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Citations de Bernard Berrou (70)


Avant Goulien, j'ai vu tout à coup un chevalier errant progresser dans le soir. Il ne portait pas de justaucorps de drap fin, mais avait revêtu un bleu de travail délavé. Pas de heaume sur le crâne, juste un béret basque. Non plus de bouclier fixé à son bras, ni de lance à la main, mais c'est bien Don Quichotte que je voyais en chair et en os. Il donnait des éperons à un cheval décharné, haut sur pattes, qui trottait résolument vers les éoliennes. Les raisons de s'attaquer à ces géants ne devaient pas lui manquer. Deux cents mètres plus loin, j'ai compris où il se rendait. Un troupeau de vaches broutait autour des éoliennes dans un enclos vaste comme six terrains de football. A part ça, la campagne est à peu près complétement vide. Le mérite des éoliennes de Goulien est de ventiler l'atmosphère en dispersant instantanément le méthane dégagé par le pet des vaches, pour un résultat final qui ne change en rien le réchauffement climatique.
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A cette époque l'oeil était affûté pour l'ombre. Le temps paraissait plus long dans l'ombre et le remplissait de milliers d'instants qui nourrissaient la vie intérieure. De l'obscurité pouvait naître une sage hébétude. Alors la lueur vacillante de la lampe à pétrole ou celle dansante de l'âtre apprivoisaient les ombres et rassuraient les âmes sensibles.
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Sans donner des chiffres précis, l’île a détenu, et détient sans doute encore beaucoup de records mondiaux par nombre d’habitants : ceux du plus grand nombre de prêtres, d’émigrants, de musiciens, de pubs, et pour son malheur, celui de la plus longue oppression dans l’histoire des peuples… Et si l’on considère la quantité de châteaux en ruines, de vestiges préhistoriques, de petites routes, de murets de pierre, de cimetières abandonnés, de litres de bière engloutie, de moines qui se sont répandus en Europe, de combattants de l’ombre, de célibataires, de rêveurs mythomanes, de bavards géniaux, et de prix Nobel de littérature, elle doit certainement arriver en tête.
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"Ce que je garde au fond de mes poches, ce sont les tessons de bouteilles. Incongrus, déplacés sur la plage, ils sont abrasés par le sable qui les rend opaques et en adoucit les angles. Polis par les marées, ils perdent leur agressivité, leur incivilité manifeste, jusqu'à se confondre avec les cailloux dont ils partagent l'humble condition minérale."

Verres de mer - Gwenaële Robert
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"Avant de rentrer à Paris, j'ai décidé de faire un détour par Pouldreuzic où Pierre-Jakez était né et où il avait passé son enfance. J'imaginais que je verrais sur le pas de sa porte Marie-Jeanne Le Goff, sa mère, harnachée en Bretonne et grandie par sa coiffe bigoudène, une coiffe empesée dans les règles et qui ne serait pas de travers. (...)
Naïveté ! Rien de tout cela, bien sûr, n'est arrivé. J'ai garé la voiture sur une place balisée et bétonnée, j'ai affiché docilement le disque de stationnement et j'ai déambulé dans des rues vides devant des portes fermées. Je suis donc repartie sans avoir pu poser "ma" question : "A part la coiffe et le chapeau rond, c'est quoi, être breton ?""

Un peu de l'âme bretonne - Elisabeth Laureau-Daull
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Certes, le changement du corps n'est pas le changement d'âme. On compenserait même cette altération du physique par ce qu'il est coutume d'appeler la sagesse, l'expérience, ou le charme de l'âge mûr... Mais le constat est impitoyable: les autres nous perçoivent seulement à travers le visage que nous leur montrons en l'instant. On ne peut se dérober à ce face à face, cette implacable réalité que Borges appelle l'éternité de l'instant. Rien ne disparaît plus vite dans notre mémoire que les visages passés que nous croyions pourtant avoir archivés. Seules les photos nous les rappellent au point d'être étonné de les voir aussi jeunes. Celui qui vous fait face, quand bien même il vous aura accompagné depuis des dizaines d'années au quotidien, que ce soit au travail ou dans votre vie familiale, aura oublié les visages que vous aviez il y a cinq ans, encore plus celui d'il y a vingt ans. Il réagit sous des impressions visuelles immédiates. Il vous dévisage en quelque sorte. Et dans ce cas c'est l'attirance ou la répugnance qui sont les sensations les plus fréquentes. Un visage laisse rarement indifférent, il vous séduit ou bien il vous déplaît. C'est bien là une forme de trahison.
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Qu'y a-t-il de commun entre le visage d'un homme de vingt ans et celui qu'il sera à cinquante, trois décennies plus tard ? Le même fond dans les yeux, quelques expressions inquiètes ou ironiques, des éclairs d'intelligence, un soupçon de candeur, un sourire dont le dessin aura conservé une vague ligne qui lui appartient en propre. Pour le reste, le temps aura déjà fait son oeuvre sur l'enveloppe extérieure, un nez plus épaté, les cheveux plus clairsemés, une peau ternie qui se boursoufle autour de quelques rides, je ne parle pas de la vivacité du regard, du timbre de la voix. Des masques successifs aussi nombreux que les jours qui passent ne cessent de se substituer irrémédiablement les uns aux autres pour nous modifier.
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La marée est haute désormais. L'eau salée ruisselle sur nos corps rincés par l'effort. Malgré le vent, nous n'éprouvons pas le besoin de nous essuyer. Nous nous abandonnons au spectacle de la mer et à la caresse vivifiante de l'air iodé. Je comprends ici tout le sens de la phrase de Mircea Eliade " Le sacré n'implique pas la croyance en Dieu, ou en des esprits, c'est l'expérience d'une réalité et la source de la conscience d'exister dans le monde."

La cale du bonheur , par Sébastien Le Fol
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"L'arrivée du Rock'n'Roll, fin des années cinquante, a été fondamentale dans ma vie. De là l'idée de créer des musiques, des chansons, des arrangements en profitant de son apport. Ceci a déterminé toute ma démarche et ma "carrière" professionnelle commencée en 1966. La chance était que mon goût le plus spontané et sincère allait pouvoir aussi servir ma cause : en finir avec le complexe d'infériorité qui empoisonnait une majorité de mes compatriotes. Aussi bien artistiquement que stratégiquement, il fallait donner à la musique bretonne l'image d'une musique à la pointe de la modernité."

Breizh au cœur - Alan Stivell
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"Me reviennent les dires d'une amie rennaise : "Ma belle-mère, brestoise, ne vient jamais à Rennes. "Pour quoi faire ? Il n'y a que des rues ! Tu prends une rue, tu tombes sur une autre rue, à quoi bon toutes ces rues ? Y'en a pas une qui va à la mer !""

Et voici bien ma terre... - Marie Le Drian
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"S'il fallait évoquer chaque province ou région française par un seul mot ou un seul nom, je dirais par exemple : Alsace choucroute, Nord terrils, Bourgogne vin, Normandie vaches, Auvergne volcans, Berry George Sand, Landes pins, Vendée chouans, Alpes montagne, Provence cigales... Et Bretagne : religion ! Oui, la Bretagne c'est une terre profonde qui monte au ciel en faisant un clin d’œil perpétuel à la mer... Les jeteurs de sort berrichons qui ont toujours affaire au diable ne peuvent pas lutter avec nos korrigans qui sortent des fougères, enfants impertinents du mariage des druides avec les fées."

Une terre profonde qui monte au ciel - Philippe Chevallier
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Les anciens se souviennent du ferraillement de la micheline sang et or Carhaix-Guingamp qui s'arrêtait quelques minutes plusieurs fois par jour à la gare de Pénity, située à quatre kilomètres de Carnoët. Par miracle, la ligne a été maintenue. Seule différence, le train ne s'arrête plus que sur demande. Sous la marquise on peut lire: "Arrêt facultatif. Pour demander l'arrêt de l'autorail, veuillez faire signe au conducteur." On imagine aisément l'arrivée haletante d'un voyageur levant le bras et le coup de frein impétueux du conducteur qui l'aperçoit au dernier moment. C'est le privilège de la lenteur de pouvoir ainsi tisser des relations occasionnelles qui transgressent les normes et rapprochent les gens dans une sorte de confraternité improbable. Pendant que des TGV sillonnent le pays à trois cents kilomètres à l'heure, on pourrait rester longtemps assis sur le quai de la gare de Pénity, tel Godot attendant on ne sait quoi, sous cette humble marquise de la taille d'un abribus, à rêvasser en écoutant les gouttes de pluie tambouriner sur le toit de la tôle.
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Galway est la porte de l'ouest irlandais qui demeure l'un des derniers espaces de liberté en Europe. Ceux qui en rêvent le plus, et sans doute le mieux, sont ceux qui en reviennent.
À peine ai-je quitté ces confins occidentaux de l'île des Saints, que j'en éprouve le regret comme si je portais le deuil récent d'un être cher.
Le Connemara, comme le Mayo, dégagent un fort coefficient émotif. Dans ma mémoire, je garde le souvenir des ciels vibratiles aux traînées d'ombre et de soufre sur l'horizontalité en hachures qui précède la mer.
Je me suis souvent laissé perdre dans le lacis des murets sur des sentiers qui descendaient et s'éparpillaient sans raison. Même en étant là depuis longtemps, devant l'unité confuse des lieux, il m'a fallu admettre que quelque chose m'avait toujours échappé, et était demeuré inaccessible.
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C'est un matin de brume comme je les aime, propice, selon le baromètre psychique, à la concentration et à la méditation. Mais, comme l'on sait, la météorologie dans ces parages n'est jamais uniforme. En ce moment surtout, la brume cède subitement à des effets de ciels époustouflants.
Kenneth White
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Les vrais coupables ce sont les violeurs, les pères ou les cousins incestueux, et les familles qui, un jours avaient jeté à la rue ces femmes enceintes. (...) C'est le pays tout entier qui est coupable pour tout vous dire.
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"On ne voyait nulle part la mer. "Mais elle est là, affirma papa comme déjà je protestais, écoute !" En effet, on entendait alentour dans le noir comme une étrange respiration, haletante, comme s'il y avait là, invisible, un géant qui soufflait et ahanait. "Et sens, chuchota mon père, c'est l'odeur des algues !""

Un goût du bonheur - Marie Sizun
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"Les souvenirs sont comme les cailloux du Petit Poucet. On les égrène sur nos routes incertaines avec l'illusion qu'ils nous permettront de revenir en arrière, qu'il suffira de les suivre pour retrouver l'éclat de l'enfance, son soleil intact sur nos vacances."

Verres de mer - Gwenaële Robert
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"Concarneau est une ville laborieuse entre les marins en mer, la criée dans la glace de minuit à 6-7 heures du matin et les femmes à l'usine (souvent des conserveries de sardines), les réjouissances, peu nombreuses, mais l'avant-dernier dimanche d'août, c'est fête !
Ce sont les Filets Bleus, la plus ancienne "fête folklorique" de Bretagne, c'est un défilé de coiffes (celles de Fouesnant, Pont-Aven sont les plus belles), de costumes, un éblouissement de couleurs (n'est-ce pas Plougastel-Daoulas ?), un carrousel de danses (de la gavotte au jabadao, en passant par l'an-dro), le tout scandé par les binious et les bombardes qui racontent notre vie, nos joies, nos labeurs, nos misères, nos facéties, nos espoirs (oh ! An Alarc'h), et nos malheurs (oh ! Maro Ponkalleg). C'est la Bretagne qui chante, qui célèbre ses racines, l'unicité de sa communauté. C'est la fête de la Bretagne."

La Bretagne, pour moi, c'est Concarneau - Jean Picollec
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"La Bretagne souvent ne devient "Bretagne" que si l'on s'en s'éloigne. Tout diffère selon que l'on y vive ou que l'on en rêve."

Et voici bien ma terre... - Marie Le Drian
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"Et je sais aujourd'hui ce qu'a pour moi la Bretagne de singulier : ce sont ses lumières et les changements qu'elles imposent à l'humeur comme au rythme de nos jours.
On ne résiste pas aux lumières bretonnes. Lentement, elles s'imposent par leur douceur et leur force, leur subtilité comme leur violence, leurs fluctuations et leur permanence.
Avec elles, tout change, rien ne bouge et c'est nous qui en sommes modifiés puisque nous en sommes baignés. "

Lumières - Stéphane Hoffmann
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