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Critiques de Beata Umubyeyi Mairesse (216)
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Tous tes enfants dispersés

Ce livre m'a bouleversée comme rarement, en plusieurs passages, les larmes sont montées . Il y a le génocide atroce , inimaginable , et comme un chant terrible du destin qui vient s'enroûler autour , les tragédies familiales, et leurs non-dits. On vibre avec la narratrice qui brise le cercle du malheur et rend possibles l'espoir, l'espérance . Par son fils la vie se prolonge, possibilité de guérir et réconcilier. Merci Madame Umubyeyi Mairesse.
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Tous tes enfants dispersés

Je suis complétement passé à coté de ce roman. Trois génération (mère, fille, petit-fils) autour du génocide des Tutsi au Rwanda. Tous les sujets du livre sont abordés avec délicatesse. Mais arrivé au tiers du livre je n'arrivais pas à bien comprendre qui était qui , qui avait fait quoi, les impacts du génocide sur les personnages. Bref, ce roman qui me semblait très prometteur m'a laissé de marbre.
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Tous tes enfants dispersés

Un bon roman, porté par une belle plume poétique malgré un sujet qui l'est moins.

Je connaissais les grandes lignes du massacre des Tutsi au Rwanda, mais ce livre m'a beaucoup appris.

Les liens familiaux, les relations parents-enfants et les identités multiples sont au cœur de ce récit.

Tout était super, sauf peut-être les lettres de Stokely et sa "nouvelle", qui m'ont moins plu.

Une très belle découverte.
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Tous tes enfants dispersés

Blanche a fuit le génocide du Rwanda en 1994. Installée à Bordeaux, elle a eut un fils, Stokely, qui en grandissant commence à se poser des questions, sur l’histoire et la culture du pays de sa mère. Ce qui incite Blanche à reprendre contact avec sa propre mère avec qui elle a un peu perdu le contact.



Trois voix s’alternent donc dans ce récit. Entre autobiographie et fiction, l’auteure arrive à nous faire revivre les émotions de ces trois générations. En 2016, Petit Pays avait déjà remis en avant le génocide du Rwanda. Ici le sujet n’est pas traité du tout de la même manière ce qui rend ce livre très intéressant également. L’écriture est de plus magnifique, avec des phrases ciselées et une vraie poésie. Les faits de guerre sont très peu décrits, on est plus centré sur les relations entre les personnages et cette pudeur nous montre qu’on peut parler de drames et de guerre sans en faire un texte cru. Les 3 personnages sont tous en quête de quelque chose, et l’évolution de ces besoins nous permet à la fois de situer le contexte et les problématiques qui ont changées.



J’ai malgré tout un peu du mal en parler dans cette critique, mais c’est un roman à mettre dans toutes les mains, très bien écrit, et prenant !
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Ejo

Ejo est un recueil de nouvelles de Beata Umubyeyi Mairesse, toutes chargées d'une profonde émotion, d'une profonde humanité mais sans le moindre pathos. Chacune est annoncée par une phrase qui se voudrait bien être à valeur de vérité générale, d'abord écrite en kinyarwanda puis traduite en français. On apprend dans la dernière nouvelle qu'il s'agit des phrases dites par une rescapée du génocide Rwandais de 1994, Agnès, professeure d'histoire, ardente à se battre pour échapper à son chagrin et qui s'effondre pourtant lorsque le gouvernement décrète que l'on doit maintenant enseigner en anglais alors même que la langue rwandaise existe et qu'elle est pratiquée. Devenue folle, elle lance ces phrases, au sens souvent obscur, ces phrases parfois absurdes, sans doute aussi absurdes que les actes du génocide perpétré dans l'indifférence générale. Nous voilà prévenus, l'écrivaine a du tempérament et peut jouer du présent gnomique par dérision. Elle bouscule mais elle sait aussi écouter, raconter, toucher. Son écriture déploie très subtilement des registres différents.

Elle donne à entendre la voix d'êtres différents, à percevoir l'expression de leurs sentiments, de leurs sensations, alors que la douleur les taraude tous, que l'effroi les tenaille encore. Aucune de ces femmes n'est éloignée de nous, jamais. Aucune des nouvelles n'a de fin… Leurs épreuves non plus. Une nouvelle, p.63, rompt avec cette structure : elle raconte l'histoire de France – quel prénom ! et de Félicitée – quel prénom aussi pour celle qui est restée au Rwanda ! Elle est construite en boucle autour d'un même lieu…les latrines ! le sarcasme, l'autodérision ne l'éloignent pas pour autant des autres séquences parce que de l'une à l'autre persiste la même incompréhension, la même sidération. La structure éclatée de ce livre n'éparpille pas les récits qui sont certes des témoignages nourris des outils culturels, religieux, sociaux et politiques indispensables mais sont avant tout, autant de preuves de vies, de survies ? différentes et semblables à la fois. On y parcourt aussi des paysages, on savoure les lieux où la végétation invite à regarder.

Si certains détails laissent imaginer l'horreur, l'écrivaine n'entre pas dans les faits des tortionnaires. D'autres écrivains ont déjà raconté, on pense par exemple à Survivantes d'Esther Mujawayo et Souâd Belhaddad publié 10 ans après le génocide de 1994. Les reportages des journalistes, même à l'époque des évènements ont été éloquents, la télévision était sur place. La souffrance de chacun de ces personnages, hommes, femmes, enfants est probablement indicible. On pense à la même difficulté à nommer chez Primo Lévi ou Imre Kertesz. le texte de Béata Umubeyi Mairesse parvient à suggérer l'inimaginable : s'il faut choisir parmi ces nouvelles, lire par exemple : Béatrice Coup d'État classique, p.109 ou Euphrasie, 0pération biscuit, p.121. Son recueil parvient à mettre en avant la mauvaise foi, les ambiguïtés complices sans accuser, sans juger (lire l'échange de lettres entre Anne et sa soeur, religieuse, p.39 au titre si humoristique « Soeur Anne - Ne vois-tu rien venir ? », allusion au conte de Perrault, Barbe Bleue). J'aime particulièrement : France – Kazungu, p.63 pour sa virulence et son sens fécond de la provocation.

« Dans la plupart des langues, hier et demain sont désignés par des mots différents. En kinyarwanda, qui est pourtant une langue très riche et raffinée, c'est un même mot qui exprime deux temporalités : ejo. » p.10

Livre à lire absolument.



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Le Convoi

18 juin 1994, Beata et sa mère ont la vie sauve grâce au convoi humanitaire Terre des hommes. Sous les yeux des journalistes de la BBC, alors âgée de 15 ans, Beata fuit le Rwanda et le génocide des Tutsi.



N’ayant utilisé jusqu’à présente que la fiction pour parler du Rwanda, Beata Umubyeyi Mairesse pose maintenant ses mots et son histoire dans un récit poignant dont les faits sont parfois difficiles à lire.



Sous forme d’enquête, l’autrice souhaite avant tout retrouver les enfants qui étaient présents dans le même convoi humanitaire qu’elle et sa mère. En s’appuyant sur les 4 photos d’un journaliste anglais, Beata Umubyeyi Mairesse reconstitue la petite histoire dans la grande.



30 ans après ces milliers de morts, Beata Umubyeyi Mairesse donne une voix aux victimes du génocide du Rwanda. Un texte qui souligne l’importance de la mémoire. Parler pour ne jamais oublier.

« Je sais aujourd’hui que les génocidaires ne m’intéressent pas. Je souhaite consacrer toute mon énergie à l’histoire des victimes, parler de nos peines, des traumatismes dont on ne guérit pas, mais aussi de nos délicates solidarités. »



Je rappelle aussi ce texte bouleversant de Pierre-François Kettler Je suis innocent (Éditions Talents hauts). Grâce une belle documentation, l’auteur donne la parole à un enfant rwandais rescapé du génocide.

« La vie ne tient qu’à un fil. »

http://www.mesecritsdunjour.com/2024/04/le-convoi-beata-umubyeyi-mairesse.html
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Consolée

Consolée est née au Rwanda à l’« époque où il était acceptable d’enfermer les enfants pâles, nés de la collision entre Noires et Blancs, dans des orphelinats, loin de leurs parents encore vivants(…) »



On retrouve Consolée soixante ans plus tard dans un Ehpad en France, rebaptisée Astrida, alors que la maladie d’Alzheimer a déjà accompli son œuvre de dégénérescence. Le personnel ignore tout de son histoire, de son vécu et encore plus de ses origines rwandaises. Elle passe des heures sur la terrasse à regarder le ciel, semblant attendre un signe. Mais lequel ? Seule Ramata, la nouvelle stagiaire art-thérapeute, est intriguée par cette seule femme non blanche de l’Ehpad qui semble livrée à elle-même. Ramata entreprend d’assembler le puzzle du passé de Consolée, tout en se confrontant à sa propre histoire personnelle, elle qui n’ignore rien des difficultés à être une femme noire en France malgré tous ses efforts d’assimilation.



Lire Consolée, c’est (re)découvrir le passé colonial du Rwanda, le sort ignoble réservé à ces enfants issus de mères noires et des colons blancs, enlevés par la force, envoyés en Belgique, à qui on a nié leur identité, qu’on a invisibilisé. C’est prendre conscience, s’il le fallait encore, que le racisme infecte toute la société, que les personnes sont systématiquement renvoyées à leur couleur de peau et à leurs origines. C’est se rendre compte que les Ehpad manquent cruellement de temps et de moyens pour s’occuper correctement des résidents, quand ce ne sont pas simplement des institutions tout juste bonnes à engranger du fric. C'est apprendre la réalité de certains malades d'Alzheimer qui perdent peu à peu leur seconde langue au profit de leur langue natale, au risque de sombrer dans l'isolement le plus total.



Vous l’aurez deviné, j’ai adoré ce roman aux multiples enjeux sociétaux. Il devrait figurer en bonne place dans toutes vos PAL. Il bouleverse, interroge et donne à réfléchir. Inoubliable et important.
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Tous tes enfants dispersés

Défi ABC 2023 2024 : Lettre U.

"Entre les mots et les morts il n'y a qu'un air", écrit mystérieusement Immaculata, une des protagonistes. Eh bien, ce magnifique roman, porté par un style où coulent les métaphores, leur rend un bel hommage.



(le langage) Les mots, ou le langage, c'est la matière d'un roman. La symbolique des prénoms, de la musique qui est une forme de langage, du mot "ejo", titre d'un autre texte de l'autrice qui signifie à la fois hier et demain en kinyarwanda, et les "virgules entre les périodes", tout cela dans le cadre d'une "famille en lambeau". Des proverbes et des références littéraires, qui enracinent la langue et n'en font pas une abstraction. Et tout, jusqu'au moindre détail, est beau et harmonieux, rien ne détonne. Beaucoup de tendresse et de mélancolie. Les mots, c'est aussi le non-silence. Or, le silence est aussi analysé dans le roman, car Immaculata est muette, elle a sombré dans le mutisme après son traumatisme familial.



(mémoire du génocide) Les morts, ceux du génocide et la mémoire des survivants. Lorsque l'époux de Blanche demande à sa belle-mère Immaculata de consigner son témoignage, pour ne pas que sa mémoire soit confisquée, on suppose qu'il a de bonnes intentions, et le geste est louable, mais il est questionné : comment peut on raconter le génocide en faisant abstraction d'ejo (avant et après), comme si une mémoire humaine se construisait par "périodes cloisonnées" ? Car ce n'est pas un "livre sur le génocide", quoique quelques scènes y soient racontées. C'est plutôt un livre sur la mémoire, qui aborde aussi d'autres thèmes telle la critique de l'"instinct maternel", (et j'ai trouvé le parallèle entre Blanche et Immaculata, les deux mères, très bien mené). L'âme d'un peuple y est évoquée, et ce de manière subtile, non manichéenne, je dirais même métissée, puisque Blanche et son fils Stokely sont, comme l'autrice, métisses. (J'y ai par exemple appris, même si on ne lit pas cet ouvrage pour apprendre, que certains Hutus ont caché des Tutsi mais en ont tué d'autres).



(une narration éparse et dispersée, à l'image d'un peuple et d'une famille) La question générationnelle, les époques et souvenirs épars qui se rassemblent à l'image des retrouvailles et des rencontres entre Immaculata, Blanche et Stokely, constituent autant de facettes de diamant. Le fils, Stokely, le plus éloigné de cette mémoire, et c'est un "lettré", amateur de contes et joueur de clarinette. Tout ce qui est épars, décousu dans la forme, correspond (intentionnellement je pense) aux "enfants dispersés" du titre et de la Bible. Cette distinction et ce refus de linéarité épouse la forme de la mémoire. Un texte non linéaire, mais très littéraire.



De la pudeur et de la dignité. Même le manque d'action est pardonné : un proverbe dit qu'on peut échapper à un poursuivant derrière soi, mais pas à une poursuite intérieure, car l'action, c'est ici la langue et la métaphore. En fait, ce livre le dissipe, cet air entre les mots et les morts.



C'est le livre qui donne envie d'écrire une belle critique en espérant qu'il orne toutes les bibliothèques et avec le temps, qu'il devienne un classique.



Je lirai sûrement "le convoi", un témoignage, essai et écriture de soi sur le génocide des Tutsis, de la même autrice sorti en 2024. Le geste de l'autrice, qui consiste à passer de la forme poétique et de la nouvelle, au roman puis à la non fiction, me semble une forme de lent déshabillage pudique.
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Le Convoi

Dans "Le convoi", l’autrice nous livre un récit poignant de sa quête personnelle, tissant habilement sa propre histoire à celle d'une tragédie collective : le génocide des Tutsi au Rwanda en juin 1994.

Ayant elle-même échappé à la mort grâce à un convoi humanitaire suisse en 1994, elle entame, des années plus tard, une enquête minutieuse pour retrouver des traces de son passé. Cette quête, démarrée avec quatre photos envoyées par un journaliste de la BBC, devient le symbole d'une lutte pour la mémoire et la reconnaissance.



L’autrice explique vouloir passer à l’autobiographie après avoir écrit des œuvres fictions pour illustrer son engagement en tant que passeuse d'histoire, consciente de l'importance de transmettre cette mémoire collective, notamment aux générations futures. Elle aborde avec justesse son rapport à l'écriture, et son engagement dans une recherche acharnée de traces de son passé et celui de sa communauté.



Le récit nous fait toucher de près à l’humanitaire, rendant un hommage vibrant à ceux qui ont risqué leurs vies pour sauver des enfants du génocide. Cette perspective apporte un éclairage nouveau sur les efforts de sauvetage durant cette période, montrant la complexité et le courage des opérations humanitaires.



Cette quête de photos la représentant elle et sa mère, qui l'amène à parcourir plusieurs pays, est alimentée par le désir de se réapproprier une mémoire souvent narrée par des voix extérieures qui nous ont donné une vision erronée de la situation à l’époque.



La réflexion sur le rôle des médias et la représentation du génocide est d’ailleurs bien écrite. Les victimes ont souvent été dépeintes par les journalistes occidentaux, comme souvent réduites à des figures passives de cette tragédie.



Ma découverte de l'histoire du Rwanda à travers ce livre a été éducative et vraiment passionnante. Le témoignage de l’autrice, émouvant, puissant et parfois brutal de vérité, ne laisse pas indifférent, elle se met véritablement à nu et invite à une réflexion profonde sur la transmission de la mémoire. Elle s’interroge même sur sa légitimité à témoigner, mettant en lumière la complexité du statut de survivante. Un comble !



Ce récit, au-delà de son aspect autobiographique, s'impose comme un outil pédagogique essentiel, permettant de comprendre les mécanismes de survie, de résilience, et l'importance cruciale du témoignage et de la mémoire dans la construction de l’identité collective d’un pays.

Et à l'aube de la 30ème commémoration du génocide des Tutsi qui aura lieu en juin 2024, "Le convoi" résonne comme un appel impérieux à ne jamais oublier les leçons du passé.



A lire absolument !

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Le Convoi

Dans « Le convoi », la romancière passe de la fiction au récit en écrivant sur ce qu’elle a traversé plus jeune. Rescapé du génocide au Rwanda en 1994 avec sa mère, elle décide d’aller cherche des informations sur le convoi humanitaire qui leur a sauvé la vie. Un convoi créé à l’initiative de l’association « Terre des hommes » et qui évacuait à la frontière des enfants de moins de douze ans, pour qu’il et elles échappent aux tueries. C’est dans l’un de ces convois que Beata Umubyeyi Mairesse et sa mère se cachent pour fuir. Le travail documentaire de l’autrice soulève de nombreuses questions qu’elle prend le temps d’approfondir. Du statut de victime au rôle de la France et de Mitterand dans le génocide, en passant par le sens à donner à ses recherches, l’autrice cherche à mettre en évidence les enjeux de son travail aussi bien pour elle que pour les femmes et les hommes qu’elle est amenée à rencontrer lors de ses recherches. Un livre à lire et à faire lire autour de soi.



extrait : "Et me voici aujourd’hui, trente ans après, qui décide de revenir sur ce passé pour enfin le raconter. Que s’est-il passé ?

Je suis arrivée dans le nord de la France à l’âge de 15 ans. Je n’avais pas été violée, je n’avais pas été machettée, j’avais encore à mes côtés une mère aimante avec laquelle j’avais survécu. Ma mère est vite retournée au Rwanda pour chercher des survivants, pour être à leur côté, me laissant aux bons soins d’une famille d’accueil française formidable au sein de laquelle j’avais une chance de recommencer ma vie là où le génocide l’avait laissée."
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Consolée

Un roman fort sur l'héritage psychologique et culturel. Deux femmes que tout oppose, qui ont grandit dans des conditions différentes mais pour qui des similitudes vont apparaître même si les liens ne se font pas aussi facilement.

Cette lecture traite de plusieurs sujets mais jamais de façon lourde, ils sont abordés de manière intelligente pour comprendre sans que ce soit fouillis ou trop hors propos.



Consolée née au Rwanda et se retrouve en exil en Belgique suite à son adoption. Ramata est née en France de parents étrangers et à tout fait pour rentrer dans le moule et gommer son héritage social. Les deux femmes vont se croiser dans une maison de retraite et de leur rencontre, l'engrenage va se lancer pour qu'on les comprennent. Une double temporalité qui nous entraine dans des endroits insoupçonnés.
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Consolée

Je n'sais plus qui je suis ici-bas, mais je suis la petite fille qui…

Ramata est en reconversion, anciennement cadre dans une collectivité territoriale, elle a fait un burn out. Elle choisit de se reconvertir pour travailler au cœur de l’humain, donc elle pratique l’art thérapie.

En stage dans un Ehpad du Sud-Ouest, elle fait la connaissance avec une dame isolée, atteinte d’Alzheimer, elle marmonne dans une langue inconnue de tous.

Ramata étant noire, immédiatement ses collègues pensent qu’elle parle peut-être la même langue.

Préjugés basiques qui ont la vie dure.

« Elle parle à peine et quand elle le fait c’est la moitié du temps incompréhensible. Elle oublie petit à petit le français et nous sort des trucs dans une langue inconnue. Peut-être que tu arriveras à la comprendre toi, tiens ! Si ça se trouve elle parle ton dialecte. »

Ramata sait immédiatement qu’elle veut faire le lien avec Madame Astrida, elle se dit qu’elle veut « prendre langue » avec cette grande dame un peu voûtée. Elle se rapprochera de Claude Mouret psychologue de l’établissement, un lien très fort se fera entre elles.

Le lecteur sera immergé dans le fonctionnement de ces établissements pour vieux, mais sous la plume de l’auteur, des constats en évitant les pesanteurs.

Claude apprendra à Ramata, que Madame Astrida a commencé à perdre la langue française au profit de son dialecte, lorsque Paola, sa seule amie dans l’établissement, a été expulsée faute de moyens financiers suffisants.

Nous lecteurs, nous entrons dans ce puzzle et progressons à reconstituer des vies.

La voix de Consolée en 1954, vibre aujourd’hui des hurlements de ce pensionnat de Sauve, où une petite fille mulâtre était soustrait à sa famille pour être matée dans cette institution.

Ramata et Astrida sont aimantées par l’histoire, au sens de magnétisme mais aussi dans le sens amour de son prochain.

Beata Umubyeyi Mairesse nous dit avec intelligence et finesse cette résonnance entre l’histoire coloniale et les générations suivantes, les traumatismes des non-dits. Il faut tisser le lien entre passé et présent pour mettre en phase. Ne pas dire c’est irriguer les traumatismes des enfants d’immigrés.



Le passé n’est jamais passé et ne pas dire fait que le passé reste coincé, il ne passe pas et ne passera jamais.

Ces établissements de fin de vie, regorgent d’histoires individuelles qui ont fait l’Histoire.

Un roman finement analysé, une écriture envoûtante qui sait dire les musicalités différentes selon l’époque évoquée.

Une histoire dans une langue qui tisse le lien entre les personnages et les lecteurs. Pas besoin d’être d’une génération exilée pour se sentir concerné.

Au moment de partir, oui, au moment de mourir, cet oubli de la langue d’une vie pour retrouver la langue de la page vierge que chacun a été. Ici c’est la langue, mais cela peut être autre chose. Se draper de la virginité de l’enfance avant de…

©Chantal Lafon

https://jai2motsavousdire.wordpress.com/2022/08/25/consolee/


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Consolée

Un EPAHD dans la région bordelaise. Ramata, la quarantaine, y fait un stage pour valider sa reconversion de en artherapie, après une carrière de cadre modèle et un burn-out qui l'a fait s'interroger sur le sens de sa vie. Ramata y remarque une résidente, Astrida à la peau mate, que la maladie d'Alzheimer prive peu à peu de langue française, au profit d'une autre langue de son passé. Elle cherche à reconstituer son parcours...



Le texte alterne les souvenirs de trois femmes : Ramata, née au Sénégal, qui a tout fait pour devenir une française comme les autres ; Consolée, petite "mulâtresse" dans le Rwanda des années 50, qui vit une petite enfance heureuse dans la famille africaine de sa mère, avant de leur être retirée par ordre de son père blanc pour être élevée dans une pension pour ces enfants du péché ; Astrida, enfermée dans ses souvenirs et dans l'EPAHD. Trois parcours qui se rejoignent, disant la beauté du monde, et la douleur d'être ni d'un continent, ni d'un autre, étrangère partout. L'écriture, légère est très agréable et fait de ce texte une belle réflexion sur l'intégration, au travers de divers personnages dont les conceptions différent. C'est également un beau texte sur les derniers moments de la vie.
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Ejo - Lézardes et autres nouvelles

Après Tous tes enfants dispersés, Beata raconte la vie des survivants au génocide .

250 caractères pour situer un livre qu'on n'a pas lu, c'est un peu ridicule, non? En plus moi qui m'applique à faire court parce que ces chroniques me servent surtout pour garder la mémoire des livres lus, c'est un peu agaçant: je développe plutôt en commentaires d'avis d'autres lecteurs. On va devoir résumer ce que d'autres ont déjà bien fait. Devoir faire du remplissage comme je le fais ici intéresse qui?

Une autrice à suivre.
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Tous tes enfants dispersés

Ce livre a été choisi aujourd'hui comme l'un des quatre finalistes du Prix Richelieu qui sera décerné en 2021. Ce prix est décerné à un auteur qui écrit en français, langue qu'il a apprise et qui n'est pas sa langue maternelle.
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Tous tes enfants dispersés

L'histoire :

Blanche a fui le Rwanda à l'époque du génocide des Tutsi pour rejoindre la France en 1994, pays natal de son père. Là bas elle a fini ses études, rencontré un homme et donné naissance à un fils. Des années après son départ elle décide de retourner en Afrique pour rendre visite à sa mère Immaculata, survivante du génocide. Mais les non-dits et le passé douloureux vont assombrir les retrouvailles.



Mon avis :

"Tous tes enfants dispersés" est un livre poignant.

En plus de délivrer un message fort, il est très bien écrit. La plume de Beata Umubyeyi Mairesse est remarquable, poétique et pudique. Elle nous raconte ici la vie d'une famille atypique : Immaculata la mère qui a élevé seule ses deux enfants nés de pères différents, Blanche l'aînée métisse qui s'est toujours sentie rejetée et Bosco l'enfant favori qui a souffert des secrets de famille et qui a combattu pendant le massacre. Une famille aimante mais écrasée par le poids des traditions : ce qui se dit, ce qui ne se fait pas... Et surtout avec son lot de souffrances. L'auteure dépeint des personnages forts, notamment celui de la mère Immaculata, un vrai roc ! Chaque membre de cette histoire est criant de réalisme, avec ses faiblesses et ses forces. Aux membres cités ci-dessus il faut rajouter celui de Stokely, fils de Blanche qui veut comprendre ses origines.

Les deux grands axes de ce roman sont le génocide, que l'auteure a vécu personnellement, et la relation mère-fille conflictuelle entre Blanche et sa mère. Le tout est écrit avec une pudeur intelligente, pudeur qui vient je pense du vécu de Beata Umubyeyi Mairesse. Elle donne la parole tour à tour à Blanche, Immaculata et Stokely qui nous confient leurs espoirs, leurs peurs et leurs doutes, le tout en voyageant dans le temps.

L'écriture comme je le dis plus haut, est belle et émouvante, le tout sans tomber dans l'apitoiement malgré les sujets durs traités. Ça m'a fait penser au style de Yasmina Khadra , écrivain que j'adore. Des mots qui font rêver, voyager et trembler.

C'est un livre que j'ai dévoré en deux jours seulement. Il amène à la réflexion sur la guerre, les liens familiaux mais aussi sur l'éducation et l'amour. Je vous le conseille surtout pour le talent de cette auteure qui sait raconter des histoires à la manière des plus grands conteurs.
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Tous tes enfants dispersés

Un vrai coup de cœur pour ce roman et ma première lecture pour cette saison des 68premièresfois.

C’est l’histoire de trois générations, trois points de vue, trois narrations : Immaculata, Blanche et Stokely.

C’est l’histoire d’une relation malhabile entre une mère et sa fille, une parole, un silence, des secrets.

C’est l’histoire d’un exil, de voyages, de retours. Le génocide Rwandais a fait de Blanche une plante exotique. Il y a ceux qui sont restés et ceux qui sont partis.

Blanche va se mettre à « l’ouvrage de sa mémoire, tisser une virgule entre hier et demain et retrouver le fil de sa vie ». (p28)

C’est l’histoire des répercussions de ces cent jours de génocide dans ce pays où le mot « paix » est synonyme de « vie » : les narrateurs posent un regard sur ce qui a été détruit. Les cœurs, les relations sont en lambeau.

Cette histoire est l’expression de la force de la maternité, de la transmission.

C’est également une belle histoire de résurrection : celle des mots et de la vie.

Ainsi, Les jacarandas coupés font des rejets

J’ai été transportée par la poésie de Neata Umubyeyi Mairesse, par la puissance des formules et des mots qu’elle emploie. C’est sensible. C’est juste très beau.
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Tous tes enfants dispersés

1994: le massacre des tutsis. Immaculata est restée au Rwanda, longtemps cachée dans une cave où elle meurt de faim et de soif, sa fille Blanche a fui en France; en 97, elle revient voir sa mère mais leurs relations sont difficiles car seule Immaculata a connu des horreurs indicibles et ne tient pas à en parler. le frère de Blanche a fait la guerre, celle des rwandais puis celle du Zaïre (Congo); il ne s'en remet pas. Frère et soeur ont la même mère mais deux pères différents. Au moment où elle attend Bosco, elle est en prison comme le père (je n'ai pas bien compris pourquoi) Blanche ne connait pas son père.

En France, elle vit avec Samora et ils ont un enfant, Stokely.

Trois générations en quête de leur histoire.

J'ai eu un peu de mal avec la construction: cela commence avec le premier retour au pays de Blanche en 97 mais sa mère est restée en 94 dans sa tête. Puis on remonte le temps jusqu'à la naissance de Bosco: enfant accident et la parole est à Immaculata et elle a des propos qu'on pourrait qualifier de féministes; ensuite, nouveau saut dans le temps, c'est Blanche qui écrit sur la naissance de son fils puis c'est de nouveau Immaculata qui parle de sa mère. Ensuite on revient sur l'enfance de Stokely qui aime...la musique des blancs! Samora en est contrarié, il pense que son fils devra subir le racisme et ne pourra s'imposer comme musicien quel que soit son talent. On revient à l'adolescence de Blanche puis sa rencontre avec Samora, tous deux métis: lui fils d'une bordelaise et d'un antillais qu'il n'a pas connu; elle fille de rwandaise et d'un blanc qu'elle n'a pas connu non plus. de nouveau, les chapitres défilent donnant la parole à I. , Blanche puis à Stokely. Ce dernier va tisser des liens avec sa grand-mère.

Un classique: Blanche est perçue comme blanche au Rwanda et noire en France. Une double culture n'est pas toujours un cadeau...

Un récit touchant, effrayant parfois même si l'autrice ne s'étend pas sur les violences qui ont été commises.

L'autrice vient de recevoir le Prix des Racines et des mots à Lille ce 5 décembre 2020 et coïncidence inattendue, l'autrice fuyant le Rwanda à 15 ans a été accueillie à Lille (le jury l'ignorait). Elle dédicacera son livre à la nouvelle librairie VO, rue Gustave Delory à Lille le 12 décembre.

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Tous tes enfants dispersés

Ouvrir un livre dont on sait qu’il trouve ses racines dans la mémoire du Rwanda des années 90 n’est jamais anodin et ne se fait pas sans une certaine appréhension mâtinée de la culpabilité d’être Français(e). L’atrocité des images évoquées, la violence des souvenirs convoqués figent les capacités intellectuelles de celui qui les reçoit dans l’horreur, l’empêchant de saisir, par-delà le sang et la chair meurtrie, l’amputation des âmes, la douleur héritée et transmise, la vie qu’il faut poursuivre lorsqu’on vous l’a laissée. Or, c’est l’une des grandes forces de Beata Umubyeyi Mairesse que de venir saisir son lecteur avec douceur mais fermeté et de le mener, d’une écriture sensible, élégante et affirmée entre les écueils de cette mémoire encore endolorie de plaies béantes, de rendre à ce pays une réalité, une proximité, une vie que l’on rechigne souvent à lui imaginer. A travers l’histoire de Blanche, sa narratrice, fille, femme, métisse, amoureuse et mère, elle nous invite à un voyage philosophique et presque apaisé qui tente de remonter aux sources de ces liens qui la font ce qu’elle est, avec cette douleur-là, inscrite quelque part, gravée pour toujours, portée pour toujours, mais qui ne saurait en aucun cas la définir entièrement. Au fil des pages, elle rassemble peu à peu ses souvenirs, les bons comme les mauvais, comme autant d’enfants dispersés aux quatre coins du monde et de l’Histoire, brossant au passage le portrait d’une femme qui semble familière, universelle et symbolique, une femme résolument inscrite dans sa lignée et dans la vie.
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Tous tes enfants dispersés

Beata Umubyeyi Mairesse s’est servi de son expérience puisqu’elle a fui le Rwanda en 1994 mais pour une fois j’ai senti la romancière bien plus que la chroniqueuse.

Ce récit est à trois voix. Blanche, la jeune métisse qui a fui en 1994 pour échapper au massacre, parle à sa mère. Immaculata, cette mère qui a par miracle échappé aux massacres, parle à son fils qui n’a pu supporter le quotidien au retour de ses années de guerre. Dans les derniers chapitres Stokely, le fils de Blanche né en France, voudrait comprendre.

Beaucoup de thèmes dans ce roman, la nostalgie du pays de l’enfance, une histoire familiale compliquée avec ses secrets et ses non-dits, des problèmes de transmission, de négritude, d’exil. C’est la difficulté de vivre entre deux monde, deux civilisations. L’enfant né en France est à la recherche de ses origines très cosmopolites. L’auteure parle aussi des difficultés de reconstruction du pays et des marques indélébiles du génocide sur les Rwandais. Le ton est juste, l’écriture sobre et distanciée.

C’est poignant et ça fait réfléchir de lire sous la plume de Beata Umubyeyi Mairesse que le rêve d’Immaculata c’est que sa fille métisse épouse un blanc de blanc pour que la descendance se dilue de plus en plus.
Lien : https://ffloladilettante.wor..
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