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Citations de Dima Abdallah (152)


Le jour où ses grands yeux noirs avaient regardé les miens pour la première fois, à peine une heure après qu'elle est née, j'avais déjà ressenti la même chose, un amour et un bonheur infinis, et une terreur immédiate devant l'ampleur de la tâche qui était désormais la mienne.
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Ca fait trente-cinq ans que je m'exerce à trier les cartons de ma mémoire. Je fais à chaque instant le grand écart entre ce qu'il faut oublier et ce qu'il faut se rappeler. Entre ce qu'il faut jeter et ce qu'il faut garder. Je fais ma sélection avec soin, j'ai mes critères à moi. (..) Je repense à ma grand-mère paternelle et je la revois dans son salon en train de trier les grains de riz. (...) Je repense à ses mains habiles et me dis que je trie mes souvenirs comme elle triait son riz.
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La misère, ce n'est pas de ne rien avoir, c'est n'avoir personne.
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Je vais noircir les pages de ce qui reste de moi. Je vais terrasser le manque d'air et anéantir le souffle court. Ecrire, c'est la révolte et j'en sus le maître. C'est la seule résistance à l'absurde. C'est le sens. C'est le tangible. C'est écrire l'absurde pour tuer l'absurde. Ecrire Sisyphe, c'est tuer Sisyphe.
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Si je ne parle pas beaucoup, c'est parce que je sais le poids des mots. Je sais que le choix et la place de chaque mot dans la phrase comptent. C'est pour ça aussi qu'elle parlait de moins en moins. C'est parce qu'elle sait, elle aussi, que les mots ont de l'importance, que les mots sont un outil sérieux, que chacun a un sens précis et que le sens importe. Elle sait que les mots ont des conséquences. (...) Je sais le poids de chaque mot, l'importance de la mesure, des consonances, l'harmonie du tout, l'écho des voyelles. La poésie supporte encore moins l'approximation et les bavardages que le reste. Un mot de trop et le rythme est perdu. Un mot de trop et la grâce fout le camp.
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J'espère qu'elle grandira comme poussent ces adventices. Ces hôtes de lieux incongrus, ces hôtes que personne n'a voulus, qui dérangent mais s'en moquent bien et n'en finissent pas de pousser. Celles dont on arrache sans relâche les racines parce qu'elles ne conviennent pas, parce qu'elles ont poussé au mauvais endroit au mauvais moment, mais qui prolifèrent ailleurs. Celles qui s'épanouissent sur des substrats improbables, qui s'acharnent à vivre dans les milieux les plus hostiles. Les plantes pudiques, celles qui ne cherchent pas à se faire bien voir, celles dont le charme est si subtil qu'il en est un peu secret. Celles qui triomphent toujours, qui poussent et repoussent à l'infini. Celles qui percent sous le béton, qui germent même sous le bitume. Celles qui se moquent bien des lieux inhospitaliers.
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Son mutisme s'est installé au rythme où le sens désertait nos vies pour laisser la place à l'absurde. Les mots quittaient sa gorge sur le tempo où je m'effondrais et où les corps tombaient. Les mots partaient avec les morts.
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Dans mille ans, des archéologues venus fouiller le toit du monde s'étonneront de trouver dans toutes les anciennes strates d'occupation toujours le même pollen, de la même famille de cerisiers. (...) Ils ne sauront jamais que ma grand-mère sème tellement de souvenirs, qu'elle sait si bien se rappeler, qu'elle a bouleversé toute la chimie de la terre des cimes et des vallées.
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Je ne sais pas ni quand ni comment on a glissé, jour après jour, semaine après semaine, année après année, vers la démence. Je ne sais plus ni quand ni comment elle a arrêté de me parler. Moi, tout ce que je sais, c'est que j'ai ouvert la fenêtre un matin et j'ai trouvé une guerre civile.
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La peur de chacun sera légitime, elle aura un objet précis, elle sera logique. Dans l'urgence de la situation, les angoisses de chacun s'effaceraient, on mettrait chacun toutes nos peurs intimes de côté pour, l'espace d'une nuit, avoir une peur commune, la même que celle de tous les autres gens. Pour une fois, on serait comme tous les autres gens. Les bombes, ça me fait moins peur que les fantômes.
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Je suis un cube qu'on essaye de faire rentrer dans le moule rond du matin au soir. Mes angles droits sont martelés à longueur de temps. La chair de mes coins est écrasée, mutilée, contusionnée, meurtrie, coup après coup.
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J’ai remarqué que la douleur de l’âme morte est semblable en un point à la douleur physique : quand on arrive à un certain seuil de douleur, la seule réponse du corps est de se recroqueviller, tête sur les genoux, et de faire le balancier. Comme les autistes. Ça ne diminue pas la douleur, mais c’est un geste archaïque. p.194
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La peur, c’est le sentiment qui prend le dessus sur toutes les autres émotions. La peur, c’est le signal de la présence d’un danger. Et le danger, ça s’affronte ou ça se fuit. Il n’y a pas de troisième voie, pas de demi-mesure, pas d’alternative. On fuit le plus vite possible ou on rassemble tout ce qu’on a de force et de moyens pour affronter. La peur, c’est fuir ou tuer. J’ai choisi de fuir. p.153
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Près de la bibliothèque, il y a un vieux monsieur qui fait la manche et dort dans la rue. Hier, je lui ai donné un de mes bonbons et il m’a souri et longuement remerciée. On a discuté un peu. Il y en a plein, ici, des gens comme lui. C’est ici que j’ai vu la vraie misère, la misère de quand on n’a plus personne. La misère, ce n’est pas ne rien avoir, c’est n’avoir personne. Et ce monsieur n’a personne, il me l’a dit. J’ai longuement réfléchi à la raison pour laquelle il y a tant de clochards dans un pays si riche. Je crois que s’ils laissent les gens dans la rue, ce n’est pas parce qu’ils n’ont pas les moyens de les aider, ni de les chasser. C’est pour les laisser là, à la vue de tous, comme un exemple, comme ce qu’il ne faut pas faire, comme un avertissement. p.112
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Je vais écrire parce que c’est la seule façon que j’ai de résister encore un peu. C’est mon combat, c’est ma guerre à moi. Je vais noircir les pages de ce qui reste de moi. Je vais terrasser le manque d’air et anéantir le souffle court. Écrire, c’est la révolte et j’en suis le maître. C’est la seule résistance à l’absurde. C’est le sens. C’est le tangible. C’est écrire l’absurde pour tuer l’absurde. Écrire Sisyphe, c’est tuer Sisyphe. p.109
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Les mots viennent quand il y a quelqu’un en face pour les entendre. Les mots viennent quand il reste un minimum de sens et il n’y en avait plus aucun. Son mutisme s’est installé au rythme où le sens désertait nos vies pour laisser la place à l’absurde. Les mots quittaient sa gorge sur le tempo où je m’effondrais et où les corps tombaient. Les mots partaient avec les morts. Plus le nombre de cadavres augmentait, plus elle se taisait. p.104
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Partir n’est pas une histoire de géographie. Douze ans de checkpoints, douze ans de fermeture d’école, douze ans d’égouts à même la rue. Douze ans de barricades, douze ans de gare-toi sur le côté, douze ans d’ouvre ton coffre, douze ans de donne tes papiers. Douze ans de crépuscule, douze ans de décadence, douze ans de déchéance, d’anéantissement de tout. p.102
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Je tiendrai le temps qu’il faudra, je tiendrai bon. Si ma boule devient trop grande et menace d’exploser, je tasserai tout plus fort tout au fond de ma gorge, puis jusque dans mes poumons s’il le faut, puis, si j’y arrive, dans mon ventre. Rien ne sortira. Je ferai comme d’habitude, je garderai tout ça verrouillé à double tour en moi, dans le contenant de mon corps, mon corps qui sera une forteresse. J’ai l’habitude. J’y arriverai, il le faudra bien. p.88
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Je me fais l’impression d’un cube qu’on essaye de faire entrer dans un moule rond et étroit. On a beau essayer le cube dans tous les sens, ça n’entrera pas, on a beau en limer même un peu les coins pour les arrondir, ça reste un cube. Je suis un cube qu’on essaye de faire entrer dans le moule rond du matin au soir. Mes angles droits sont martelés à longueur de temps. La chair de mes coins est écrasée, mutilée, contusionnée, meurtrie, coup après coup. Il ne sait pas lui, je ne veux pas lui dire. Il ne sait pas ce que c’est pour moi, de le laisser. p 66 et 67
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D’un jour à l’autre, il faudra bien que cette guerre finisse, ce n’est qu’une affaire de quelques semaines, quelques mois tout au plus. Il ne peut pas en être autrement, je n’ai pas le courage qu’il en soit autrement. Parce qu’elle ne grandira pas dans ça, ce n’est pas une option. Parce que six ans dans ça, c’est déjà trop. Je vais continuer à lui dire que rien de tout ça n’est grave, qu’elle a bien raison de ne pas pleurer, qu’on ne risque rien et que ça ne nous regarde pas, ce vaste bordel. Je me dis qu’il n’y a pas besoin d’en parler, demain, on ira acheter un pot de marjolaine pour remplacer celui qui a fané et on mangera une glace. p.33
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