Citations de Cécile Coulon (1195)
Le week-end, nous passions des heures dans le parc adjacent, un ancien cimetière reconverti en lieu de promenade. À l'entrée, au-dessus de la grille, une rosace de pierres claires gravées annonce : "Nous avons été ce que vous êtes, et vous serez ce que nous sommes, pensez-y."
Jusqu'à l'entrée en sixième, le seul endroit susceptible de nous procurer de quoi muscler notre intellect est le salon familial. Dans les villages, il n'y a ni librairie, ni salle de cinéma, ni vendeur de journaux, de magazines, de bandes dessinées.
Le week-end, pendant les matchs, le village bat au son des hurlements des supporters, les plus jeunes restent sur le terrain de jeux pour enfants, les adolescents se réunissent sur le parking. Ils viennent voir jouer leurs frères, leurs parents, leurs amis ; l'apéro dure plus longtemps que le match lui-même.
Les vieux disent : "Une maison avec des araignées est une maison saine."
L'arrivée d'internet a changé la donne, mais les cartes sont restées dans les mêmes mains.
Le temps fait partie du jeu, la vie ne s'arrête pas à cause de la météo. "De toute façon, on vit avec les saisons. De toute façon, on vit dehors."
C'est drôle, dès qu'il y a de la vie quelque part, les gens ont peur du danger. Les gens ont peur de vivre. Ils se contentent d'exister, d'être là.
Malgré la proximité de ces trois villages, les habitants "du haut" ne connaissent rien de celui "du bas", alors qu'il suffit de traverser "celui du milieu", environ deux kilomètres plus loin, pour le rejoindre. Il n'est pas nécessaire de serrer fort pour tordre le cou à une idée reçue : non, tout le monde ne connaît pas tout le monde à dix kilomètres à la ronde.
La mémoire ressemble à une chambre froide défaillante ; incapable de conserver les souvenirs en état, d'ailleurs toujours émaillés par des débris d'imagination.
Sa pensée était floue, son raisonnement embrouillé.
- Angelin, quoi que vous me vouliez, ne me faites pas de mal. Je vous en prie.
Elle eut soudain si peur que ces mots sortirent d'elle sans qu'elle puisse les retenir.
Dès qu'elle ouvrit les yeux, elle sentit monter en elle un sentiment indéfinissable, où la peine et le soulagement rivalisaient.
Dans cette porte que son époux avait fermée sur elles, Aimée reconnaissait le geste du geôlier.
Derrière lui, repliée dans l'ombre, Aimée aperçut soudain la silhouette sévère d'Émeline.
Elle sourit. Jusqu'au bout, elle admirerait Claude. Tout, chez lui, lui rappelait ce qu'elle n'était pas.
- Tu vas me manquer, Claude.
- J'espère bien que je vais te manquer, sinon ça ne sert à rien que je parte ! dit-il dans un éclat de voix.
Sur ses parents planait la promesse d'une fin : ils s'enfonçaient dans la vieillesse.
Et voilà qu'elle parlait, plus que d'ordinaire, plus qu'elle n'avait jamais parlé depuis son arrivée.
- Vous êtes en voix, ce matin, dit-il en froissant nerveusement son journal.
Il la regardait, avec dans les yeux et aux lèvres cette douceur désarmante, ce sérieux d'homme seul depuis l'enfance.
Depuis des semaines qu'elle vivait au domaine, après avoir œuvré à trouver sa place, à s'y tenir droite, à s'en satisfaire, elle s'était écartée de la vie des autres. Tout à coup, le monde extérieur revenait à la charge.