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Citations de Eduardo Mallea (69)


Celui-ci, levant vers lui ses yeux patients, où la patience avait presque une qualité bovine, …
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Le lendemain matin, en entrant de bonne heure dans la fabrique, il reconnut quelques-unes des physionomies qu’il avait vues la veille dans le groupe; mais il le fit sans que son esprit s’y arrêtât, de même que sur le chemin on distingue la couleur d’une pierre au milieu d’un cailloutis confus.
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Il allait s’asseoir parmi eux à l’une des tables écartées, devant un grand verre de bière, avec sa cigarette et ses yeux noirs patiemment allumés
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Chaves n'entrait dans aucune maison, aucune de celles, du moins, où il pût entendre, dès le vestibule, ces exclamations familières, ces phrases connues et rebattues qui sont le miroir nostalgique de nos existences dans ce qu'elles ont de plus intime et de plus collectif. Il se mettait à marcher seul et prolongeait longtemps son exploration du monde inanimé.
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De même qu'il existe des vies qui ne s'épanouissent que dans la solitude, il y en a d'autres qui s'étiolent sans leur double. Agata, plus que quiconque, avait confusément besoin de se confesser et d'être réconfortée. Rien dans sa vie n'avait de sens s'il ne lui était pas loisible de le confier. Si elle ne le partageait pas, tout ce qu'elle avait vécu prenait l'allure de ces objets inutiles et poussiéreux que l'on conserve dans les galetas des vieilles demeures familiales.
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Leurs amertumes étaient dissemblables. L'une de mâle raté trépignant au beau milieu de son apocalyptique inefficacité, acculé par une réalité qui se refuse à tout compromis, qui se gausse et lui tourne le dos dans un éclat de rire. L'autre blessée; ne portant que le désert dans ses entrailles, le désert dans son âme, le désert dans son cœur, le désert dans son esprit, et traitée par cet homme comme un objet que l'on traine négligemment jusque dans les recoins des ténèbres et du mutisme. Lui, plein de rancœur; elle, blessée. Et tous deux jetés dans le tourbillon de la vie comme des pestiférés du temps et totalement dépourvus l'un vis-à-vis de l'autre de toute charité.
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Là-haut, il y avait le vaste ciel, vaguement laiteux. Dans cette poussière argentée, toutes les étoiles se confondaient. Montagnes et champs ne formaient qu'une seule même ombre. Le vent apportait un parfum de menthe, l'odeur pénétrante du suico. Là-bas, dans la vallée, les noyers et les peupliers de la Carolina affrontaient comme elle le vent glacé, et la rumeur de leurs feuilles, pareille à un frottement sifflant, parvenait jusqu'à ses oreilles. Ah ! mon Dieu, se livrer enfin à la vie, à la vie fleurant le vent, et sans entraves !
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Après cet épisode, une cruauté impitoyable s'était emparée d'eux. L'idée de se séparer leur paraissait inconcevable. Primitifs et de vieille tradition chrétienne, c'était pour eux quelque chose de trop moderne. Ils étaient unis, férocement unis par cette frustration, cette stérilité et cette rancœur triste et solitaire. Ils n'avaient ni famille ni projet en commun. Il ne leur restait plus qu'à supporter ce déluge, ce déluge de jours sinistres. Il n'y avait pas d'autre échappatoire, pas d'autre possibilité, pas d'autre chose à imaginer. Comme des bêtes, ils s'étaient raccrochés aux tâches matérielles qu'ils devaient accomplir.
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Assis tous deux sur les sièges avant du véhicule, perdus dans la vaste étendue désolée du paysage, ils avaient l'air si petits, si misérables, si gauches! De temps à autre, ils apercevaient une chouette perchée sur un poteau, un lièvre déboulait de façon impromptue sur le chemin, un engoulevent traversait le ciel en diagonale comme s'il allait les agresser. Ce n'est que dans ces moments-là qu'Ágata sentait la proximité de Dieu. L'immense campagne plate lui faisait voir l'énorme disproportion avec les hommes, leurs insuffisances et leur médiocrité. Dans ces étendues illimitées, on se croyait abandonné et éloigné de tout, et cependant, il semblait possible, en ces lieux et par un simple cri, d'accéder à l'éternité, au ciel universel. Aucune barrière entre soi-même et l'infini.
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Il n'existe de pire tourment que la fièvre interne des riches natures, lorsqu'elles jettent leurs regards vers l'extérieur, lorsqu'elles tournent leurs yeux vers les perspectives du désert.
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Il songeait qu'en été il pourrait se déchausser, mettre ses pieds dans la rivière et ajouter aux autres impressions la sensation de l'eau qui lui glisserait sur les chevilles. Il songeait que l'eau devait être gelée maintenant, et on n'apercevait jamais une silhouette humaine parmi les arbres de la rive opposée. Il songeait qu'en face, entre les chalets et les villas, tout n'était, sans doute, que paix.
(...)
Il songeait à tout le reste. À ces sept années d'isolement passées en compagnie de Pure, dans l'inquiétude, dans la crainte constante que le fil de la vie ne se brisât, les laissant, lui ou elle, solitaires au milieu des choses. Les choses ! Elles étaient plus vieilles et plus durables que la naissance ou la mort - avec leur monstrueuse docilité qui devient bientôt une tyrannie, obéissantes entre nos mains, mais despotiques à notre mort et régnant sur notre disparition.
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Une nouvelle fois il voulut essayer sur elle la magie des paroles. Que de réserves et de réserves il se remit à inventer ! C'étaient comme de grands lacs intérieurs, pleins de poissons auditifs inespérés. Et Pure semblait renaître, elle semblait retrouver le riche éclat de ses yeux en écoutant tout cela, et elle pensait qu'il n'était inspiré que par son amour pour elle et que ce sentiment donnait à un homme des facultés insolites et inouïes.
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Dans quels méandres, dans quels détours de paroles il se lançait alors ! Quelquefois il avait de la peine à s'y reconnaître et à retrouver le chemin du retour. Une rougeur soudaine l'empourprait; il levait les yeux pour regarder la tour de la Coopérative et il lui semblait que la tour se moquait de lui. Dans ces moments-là, il donnait à ses vaniteuses paroles une intonation plus voilée et contemplait les branchages bourgeonnants du parc comme si, dans leur estivale exubérance, ils avaient pu le comprendre.
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Au cercle, il n'avait pas d'amis intimes (...) mais tous les membres étaient des êtres familiers, des personnes communes, des gens qu'il voyait presque quotidiennement et dont il ne connaissait pas la vraie intimité, les souterrains de l'âme, la conscience, mais, tout au contraire, ces cachotteries, ces vantardises, ces défenses et toute cette machinerie du caractère que se fabriquent les hommes pour composer leur apparence publique. Ce qu'il y a de révélateur au Cercle, dans les réunions, c'est que les hommes ne vivent pas ces moments là avec leurs propres organes les plus consubstantiels, mais avec leur prestige extérieur, en agissant à partir de structures complexes, du quasiment fait main. Et savez vous ce que signifie le mot prestige? Fascination attribuée à la magie ou provoquée par un sortilège; tromperie, illusion ou apparence. Entraîné par la parole, on en arrive à oublier le sens des mots.
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Il s’était senti séparé de tout dans sa pensive individualité.
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Wickers l’avait provoqué; les autres aussi l’avaient provoqué. Comme s’ils ne parvenaient pas à admettre qu’il pût leur résister et agir en toute liberté. Ce que les gens craignent par-dessus tout, chez quelqu’un, c’est l’absence de crainte. Ils craignaient que Chaves ne fût capable d’agir sans crainte, librement.
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Qu'est-ce qu'une vie?

Rien de bien vaste! Le plus mesurable et le plus périssable de toute la création!

Parce que l'intelligence, le fait d'être un homme, la dignité que confère la pensée, tout cela n'allonge pas le temps, bien au contraire, cela le raccourcit, tout en multipliant à l'infini ce qui peut tenir dans chaque minute. Comme elle est longue la vie du scarabée, comparée à celle de l'homme qui, dès qu'il s'arrête pour penser, a cessé d'être dans le présent pour être bien au-delà, un peu plus près de la mort, et avec une fraction de vie en moins! C'est notre intelligence, bien plus que notre chair, qui nous rapproche de la mort. C'est notre raison qui nous prolonge jusqu'à nos limites.

Oui, le plus mesurable et le plus périssable de toute la création, c'est bien une vie!
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Une nouvelle fois il voulut essayer sur elle la magie des paroles. Que de réserves et de réserves de paroles il se remit à inventer! C'étaient comme de grands lacs intérieurs, plein de poissons auditifs inespérés. Et Pure semblait renaître, elle semblait retrouver le riche éclat de ses yeux en écoutant tout cela, et elle pensait qu'il n'était inspiré que par son amour pour elle et que ce sentiment donnait à un homme des facultés insolites et inouïes.
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Celui que nous avons quitté il y a trente ans, qui portait notre nom, qu'a-t-il à voir avec celui que nous sommes trente ans plus tard? C'est un autre être, d'une autre race -ou peut-être est-ce monstrueusement le même, sans solution de continuité, sans mutation, sans prodige.
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Dans le crépuscule de décembre, la ville solitaire qu'elle laissait derrière elle lui semblait être un fantôme vaincu, un cri d'agonie bloqué dans la gorge du temps. Bien des fois, elle avait songé qu'en cet instant précis elle ressentirait de la joie; mais ce qui pesait sur elle, à ce moment-là, c'était une étrange douleur. C'était comme d'abandonner l'être prostré dont l'immobilité et l'inertie nous ont enchaînés, mais dont nous ne nous séparons pas sans conserver des liens, et qui, alors que nous fuyons, nous retient toujours par son isolement mélancolique.
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