Peut-être était-il judicieux d'établir une distinction entre les folles (ou androgynes) et les hommes vraiment hommes, mais Théodore voyait mal quels étaient leurs rôles respectifs. Si manifestement il était l'homme, l'idée qu'Elliott soit un substitut de femme lui était antipathique. Les allures d'éphèbe d'EIliott - qui parfois lui donnaient l'impression d'un retour à l'Antiquité grecque - étaient ce qu'il appréciait chez celui-ci, même s'il devait avouer qu'il avait été fasciné d'abord par l'ambiguité de son visage maquillé. Etait-ce parce que le mascara révélait que l'adolescent était prêt à tout, donc disponible ? Le maquillage manifestait qu'il s'offrait comme un objet, qu'il était à était à vendre, or un adolescent ne se vend pas. (Extrait de "Le Garçon maquillé")
Isn’t that what most people call a diary?
Je pensais que jamais un groupe (la communauté homosexuelle) n'avait connu un cycle aussi rapide--opprimé dans les années cinquante, libéré dans les années soixante, exalté dans les années soixante-dix, et anéanti dans les années quatre-vingt.
Je ne m'étais jamais senti bien avec les hommes; avec un homme gay j'ai toujours senti que quelque chose d'indéfinissable manquait, tandis qu'avec une femme JE SAVAIS ce qui manquait : un homme.
J’imaginais un amant qui viendrait m’enlever.il grimperait sur un sapin le long de ma fenêtre, rentrerait dans ma chambre et me serrerait dans ses bras. Ce qu’il disait et ce à quoi il ressemblait était vague, ce n’était qu’un spectre délicieux qui tourbillonnait autour de moi et mon visage rutilait d’une couleur de plus en plus vive. Le temps qu’il mettait à venir dura si longtemps que mon attente s’était transformée en nostalgie. Une nuit, je me suis assis à ma fenêtre et j’ai regardé la lune en lui portant un toast avec un verre à champagne rempli de jus de raisin. Je savais que la clarté immense et froide de la lune rejaillissait également sur lui qui était loin et aussi seul que moi dans une chambre distante. Je voulais qu’il ait la prescience de ma présence et de mes désirs futurs, et qu’il comprît que dans la chambre obscure de cette maison de compagne un garçon de quatorze ans était en train de l’attendre.
Il se recula et me regarda d’un air songeur et puis, sa langue aussi musclée que le pied d’un escargot me lavait le visage, le bout explorant ma narine, puis léchant l’arcade au-dessus de mes paupières et une seconde plus tard sur ma langue, et j’étais reconnaissant de la férocité de son désir parce que je me sentais porté par lui, exactement comme si je volais sur le dos d’une cigogne – oui, un de ces bébés qu’une cigogne apporte à grands coups d’ailes à ses parents.
Nous les p...., nous sommes tellement conscients de nous-mêmes, nos petites droguées par le pur plaisir de se sentir exister en public, que nous ne pouvons même pas traverser une pièce sans minauder et faire des manières. Ce n’est pas que, d’emblée, nous voulions paraître efféminés. C’est que nous nous servons d’un efféminement après coup comme d’un alibi pour cacher notre gêne, nos gestes fleuris mais plutôt mal coordonnés, l’angla bizarre de notre être…
Je lui ai dit une fois que je pensais que l’amour était une escroquerie et je lui ai répété quelque chose que j’avais lu, qu’il n’y avait pas d’amour dans l’ancien monde et qu’il n’était apparu qu’avec les troubadours.
Un homme aime les choses. Les filles adorent mais les hommes aiment. (page 199)
Je jetai mon dévolu sur le garçon qui avait le plus de succès à l'école. Je me disais que si je pouvais l'avoir comme ami, les gens seraient obligés de m'accepter (page 156)