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Citations de François Augiéras (109)


TRENTE-SIX



extrait 12

Champs de neige,
cliquetis d’enfer,
le wagon fonce,
bardé,
de fer,
la locomotive ronge
les rails.
Est-ce que tu songes
à demander
où on les mène,
comme du bétail ?

Par la Russie errante
il est
plus d’une sente.
A chaque pas,
une tombe.
A chaque lieue,
une croix.
Jusques au Iénissey
on peut compter
– je sais –
six mille un tumulus
et plus.

Le train roule
à toute vapeur,
au cœur de chaque,
vrille la peur :
« Ainsi, de ce bracelet
ornés,
on nous mène, pour des
années,
à des lieues du pays
natal,
trimer aux mines de
métal.

Il se peut qu’il arrive
un jour
qu’un de ces lingots,
sans amour
arrachés par mon pic au sol,
par un jeu de la chance
folle,
soit un anneau d’or
là-bas,
que ma fille
portera au doigt ? »



// Serge Essénine (1895 – 1925)

/ Traduit du russe par Gabriel Arout
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Je suis seul; l'existence que je mène ignore les heures : je perds la notion de l'écoulement du temps.(...)Je ne suis qu'un esprit incarné dans un espace et un temps qui ne sont pas les miens(...)(p.43 /Fata Morgana,1982)
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Je mangeai du pain. Ce silence, la fraîcheur à cette heure-là du soir, jointe aux parfums dévastés par la pluie, et ce pain me parurent délicieux. Il me fallait m'occuper des brebis de mon prêtre. Nous les tenions dans une étable où l'on entrait par une porte, au fond même de notre cuisine, en sorte que nous les entendions cogner de la tête contre cette porte, gémir près de nous comme des âmes doucement captives, leurs faibles querelles, leurs murmures interrompant souvent notre peu de conversation. Derrière cette porte elles naissaient et mouraient dans l'obscurité, sur l'épaisseur des litières, en rêvant d'herbe verte.
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Soudain, je vis le premier habitant de ce pays des morts, un homme seul, debout sur un rocher, vêtu d'une robe de moine qu'une ceinture de cuir serrait à la taille.
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Je bois mes larmes, je vais toujours plus loin sur les falaises roses, prenant le ciel à témoin de mon âme éternelle, jusqu'à des vallées de pierre, comme les cratères de la lune.
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Cependant,malgré mon courage,la peur,l'angoisse de la solitude,le temps si froid,et la tristesse de l'Europe m'accablent chaque jour davantage.En sorte que j'ai tendance,pour moins ressentir la cruauté de ma solitude, à tenir mon esprit à une petite distance de moi,à n'habiter qu'assez peu dans mon corps,à m'éloigner doucement du visage d'un être qui pleure parfois dans cette caverne. (Fata Morgana,1982,p. 44)
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Qu'ai-je fait, si loin des écrivains de mon temps; en Afrique ils avaient un rival inconnu.
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Il me prit dans ses bras : — Tu ne vas pas crever, non ? — Ça fatigue le cœur, lui dis-je, toujours les yeux fermés, avec orgueil, avec un sanglot dans la voix. Le dos, les cuisses me brûlaient ; la taille surtout me faisait mal. Il rajusta mon pantalon; j'étais comme aveuglé par les coups et j'avais une étrange douceur, et des larmes dans les yeux. — Je t'aime ainsi. — Oui, c'est bien, merci.
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Je ferai ce qu'il veut; nous mettrons le gramophone en marche, je fixerai une aiguille de couture à l'appareil, nous écouterons la musique à côté d'un coin de la table. La tête dans les bras, du sable dans les poches de mon blouson de laine, je fermerai les yeux dans l'obscurité de la nuit.
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Les Hommes demeurent une énigme pour moi. Dans le fond, je ne sais rien d'eux. Leur vie me reste absolument étrangère. En quarante ans je n'ai rien appris de sérieux sur les Hommes. Ce qui est rassurant, c'est qu'ils ne sont pas mieux renseignés sur mon compte : je peux faire ceci, puis cela, sans qu'ils y comprennent jamais rien.
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Mon étonnement de vivre au-delà de la mort devenait une joie sans mélange que je ressentais de toute mon âme neuve.
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TRENTE-SIX



extrait 6

Un fin duvet qui
transit.
C’est dur de marcher
ainsi
dans la neige et le vent
et dans le bruit
des fers.
Mais si tu aimes
le jour
est-ce que tu préfères
moisir
à Schlisselbourg ?

Là, en heurtant les murs
tu te promènes,
dur
et la rage au cœur,
comme un bête
en cage.



// Serge Essénine (1895 – 1925)

/ Traduit du russe par Gabriel Arout
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Debout sur le pont, j'étais heureux comme une âme divine, et notre barque allait silencieuse dans ce pays des morts.
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Qu'un enfant séduit chante la gloire de son tortionnaire déguisé en dieu, c'est la plus profonde des intrigues, la seule grave; je chantais la gloire de mon « père » qui m'avait possédé.
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Une plate-forme surplombe la vallée. Je m'étends sur la pierre humide. J'ai emporté de quoi me préparer du café, peu désireux que je suis de boire celui de l'hospice, et, d'autre part, je veux m'éloigner des humains dont je n'ai rien à attendre de bon. Accoudé à quelques pas du précipice, je suis libre absolument, ou presque. Sans doute, me faut-il coucher à l'hospice, y prendre hâtivement mes repas; le reste du temps je suis libre comme l'air. Mais il s'agit d'une terrible liberté qui m'effraie et m'attire à la fois, comme le vide au bord duquel je me suis allongé.
Vu des hauteurs de Domme, cette immense table de pierre qui oblige la Dordogne à de larges méandres, et, plus particulièrement, de cette vigoureuse avancée des falaises où je fais une halte, le vaste paysage demeure d'une rare beauté malgré la pluie qui, à l'horizon, commence à tomber. Elle rend maintenant de moins en moins distinctes les lointaines falaises et les noires collines du Sarladais qui paraissent depuis quelques instants tirées d'une peinture chinoise.
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TRENTE-SIX



extrait 14

- Mais peut-être
vous semble-t-il
que filer de nuit
est facile ?

Ils étaient cinq
là-bas.
Chacun sur son
grabat,
givre aux fenêtres,
dehors - verglas.
Et le vent sonne
comme un
glas,
se brise aux angles
des tours
massives de
Schlisselbourg.
Seulement, on n’y dort
pas.

Peut-on dormir,
troublé
par la vision
des blés,
de la vieille
treille,
d’un jour tout bleu
où l’on
marche dans les sillons ?



// Serge Essénine (1895 – 1925)

/ Traduit du russe par Gabriel Arout
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Depuis longtemps j'en avais le désir ; vivre mes opinions, les expérimenter dans la réalité ; voilà ce qui compte pour moi. J'ai connu le malheur, la bien réelle infamie de Paris, une civilisation dégradée ; aussi est-ce en ce monde que je veux ma revanche, sans plus attendre, sans jamais tenir compte des opinions des fatigués de la vie.

(p. 144)
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Le châtiment donné à tour de bras m'écrasait sur le sol, pénétrait dans ma chair, me brûlait. Les dents serrées pour ne pas crier, les poings fermés, les yeux fermés, je ne bronchais pas. Au vingtième coup, j'avais envie de hurler, de pleurer. Il cinglait mes reins à vif, meurtris, mes épaules en sang. J'aurais voulu savoir ce qui arrive après : quand on hurle.
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Avec les ongles, il fit sauter les croûtes mal sèches que j'avais sur le dos, suça ses doigts poissés de sang. Il avait passé en moi, en rêve. Cet homme âgé n'était plus que la volupté d'un enfant. Il agissait comme il eût fait pour lui; les plus secrets mouvements de ma vie intérieure lui étaient connus. Dans le noir, j'étais le printemps d'un mort, d'un homme aveugle.
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D'autre part, je suis un écrivain qui parlera, dont la délicatesse n'est pas la qualité première, qui publiera tout, racontera tout ; on ne peut pas compter sur mon silence. Joël, lui, au contraire, est un garçon rassurant, qui ne parle que presse lithographique, que tirages sans dédaigner la plaisanterie gauloise; mais Augieras...., Augieras.. ..devient bien emmerdant.
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