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3.81/5 (sur 1137 notes)

Nationalité : France
Né(e) à : Nantes , 1961
Biographie :

Patrice Gain est ingénieur en environnement et professionnel de la montagne.

Il est l’auteur de quatre romans publiés aux éditions Le mot et le reste : "La Naufragée du Lac des dents blanches" (prix du pays du Mont-Blanc 2017, prix Récit de l’Ailleurs 2018), "Denali" (Prix Lire Élire Nord Flandre 2018), "Terres Fauves" (Prix du Festival du Polar de Villeneuve-lez-Avignon 2019) et, plus récemment, "Le Sourire du scorpion".





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Bibliographie de Patrice Gain   (6)Voir plus


Quelques questions à propos de Le Sourire du scorpion  


24/02/2020

Alors que Tom passe des vacances en famille et en pleine nature, il est loin de se douter de la tragédie qui va se jouer durant la descente en raft du canyon de la Tara, au Monténégro, guidée par un certain Goran. Il forme pourtant avec son père, sa mère et sa sœur un clan habitué à la vie nomade et au grand air, mais cette fois, en plus des éléments, le destin s`en mêle. Dans ce quatrième roman, qui succède dans sa bibliographie au très remarqué Terres fauves, Patrice Gain ausculte les répercussions de l`après-tragédie, le délitement de la cellule familiale, mais pose aussi la question de la confiance, et d`une certaine violence qui fait brutalement irruption lorsque deux univers entrent en collision. Nous en avons profité pour en savoir plus sur son rapport à la nature, à ses personnages, et comprendre quels sont les enjeux principaux de son travail d`auteur. Tout en évitant de trop "spoiler" l`intrigue de ce livre...

Pour écrire cette histoire, vous vous êtes librement inspiré d’un « fait divers » ayant eu lieu à Lyon (sans trop en dire). Pourquoi avoir choisi d’évoquer cet événement à travers ses répercussions, en choisissant de centrer le récit sur une famille affectée par ricochet ? Le livre aurait pu par exemple donner la parole à Goran Coban…

C’est le volet familial qui m’intéressait. Je me suis demandé comment on pouvait poursuivre sa vie après une telle expérience. C’est ce qui a déclenché l’idée de ce roman. J’avais envie de confronter mes personnages à cette situation bien particulière, de sa genèse jusqu’à la vie d’après...

Si la cohabitation entre Goran et cette famille semble au départ évidente, avec cette excursion en raft sur une rivière, le sentiment d’un carambolage entre deux mondes (nomades français, migrant serbe) et deux types de passés (faire « les saisons » en France, faire la guerre en Yougoslavie) s’installe peu à peu. L’idée du livre était-elle aussi de mettre en scène une forme de violence symbolique, souvent cachée à nos yeux au quotidien ?

Au fil du texte, le roman confronte clairement deux mondes, celui d’une existence bohème et celui… de Goran. L’idée était effectivement de mettre en place, dans la seconde partie du texte, une forme de violence qui n’est pas instantanément intelligible. La famille, ensuite la mère, particulièrement, participent à leur propre soumission. Tom, le narrateur, raconte les faits quelques années plus tard, il pose des mots d’adultes sur ces moments qui ont défait leur vie.



On note dans vos livres un certain goût pour la disharmonie entre l’homme et la nature, ou du moins une grande indifférence de celle-ci, à la fois majestueuse, hostile et brutale. Pourquoi avoir fait de la rivière Tara, au Monténégro, le cadre de ce drame ?

Je ne cherche pas à idéaliser la nature, je l’observe avec lucidité. Dans nos écosystèmes, les plus gros mangent les plus petits, c’est la chaîne alimentaire et c’est parfois très violent. L’homme y a sa place, bien sûr, mais sans lui, elle se débrouillerait fort bien. C’est bon de savoir où on met les pieds…

Pour la rivière Tara, c’est le lieu qui a primé. Je voulais faire évoluer mes personnages dans un endroit fort et qui soit en adéquation avec ce que je voulais développer. Le canyon de la Tara s’est tout de suite imposé. Il est situé dans le parc du Durmitor, les deux sont d’une beauté rare.

En tant qu’auteur, vous mettez vos personnages principaux dans des situations assez extrêmes, voire cruelles – on pense notamment à Tom, qui vit un passage à l’âge adulte plus que difficile, mais aussi à David McCae dans Terres fauves. N’est-ce pas trop dur pour vous, d’accabler vos personnages ainsi ?

Vous auriez pu ajouter Matt, qui est le narrateur dans Denali, à cette liste. Je cherche avant tout à introspecter mes personnages confrontés à des situations complexes. J’ai de l’empathie pour eux. S’il y a quelque chose de cruel dans mes textes, c’est que le monde fonctionne ainsi. Notez que je suis bien plus dans la retenue que lui, qui nous confronte régulièrement à une effroyable réalité. L’homme est ainsi fait. Il ensemence la planète de projets mortels sans trembler. Si la souffrance produisait une énergie exploitable, je ne doute aucunement que l’un d’entre nous aurait depuis bien longtemps eu l’idée de créer des « centrales à géhenne » pour produire de l’électricité. On aurait accommodé notre conscience avec. On le fait déjà avec un tas d’autres choses, un tas d’autres humains.

Un autre thème fort du livre semble être la solitude, suite au délitement de la cellule familiale. C’était déjà le cas dans Terres fauves (de manière allusive au moins), mais vous explorez ici plus avant cette idée d’une fratrie qui se brise, mais aussi de l’irresponsabilité parentale…

Il s’agit d’une famille bohème, mais aimante. L’irresponsabilité supposée ne conduit pas nécessairement à des drames. À un moment, la mère dit ceci : « Je disais à Luna, qu’avec Alex, nous charpentions un monde meilleur pour vous. Nous voulions tellement vous faire monter dans la sève des arbres... ».

Le délitement familial est un thème que j’avais précédemment abordé dans Denali, avec une approche de la fratrie bien différente. Dans ce texte, Tom et Luna sont proches, des enfants très liés, pas seulement par leur gémellité. Et pourtant ils s’éloignent l’un de l’autre, Luna surtout, sans heurt, sans désamour. Le contexte est très pesant. Tom subit des moments de grande solitude avec une forme d’abnégation. J’ai cherché à tisser une trame psychologique particulière. On est loin de la chasse à l’homme.



Vous faites référence à plusieurs reprises au livre Délivrance de James Dickey, adapté au cinéma par John Boorman. A-t-il été une source d’inspiration ? Y en a-t-il eu d’autres ?

Non, mais cette histoire est tellement connue qu’elle contribue à créer l’ambiance, et j’aime glisser entre les mains de mes personnages des livres que j’ai aimés. C’est surtout le contraste que je voulais saisir. Le contraste entre les moments agités et tragiques du canyon, que j’adosse aux journées béantes qui suivent. Pour ce qui est de mes sources d’inspiration, c’est souvent un détail, une bribe de conversation, un fait divers, qui les ensemencent.

Tom, le narrateur, a ces mots vers la fin du récit : « Je ne savais plus quoi penser. Je me demandais ce qui nous définissait : était-ce l’ensemble de nos actes ou seulement les conséquences de nos erreurs ? » Selon vous, Tom va-t-il être obligé de pardonner pour continuer à vivre ?

Je ne crois pas que le pardon fasse nécessairement partie d’un travail de résilience, mais il appartient aux lecteurs de répondre à cette question.


Quelques questions à propos de vos lectures

 

Quel est le livre qui vous a donné envie d`écrire ?

Aucun ne se démarque précisément, parce que je n’ai jamais cultivé cette idée… Assurément un distillat de tous ceux que j’ai adoré.

Quel est le livre que vous auriez rêvé d’écrire ?

Des souris et des hommes de John Steinbeck.

Quelle est votre première grande découverte littéraire ?

L`appel de la forêt de Jack London.

Quel est le livre que vous avez relu le plus souvent ?

Les conquérants de l`inutile de Lionel Terray.

Quel est le livre que vous avez honte de ne pas avoir lu ?

À la recherche du temps perdu.

Quelle est la perle méconnue que vous souhaiteriez faire découvrir à nos lecteurs ?

Le Chant du Pluvier, d`Amandine LaprunBéhé et Erwann Surcouf.

Quel est le classique de la littérature dont vous trouvez la réputation surfaite ?

Je ne peux pas répondre à cette question. En revanche, je me souviens avoir eu du mal avec L`Homme qui rit de Victor Hugo, mais c’était une lecture contrainte. Un rendez-vous raté en quelque sorte…

Avez-vous une citation fétiche issue de la littérature ?

« À mes yeux, monsieur et cher éléphant, vous représentez à la perfection tout ce qui est aujourd`hui menacé d’extinction au nom du progrès, de l’efficacité, du matérialisme intégral, d’une idéologie ou même de la raison, car un certain usage abstrait et inhumain de la raison et de la logique se fait de plus en plus le complice de notre folie meurtrière. Il semble évident aujourd`hui que nous nous sommes comportés tout simplement envers d’autres espèces, et la vôtre en particulier, comme nous sommes sur le point de le faire envers nous-mêmes »…Romain Gary. D’une actualité brûlante !

Et en ce moment que lisez-vous ?

Une journée d`Ivan Denissovitch d`Alexandre Soljenitsyne.

Découvrez Le Sourire du scorpion de Patrice Gain aux éditions Le Mot et le Reste



Entretien réalisé par Nicolas Hecht


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Citations et extraits (402) Voir plus Ajouter une citation
Tout passe par le silence.
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En chemin, nous avons croisé des boeufs musqués. Ils ont tourné vers nous leurs têtes massives et hirsutes. Leurs longs poils étaient ébouriffés par le vent.
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J'ai roulé au cœur de paysages aux langueurs acides .

Des champs de coton gavés de pesticides ,
des étendues de maïs aux sillons stériles
et des horizons d'épis de blé au garde-à-vous ,
pas une tête qui dépasse ,
dans lesquels on traquait le coquelicot soyeux ,
le bleuet des poètes
et les pensées égarées à grand coup d'herbicide .

Le ciel monochrome s'ennuyait ferme .
Des nuages couleur cendre ,
[...]
paysage sous chimio .
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L’éthique de nos parents était de dire que redouter quelque chose c’était l’attirer, que l’insouciance était le meilleur rempart contre les mauvais coups. Pourtant maman s’était mise à avoir peur.
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Les émotions me frappent souvent à l'improviste, avec une violence inouïe.
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Son île à lui, c'est le monastère, son océan, le silence sur lequel il espérait voguer sans émois. Mais il est parsemé d'écueils.
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Par les vitres, un paysage désolé défilait. Désolé, vide et oppressant comme l'était l'atmosphère dans l'autocar. Des montagnes abruptes couvertes d'une herbe rase. Un océan déchaîné omniprésent et un vent constant qui faisait rageusement tanguer notre refuge ambulant. Quelques moutons apparaissaient ici ou là. Une maison aussi parfois et je me demandais quelles fautes avaient bien pu commettre le propriétaire pour être condamné à vivre là.
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" Je suis un convalescent de la minute qui passe. "

Fernando Pessoa, Opium à bord (1993).

(page 9).
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La mer était noire et peinait à effacer ses emportements nocturnes. Les montagnes qui la bordaient étaient blanchies par une fine pellicule de neige tombée avec le lever du jour. Un paysage en noir et blanc qui s'accordait parfaitement avec mes afflictions nées de la nuit.
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Une vie n’est que l’empilement de tout un fatras de choses, bonnes ou mauvaises, goûteuses ou fades, et la dernière que l’on pose sur le tas fait s’écrouler l’ensemble et elle s’arrête là.
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