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Citations de Denis de Rougemont (78)


Il ne faut être ni riche ni pauvre, selon les mesures sociales qui ne valent jamais que pour "les autres".
Il faut simplement être libre selon la mesure de sa vocation.
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Denis de Rougemont
L'Europe unie n'est pas un expédient moderne, économique ou politique, c'est un idéal qu'approuvent depuis mille ans tous les meilleurs esprits, ceux qui ont vu loin.
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Non seulement je ne sens pas qu'ils se méfient de moi en tant qu'intellectuel ou "spécialiste", mais encore je devine qu'ils n'estiment pas que je puisse avoir une opinion plus avertie que la leur sur les sujets que je viens de nommer. Ils ne se doutent pas que c'est de cela précisément qu'un écrivain peut faire sa "spécialité". Et rien ne les étonnerait davantage que d'apprendre un beau jour que je m'intéresse à leurs "idées", à leur situation, à leurs problèmes, et que j'en fais parfois la matière même de mon travail ...
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Nous n'avons qu'une dizaine de disques : Bach, Mozart, Stravinsky, Honnegger.
De Milhaud, l'ouverture des Euménides, emportée de Paris sans avoir pu la jouer ailleurs que chez le marchand.
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Pédenaud est mutilé de guerre. Il boite. On lui a donné cette recette auxiliaire à titre de dédommagement. Salaire : 280 francs par mois "en comptant tout".
Sa femme fait des lessives. En été ils pêchent des palourdes et les vendent aux baigneurs. Bien entendu, je n'arrive pas à savoir combien ce petit commerce lui rapporte, "ça dépend des années".
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Simard, à propos de la récente baisse des salaires à la filature :
- " Je vous dis, c'est MIRACULEUX ce qu'on leur donne ! Sept francs par jour !" (Il voulait dire : scandaleux. Mais un miracle est un scandale, après tout. Tradition laïque.)
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Ça vous faisait mal à la gorge ?
- Non, j'ai cessé d'acheter des cigarettes, je fumais des jaunes comme celles-là, le jour où l'Etat les a augmentées de deux sous parce qu'il avait pris le monopole.
Ça n'est pas les deux sous, mais il faut se défendre !
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Je note, à l'usage d'un futur historien des mœurs, que la presse "de droite" reflète assez exactement la mentalité et les conversations de la bourgeoisie conservatrice, alors que la presse de gauche ne reflète nullement la mentalité ni les conversations populaires. C'est que les journaux socialistes et communistes sont dirigés par des bourgeois, ou par des candidats à la bourgeoisie, en tous cas par des gens qui recherchent la "considération" du peuple. D'où le ton haineux, typiquement petit-bourgeois, de certaines de ces feuilles. Je n'ai jamais retrouvé ce ton dans le peuple. S'il en paraît parfois, par accident, quelques traces ici ou là, c'est que le peuple de France lit trop de journaux, ne lit que cela, et finit par se croire "le peuple" tel que l'imaginent les bourgeois et leurs journalistes.
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Derrière la préférence accordée par l’auteur à la règle de chevalerie, il y a le goût du romanesque. Derrière le goût du romanesque, il y a celui de l’amour pour lui-même. Et cela suppose une recherche secrète de l’obstacle favorable à l’amour. Mais ce n’est encore là que le masque d’un amour de l’obstacle en soi. Et l’obstacle suprême, c’est la mort, qui se révèle au terme de l’aventure comme la vraie fin, le désir désiré dès le début de la passion, la revanche sur le destin qui fut subi et qui est enfin racheté.
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Pour l’Eros, la créature n’est qu’un prétexte illusoire, une occasion de s’enflammer ; et il fallait aussitôt s’en dépendre, puisque le but était de brûler toujours plus, de brûler jusqu’à en mourir ! Le nouveau symbole de l’Amour ce n’est plus la passion infinie de l’âme en quête de lumière, mais c’est le mariage du Christ et de l’Eglise. Un tel amour peut vraiment être réciproque. Car il aime l’autre tel qu’il est – au lieu d’aimer l’idée de l’amour ou sa mortelle et délicieuse brûlure. De plus, c’est un amour heureux – malgré les entraves du péché – puisqu’il connaît dès ici-bas, dans l’obéissance, la plénitude de son ordre.
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Parmi tant de facilités, de raffinements intellectuels ou voluptueux, de satiétés, l'un des besoin les plus profonds de l'homme demeure privé d'assouvissements, et c'est le besoin de souffrir.
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Notre sort […] demeure […], à nous autres Occidentaux, de devenir de plus en plus conscients des illusions dont nous vivons.
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On apprend plus d'une chose longuement contemplée que de milles aperçues au passage
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«  La passion est cette forme de l’amour qui refuse l’immédiat, fuit le prochain, veut la distance et l’invente au besoin, pour mieux se ressentir et s’exalter » .
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Le dogme fondamental de toutes les sectes manichéennes, c’est la nature divine ou angélique de l’âme, prisonnière des formes créées et de la nuit de la matière.
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Le mariage cessant d’être garanti par un système de contraintes sociales ne peut plus se fonder, désormais, que sur des déterminations individuelles. C’est-à-dire qu’il repose en fait sur une idée individuelle du bonheur, idée que l’on suppose commune aux deux conjoints dans le cas le plus favorable.

Or s’il est assez difficile de définir en général le bonheur, le problème devient insoluble dès que s’y ajoute la volonté moderne d’être le maître de son bonheur, ou ce qui revient peut-être au même, de sentir de quoi il est fait, de l’analyser et de le goûter afin de pouvoir l’améliorer par des retouches bien calculées. Votre bonheur, répètent les prêches des magazines, dépend de ceci, exige cela – et ceci ou cela, c’est toujours quelque chose qu’il faut acquérir, par de l’argent le plus souvent. Le résultat de cette propagande est à la fois de nous obséder par l’idée d’un bonheur facile, et du même coup de nous rendre inaptes à le posséder. Car tout ce qu’on nous propose nous introduit dans le monde de la comparaison, où nul bonheur ne saurait s’établir, tant que l’homme ne sera pas Dieu. Le bonheur est une Eurydice : on l’a perdu dès qu’on veut le saisir. Il ne peut vivre que dans l’acceptation, et meurt dans la revendication. C’est qu’il dépend de l’être et non de l’avoir : les moralistes de tous les temps l’ont répété, et notre temps n’apporte rien qui doive nous faire changer d’avis. Tout bonheur que l’on veut sentir, que l’on veut tenir à sa merci – au lieu d’y être comme par grâce – se transforme instantanément en une absence insupportable.

Fonder le mariage sur un pareil « bonheur » suppose de la part des modernes une capacité d’ennui presque morbide – ou l’intention secrète de tricher. Il est probable que cette intention ou cet espoir expliquent en partie la facilité avec laquelle on se marie encore « sans y croire ». Le rêve de la passion possible agit comme une distraction permanente, anesthésiant les révoltes de l’ennui. On n’ignore pas que la passion serait un malheur – mais on pressent que ce serait un malheur plus beau et plus « vivant » que la vie normale, plus exaltant que son « petit bonheur »…

Ou l’ennui résigné ou la passion : tel est le dilemme qu’introduit dans nos vies l’idée moderne du bonheur. Cela va de toute manière à la ruine du mariage en tant qu’institution sociale définie par la stabilité. (VI, 2)
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Peut-on prouver que la poétique arabe a réellement influencé la cortezia ? Renan écrit en 1863 : « Un abîme sépare la forme et l’esprit de la poésie romane de la forme et de l’esprit de la poésie arabe. » Un autre savant, Dozy, déclare à cette époque qu’on n’a pas prouvé l’influence arabe sur les troubadours, « et qu’on ne la prouvera pas. » Ce ton péremptoire fait sourire.

De Bagdad à l’Andalousie, la poésie arabe est une, par la langue et l’échange continu. L’Andalousie touche aux royaumes espagnols, dont les souverains se mêlent à ceux du Languedoc et du Poitou. L’épanouissement du lyrisme andalou aux dixième et onzième siècles nous est aujourd’hui bien connu. La prosodie précise du zadjal est celle-là même que reproduit le premier troubadour, Guillaume de Poitiers, dans cinq sur onze des poèmes de lui qui nous restent. Les « preuves » de l’influence andalouse sur les poètes courtois ne sont plus à faire. Et je pourrais ici remplir des pages de citations d’Arabes et de Provençaux dont nos grands spécialistes de « l’abîme qui sépare » auraient parfois peine à deviner de quel côté des Pyrénées elles furent écrites. La cause est entendue. Mais voici ce qui m’importe.

L’on assiste au douzième siècle dans le Languedoc comme dans le Limousin, à l’une des plus extraordinaires confluences spirituelles de l’Histoire. D’une part, un grand courant religieux manichéen, qui avait, pris sa source en Iran, remonte par l’Asie Mineure et les Balkans jusqu’à l’Italie et la France, apportant sa doctrine ésotérique de la Sophia-Maria et de l’amour pour la « forme de lumière ». D’autre part, une rhétorique hautement raffinée, avec ses procédés, ses thèmes et personnages constants, ses ambiguïtés renaissant toujours aux mêmes endroits, son symbolisme enfin, remonte de l’Irak des çoufis platonisants et manichéisants jusqu’à l’Espagne arabe, et passant par-dessus les Pyrénées, trouve au Midi de la France, une société qui, semble-t-il, n’attendait plus que ces moyens de langage pour dire ce qu’elle n’osait et ne pouvait avouer ni dans la langue des clercs, ni dans le parler vulgaire. La poésie courtoise est née de cette rencontre.

Et c’est ainsi qu’au dernier confluent des « hérésies » de l’âme et de celles du désir, venues du même Orient par les deux rives de la mer civilisatrice, naquit le grand modèle occidental du langage de l’amour-passion. (II, 9)
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Quelques rencontres avec des écrivains impressionnés par les Soviets, aussi par le cortège de la Bastille. Je leur demande ce qu'ils pensent de la brutalité tyrannique de Staline, des camps de concentration sibériens, des fusillades massives, de l'asservissement des paysans, de la puissance des trusts étatisés, des nouveaux maréchaux rouges, de la suppression totale des libertés culturelles et politiques, etc.
Ils me répondent que tout cela n'est rien, ou n'est que provisoire et simplement "tactique", et que l'idée qui préside à tout cela est si belle et si grande qu'elle mérite bien des sacrifices...
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Il se peut que la connaissance ne soit rien d’autre que l’effort d’un esprit qui résiste à la chute, et qui se défend au sein de la tentation…
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La fidélité dans le mariage ne peut pas être cette attitude négative qu’on imagine habituellement ; elle ne peut être qu’une action. Se contenter de ne pas tromper sa femme serait une preuve d’indigence et non d’amour. La fidélité veut bien plus : elle veut le bien de l’être aimé, et lorsqu’elle agit pour ce bien, elle crée devant elle le prochain. Et c’est alors par ce détour, à travers l’autre, que le moi rejoint sa personne – au-delà de son propre bonheur.
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