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Citations de Ernst Theodor Amadeus Hoffmann (214)


Marino Faliéri

Il y a bien long-temps, et si je ne me trompe, c’était au mois d’août de l’année 1354 ; le brave amiral génois, Paganino Doria, battit les Vénitiens, et surprit leur ville de Parinzo. Ses galères bien armées couraient des bordées dans le golfe de Venise, semblables à des bêtes de proie affamées qui vont et viennent pour mieux happer leur victime. Le peuple et la seigneurie de Venise étaient saisis d’un effroi mortel. Tous les hommes en état de marcher prirent l’épée ou la rame. Les troupes se rassemblèrent dans le port Saint-Nicolo. Les navires, les arbres, les pierres, tout fut employé pour encombrer la rade et empêcher l’approche de l’ennemi ; et tandis que le bruit des armes retentissait au milieu du tumulte, que les masses qu’on lançait à la mer réveillaient tous les échos du voisinage, on voyait sur le Rialto les agens de la seigneurie, le front chargé de sueur, le visage défait, offrir d’une voix tremblante des obligations à gros intérêts en échange de l’argent ; car la république était dans un état de détresse extrême.
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Antonio ne fut pas peu étonné lorsque, le jour suivant, Salvator lui décrivit dans ses moindres détails l’intérieur de Capuzzi.
— La pauvre Marianna, dit Salvator, est indignement tourmentée par ce vieil insensé. Il soupire et roucoule tout le jour ; et ce qu’il y a de pis, il chante pour toucher son cœur, et il chante des airs qu’il a composés lui-même. Outre cela, il est jaloux à en mourir, et il éloigne de cette pauvre fille tous les serviteurs qui, dit-il, pourraient se prêter à une intrigue. Chaque soir et chaque matin un petit monstre qui fait l’office de femme de chambre, se présente devant la pauvre Marianna. Ce spectre n’est autre que le petit Poucet, le Pitichinaccio, que Capuzzi force à s’habiller en femme. Quand Capuzzi s’absente, il ferme soigneusement toutes les portes, et un coquin qui a fait autrefois le métier de bravo, et qui est sbire aujourd’hui, monte la garde devant la maison. Il semble donc impossible d’y pénétrer ; et cependant je te promets, Antonio, que la nuit prochaine tu verras ta Marianna, et en présence de Capuzzi lui-même.
— Que dites-vous ? s’écria Antonio hors de lui : la nuit prochaine ! Cela est impossible !
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Le bonheur au jeu

Dans l’automne de l’année 182... les eaux de Pyrmont étaient plus visitées que jamais. De jour en jour l’affluence des riches étrangers augmentait, et excitait l’ardeur des spéculateurs de toute espèce qui abondent dans ces sortes de lieux. Les entrepreneurs de la banque du pharaon ne restèrent pas en arrière , et étalèrent sur leur tapis vert des masses d’or, afin d’attirer les dupes que l’éclat du métal séduit infailliblement, comme l’attrait dont se sert le chasseur pour prendre une proie crédule.
On n’ignore pas que dans la saison des bains, pendant ces réunions de plaisir, où chacun s’est arraché à ses habitudes, l'on s’abandonne à l’oisiveté, et que le jeu devient une passion presque irrésistible. Il n’est pas rare de voir des gens qui n’ont jamais touché les cartes , attachés sans relâche à la table verte et se perdre dans les combinaisons hasardeuses du jeu. Le bon ton qui veut que l’on risque chaque soir quelques pièces d’or , ne contribue pas peu non plus à entretenir cette passion fatale. Un jeune baron allemand, que nous nommerons Siegfried, faisait seul exception à cette règle générale. Quand tout le monde courait au jeu, et qu’il perdait ainsi tout moyen d’entretenir une conversation agréable, il se retirait dans sa chambre avec un livre, ou il allait se promener dans la campagne, et admirer la nature, qui est si belle dans ce pays enchanté.
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Le leçon de violon

J’étais à Berlin, très-jeune, j’avais seize ans, et je me livrais à l’étude de mon art, du fond de l'âme, avec tout l’enthousiasme que la nature m’a départi. Le maître de chapelle Haak, mon digne et très-rigoureux maître, se montrait de plus en plus satisfait de moi. Il vantait la netteté de mon coup d’archet, la pureté de mes intonations ; et bientôt il m’admit à jouer du violon à l’orchestre de l’Opéra et dans les concerts de la chambre du roi. Là j’entendais souvent Haak s’entretenir avec Duport, Ritter et d’autres grands maîtres, des soirées musicales que donnait le baron de B***, et qu’il arrangeait avec tant d’aptitude et de goût que le roi ne dédaignait pas de venir quelquefois y prendre part. Ils citaient sans cesse les magnifiques compositions de vieux maîtres presque oubliés qu’on n’entendait que chez le baron, — qui possédait la plus rare collection de morceaux de musique anciens et nouveaux ; — et s’étendaient avec complaisance sur l’hospitalité splendide qui régnait dans la maison du baron, sur la libéralité presque incroyable avec laquelle il traitait les artistes. Ils finissaient toujours par convenir d’un commun accord qu’on pouvait le nommer avec raison l’astre qui éclairait le monde musical du Nord.
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Lorsque la réputation de Salvator se fut répandue à Naples, à Rome, dans la Toscane, et même par toute l’Italie, lorsque les peintres qui voulaient plaire devaient tâcher d’imiter le style étrange de son pinceau, à cette époque même de méchans envieux faisaient naître des bruits fâcheux qui devaient obscurcir la gloire divine de l’artiste. On prétendait qu’à une époque antérieure de sa vie Salvator avait fait partie d’une bande de brigands, et que c’était dans cette société maudite qu’il avait pris les originaux de toutes ces figures féroces, fières, si fantastiquement costumées, qu’il plaça plus tard dans ses tableaux. On disait que les déserts sombres et affreux, les selve selvagge, comme les nomme le Dante, où il s’était tenu caché, étaient fidèlement reproduits dans ses paysages. Mais ce qu’il y avait de pire, c’est qu’on soutenait qu’il avait été entraîné dans la terrible et sanguinaire conspiration, tramée à Naples par le fameux Mas’Aniello, et l’on en racontait les particularités avec les plus petits détails.

Extrait de Salvator Rosa
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Au vingt-quatre décembre, la chambre du milieu et bien plus encore le salon qui y donnait furent formellement interdits aux enfants du médecin consultant Stahlbaûm.
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il n'en faut pas accuser mes yeux si tout me semble décoloré dans la vie ; car un nuage sombre s'est étendu au-devant de moi sur tous les objets, et ma mort seule peut-être pourra le dissiper.
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Il la précéda, et Marie le suivit jusqu'à ce qu'ils fussent arrivés devant l'armoire aux habits de la chambre du rez-de-chaussée ; là, ils s'arrêtèrent. Marie fut étonnée de voir ouverts les battants de cette armoire, ordinairement toujours fermée. Elle aperçut en premier la pelisse de voyage de son père, faite en peau de renard, et qui était accrochée sur le devant. Casse-Noisette se servit du bord de l'armoire et des ornements comme d'escaliers pour atteindre un gros gland qui, fixé à une forte ganse, tombait le long du dos de cette pelisse. Aussitôt qu'il eut fortement tiré cette ganse, un charmant escalier de bois de cèdre descendit d'une des manches de la pelisse. - Montez, s'il vous plaît, belle demoiselle, s'écrit Casse-Noisette. Marie monta ; mais à peine avait-elle atteint le haut de la manche et avait-elle dépassé le collet, qu'une lumière éclatante vint éblouir ses yeux et qu'elle se trouva tout d'un coup dans des prairies embaumées de mille délicieux parfums, d'où s'élançaient en gerbes de lumière des millions d'étincelles avec l'éclat des diamants. - Nous sommes sur la prairie de Candie, dit Casse-Noisette, mais nous allons bientôt passer cette porte. Et alors Marie, en levant la tête, aperçut la belle porte qui s'élevait sur la prairie, à quelques pas devant elle. Elle semblait faite de marbres nuancés de blanc, de brun et de rose. Mais Marie vit, en s'approchant, que tout cet édifice était composé de dragées et de raisins de Corinthe cuits ensemble, et Casse-Noisette lui apprit que par cela même cette porte qu'ils passaient alors était appelée porte de Dragées-Raisins-Secs. Les gens du peuple l'appellent fort mal à propos porte de la Nourriture des étudiants. Sur une galerie en saillie sur cette porte, et qui paraissait faite de sucre d'orge, six petits singes couverts de pourpoints rouges exécutaient la plus belle musique de janissaires que l'on pût entendre : de sorte que Marie s'aperçut à peine qu'elle s'avançait toujours plus loin sur des dalles de marbre de toutes couleurs, qui n'étaient autre chose que des tablettes de chocolat bien travaillées. Bientôt elle fut enveloppée des plus douces odeurs, qui se répandaient d'un arbre étrange qui s'élançait de deux côtés différents. Dans son feuillage sombre on voyait étinceler, avec tant d'éclat que l'on pouvait tout d'abord les apercevoir, comme des fruits d'or et d'argent suspendus aux branches de mille couleurs, et le tronc et les rameaux étaient ornés de tresses et de bouquets de fleurs, comme le seraient de nouveaux mariés et leurs joyeux convives un jour de noces. Et quand les parfums des oranges couraient comme zéphyrs volent, entendait bruire les rameaux et les feuilles, et le grincement du clinquant qui s'agitait résonnait comme une musique joyeuse aux accords de laquelle dansaient les petites lumières brillantes.


- Ah ! comme tout est beau ici ! s'écria Marie, heureuse et enchantée.

- Nous sommes dans la forêt de Noël, bonne demoiselle, dit Casse-Noisette.
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Frère Cyrille renferma le mystérieux coffret dans l'armoire où il l'avait pris et il me remit le trousseau de clefs, y compris celle de l'armoire. Tout ce récit avait fait sur moi une impression particulière ; mais plus je sentais germer en moi le désir secret de regarder l'étonnante relique, plus je faisais d'efforts pour l'écarter en pensant à l'avertissement de frère Cyrille. Lorsque je fus seul, je regardai encore une fois les saints objets qui m'avaient été confiés ; puis je détachai du trousseau la petite clef de la dangereuse armoire et je la cachai au milieu de mes papiers, dans mon pupitre.
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Nudité incongrue

«Honorable assemblée! Tout rêve est de l’écume: c’est là un vieux, très honnête et très solide proverbe allemand. Mais Ottmar l’a interprété si adroitement et de manière si subtile, que, tandis qu’il parlait, je sentais réellement monter dans mon cerveau les petites bulles dégagées de la matière et destinées à s’unir avec le principe spirituel supérieur. Toutefois, n’est-ce pas dans notre esprit que s’opère la fermentation d’où jaillissent ces parties plus subtiles, qui ne sont elles-mêmes qu’un produit du même principe? Je demande enfin si notre esprit trouve en lui seul tous les éléments nécessaires à la production de ce phénomène, ou si, d’après une loi d’équilibre, quelque mobile étranger y concourt avec lui? et je réponds à cela que la nature, secondée par tous les phénomènes qui lui sont propres, s’emploie moins à l’assister qu’à le laisser manœuvrer dans les vastes ateliers de l’espace et du temps, de sorte que, tout en se croyant son propre maître, il ne crée et n’agit en fin de compte que pour accomplir les fins qu’elle se propose. Nous sommes si intimement liés par des rapports physiques ou spirituels avec tout ce qui est extérieur à nous-mêmes, avec la nature entière, que le fait de nous en affranchir, en admettant même que ce fût possible, impliquerait la destruction de notre existence. La vie que vous nommez intensive est déterminée par notre vie expansive, dont elle est pour ainsi dire le reflet. Mais ce reflet nous apparaît comme recueilli dans un miroir concave, de sorte qu’images et figures se présentent sous d’autres proportions et offrent par conséquent des formes bizarres et inconnues, bien qu’elles ne soient que les caricatures d’originaux vraiment existants. Je soutiens hardiment que jamais un homme n’a imaginé ni rêvé aucune chose dont les éléments ne pussent se retrouver dans la nature à laquelle nous ne pouvons jamais nous soustraire.

«Abstraction faite des impressions extérieures et inéluctables qui émeuvent notre âme et la mettent dans un état de tension anormal, comme un effroi subit, une grande peine de cœur, etc., je prétends que notre esprit, sans la prétention de franchir les limites naturelles qui lui sont assignées, peut aisément extraire des manifestations les plus agréables de la vie cette essence volatile qui engendre, au dire d’Ottmar, les petites bulles dont se forme l’écume du rêve. Quant à moi, qui manifeste, surtout le soir, comme on voudra bien me l’accorder, une bonne humeur à toute épreuve, je prépare à la lettre mes rêves de la nuit en me faisant passer par la tête mille folies qu’ensuite mon imagination reproduit, durant mon sommeil, avec les plus vives couleurs et de la manière la plus récréative; mais je préfère à toutes les autres mes imaginations dramatiques.

— Qu’entends-tu par là? demanda le baron.

— Comme l’a déjà fait remarquer un auteur bien inspiré, poursuivit Bickert, nous devenons en rêvant auteurs dramatiques et acteurs par excellence dans la mesure où nous saisissons avec précision et dans leurs moindres détails des individualités étrangères qui se présentent à notre esprit avec une parfaite vérité. Eh bien, c’est la base de mon système: je pense parfois aux nombreuses aventures plaisantes de mes voyages, à maints originaux que j’ai rencontrés dans le monde, et mon imagination, en ressuscitant la nuit ces divers personnages avec tous leurs ridicules et leurs traits comiques, me donne le spectacle le plus divertissant du monde. Il me semble alors que je n’ai eu devant moi, durant la soirée, que le canevas, le croquis de la pièce à laquelle le rêve, docile pour ainsi dire à la volonté du poète, vient communiquer la chaleur et la vie. Je vaux à moi seul la troupe entière de Sacchi, qui joue la farce de Gozzi, peinte et nuancée d’après nature, avec une telle puissance d’illusion que le public, représenté lui aussi par ma personne, y croit ni plus ni moins qu’à la réalité.

«Comme je vous l’ai dit, je ne comprends pas dans ces rêves, pour ainsi dire volontairement amenés, ceux qui sont le résultat d’une disposition d’esprit exceptionnelle, due à des circonstances étrangères, ni ceux qui sont suscités par une impression physique externe. Ainsi tous ces rêves, dont presque chaque individu a quelquefois éprouvé le tourment, comme de tomber du faîte d’une tour, d’être décapité, etc., sont ordinairement provoqués par quelque souffrance physique que l’esprit, plus indifférent pendant le sommeil à la vie animale et ne travaillant plus que pour lui-même, explique à sa façon ou motive d’après quelque représentation fantastique, prise parmi celles qui occupent son imagination. Je me rappelle un songe où j’assistais à une soirée de punch en joyeuse compagnie. Un fier-à-bras d’officier, que je connais parfaitement, poursuivait de ses sarcasmes un étudiant qui finit par lui lancer son verre à la figure; il s’ensuivit une bagarre générale; et, comme je voulais rétablir la paix, je me sentis blessé à la main si grièvement que la douleur cuisante du coup me réveilla: que vois-je? ma main saignait réellement, car je m’étais écorché à une grosse épingle fichée dans la couverture.

— Ah! Franz! s’écria le baron, cette fois ce n’était pas un rêve agréable que tu t’étais préparé!

— Hélas! hélas! dit Bickert d’une voix plaintive : est-on responsable des maux que le destin nous inflige souvent en punition de nos fautes? Assurément, j’ai eu, moi aussi, des rêves horribles, désolants, épouvantables, qui me donnèrent le délire et des sueurs froides d’angoisse ...

— Ah! fais-nous-en part, s’écria Ottmar, dussent-ils réfuter et confondre ta théorie!

— Mais, au nom du Ciel! interrompit Maria d’une voix souffrante, n’aurez-vous donc pas pitié de moi?

— Non, répliqua le peintre, à présent plus de pitié! Oui, moi aussi, j’ai rêvé comme un autre les choses les plus terrifiantes! Ne me suis-je pas présenté chez la princesse Almaldasongi, qui m’avait invité à venir prendre le thé, dans le plus magnifique habit galonné par-dessus une veste richement brodée, et parlant l’italien le plus pur, — lingua toscana in bocca romana? N’étais-je pas épris pour cette beauté ravissante d’un amour passionné tel qu’il sied à un artiste et ne lui disais-je pas les choses les plus touchantes, les plus poétiques, les plus sublimes lorsque, baissant les yeux par hasard, je m’aperçus, à ma profonde consternation, que je m’étais bien habillé en tenue de cour et avec la dernière recherche, mais que j’avais oublié la culotte!»

Sans laisser à personne le temps de se formaliser de son incartade, Bickert continua avec feu: «Dieu! que vous dévoilerai-je encore des calamités terribles qui ont empoisonné mes rêves? Une fois, revenu à ma vingtième année, je me faisais une fête de danser au bal. J’avais mis ma bourse à sec pour donner à mon vieil habit un certain air de fraîcheur en le faisant retourner adroitement et pour m’acheter une paire de bas de soie blancs. J’arrive enfin heureusement à la porte du salon étincelant de mille lumières et de superbes toilettes: je remets mon billet; mais ne voilà-t-il pas qu’un maudit chien de portier ouvre devant moi l’étroit coulisseau d’un poêle en me disant, d’un ton poli à mériter qu’on l’étranglât tout vif: «Que monsieur se donne la peine d’entrer, c’est par là qu’il faut passer pour arriver dans le salon.» Mais ce ne sont encore là que des misères auprès du rêve affreux qui m’a tourmenté et supplicié la nuit dernière! Ha!... J’étais devenu une feuille de papier cavalier, ma silhouette figurait juste au milieu en guise de marque filigranée; et quelqu’un ... c’était, en fait, un enragé de poète bien connu de tout le monde, mais disons quelqu’un ... ce quelqu’un était armé d’une plume de dindon démesurément longue, mal fendue et dentelée, avec laquelle, tandis qu’il composait des vers raboteux et barbaresques, il griffonnait sur moi, pauvre infortuné, et me lacérait dans tous les sens. Une autre fois, un démon d’anatomiste ne s’est-il pas amusé à me démonter comme une poupée articulée et à torturer mes membres par toutes sortes d’essais diaboliques, voulant voir, par exemple, quel effet produirait un de mes pieds planté au milieu du dos, ou bien mon bras droit fixé dans le prolongement de ma jambe gauche ? .. .»
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Spikher releva sa pauvre femme, mais elle n'eut pas plus tôt repris connaissance, qu'elle le repoussa loin d'elle avec horreur. "Laisse-moi, cria-t-elle, homme maudit! Ce n'est pas toi! tu n'es pas mon mari, non! Tu es un esprit infernal qui veut ma perte, ma damnation. Va-t'en! fuis loin de moi, tu n'as sur moi aucune puissance, réprouvé!" Les éclats de voix retentirent dans toute la maison, les domestiques accoururent effrayés; Erasme [Spikher], au comble de la fureur et du désespoir, se précipita dehors et dans son égarement se mit à courir dans les allées désertes d'un parc voisin de la ville.

La nuit de la Saint-Sylvestre
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Le fils du cousin en effet était un joli jeune homme, bien bâti, qui n'avait pas encore été rasé et n'avait jamais porté de bottes. Dans les jours de Noël il mettait un bel habit rouge avec de l'or, et puis avec l'épée au côté, le chapeau sous le bras et une belle frisure avec une bourse à cheveux, il se tenait dans cette tenue brillante dans la boutique de son père, et cassait, par l'effet d'une galanterie naturelle en lui, les noix des jeunes filles, qui à cause de cela l'appelaient le beau Casse-Noisette.
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Il se peut aussi qu'à regarder avec plus d'attention tout ce qui à première vue, te semblera informe, tu en distingues bientôt plus nettement les contours. Tu y découvriras le germe caché qu'enfanta une sombre fatalité ; il s'élance et devient une haute plante luxuriante qui, sans cesse grandissant, s'accroît de mille rameaux jusqu'au jour où une unique fleur, devenue fruit, attirera à elle toute la sève génératrice de vie ; le germe lui-même alors disparaîtra.

Préface de l'éditeur
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Mais si tu te décides à parcourir avec Médard, en fidèle compagnon les cellules, les sombres dédales, tout un univers aux nombreuses, aux multiples couleurs, si tu consens à supporter avec lui tout ce que sa vie comporta d'effrayant, d'horrible, d'insensé, de grotesque, peut-être alors prendras-tu plaisir à voir défiler sous tes yeux les mille tableaux de cette camera obscura qui se sera entrouverte pour toi.

Préface de l'éditeur
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Les chuchotements, les bruissements de voix mystérieuses animent les arbres jusqu'à devenir des cantiques accompagnés du son des orgues. Des hommes graves, drapés dans de larges vêtements, le regard pieusement levé vers le ciel, s'avancent en silence sous les charmilles du parc. Les saintes images auraient-elles pris vie ? Seraient-elles descendues du haut des cimaises ?
Le souffles mystérieux des légendes et des histoires extraordinaires qui se trouvent là-bas représentées te pénètre d'effroi ; il te semble que tout ce passé se déroule sous tes yeux ; tu te plais à croire. L'esprit ainsi disposé, tu commences à lire l'histoire de Médard.

Préface de l'éditeur
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Comme j'aimerais, aimable lecteur, te conduire sous ces platanes sombres où, pour la première fois, je lus l'étrange histoire du frère Médard ! (...) Comme moi, tu contemples avidement les montagnes bleutées dont les silhouettes fantastiques se dressent au fond de la riante vallée qui s'étend devant nous au sortir du berceau de verdure. En te retournant, tu aperçois, à vingt pas à peine, un bâtiment gothique au portail abondamment orné de statues.

Préface de l'éditeur
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Au reste, s'il est vrai qu'on puisse lire Les Elixirs du Diable comme un passionnant roman noir et fantastique, il s'en faut de beaucoup qu'il soit construit suivant les règles traditionnelles du roman.
A chaque instant, au gré des fantaisies et de l'inspiration de l'auteur, les épisodes symboliques, bouffons, mystiques, horrifiques se suivent sans aucune logique pour concourir, sans ordre, ni sens apparent, à la révélation finale qui éclairera l'ensemble ; ainsi en va-t-il, sans doute, des évènements du monde qui obéissent au doigt de Dieu sans que l'homme, tant qu'il est sur la terre, comprenne rien aux intentions de son Créateur.

Les démons de la nuit
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(...) cette "hallucination du dédoublement, comme la folie, comme le rêve, est aussi un commencement de connaissance d'un autre monde ".
Hoffmann, curieux de littérature scientifique et philosophique fut fortement impressionné par la lecture du livre de Schubert, à la faveur duquel il pénétra dans l'univers de la Naturphilosophie : Aspects nocturnes de la Nature, paru en 1808. Mais, de cet ouvrage philosophique et mystique, Hoffmann a surtout retenu des thèmes qu'il a développés poétiquement.

Les démons de la nuit
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Krafft-Ebing, dans sa Psychopathia sexualis, fait quelques remarques qui éclairent certains aspects du drame de Médard : "La musique d'église peut, chez certains individus, entraîner des manifestations d'une extase amoureuse et l'ivresse mystique conduit parfois à l'ivresse sensuelle, ainsi qu'à toutes ses manifestations cruelles ou anormales; une commune affinité, une semblable recherche de l'infini, unissent parfois l'amour humain et la mystique religieuse...Le sens religieux et le sens sexuel, arrivés au maximum de leur développement, présentent des similitudes en ce qui concerne le quantum et la nature de l'excitation ; ils peuvent donc se substituer dans certaines conditions. tous donc peuvent dégénérer en cruauté, si les conditions pathologiques nécessaires existent."

Les démons de la nuit
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C'est à cette connaissance familière de la vie monacale que l'on peut attribuer non seulement la place importante, mais encore le rôle essentiel que tiennent, dans les Elixirs, la musique religieuse et les exercices de piété.

Les démons de la nuit
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