme riche, de cet Ogre, comme l’appellent certains… : Y défilent successivement une droguée qui se sert de lui pour ses expériences, une danseuse étoile qui lui montre l’existence du plaisir dans la douleur physique, une mère veuve qui étouffe littéralement de se trouver plus grosse que les autres, une cérébrale qui comprend son besoin de mise en scène pour exister et en fera les frais, puis l’amour de sa vie, la seule dont il ne souhaite pas la mort mais qui ne veut pas vieillir…

S’ajoute à elles la première, celle qui fut l’élément déclencheur de cette collection d’horreur. Et bien sûr la dernière, qui aide Barbe Bleue à boucler la boucle (ou pas ?...) de son histoire.





Douces-amères ou franchement atroces, les morts successives de ces 7 femmes ne font aucun doute. Les tue-t-il de ses mains ? Pourquoi l’épousent-elles en le sachant ? Le lui demandent-elles ? Pourquoi accepte-t-il leurs demandes ?

Heureusement pour nous qui, sans cela, resterions sans réponse, une étrange rumeur court selon laquelle Barbe Bleue obligerait chacune de ses femmes à écrire un journal.

En plus de conserver leurs affaires personnelles dans son musée des horreurs, il paraît même qu’il contraindrait ses épouses à lire les récits des précédentes…

Etes-vous prêt(e)s à les lire à votre tour… ?





*****



Voici une lecture très plaisante, avec une imbrication parfaite, des explications convaincantes, une imagination au service de ce conte revisité de Barbe Bleue, qui est destiné aux adultes mais conserve très habilement son esprit de conte.

Amour, admiration, richesse, puissance, jeux sexuels, et mort subite, que cherchent ces femmes qui l’ont aimé ? Qu’ont-elles aimé en lui, et lui en elles ? Audrée WILHELMY nous ouvre, pudiquement et violemment à la fois, les portes du Manoir le plus intriguant et effrayant de nos souvenirs de jeunesse, nous laissant entrevoir la malédiction de cet homme qui, finalement, est presque autant victime que coupable tant les femmes se servent autant de lui que lui d’elles – pour son plaisir et pour son malheur.

Qui est cet homme très seul qui, lorsqu’il trouvera enfin l’amour, le vrai, ne parviendra pas à le conserver… ? Sera-t-il inquiété pour autant lui qui est si riche ; et si puissant… ? Il laissera en tous cas, en guise de témoignage, cet étrange et agréable roman.


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Les sangs

Le récit met en scène sept femmes dont cinq finiront par mourir aux mains du même homme, Féléor-Barthélémy Rü. Le roman est divisé en sept parties, une pour chaque femme. Chaque partie est structurée de la même manière : présentation de la femme, journal intime ou correspondance de celle-ci, suivi d’un court paragraphe rédigé par Féléor.

Mi conte, mi histoire d'horreur – mais, les contes ne sont-ils pas tous des histoires d'horreur? – ce roman raconte l'étrange passion sous-tendue par un érotisme fou, qui pousse Féléor à tuer ses épouses (sauf une qui se suicide) et celles-ci à réclamer la mort des mains de leur époux (sauf une qui est quand même tuée). Chacune recherche la mort pour une raison différente : expérimentation de drogues hétérogènes, sadomasochisme, dégoût de soi, fascination pour la violence pour celui qui la donne et celle qui la reçoit, peur de la folie héréditaire etc. On y suit, à travers la lecture du journal qu'écrivent chacune à leur tour les épouses, la transformation de Féléor de garçon réservé presque timide et taciturne, en tueur en série.

Chaque épouse semble avoir bien réfléchi et avoir accepté d'être tuée mais sont-elles vraiment conscientes de l'horreur d'un tel acte et quelle pulsion les pousse à réclamer la mort?

Dans la Cité on appelle Féléor l'Ogre mais il n'a rien d'effrayant et pourtant c'est un meurtrier mais est-ce que le consentement à être tué adouci la faute de celui qui assassine?

La Cité ne fait rien pour empêcher l'Ogre d'assassiner à répétition, est-ce parce qu'il est riche et puissant et donc intouchable?

Le récit ne nous offre pas de réponse. À nous de nous faire une opinion et de nous interroger. D'ailleurs, c'est la force de l'écriture d'Audrée Wilhelmy, une écriture envoûtante, poétique qui nous entraîne dans un imaginaire si peu commun où les questions sont suggérées plutôt que posées et les réponses laissées à notre bon vouloir, ou, devrais-je dire conscience dans ce cas-ci?

Excellent roman, riche et puissant, autant par sa structure, que par l'écriture et l'histoire pleine de sous-entendus qui y est raconté.

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Les sangs

C'est le deuxième livre de cette auteure, après Oss. Je retrouve son écriture fluide, poétique et prenante, son imaginaire profondément dérangeant, ces personnages tordus et étranges… Les Sangs m’a tout de suite fascinée. À peine avais-je commencé à lire quelques lignes que j’ai accroché. Pari gagné pour l’auteure !



Audrée Wilhelmy s’attache à dresser le portrait d’un homme, Féléor Barthélémy Rü, au travers des femmes qu’il a connues. Riche, puissant, beau, énigmatique, il a tout pour plaire. Mais ce sont les femmes qui prennent la parole pour le raconter. En parallèle, elles racontent leur histoire à elles. Leur vie, leurs désirs, le sexe, surtout, et leur mort.

Le récit est découpé en sept parties, chacune au nom d’une des protagonistes. On commence avec une courte description du personnage, puis elle raconte à la première personne son aventure avec Féléor ; et parfois son enfance pour expliquer une partie de sa personnalité. Cela peut prendre la forme d’un journal intime, mais aussi de lettre adressée aux morts ou à Féléor. À la fin de chaque partie, ce dernier parle à la première personne et donne sa version des faits. Et là, surprise ! On constate qu’ils ne sont pas tout à fait les mêmes – ou que certaines choses ont été passées sous silence. Les filles se laissent parfois emporter par leurs lubies, leurs désirs, elles perdent le sens de la réalité – à l’image de Mercredi. Cela donne matière à réfléchir sur la subjectivité de chacun. Nous déformons la réalité, qu’on le veuille ou non, car nous l’interprétons malgré nous.



Selon la femme avec qui est Féléor, la relation qu’ils auront prendra des tons de manipulation, de sadomasochisme, d’inceste… Il y en a pour tous les goûts, et le moins qu’on puisse dire, c’est que sa vie n’est pas triste ! Au début des accidents, puis des lubies de ses femmes, les meurtres de ses compagnes deviennent habituels. Féléor finit même par y prendre goût.



Le procédé d’écriture est étrange, mais innovant et très intéressant. Parfois presque inquiétant. Les personnages sont…bizarres. Mais ils restent réalistes, humains – contrairement à certains livres où on ne parvient plus à s'y retrouver, tellement ils sont exagérés et leurs pensées, erratiques (comme Quai Ouest, de Koltès ou Nightfall, de David Goodis). Ils ont tous une certaine profondeur ; à l'exception de Phélie, que je trouve trop ressembler à Abigaëlle.

On a beau se voiler la face, mais les désirs que décrit l'auteure peuvent prendre part en chacun de nous, on peut se les approprier. Même si certains sont tellement horribles que ça donne plutôt envie de vomir – je pense notamment au moment où Féléor lèche et mord le pied d’Abigaëlle pour goûter ses plaies et faire exploser ses cloques entre ses dents... Gloups. À mon avis, c’est un des passages les plus marquants de ce livre (c’est pourquoi il est en citation).



J'ai aussi remarqué quelque chose d'intéressant : le premier amour de Féléor s'appelle Mercredi, et le nom de famille de la dernière est des Cendres. On dirait une connotation chrétienne, d'autant plus qu'on ne connaît pas le nom de famille de Marie et que ce n'est qu'en regardant la table des matières qu'on peut le remarquer. Mais d'après l'auteure ce n'est pas voulu. Et « c'est dans ces moments qu'on se découvre plus intelligent qu'on ne le croit ».



Ce livre fait partie de mes coups de cœur. Il est dérangeant et original, mais c'est ce qui fait sa particularité. J'ai accroché aux personnages, j'ai accroché à l'écriture fluide de l'auteure, j'ai accroché à l'idée : si vous êtes prêts à tenter l'aventure, je vous le recommande ! :)
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Les sangs

Comme Barbe Bleue, Féléor est un collectionneur, d’épouses mais aussi des effets qui leur ont appartenu et qu’il aime retrouver pour se souvenir. Mais ici, l’auteure n’en fait pas un meurtrier délibéré. Ce sont plutôt les femmes qui le pousseront à les « suicider ». Sept femmes connaitront un destin funeste après être tombées sous le charme de ce riche et beau jeune homme. Sept femmes passionnées, de conditions et fortunes diverses, animées d’un même désir dévorant mais aussi malsain que déviant. Aucune union ne sera sereine, équilibrée, normale.



De construction originale, entre allégorie et réalisme, ce récit nous présente chaque situation comme un tableau, un morceau indissociable d’une fresque. Chaque partie s’ouvre sur un bref portrait de la femme, établi par cet homme qui la désire. Puis nous avons accès à son journal intime, des lettres ou des écrits personnels qui nous révèlent non seulement sa folle passion mais aussi ses pensées les plus intimes. Viennent ensuite les notes de Féléor qui apportent un regard autre sur chacune, sur chaque relation, mettant en exergue les personnalités névrosées de ces femmes. Plus qu’un meurtrier, il semble l’instrument des fantasmes cruels qu’elles mettent en scène, un voyeur, un jouisseur ; pas un tortionnaire comme on pourrait le penser de prime abord.



Ce conte érotique et noir découvre peu à peu un univers étrange et décalé. Il présente également une réflexion sur les relations humaines, les jeux de l’amour, les fantasmes. Livrées sans pudeur, les pensées des amantes m’ont quelques fois mises mal à l’aise, non pas tant par la crudité de leur propos que par le côté malsain de leurs comportements sexuels déviants. Leurs jeux toujours plus pervers pour atteindre la jouissance suprême les conduisent inexorablement vers la mort. Une mort salvatrice qu’elles attendent voire planifient et dont leur amant sera l’auteur.



Cette plume libertine à l’écriture ciselée et concise offre un récit vif, enlevé et pour le moins original. Je reconnais de grandes qualités littéraires à ce texte mais la thématique du plaisir lié à la douleur et à la mort n’est pas pour moi.

Ce conte immoral et captivant à la fois est à déconseiller aux âmes sensibles. Les descriptions crues d’odeurs fétides, de chairs en lambeaux et autres passages sordides risquent fort de les retourner. Pour les autres, les curieux, tentez ce récit hors du commun et faites-vous votre propre opinion.



Audrée Wilhelmy, née en 1985 à Québec, vit à Montréal. Ce roman est son second après "Oss".

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Plie la rivière

Un petit livre, quelque part au croisement de la novella et du conte, dans lequel on retrouve Noé, personnage récurrent de l'oeuvre d'Audrée Wilhelmy. Deux temporalités s'entremêlent autour de la figure d'un ours, et des symboles se font écho.



Je ne suis pas certaine d'avoir tout compris, mais pour moi, il est question de la faiblesse des hommes s'opposant aux forces de la nature, incarnées dans le caractère indompté de Noé et la constance des cours d'eau. Les thèmes de la filiation, de la masculinité et de la pédophilie sont aussi abordés.



J'ai beaucoup aimé les images évoquées, la prégnance de la nature et les passages écrits en vers. Je pense que je l'ai lu trop vite, cependant, et que je suis un peu passée à côté. Il faudra que je le relise avec plus d'attention pour pouvoir bien m'en imprégner!
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Peau-de-sang

Je crois que c'est maintenant mon livre préféré d'Audrée Wilhelmy. On dirait un "Conte de village" qui aurait mal tourné! C'est une histoire de sorcière, c'est-à-dire l'histoire d'une femme forte et indépendante qui sert de bouc émissaire quand les choses tournent mal. C'est aussi une réécriture du conte de Peau-d'Âne, où les vêtements, comme dans le conte classique, tiennent une place importante. Domaine des femmes, qui les fabriquent et les portent, ils suscitent la curiosité et le désir des hommes...



Il faut savoir que les textes de cette autrices sont souvent chargés d'un érotisme dérangeant, et celui-ci ne fait pas exception. C'est tordu à souhaits!

La narration est un peu déroutante – plusieurs voix se répondent sans qu'on sache trop à qui elles appartiennent –, mais je m'y suis habituée au fil de ma lecture. L'écriture est taillée au couteau, saisissante, et brodée de poésie. Il y est question de désir, d'obsession et de sororité. C'est très sombre, violent, mais également lumineux. C'est un livre qui ne sera peut-être pas au goût de tout le monde, mais personnellement, j'ai adoré!
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Les sangs

Ça faisait longtemps que je voulais lire un livre pareil: une sorte d'empire des sens d'Ôshima, l'amour poussé jusqu'à la mort, associé à la légèreté de Kawabata dans les belles endormies. C'est ce que j'ai ressenti à la lecture de les sangs d'Audrée Wilhemly.



Même si l'auteur s'amuse à changer de personnages (7 fois), à changer de voix, il reste néanmoins toujours enfoui en elles, une douceur, de l'ordre du respect, comme le vieil homme étendu près de la belle endormie. Il se dégage un sentiment d'immense sécurité. Il suffit d'être attentif au souffle et aux gonflements de la poitrine de celle qui dort.



Même si dans le roman de Wilhemly la plupart des héroïnes se révoltent (elles le font presque toutes), elles le font sans jamais trop y croire. Elles le font comme on gronde parfois un enfant, sans trop de conviction, en accentuant les gestes pour paraître crédible. Cette délicatesse amène une sorte d'insouciante face une tragédie qui est connue d'avance. Elles savent toutes qu'il y aura du sang et une mort, la leur. Sans jamais s’appesantir, les femmes de Féléor virevoltent devant la mort, danse sur la pointe des pieds, même affaler sur le plancher, dans des moments qu'elles savent qui seront intensément vécus.
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Les sangs

Composée d’une multitude de voix, Les sangs incarne tour à tour la poésie profonde des amoureuses et celle plus torride du désir. Un portrait hommage aux femmes amantes et aimantes qui se donnent autant qu’elles se perdent dans un idéal d’amour fait de trahisons et de déraison.

Une ode au conte, ici réinventé avec fantaisie et surprise, souvent cru et brutal, qui s’adresse clairement aux adultes. Ce livre vous enchantera par ses multiples voix féminines, qui telles des chants de sirènes nous entraînent sur les rivages du désir et de l’attente. Un point de vue qui alterne avec celui de l’ogre Barbe-bleue, objet d’amour et de passion qui devient un personnage mythique autant que réaliste. Une belle histoire à découvrir si vous aimez les contes revisités et les passions sans illusions.
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Oss

C'est une première publication d'un conte, et bravo ! certes, c'est déconcertant, voir dérangeant, mais quelle histoire ... auteur prometteur pour la suite
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Oss

« Les insectes sont trop nombreux au village. La nuit, ils entrent jusqu'au fond de la gorge des enfants qui se réveillent au matin en toussant des mouches noires. »



Tout petit livre très lourd qui laisse dans la tête des images indélogeables, 'Oss' triture les contes jusqu’à en extraire une histoire sombre, cruelle, qui refuse catégoriquement de faire la morale. Mais tout ça avec un lyrisme particulier, une poésie qui est douce même lorsque ce qu’elle raconte est d’une violence inouïe, d’une violence à briser les côtes.



Dans un village de bord de mer, derrière les façades sales de maisons qui empestent le poisson, la tenancière obèse du magasin général meurt & laisse derrière elle sa fille adoptive, Noé, trouvée enfant sur la plage. La jeune femme a quelque chose à la fois de la sorcière & de l’idiote du village, des grelots plein les cheveux & un répertoire de chansons qu’elle fredonne pour elle-même ; avec la mort de Grumme, sa protectrice qui n’en était pas tout à fait une, se rompt un certain équilibre, celui des rapports de force qui prévalaient jusqu’ici. La petite chose maigre & abîmée que semble être Noé se révèle alors tout autre, dans une série de complications & de péripéties où il devient difficile de distinguer la façon dont se distribuent les rôles de victime & de bourreau.



'Oss' est un conte inquiétant qui relève beaucoup du rêve, de ces rêves tordus dont on s’éveille & dont on se surprend, qu’on interroge pour essayer de comprendre de quelles parties enfouies de nous, de quel recoin noir & brutal ils sont nés. C’est un livre qui m’a beaucoup troublé. Qui m’a habité très longtemps, aussi, de par la justesse de son rythme, de ses phrases parfaites & parfaitement bouleversantes. Un récit déconcertant qui s’insinue sous la peau.

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Blanc résine

Le rapport à la féminité, la nature indomptable, les croyances ancestrales… Oui, Audrée Wilhelmy sort bel et bien un troisième roman en France aux éditions Grasset initialement publié chez Léméac en 2019. Après Les Sangs (2013) ou encore Oss (Léméac, 2011) distingué par le Prix du Gouverneur général, l’auteure québécoise laisse son lecteur indéniablement troublé par l’étrangeté et la beauté de Blanc Résine.



Daã est une enfant de la taïga, un petit bout de femme élevé dans un couvent au cœur de la forêt boréale. Son être transpire la liberté et l’attachement à son berceau-nature. Le jour où elle rencontre Laure, ce garçon un peu plus âgé qu’elle issu des mines, albinos et un peu gauche, le constat est sans appel : tout les oppose. Mais quelque chose les lie, un lien qui dépasse les mots, les actes, une communication hors norme naît de leurs différences.



Au-delà des thèmes qui reviennent régulièrement chez l’auteure, Blanc Résine est d’une originalité esthétique qui entrave notre monde réel lorsque l’on ouvre ce roman. Très loin pourtant du genre fantastique, il touche tout de même au conte réaliste, aux belles histoires qui captent l’attention par leur étrangeté et leur drôle de douceur enfantine. Des codes connus donc, pour des personnages très curieux, attachants et sincèrement eux dans l’espace-temps envoutant du Québec à l’ancienne. La vie se rêve à travers saisons et sabbats païens tandis que d’autres la subissent ou l’aiment sous le joug des hommes et des nouvelles technologies qui rendent l’existence insipide.



Audrée Wilhelmy esquisse la genèse d’une décadence dans laquelle se créé un microcosme où la rencontre des deux amants s’opère. Ils illustrent parfaitement la poétique de l’opposition, déconcertante et séductrice. Laure prend des airs de Julien Sorel dans son besoin absolu de réussite, un self-made-man aux aspirations professionnelles qui ne coïncide pas toujours avec la teneur de ses émotions envers le personnage de Daã. Mais n’est-ce pas cela qui rend cette association de protagonistes si belle ?



Blanc Résine, c’est aussi l’engagement – certes léger mais difficilement imperceptible, en faveur de l’autonomie féminine. Daã est l’image même de la femme forte, indépendante, « sorcière » pour son temps et terriblement vraie par sa sensibilité presque animale. La communication que les deux personnages entretiennent tout au long du roman est faite de respect tout en préservant cette beauté incompréhensible du secret : ainsi, on perçoit l’autre sans jamais le comprendre totalement, on aime sans jamais l’éprouver réellement, on voit sans voir, mais on accepte. Alors oui, c’est peut-être cette complexité qui donne à ce roman toute son étrangeté mais il reste définitivement un ovni de la rentrée, sublime et surprenant.
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Les sangs

Lettre W de mon challenge ABC.

Les sangs est le deuxième roman de Audrée Wilhelmy. Cet ouvrage a été rédigé dans le cadre de son doctorat en études et pratiques des arts de l’Université du Québec à Montréal. C’est une auteure que je ne connaissais pas du tout, malgré mon amour de la littérature québécoise. Dans ce livre elle revisite, en quelque sort, l’histoire de Barbe-Bleue, conte populaire rendu célèbre par Perrault dans Les contes de ma mère l’Oye. Riche roturier, veuf en série, meurtrier présumé.

Ici, Barbe-Bleue est Féléor Barthélémy Ru et ses femmes seront Mercredi, Constance, Abigaëlle, Frida, Phélie, Lotta et Marie. A 4 ans, le petit Féléor mange une poitrine de canard qui n’a pas été cuite et le flanc cru d’un agneau enlevé qui a été coupé en morceaux qu’il accompagne de pommes et d’épices. Ces autres frères ne font pas de cas de cette habitude alimentaire. Il mastique doucement la viande, repose ses couverts, s’essuie la bouche. Il est repu. Voici la première page. Le ton est donné.

Mais détrompez-vous, lecteurs, le sang, il n’est présent que dans le titre. Audrée Wilhelmy ne fait pas dans le gore, ne fait pas dans le facile. Ses pages sont pour nous l’occasion d’apprendre à connaître ce Barbe-Bleue d’une époque inconnue, d’une ville inconnue. Un riche héritier d’une entreprise familiale, vivant dans un grand manoir. Certes, des pièces sont interdites puisqu’elles y gardent la mémoire de ses 7 femmes de sa vie. Mais les apparences sont souvent trompeuses.

Les sangs, c’est aussi l’histoire de ces 7 personnages féminins racontée sous forme de lettres, de journaux intimes, de journal de bord. Des femmes aimées par Féléor, des femmes aimantes. Des femmes folles, marginales, ingénues. Des femmes dont l’amour est si fort, si puissant, qu’elle serait prêtes au pire, au définitif pour un homme, pour leur Barbe-Bleue, pour leur Féléor.

Je retiens de ce livre un exercice de style, puisque nous lisons 8 écritures différentes, de la même plus d’UNE auteur. Je retiens aussi que ce qui nous semble si évident ne l’est pas. Je retiens qu’il y a toujours plusieurs côtés à une même médaille. Un bouquin intéressant à se mettre sous la main. Un roman court, sans fioritures. Un petit 3 heures de lecture qui en vaut la peine.
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Peau-de-sang

Un texte hors catégories qui fascine par sa capacité à développer la personnalité des personnages et leurs interactions par des dialogues crus, des flashs, des réflexions, de la poésie pure, une prose discontinue, hachée, qui finit par donner un sens à l'histoire de cette plumerie où règne une femme au lit ouvert à tous les hommes . Dans les quatre saisons de ce village hors du temps où passent les oies sauvages, les hommes se bousculent, font les sucres, rêvent, forniquent, les femmes tissent, plument les oies et cherchent à se libérer de leurs camisoles (leurs vêtements d'adolescentes – leur condition de femmes). Peau de sang, courtisée par le médecin, meurt comme une oie, suspendue à un crochet. C'est à la fois sombre et sublime, grivois et poétique, tendre et brutal, drôle et triste. Une sorte de conte où les personnages sont condamnés à jouer avec leur sort. Un texte unique avec des aurores boréales de mots, éblouissantes de beauté.
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Le corps des bêtes

C'est l'histoire d'une famille recluse et des liens qui rattachent ses membres les uns aux autres en un noeud inextricable. Comme c'est toujours le cas avec cette autrice, les tabous sont abordés de façon très frontale. Il est notamment question de la naissance du désir sexuel, de voyeurisme, de polygamie et d'inceste, mais aussi de filiation et de maternité.



C'est un livre très étrange, qui dérange, mais qui est sommes toutes moins perturbant que ce à quoi je m'attendais. Je crois que c'est celui de ses livres que j'ai le moins aimé à venir jusqu'à maintenant, mais cela ne signifie aucunement qu'il soit mauvais. Ce n'est peut-être pas l'intrigue qui captive, dans ce cas-ci, mais l'écriture : puissante, hypnotique...
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