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Citations de Guy Boley (328)


Car il est bien connu que les êtres chers, en mourant, se posent instantanément sous les pieds des survivants, et que ceux-ci grandissent à l'aune des morts qui s'accumulent. Alors sûr que [le petit Fritz Nietzsche] est grand : être debout sur les épaules d'un père et d'un petit frère, ça vous met les yeux, sinon à hauteur des étoiles, du moins juste en face du regard ou des dents d'un géant. (p.70)
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Sophie s'étonne qu'elle ait pu posséder, à un âge si tendre, tant de maturité. Elisabeth répond que non, qu'il n'y a là rien de spectaculaire : si votre frère rentre de l'école en n'y voyant plus clair, que vous lui faites la lecture et que vos yeux spontanément se mettent à remplacer les siens, vous vous retrouvez naturellement à devenir sa secrétaire ; ou, formulé plus affectueusement : son âme soeur. (...)
Plus tard, Elisabeth, dans un de ses écrits, confirmera ce dont actuellement elle parle tout en buvant un thé dans un fauteuil crapaud :
(...) j'avais pressenti comme mon but dès ma tendre jeunesse : la sanctification personnelle par renoncement et sacrifice pour autrui.

Cela bouleverse Sophie et confirme ce qu'elle savait déjà : derrière chaque grand homme est tapie une femme.
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Ces vies pieuses et aseptisées n'ont pas vraiment choisi la vie communautaire : uniquement liées par la mort de Carl Ludwig, elles sont contraintes, financièrement, matériellement, affectivement, religieusement et contractuellement, de devoir vivre ensemble, de se lier, s'aider, se supporter, se mélanger, chacune guettant, sinon la mort de l'autre (synonyme d'héritage et de liberté), du moins son potentiel déclin, et passent ainsi leurs vies à piailler, à prier, à picorer de l'Eternel comme une poule sur un mur le ferait du pain dur.
Mais elles s'efforcent aussi de s'aimer en feignant de s'aimer tout en s'aimant quand même, se sacrifiant l'une à l'autre et le clamant bien fort, unies dans la ferveur de leur naufrage comme dans celle de Dieu. On a coutume, sur terre, de nommer ces armées ennemies remplies d'âmes amies, une famille. A la différence, toutefois, que celle-ci est obsédée par une seule idée qui leur sert de moteur, de colle à bois et d'harmonie : que Friedrich Wilhelm Nietzsche, seul mâle encore vivant de la couvée, fils du mieux défunt mais leur enfant à elles toutes, Fritz leur génie, leur sauveur, leur lettré, leur espérance et leur seule charité, devienne, comme son père, ses grands-pères, ses oncles et leur floppée d'ancêtres : PASTEUR.
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Wagner ne cherche pas à bâtir une civilisation nouvelle avec ses œuvres, il veut seulement régner sur des buveurs de bière et des marchands de cochons. L'Allemagne sublimée qu'à Tribschen ils ont tous deux rêvée, n'est qu'une truie épaisse. Ce n'est pas une erreur, c'est une trahison.
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Au "deviens qui tu es" dont jadis par inconscience et fatuité il a fait sa devise,il répond qu'ici,à Bâle,il est en train de devenir tout ce qu'il a souhaité ne jamais vouloir être.
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Le simple fait de naître n'est plus une pénitence, une impureté ou une malédiction. L'agneau de Dieu n'a plus à enlever le péché du monde car on l'a fait rôtir, on le mange en gigot. Le monde enfin prend sens.
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Alors Nietzsche s’arrête, s’assied sur un rocher, se saisit de sa plume. Et pour être agréable à ces puissances occultes qui offrent à chaque vie la possibilité de devenir soi-même sans se sentir coupable d’être venu au monde, il lâche enfin la phrase qui le rendra célèbre dans les siècles à venir et qui fera de lui le nouvel Antéchrist : « Dieu est mort ! »
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Cela bouleverse Sophie et confirme ce qu’elle savait déjà : derrière chaque grand homme est tapie une femme.
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Le grand avantage de la bêtise sur l’intelligence est que la première, contrairement à la seconde, est totalement illimitée.
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Assis sur son rocher et les deux pieds ballants, il dresse une liste des choses à effectuer afin que puisse éclore son propre avènement en tant que fils de lui et non plus fils d’autrui. Ont été classés dans les rubriques Urgent et Prioritaire, soulignés trois fois au crayon rouge en gras:
1. Tuer Schopenhauer et tous les mauvais guides et tous les mauvais Maîtres.
2. Enterrer Wagner au fond de ce bocal où l’on met les compresses usagées et les fioles périmées : Wagner n’est qu’une de mes maladies.
3. Renaître intensément.
4. Renaître immédiatement.
5. Réapprendre à écrire de façon animale, libre comme un chamois, et jeter aux orties cette glose pédante et scolaire. Ne plus mourir aux mots. Le style doit vivre. Il faut que j’apprenne à jouer de mon style comme je joue du piano.
6. Accepter mon état, rejeter médecins, rebouteux, charlatans et autres prétendus soignants. Trouver mon équilibre, mon harmonie, uniquement dans l’art et nulle part ailleurs. Seul l’art guérit les âmes. Seul l’art parvient à enlever à la vie l’absurdité qui la recouvre de son voile d’horreur et de sa vanité.
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L’art n’a pas pour fin de laisser des œuvres que le temps ruine, mais de créer des artistes en tous les hommes et d’éveiller dans le vulgaire le génie endormi.
Nietzsche
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Lui reviennent alors en mémoire quelques mots que Friedrich avait jadis notés dans un de ses cahiers que l'on dit de jeunesse, qu'on écrit dans son lit tandis que l'aube naît ou que le soir s'effondre : "Je ne ressemblais pas à ma sœur, impulsive, coléreuse, osant se rouler par terre ou crier des mots grossiers à notre mère (…) moi je n'aurais pas osé, moi l'immoraliste, le tumultueux, le bagarreur, j'étais un homme doux."
Oui, Friedrich est un doux, et Lisbeth une guerrière. Son petit visage d'ange n'est que masque de théâtre.
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Elle parle évidemment de ce qu'on nommera plus tard, avec grandiloquence l'"affaire Lou Salomé", aisée à résumer : au printemps 1882, Friedrich tombe amoureux d'une femme que sa sœur maudit parce qu'elle est belle, jeune, intelligente, et qu'elle a sur son frère une emprise affective et intellectuelle qui supplante la sienne. Jalouse à en crever, elle la roule dans la boue, la décrit à sa mère comme étant une catin de bas étage, la traite de serpent, de sangsue et de hyène, de sombre aventurière, de basse calculatrice, de monstre au cœur de marbre, frigide au corps de glace, de sale Juive perfide, envoûteuse de mâles, vampire ne cherchant qu'à s'abreuver du sang de leur génie. Enfin, ne reculant devant rien pour assouvir sa rancœur, elle la dénonce aux autorités allemandes en tant qu'espionne russe.
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Ils n'ont pas tort de le juger ainsi car c'est bien ce qu'il est : un apatride. Tant des terres que des lettres. Un fugitif errant. Un homme qui n'eut jamais ni femme, ni oriflamme, ni doctrine, ni disciples, ni chapelle, ni domicile fixe. Pa vraiment de profession, ou si peu. Pas vraiment de salaire, juste une petite pension. Un homme qui jamais rien ne posséda et depuis quelques jours, hélas, même plus la raison.
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Couverture aux genoux et boisson chaude en main, ils parlent, et rient, ou pleurent. Parfois l'un deux se lève et prend l'autre en ses bras. L'enfance est une fontaine qui ne tarit jamais, elle est l'unique source où tous deux s'en vont boire.
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L'enfant, c'est l'innocence et l'oubli, un recommencement, un jeu, une roue qui roule d'elle-même, un premier mouvement, le don sacré de dire oui.
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Seul l’art guérit les âmes. Seul l’art parvient à enlever à la vie l’absurdité qui la recouvre de son voile d’horreur et de sa vanité.[Nietzsche]
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Le but proclamé du Ring est avant tout de rétablir, par la puissance de sa pensée, par la force de ses textes et la beauté cosmique de sa musique, une Allemagne conquérante capable de faire tanguer cet univers inculte et de renverser artistiquement cette planète triviale, avide et roturière, pour bâtir, à Bayreuth, une religion neuve faite de grand-messes purement tétralogiques. Le but du Ring, en substance, est de faire de Wagner le nouveau dieu d’un nouveau temple. Et de ses opéras un nouvel évangile afin que l’être humain vête son âme de génie et accède enfin à ce qu’il se doit d’être : surhumain. À savoir un humain anobli par lui seul.
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Wagner va enfin pouvoir se redresser sur ses ergots et bâtir ce lieu sacré dont il rêve depuis toujours. Durant son exil, il a compris qu’aucun théâtre d’Europe ne serait digne d’accueillir son grand œuvre, cette tétralogie sur laquelle il travaille depuis plus de trente ans. Mais Louis II paiera, bâtira son palais. Peu importe la somme. Ce qui, pour Wagner, n’est que justice : « Le monde me doit ce dont j’ai besoin. » C’est un peu sa devise.
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Car une mission suprême les soude et les unit. Friedrich la résumera en une formule intense et lumineuse qui aurait dû, et qui devrait encore, servir de Bible miniature à toute l’humanité : L’art n’a pas pour fin de laisser des œuvres que le temps ruine, mais de créer des artistes en tous les hommes et d’éveiller dans le vulgaire le génie endormi.
Telle est leur volonté : enlever à l’humain, grâce à l’immensité du souffle wagnérien puisé dans le vieux fonds germano-grec, l’habit de chimpanzé dont il s’était vêtu afin qu’il puisse enfin, assis entre les dieux, se lever dignement, et pleinement rayonner en clamant sa grandeur.
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