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Critiques de François Mitterrand (51)
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Lettres à Anne : 1962-1995

Lorsqu’ils se sont rencontrés pour la première fois, au début des années 1960, sur la plage estivale d’Hossegor, François avait 46 ans et Anne, 19. N’était leur amour commun pour la littérature, ils ne se ressemblaient guère.



L’encore jeune socialiste Mitterrand avait déjà une partie de sa carrière derrière lui (il avait été douze fois ministre, il était sénateur de la Nièvre); la très jeune, ravissante et bourgeoise Mlle Pingeot avait toute sa vie devant elle. Lui avait une femme, Danielle Gouze, épousée en 1944, et deux fils adolescents, Jean-Christophe et Gilbert. Lorsqu’elle ne vivait pas chez ses parents, Anne logeait, à Paris, dans un foyer de jeunes filles.



Dans la première lettre qu’il lui envoie, le 19 octobre 1962, depuis le palais du Luxembourg, François Mitterrand s’engage à lui trouver le volume sur Socrate dont ils avaient parlé, un soir, à Hossegor. Suivront plus de 1200 autres lettres, que l’on découvre aujourd’hui avec stupéfaction.



Cette Correspondance amoureuse, par sa longévité, son intensité, son exclusivité, sa clandestinité et surtout sa qualité littéraire, défie en effet la raison politique. Si elle confirme le talent singulier du Mitterrand écrivain, qui fut notre dernier président à vénérer la langue française, user du subjonctif passé, connaître le chromatisme des métaphores et pouvoir écrire, comme ici, de vibrants poèmes d’amour, elle corrige, en le réévaluant à la hausse, en lui ajoutant soudain un tremblé inédit, le portrait doré à l’or fin du monarque florentin, volage, infidèle et cynique.



Car oui, François Mitterrand a follement aimé, et jusqu’à son dernier soupir, Anne Pingeot, qui avait la grâce, la foi et le goût des beaux-arts. Elle fut sa passion fixe. Elle fut aussi son grand regret: quel gâchis, suggère-t-il au moment où la maladie l’emporte, d’avoir caché une si belle flamme pendant plus de trente ans et d’avoir condamné à l’ombre sa «femme-fille-fleur-fruit-beau soleil».



Mais quelle chance, aussi, de lui avoir épargné les rigueurs du protocole et le poids de la charge présidentielle, d’avoir empêché cette figure poétique de tomber dans la prose de l’exécutif : car si Anne ne fut pas la première dame, elle fut sans conteste son grand amour.



Un amour que, dès le début, François Mitterrand, lecteur de Barrès et de Drieu, inscrit avec lyrisme dans la durée. Même s’il est marié (il n’envisagera jamais de quitter sa femme), il n’imagine plus sa vie sans celle qui pourrait être sa fille et dont l’âge, à lui seul, est une promesse d’avenir, comme une revanche sur sa propre finitude. 15 novembre 1964:

"Je t’ai rencontrée et j’ai tout de suite deviné que j’allais partir pour un grand voyage. Là où je vais, je sais au moins que tu seras toujours. Je bénis ce visage, ma lumière. Il n’y aura plus jamais de nuit absolue pour moi. La solitude de la mort sera moins solitude. Anne, mon amour.» "



S’il lui écrit de si longues lettres, avec d’incomparables descriptions des paysages et des ciels d’une France dont Anne serait l’incarnation idéale, ce n’est pas seulement pour la séduire, pour la conquérir, c’est aussi pour tenir, en secret et en marge de l’histoire officielle, le journal de son grand destin (on a ici une nouvelle fois la preuve que cet homme avait beaucoup d’ambition et qu’il ne se détestait pas): à son «Anne chérie», sa «Nannon aimée», son «canard à l’orange amère», sa «Nannour», son «Animour», il raconte dans le détail ses tournées de député, les débats houleux à la Chambre, le propos des articles et des livres qu’il rédige, sa première candidature à la présidence de la République, les coups qu’il reçoit, ainsi que les innombrables parties de golf qui ponctuent, avec autant de trous, son long parcours politique – «Quel chemin à gravir !» (septembre 1965).



En lui écrivant, il s’écrit aussi à lui-même, et tout laisse à penser ici qu’il envisageait une publication posthume de cette Correspondance.



Mais, pour tenir dans le temps, cet amour clandestin connaît de nombreuses crises. Même si ce volume ne contient pas les lettres d’Anne Pingeot (quelques très rares apparaissent, à partir de 1981, où elle l’appelle «Mon univers Anchois Pommier», «Mon créateur de joie» ou «Mon très très cher amour»), on mesure, en lisant celles de François Mitterrand, que la jeune femme ne s’accommode pas d’être sans cesse dissimulée, demande à partager sa vie, ou alors de pouvoir jouir de sa pleine liberté, ce qu’il ne supporte guère, et qu’elle veut bientôt avoir un enfant de lui. Mazarine naquit le 18 décembre 1974, à Avignon, et ce fut le plus beau jour de sa vie.



A partir de cette date, et plus encore après son élection à la tête de l’Etat, les lettres de François Mitterrand sont moins nombreuses. C’est qu’ils ont désormais tous les trois, entre Gordes, Souzy-la-Briche et la rue de l’Université, une vraie vie de famille, fût-elle encore officieuse. Mais ni sa fonction élyséenne ni le calvaire de la maladie ne mettront fin, au contraire, à l’expression de son amour fou pour celle à qui, en juillet 1967, il écrivait: «T’aimer est en soi une œuvre passionnante» et, en août 1969, à la manière du maître en théologie Abélard se brûlant pour sa jeune et pieuse élève Héloïse: «Notre amour me donne le sentiment de l’éternel.»



Cette Correspondance, qui se termine le 22 septembre 1995 par ces mots d’un homme au seuil de la mort: «Tu as été ma chance de vie. Comment ne pas t’aimer davantage?», Anne Pingeot la plus que discrète a donc fait le choix de la publier. C’est l’Institut Mitterrand, présidé par Hubert Védrine et au conseil d’administration duquel siège Mazarine Pingeot, qui lui a proposé de la rendre publique. Comme elle a eu raison d’accepter et d’y ajouter, en épigraphe, cette phrase de Montaigne: "Qui me demanderait la première partie en l’amour, je répondrais que c’est savoir prendre le temps; la seconde de même et encore la tierce: c’est un point qui peut tout.» "



Car ces lettres ne dessinent pas seulement le meilleur autoportrait de François Mitterrand, ce conservateur contrarié, elles composent aussi, en creux, le plus éclairant portrait de l’invisible Anne Pingeot.
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Lettres à Anne : 1962-1995

1200 pages de lettres d'amour..... Ça laisse pantois, quand même!

Je n'ai pas terminé cette lecture. Je savoure une lettre par ci une lettre par là quand l'envie me prend. Mitterrand manie le verbe avec une grande dextérité, de la justesse et une légèreté qui enlève au romantisme ce qu'il peut parfois avoir d'empesé, et je l’avoue, c’est du régal.

Pour ce qui est du contenu de ces lettres, si l'on fait abstraction du registre amoureux, je ne suis pas certaine qu'il y ait beaucoup d'autres choses à y trouver. Les aspects historiques ou politiques sont traversés de manière aléatoire et il ne faut chercher là aucune révélation. Non, ma grande question lors de cette lecture c'est : qu'a voulu faire Anne Pingeot en publiant ces lettres ?

Dire qu’il est impossible à 19 ans de sortir indemne d'une correspondance si puissante ? Ou alors attester de l’amour de Mitterrand à son égard? Prouver sa légitimité? Ou bien seulement rendre publique une vie trop privée?

Alors c’est vrai que parfois s’installe comme une gène à la lecture de certains passages. Une gène que l’on connait probablement tous à la lecture de ces ouvrages épistolaires. Un petit relent de voyeurisme qui même s’il est autorisé, vient titiller nos contradictions....
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Lettres à Anne : 1962-1995

Il m'aura fallu trois ans pour lire et apprécier ce recueil de lettres, de François Mitterrand à Anne Pingeot, à sa juste valeur.

Avec les moyens de communication actuels, c'est sans doute un des derniers livres épistolaire édité.

L'amour y est exprimé avec toute la puissance des mots. C'est principalement la première partie qui est la plus intéressante et la plus émouvante. On y trouve aussi à la fin de l'ouvrage quelques très beaux passages.
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Lettres à Anne : 1962-1995

1218 lettres. 33 ans. 1218 lettres où se dévoile un écrivain, parfois poète, mais surtout un homme amoureux. Amoureux d’Anne.



« Tout de même, dis à Mazarine que je l aime. Chaque fois que nous l’avons voulu nous avons éclairé nos vies, notre vie, mon Anne » François, 26 novembre 1978 …



La lettre dont est issue cet extrait, François Mitterand l’a adressée à Anne Pingeot en 1978, seize ans après le début de leur histoire d’amour où le Sénateur de 43 ans courtise alors une jeune fille de 19 ans. S’en suivront trente trois années d’un amour caché, tendre, que le temps et les épreuves ne parviendront pas à ébranler.



Au fil de la lecture des lettres rédigées par François Mitterand à son Anne chérie, l’homme d’Etat s’efface au profit de l’amoureux, tendre, fragile, mais également pragmatique, planifiant les futures entrevues avec sa chère et tendre, lui faisant envoyer billets de train et pensant à réserver une couchette de nuit pour son confort !



Une plume que vous pouvez parcourir au gré de vos envies, l’abandonnant de temps à autre puis vous replongeant ça et là dans la douceur de ces mots contemporains que l’on jugerait dignes d’un temps passé.
Lien : http://cetaitpourlire.be/ind..
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Lettres à Anne : 1962-1995

Bien que l'homme politique ne m'intéressait pas particulièrement, ...et ne n'intéresse pas plus historiquement maintenant ... j'apprécie par contre, beaucoup "l'écriture" (parfois abstraite) de cette correspondance retraçant l'histoire -peu banale- de ces deux personnages : romantique, sincère je pense, teintée cependant d'un peu d'égoïsme dû aux obligations familiales et politiques auxquelles F.Mitterrand était obligé de se soumettre.

Je suis transporté dans un certain contexte des années 60-95, et notamment dans la région du sud-ouest.

J'ai aimé cette lecture très intéressante que je recommande .C'est magnifique vraiment ... Je lis des passages de temps en temps et se n'est que du bonheur !!

Je ne pouvais imaginer François Mitterand aussi beau, amoureux, attentionné dans sa vie ...
Lien : https://www.babelio.com/livr..
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Lettres à Anne : 1962-1995

Plus de 600 lettres écrites par François Mitterand à l’amour de sa vie, donc à sa maîtresse Anne Pingeot.



Où l’on découvre un tout autre aspect de François Mitterand en étant, au début en tout cas, presque gêné par cette intrusion dans son intimité (intrusion néanmoins souhaitée par Anne Pingeot à l’origine de la publication des lettres, qu’elle voulait de son vivant afin d’éviter toute déformation).



Une fois la gêne passée cela devient rapidement passionnant, en particulier quand il évoque son évolution et ses contacts avec d’autres plus ou moins grands de ce monde. Mais pas seulement…



Les lettres d’amour sont aussi magnifiques qu’enflammées ; l’évolution de sa relation avec Anne Pingeot est très intéressante ; leur choix après de longues hésitations d’avoir un enfant (Mazarine) superbement évoqué. Et ses dernières lettres, quand l’heure de la déchéance physique puis de la mort a sonné, sont absolument bouleversantes!



À lire donc. Vraiment! Non seulement pour l’Histoire, mais également pour de nombreux autre aspects bien plus subtils qu’on ne pourrait le croire avant la lecture.
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Lettres à Anne : 1962-1995

Je suis étonnée de ne pas lire plus de critique à propos de Lettres à Anne, et y ajoute donc ma plume. Vu les 1200 pages, j'ai pour le moment lu les trois premières années seulement. Faute de temps et aussi car cette œuvre se déguste lentement. Il faut en apprécié chaque mot.

Allons droit au but, ce sont pour ma part les plus lettres d’amour jamais lues en littérature jusqu’ici. Et les plus beaux mots d’amour. C’est sublime.

F. Mitterrand écrit l’amour fou, l’amour obstination (Anne Pingeot va se refuser longtemps à lui), l’amour absolu. Il est nourri par elle, par cet amour et vidé à la fois. Il a besoin de tout dire tout raconter, tout décrire, tout disséquer.

Alors au-delà de ses déclarations amoureuses sans cesse réinventées, c’est un homme qui se raconte entre 1962 et 1995, un homme simplement, un homme cultivé et érudit (ses sorties en librairie sont des moments de grande liberté pour lui), mais aussi un homme public et un homme d’état.

Le dévoilement est ainsi multiple et renforce la fascination pour ce livre. Ces lettres aujourd’hui rassemblées et publiées font de ce corpus, Lettres à Anne, un chef-d’œuvre littéraire et historique.

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Lettres à Anne : 1962-1995

Les lettres brûlantes de Mitterrand à Anne Pingeot.
Lien : http://www.lalibre.be/cultur..
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Mémoire à deux voix

Publié très peu de temps avant sa disparition, voici François Mitterrand confronté à Elie Wiesel dans ce livre de dialogue. Idée intéressante si ce n'est que, comme à son habitude, François Mitterrand ne renie pas ses amis, y compris ceux qui ont trempé dans la collaboration jusqu'aux cheveux. Cela agace Wiesel, mais on passe à autre chose car, à propos de René Bousquet, Mitterrand ne démordra pas. Certes, ce passé qui ne passe pas, comme nous l'a signalé Henry Rousso, se perd dans les brumes. Or, dans les brumes, tout est gris. Mais il est bon toutefois de comprendre que, dans le gris, se cache des ombres aux costumes douteux. La vraie question est: Mitterrand était-il dupe de Bousquet? Était-il dupe de lui-même?
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Mémoires interrompus

N'étant pas socialiste et encore moins fan de Mitterrand, j'ai voulu mieux connaître le personnage des années après son départ. Donc j'ai lu quelques livres parmi lesquels ces mémoires interrompus dans lesquels je rencontre d'abord un écrivain, une connaissance et une précision de l'écriture dont nos politiques ne sont pas coutumiers, hormis sans doute De Gaulle et Pompidou.

Son texte met bien en avant l'ambiguïté de son personnage et ce n'est pas involontaire. Il peut même être lyrique, notamment quand il parle de son admiration pour De Gaulle et de ses orientations politiques différentes. Ce texte est assez court et procure un vrai plaisir de lecture.
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Pensées, répliques et anecdotes

Pour se changer les idées avec un livre vite lu, vous pouvez lire ce petit recueil de pensées et de répliques de François Mitterrand.



Sans être particulièrement fan du personnage, on y retrouve toute l'ironie, la verve et le sens du jeu de l'ancien président. La forme est souvent prédominante sur le fond, mais c'est sans doute un défaut de tous les politiques.



J'oublierai sans doute ces aphorismes aussi vite que j'ai lu le livre, mais il permet de passer un bon moment.
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