Citations de Carl Gustav Jung (2497)
Il faut sans doute que je laisse venir ces pensées. A quoi servirait-il de les refouler -elles reviendront- mieux vaut avaler ce fade breuvage plutôt que le conserver dans sa bouche.
Le Serpent m’enseigne la différence d’essence inconditionnelle des deux principes en moi. Si je regarde depuis la pré-pensée vers le désir, je vois tout d’abord l’effrayant Serpent venimeux. Si depuis le désir, je ressens la pré-pensée, je ressens tout d’abord le Serpent froid et cruel. Le serpent est l’essence chthonienne de l’homme dont il n’est pas conscient. Sa nature change selon les pays et les peuples, car elle est la dimension secrète qui afflue vers lui depuis la terre-mère nourricière.
Le Diable est un élément mauvais. Mais la joie ? Que la joie comporte aussi le mal en elle, tu t’en aperçois quand tu la poursuis, car tu tombes alors dans le désir, et du désir directement en enfer, dans ton enfer qui t’est propre et qui pour chacun prend une tournure différente.
Lors de mon arrangement avec le Diable, il me prit une part de mon sérieux, et moi une part de sa joie. Cela me donna du courage. Mais si le Diable a gagné en sérieux, il faut se tenir prêt à tout. C’est toujours chose risquée que d’accueillir la joie, mais elle nous conduit à la vie et à sa désillusion dont est faite la totalité de notre vie.
La pré-pensée est ce qui engendre, l'amour, ce qui conçoit. Tous deux sont au-delà de ce monde. Ici se trouvent l'entendement et le désir, le reste, nous nous contentons de le pressentir. Ce serait folie de prétendre qu'ils sont en ce monde. Autour de cette lumière, il y a tant d'éléments énigmatiques tortueux et insaisissables comme des serpents. J'ai reconquis la puissance en allant la chercher dans les profondeurs, et elle est passée devant moi comme un lion.
(Le Livre Rouge)
Le Diable est en tant que contradicteur ton propre autre point de vue, qui te met à l’épreuve et qui dépose des obstacles sur ton chemin, là où tu peux le moins t’en servir.
Prendre le Diable en considération ne signifie pas passer dans son camp, sinon l’on est possédé par le Diable. Cela signifie bien plutôt : tenter de s’arranger. Par là, tu prends ton autre point de vue en considération. Ainsi, le Diable perd un peu de terrain et toi aussi. Et cela pourrait être bon.
Vous savez par vos poètes que ceux qui sont sérieux, quand ils cherchent des yeux, dans leur attente, les choses des profondeurs, reçoivent en tout premier lieu la visite du Diable de leur joie printanière.
- […] La vie n’exige aucune gravité, au contraire, on traverse mieux la vie en dansant.
-Je connais la danse. Oui, s’il suffisait de danser ! La danse appartient au temps du rut. Je sais qu’il y a des hommes pour qui c’est toujours le temps du rut, et d’autres qui veulent aussi danser pour leur Dieu. Les premiers sont ridicules et les autres jouent à l’Antiquité, au lieu d’avouer honnêtement leur manque de possibilité d’expression.
La pluie est le grand flot de larmes qui viendra sur les peuples, le flot de larmes de la détente, après que le resserrement de la mort a accablé des peuples de sa monstrueuse passion. Elle est la déploration du mort en moi, précédant la mise au tombeau et la résurrection. La pluie est la fécondation de la terre, elle engendre le blé nouveau, le Dieu nouveau qui germe.
Es-tu par hasard un saint ? Probablement pas un philosophe, car la langue savante n’est pas ton genre. Mais un saint ? Plutôt cela, sans doute. Ta gravité respire le fanatisme. Tu dégages une atmosphère éthique et tu as une simplicité qui rappelle le pain sec et l’eau.
Devons-nous vouloir l’erreur ? Tu ne le dois pas, mais tu voudras cette erreur que tu tiens pour la meilleure des vérités, comme les hommes l’ont fait de tout temps.
Vous êtes des chrétiens, vous courez après les héros et vous attendez des rédempteurs qui, pour vous, doivent prendre sur eux la souffrance et vous épargner le Golgotha. Ainsi vous vous élevez une montagne de calvaires qui recouvre toute l’Europe. Si vous réussissez à faire de cette guerre un mal effroyable et à jeter dans ce gouffre d’innombrables victimes, cela est bon, car cela rendra chacun de vous prêt à se sacrifier lui-même. […]
Abreuvez-vous à satiété des horreurs sanglantes de la guerre, assouvissez votre faim de tueries et de destruction, alors vos yeux s’ouvriront et vous verrez que c’est vous-mêmes qui portez de tels fruits. […]
Puisse l’effroi devenir si grand que l’œil de l’homme se tourne vers l’intérieur, que votre vouloir ne cherche plus le Soi dans les autres, mais dans soi-même. […]
Lorsque je vis quelle fierté et quelle force emplissaient les hommes, quelle beauté rayonnait dans les yeux des femmes lorsque la grande guerre éclata, je sus que l’humanité était sur le chemin du sacrifice de soi.
Qui est dans l’amour est un réceptacle rempli et débordant, il attend impatiemment de donner. Qui est dans la pré-pensée, est profond et creux, il attend impatiemment d’être comblé.
L’amour et la pré-pensée sont en un seul et même lieu. L’amour ne peut exister sans la pré-pensée, et la pré-pensée ne peut exister sans l’amour. L’homme est toujours trop dans l’un ou dans l’autre. Cela est dû à la nature humaine.
Je suis en danger de croire que je suis moi-même d’une grande importance parce que je contemple ce qui est important. Cela nous fait encore et toujours perdre la tête, et nous transformons ce que nous contemplons en folie et illusion grotesque, parce que nous ne pouvons renoncer à l’imitation.
Les pensées croissent en moi comme une forêt qu’habitent toutes sortes d’animaux.
Si j’abandonne mon Soi, la faim me poussera à trouver mon Soi dans mon objet, donc dans ma pensée. C’est pourquoi tu aimes les idées raisonnables et ordonnées, car tu ne pourrais supporter que ton Soi se trouve dans des pensées en désordre, c’est-à-dire inadéquates.
Si par exemple on veut faire ou dire quelque chose et que, malheureusement, un complexe s’y oppose, alors on fait ou dit une chose différente de ce dont on avait l’intention. On en est tout simplement empêché, et même nos meilleures intentions sont détournées par le complexe, exactement comme si une personne ou un événement venait, de l’extérieur, s’opposer à nous.
Beaucoup trop ne veulent pas savoir où se trouve leur aspiration profonde, car cela leur paraîtrait impossible ou trop affligeant. Et pourtant l’aspiration profonde est le chemin de la vie. Si tu ne t’avoues pas ton aspiration profonde, alors tu ne te suis pas toi-même, mais tu empruntes des chemins étrangers qui t’ont été désignés par d’autres. Ainsi tu ne vis pas ta vie, mais une vie étrangère. Mais qui vivra ta vie si tu ne la vis pas toi-même ? […]
Se vivre soi-même, c’est être pour soi-même un devoir. Ne dis jamais que c’est un plaisir de se vivre soi-même. Ce ne sera pas une joie, mais une longue souffrance, car il te faut devenir ton propre créateur. Si tu veux te créer, ne commence pas par le meilleur et le plus élevé, mais par le pire et le plus profond.
Le manque de liberté me remplissait de tristesse. Souvent j'avais l'impression de me trouver sur un champ de bataille. "Te voilà à terre, mon cher camarade, mais je dois continuer ! Je ne peux pas, non, je ne peux pas rester ! Car "honteusement, une force nous arrache le cœur". Je t'aime bien, oui, je t'aime bien mais je ne peux rester".
Sur le coup, cela a quelque chose de déchirant. Oui, je suis moi-même victime, je ne puis rester. Mais le daimon ourdit les choses de telle sorte que l'on parvient à s'en tirer et l'inconséquence bénie fait que, en opposition flagrante à mon "infidélité", je reste fidèle à un degré insoupçonné.
Il est des valeurs plus hautes que la volonté du moi, auxquelles il faut apprendre à se soumettre
Te confondras-tu […] avec un arbre ou un animal, parce que tu les contemples et parce qu’ils existent avec toi dans un seul et même monde ? Te faut-il être des idées, parce que tu es dans le monde de tes idées ? Mais tes idées sont autant en dehors de ton Soi que les arbres et les animaux sont en dehors de ton corps.