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Citations de Christina Mirjol (83)


Et le temps qui est long dans ces cas-là, mon Dieu, qu'est-ce que le temps est long quand il n'y a plus d'espoir !
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Christina Mirjol
C’est à travers des formules toute faites, indifférenciées même des rêves de pacotille, que surgit le désir d’émancipation, dont on subodore l’échec à venir. Et c’est sur cet échange pathétique que se clôt la pièce Haute-Autriche [de Franz Xaver Kroetz], dans laquelle toute l’action est portée par le langage.
Ma première lecture de ce texte fut pour moi un choc au moment où je le découvris tardivement dans les années 2000. Il réactivait les questions que je me posais dans mes mises en scène, et venait percuter mes premiers pas en écriture. Exploiter la matière orale de toutes les façons possibles s’était imposé naturellement dans l’écriture de mon premier texte, Les cris. Le monologue intérieur, tel que Joyce l’avait sublimé dans Ulysse, les jeux polyphoniques, la voix rhapsodique telle que définie par Jean-Pierre Sarrazac, résultat de métissage des formes épique, dramatique et lyrique « cousues » entre elles, etc.. avaient été autant d’exercices à explorer pour ce texte. Mais, assez vite, c’est la voix, la voix métaphorique, représentative de l’Autre au singulier, propre à chaque Autre et irréductible à lui, abstraite en vérité, qui s’imposa dans mon écriture, au point que je puis dire que la « voix du texte », son style, inséparable de l’auteur et cependant « insaisissable » par lui-même, selon la formule de Jon Fosse, serait le résultat pluriel, polyphonique, de voix qui me sont étrangères.
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Sur les terres les plus riches et donc les plus enviées, se développe en effet de façon synchronique une très grande méfiance à l'égard de l'intrus.
(p. 19)
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Il est l'homme anonyme au destin criminel, sentinelle transparente que l'on montre du doigt, responsable, cela va de soi, de son mauvais départ, responsable de sa honte, coupable de toutes les fautes.
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Dix ans.
Tout ce qui nous arrive, les choses qui nous arrivent, entraine des petits cataclysmes, même les choses minuscules on ne s'en méfie pas. Elles nous blessent, elles nous blessent, continuent de nous blesser, et sont aussi cruelles qu'elles étaient ordinaires au moment d'arriver ; ainsi sommes-nous la proie de tristesses dérisoires...
(Incipit)
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Cri n°94
Un résistant de l'an deux mille :
Mon père n'avait pas de téléphone. Ni mon grand-père. Ni mon arrière-grand-père. Ni aucun de mes ancêtres. Je n'aurai pas de téléphone.

Mais monsieur, puisqu'on vous l'offre !... C'est gratuit !

Je n'en veux pas.
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Les uns et les autres ne pensent pas que quand ils sont partis, les choses restent. Ils ont besoin de changement et toujours de nouveautés. Leur insatisfaction est permanente, tu vois. Et nous qui sommes ici, perpétuellement logés au bord du même fossé, nous avons la rareté. Nous avons la rareté, dit l'homme à son caddie, sans l'ennui, tu comprends ?
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Comme il est bon alors de ne plus rien vouloir et d'être comme de l'eau qui coule, tout simplement, sur la pente d'un chemin… Et comme les choses soudain qui semblaient solennelles nous apparaissent naïves, plus du tout mystérieuses mais limpides comme l'eau claire. Plus rien à attendre d'agréable ou de déplaisant et rien n'arrivera plus, puisque c'est fait, maintenant, que peut-il se passer ?

(p. 37)
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Quand je chante aujourd'hui et qu'il pleut sur la ville, je suis content. Je raconte à l'eau ce que je fais ici. Je dis ce qu'il y a de sec qu'il faudrait irriguer. Ce qui est trop mouillé. Ce qui est trop pourri.
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Comme mes noces furent brèves. Et comme ma vie ressemble au jour qui se lève et qui finit. Le bouquet que je voulais t'offrir, mon amour, n'était pas un bouquet d'orties. Vois comme ce vase est pur et à la fois si simple, et comme il a gardé sans faillir l'eau de pluie et maintenu les fleurs entre ses parois lisses. N'aurais-je fait dans ma vie qu'un seul vase, fabriqué de mes mains avec la terre d'ici, que je serais content. Car il est bon de laisser à la terre un souvenir...
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Cri n° 69
Une institutrice
Je le répète pour la Nième fois, on ne meurt qu’une fois. Il y en a combien qui ont écrit mouRRir avec deux R ? Levez le doigt ! Combien de fois l’ai-je répété ? Un R, un seul R, on ne meuRt qu’une fois !
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Le réveil est ainsi, tous les jours de sa vie, une entrée dans le vif pour l’homme de la ruelle. Il doit recommencer, mettre son corps debout, extirper du néant son âme ratatinée. Il doit compter chaque jour sur l’état déplorable de ses pieds, repasser par l’exil, s’évader en sous-main, incessamment en fuite sur la ligne de départ et sans droit devant le mur. Il n’a pas de ticket, il est l’homme sans papiers, l’homme sans valises qui guette, un voleur, un fraudeur, un détrousseur de lits, qui glisse, qui se faufile, s’assoit clandestinement sur le terrain d’autrui, s’y installe, vole sa place, un saboteur en somme des dîners entre amis, des matinées tranquilles, du repos mérité, de la douceur de vivre, et un fauteur de troubles.
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Plus tard, quand nous rentrons, je dis à mon mari : Elles étaient bleues de froid.
Elles étaient presque noires à force d'être à l'air, et, des premières phalanges jusqu'au-dessus du poignet qu'on apercevait nus, frissonnaient. Il n'avait pas de sac, possédait uniquement un petit caddie rouge qui était devant lui comme un partenaire squelettique.
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Jean est mort.
Jean ?.. Quel Jean ?... Tu connais un Jean ?
Un clochard.
Un clochard ?... Je ne comprends pas.
Il n'y a rien à comprendre, il est mort.
Et tu sais son nom ?.. Toi ?... Il a un nom ?
Il s'appelle Jean.
Qu'est-ce que ça peut me faire, à moi ? Un clochard..
Jean... Mort.
Je veux que tu l'enterres... Comme ton fils.
Mon fils ? Un clochard ?
Il n'a pas de famille. Ce sera nous.
Nous ?
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Cri n°148

Une voix
Entendez-vous le cri des mouettes ? Maintenant qu'il fait nuit. Que tous les ports-avions dans la rade sont prêts. Que les navires de guerre, les bombardiers sont prêts. Que tous les sous-marins sont tapis dans l'eau noire. Le cri des mouettes est déchirant la nuit. Entendez-vous leurs longs appels aigus et répétés la nuit ? La nuit à la fin n'est plus qu'un cri, n'est plus qu'un bec.

(p. 253)
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Cri n°156

L'écrivain

Alors qu'il frotte ses pieds un soir sur son palier, un voisin sans histoire assiste malgré lui au drame épouvantable survenu ce soir-là au cinquième de l'immeuble, son étage. La femme de son voisin se jette par la fenêtre. Il la voit se jeter. Or, étant pris à partie en tant qu’unique témoin, le voisin en question, interpellé dans l'heure, devient pour ainsi dire l'otage du mari : un écrivain macabre travaillant jour et nuit sur un texte brûlant et autobiographique. Drôle d'histoire !

(p. 263)
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C’est pas bête ce qu’elle dit. Elle n’est pas bête, ma femme, elle sait compter du reste. Moi je suis socialiste, Socialo comme elle dit. Parce que ma femme et moi, on aime bien rigoler. Elle est maline, c’est vrai, quand je passe à sa caisse, moi je fais le client, et elle, sur sa machine, elle passe les commissions et elle fait la caissière. On fait semblant comme ça de ne pas se connaître et moi faire le client, j’aime bien, j’ai tout mon temps.
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Les uns et les autres vont trop vite, dit l’homme à son caddie, ils ne savent pas combien leur front peut être bas dans leur hâte et leur repli, leurs distractions communes et leur étourderie, ni qu’ils sont dépassés par des grues rectilignes, aussi fines qu’incassables, aussi plantureuses qu’indolentes et souples comme des girafes.
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Cri n°109
Une jeune fille
Voulant acheter pour moi des tulipes ce matin, j'hésite un bon moment devant le magasin : les violettes ou les rouges ?…
Les violettes en bouton ont de longues et belles queues mais qui tirent sur le jaune ; les rouges, elles, les ondes vertes mais courtes !
Tout en imaginant les queues démesurées dans le vase transparent, j'achète à contrecœur les rouges aux petites queues.
La fleuriste à présent étale sur le comptoir les tulipes écarlates et c'est à moi de payer.
Mon regret des violettes est alors à son comble et me rend subitement la vendeuse insupportable…

En arrivant chez moi, je dispose de bouquet au centre de la table. Je ne le regarde plus…

Les fleurs furent équitables. Leurs vaillantes petites queues ne fléchirent pour de bon qu'au bout du sixième jour.

(p. 195)
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Sous la voûte impassible, la nuit tire son rideau sur tous ceux qui gémissent. Ne reste à tous ceux-là que ce manteau ingrat tissé d’étoiles distantes, qui ne brille pour personne.
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