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Citations de Caroline Hinault (167)


Le problème c’est que les gens comme Grizzly savent pas lutter avec les vraies brutes qui ont jamais touché une goutte de nuance de leur vie alors que Grizzly a appris à nager dedans depuis sa tendre enfance, à croire qu’il en avait toute une piscine à la maison. Grizzly sait peut-être beaucoup de choses mais pas que pour gagner, il faut pas craindre la violence mais l’aimer. Il continuait à parler, sans deviner la jouissance de Roq dont j’entendais pourtant déjà déferler la rivière souterraine. Grizzly déballait ses réflexions de viking de la pensée, de valeureux combattant à valeurs et principes sans comprendre que les idées de Roq étaient des tiques hargneuses qui lâchent jamais le bout de haine qu’elles ont accroché. (…)
J’aurais pu le lui dire à Grizzly, que la défaite des tendres tient tout entière dans la croyance qu’ils ont qu’on peut battre un chien enragé dans un duel au fleuret, l’espoir que la raison et la finesse pourront embrocher la violence avec de la dentelle de mots, tout ce fatras que Grizzly était en train de déblatérer à la gueule de Roq qui buvait du petit-lait noir.
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En tout cas, j’ai pensé sans le dire, ce qui est certain c’est que sur Solak, le temps on le voit mieux passer qu’ailleurs, chaque minute ressort bien nette à angle droit, pas comme chez les terriens avec leurs remparts d’activités qui leur bouchent la vue. Ici, le temps, on voit même que ça, c’est comme un troupeau de rennes dans la cour de la Centrale au printemps, on peut pas le rater.
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Il coulait. Je le savais bien moi, qu’il coulait, mais qu’est-ce qu’on pouvait y faire ?
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Au début, on s’est pas trop méfiés. On l’entendait chanter, marmonner. Et puis au fil des nuits, parce que c’était pendant la grande Nuit, faut croire qu’il a cédé à l’obscurité. Il a dû penser que jamais plus le soleil reviendrait et c’était plus qu’il pouvait supporter, Igor, cette vie de chien aveugle. En tout cas, il sortait presque plus de son baraquement et on l’entendait pleurer, crier, pousser seul des rires glaçants dans un délire incompréhensible. Ses paroles pour personne se déversaient en flots continus, on l’entendait se raccrocher aux mots comme à des balises de secours dans une cacophonie solitaire, un baragouin imaginaire.
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À Solak, on finit par croire que la peau, les muscles, tout ce petit monde chaud et souterrain du corps, ça existe plus, que c’est une légende de vivants et que même les entrailles sont figées, l’estomac rose en stalagmite, les intestins congelés. Malgré ses biceps bien vivants ou à cause peut-être, Igor a commencé à gripper. Il a dû sentir qu’il se cryogénisait de l’intérieur et s’est mis à causer tout seul. On le fait tous. Mais Igor parlait seul avec nous, c’était ça le problème, c’est par le langage, toujours, que ça commence.
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Mais pour un jeune soldat même d’esprit aventureux, la solitude, l’hiver et le Pater sont de sérieux ennemis. Y avait qu’à voir Igor. Pauvre Igor. La charpente pourtant taillée pour cette vie-là. Une mâchoire-équerre plantée à angle droit sous le bonnet, des biceps bien durs qu’on devinait bandés sous l’édredon de la parka, faut le faire deviner le nerveux d’un muscle sous les couches de laine et de duvet comme si le spectre de sa chair se baladait tranquille à la surface du manteau.
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Je me laisserai envelopper dans mon manteau de fausse sagesse et le froid finira gentiment son travail, la banquise comme un linceul brodé d’avance.
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Nous trois on le regarde faire, têtes en l’air, cou cassé. Ceux de là-haut continuent à dérouler le fil qui est plus qu’à quelques mètres du sol. Enfin la queue du câble caresse les poils de la toundra et le gamin pose deux guiboles flageolantes par terre, tête baissée sous la capuche fouettée par l’air. Avec le vent et le souffle de l’hélico, ça lui prend plusieurs minutes de se détacher du harnais, sans parler du froid qui engourdit les doigts.
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Sûr que ça s’oublie pas, le spectacle qu’il devine au bout du vide, là tout en bas, à la racine du vertige, le gros œil de la presqu’île qui le fixe mauvais sous ses paupières d’eau froide. Le câble coulisse, le gamin se balance dans les rafales, agrippé au filin comme un nourrisson à sa mère.
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Mais déjà le flot brun commençait à tarir, le corps à s’affaisser, hagard et bête devant sa propre mort. Le soulagement n’est jamais qu’un éclair. On ne sait jamais ce qui suit
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(...) la révolte qui dévorait de ses dents creuses jusqu’au regard sur le monde, le rendait inhabitable, hostile et inconnu ; la révolte giclait à l’air libre désormais, ensanglantait ses doigts, se répandait en fleuve sur les phalanges crispées qui tenaient rouge la garde, profond dans le gargouillis des entrailles à la résistance molle et au poids d’une lourdeur soudain incommensurable.
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(...) ; la révolte qui grondait depuis des zones lointaines, profondes et incarnées ; la révolte au reflet d’œil sombre, qui était sienne et pas seulement, qui avait tout infecté, corrompu et dont la seule issue était la mort imminente ou le crime, qui avait choisi le crime, avait cessé de prendre sur soi pour prendre dans l’autre, lui fendre l’abdomen et y tracer une voie par laquelle la colère allait enfin pouvoir perler, puruler, jaillir en un intarissable geyser de sang et de soulagement (...)
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(...)la révolte qui l’inondait quotidiennement d’une sève opaque et gluante et sur laquelle un couvercle de plomb appuyait comme sur un œuf de vautour qu’on empêcherait d’éclore (...)
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La lame creuse en vrille lisse. Sa mèche fore un trou rouge d’où la révolte de tout temps, du premier jour, celle jamais éteinte avec son noyau noir qui lui roulait au ventre depuis l’obscurité originelle, qui souffletait dans tout son corps, fulminait et tapait de son pied de taureau aux narines dilatées ; la révolte qui gangrenait tout, empêchait tout, ne pouvait se dire, exulter, jouir pour mourir (...)
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Ça fait longtemps qu’on a deviné que tant que les terriens auront pas une stalactite plantée dans la glotte, il préféreront pas comprendre. Il faudrait au moins que l’apocalypse leur morde les draps du lit pour les faire galoper cul nu vers la sortie.
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Caroline Hinault
Dans un endroit comme Solak où on est quatre bonshommes obligés de frayer ensemble sur un bout de presqu'île glacée, y a un contrat tacite pendant la grande Nuit. On frôle les autres, mais on cherche pas à entrer vraiment en contact avec eux. Faut surtout pas péter la fragile bulle que chacun a soufflée autour de lui et dans laquelle il s'est enroulé pour supporter l'égouttement des jours sans lumière et du froid indescriptible qui ont plaqué la vie au sol.
Tout est suspendu, cotonneux, si bien que même quand on se parle, on essaie de pas être trop pointu, histoire que la parole soit raccord avec le duvet de pénombre dehors et que nos conversations forment un tapis le plus doux possible, du nécessaire sans aspérités. (P.80)
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Mais, de toute façon, c'est trop tard, (...) ils ont donné nos visages à leurs peurs.
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Et je songerai, même si la panse du monde se gonfle chaque jour d'horreur et que le temps déroule sous nos pieds son suaire silencieux, qu'il existe des printemps.
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²Les mots du gosse, l'écriture fine sur les carnets de papier jaune. Ça tourne comme des bourrasques de neige, sans jamais retomber. Ça recommence sans cesse, ça s'enroule, ça fait vortex et ça m'emmêle violent le fil des pensées.
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Faut dire aussi qu'après des années sur ce maudit glaçon de presqu'île, selon que t'es resté plus ou moins animal, ça bout là-dedans comme une Cocotte-Minute qu'on aurait jamais dégazée, et je me demandais parfois comment faisait Grizzly, même s'il était le plus éloigné de nous sur l'échelle de la bête avec tous ses chiffres et ses mots qui lui grandissaient l'intelligence, contrairement à ce pauvre Roq que sa queue tirait vers le bas et que rien venait jamais remettre à sa place, ni paroles ni idées. Pour ça Roq avait sans doute pas rencontré les bonnes personnes. Suivi les mauvaises c'est sûr, et bifurqué tout seul à des carrefours où on fait pas demi-tour, c'est certain aussi.
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