"Comment un auteur si rébarbatif peut-il avoir écrit un livre qui l'est si peu ?" se sont étonnés certains critiques après la publication de Bardadrac (Seuil, 2006). Rébarbatif, Gérard Genette ? Que neni ! Plutôt un délicieux textologue, ivre d'humour et d'érudition, à l'esprit et à l'écriture suraiguisés.
J'oublie volontiers avoir un peu souffert il y a quelques années sur Figures IV, alors que je me laissais porter voluptueusement par des études littéraires tardives : ce livre a été pour moi une rencontre inattendue, une ouverture sur un nouveau mode de lecture exigeant, moins flottant que celui vers lequel je tendais naturellement.
Puis j'ai découvert Seuils (Seuil, 1987) à l'occasion d'un travail sur le livre en sémiotique de l'objet : passionnant de la première à la dernière ligne, car il m'a appris à regarder le livre et toutes ses interfaces sous un angle inédit - il serait d'ailleurs intéressant de réaliser une recherche équivalente sur les "seuils" des blogs.
Vinrent ensuite, au fil de mes curiosités, Palimpstes : la littérature au second degré (Seuil, 1982) et Mimologiques : voyage en Cratylie (Seuil, 1976) Autant de lectures marquées par le plaisir de cette intelligence et de ce style si peu banals.
Et voilà que Gérard Genette prolonge Bardadrac par un vif Codicille (Seuil, coll. Fiction & Cie, avril 2009) où il se livre et baguenaude en liberté, au gré d'un alphabet tout personnel à deux cent quatre-vingt six entrées : de A comme Again et Albussac à Z comme Zigue et Zou. On y croise Proust et Barthes, bien sûr, Derrida, Austin, Mitterrand, Goya (les deux), Borgès, le Cardinal de Retz, Maurice Blanchot, mais aussi six sortes de libido, des médialectes, des "souvenances", des faits historiques, des mots-chimères ("Rêvolution : changement de régime onirique"). Tout simplement délicieux !
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