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Critiques de Héctor Abad Faciolince (56)
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L'oubli que nous serons

Ce livre est "plein de choses à la fois", comme l'a dit Llosa dans la préface. C'est un texte remplit d'humanisme, un éloge de l'amour filial entre, notamment, un père et son fils et, surtout, un magnifique plaidoyer contre la Violence sanglante et assassine qui (a) fait rage en Colombie. Une très belle lecture, sans aucune difficulté liée à l'écriture, qui permet de ne jamais oublier.
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L'oubli que nous serons

Ce livre aurait pu s'intituler « le livre de mon père », reflet miroir du livre maternel d'Albert Cohen. Une autobiographie colombienne bouleversante…quand mémoire familiale et mémoire collective s'entrelacent avec brio et délicatesse…



« J'aimais mon père d'un amour animal. J'aimais son odeur, et aussi le souvenir de son odeur, sur le lit, lorsqu'il partait en voyage et que je demandais aux bonnes et à ma mère de ne pas changer les draps ni la taie d'oreiller ».



Voilà un livre dont j'ai débuté la lecture en ne sachant quasiment pas de quoi il était question. Une seule certitude : étant sur l'île déserte d'Idil (@Bookycooky), cela devait forcément être un bon livre. Il me faisait de l'oeil depuis un moment, là, installé sur son île avec sa couverture d'un joli et énigmatique rose brumeux d'où émergent les tours d'une mégalopole, une ville tentaculaire d'Amérique du Sud probablement, étant donné les nom et prénom de l'auteur d'une part, et vu le goût d'Idil pour cette région du globe d'autre part.



Et en effet le livre est colombien et la ville en question est Medellin.

J'ai eu le bonheur de découvrir le plus bel hommage fait à un père que je n'avais jamais lu jusqu'à aujourd'hui. Témoignage bouleversant d'amour d'un fils pour son père, biographie pittoresque, chronique d'une famille unie - et oh combien unique - au sein de laquelle la pratique religieuse, fervente et mystique, réactionnaire, de la mère le dispute à l'esprit scientifique et cartésien du père, radiographie de la société colombienne des années 1970 et 1980 déchirée par la violence et la guerre que se livrent les paramilitaires, l'armée, les narcotrafiquants et les guérilleros, voilà les ingrédients de ce livre qui m'a parfois émue aux larmes tant Victor Abad sait combiner en un subtil dosage l'histoire de son pays et sa vie familiale et intime.



Le père dont il est question est le docteur Héctor Abad Gômez. Celui-ci enseigne la médecine à l'Université de Medellin et travaille dans les quartiers populaires de la ville où il se bat pour apprendre à la population les règles élémentaires d'hygiène afin de prévenir les maladies et où il lutte pour leur offrir une eau pure, base de la santé du peuple estime-t-il face à la médecine curative à base uniquement de traitements onéreux, business florissant. Mieux vaut prévenir que guérir. Médecine sociale en lien avec la situation économique versus médecine curative. Autrement dit « cesser d'être un sorcier pour devenir un acteur social » et agir ex ante plutôt que ex-post.

Eduqué dans la tradition des Lumières, militant fervent des droits de l'homme, ce libre penseur croit ainsi à la possibilité de changer la vie de ses semblables et de bâtir, grâce à la science, un avenir meilleur. Il s'exprime dans les journaux, sur les radios et ses messages dérangent les autorités. À plusieurs reprises il est contraint à l'exil aux États Unis. Mais on ne musèle pas facilement cet homme libre et courageux qui le deviendra encore plus en vieillissant, surtout après la mort d'une de ses filles chérie, la magnifique Marta.



Le portrait, doux et pudique, de ce père d'exception, libre, généreux, sensible, optimiste, ouvert, tolérant, engagé avec passion et humanisme, est dépeint par Hector Abad fils avec une admiration et un amour tout aussi exceptionnels. L'assassinat de cet homme si bon, assassinat jamais élucidé, est d'autant plus déchirant. Il met également en valeur la violence institutionnalisée déployée par le pouvoir en place contre son peuple afin que celui-ci ne se tienne pas debout, se milite pas, n'ait pas des idées libertaires. A coup de tortures atroces, de menaces incessantes, de crimes orchestrés en toute impunité.



« Toute personne qui incitait à l'éveil et à la participation des pauvres était considérée comme un dangereux activiste qui mettait en péril l'ordre imperturbable de l'Eglise et de la société ».



Quel homme que ce père, mais quel homme…Sa façon d'aimer, à la fois exubérante, chaleureuse, confiante, mais aussi un peu étouffante, sa façon d'éduquer ses enfants avec un amour sans limite, avec légèreté et humour, bienveillance et respect, sa façon d'exprimer sans honte ses émotions, ses pleurs, ses élans d'amour, ses passions. Je l'ai aimé ce père, immédiatement, ne cessant de penser à mon petit papa à moi, et comme le petit Hector, j'ai été fascinée et admirative. Aucun sentimentalisme, aucun pathos, aucun côté mièvre et larmoyant dans le portrait de cet homme qui déborde de bonté, c'est juste délicat, subtil et beau. L'auteur a su trouver le ton juste, adéquat, pour nous fasciner, nous faire vibrer, nous toucher en plein coeur et rendre palpable la douleur et le désarroi. C'est remarquable de coeur et d'intelligence.



« Mon père a toujours pensé, et moi je le crois et l'imite, que cajoler ses enfants est le meilleurs système éducatif ».





Hector Abad a écrit sur l'assassinat en 1987 de son père avec beaucoup de pudeur, de sincérité, de réalisme et aussi, il faut le dire, d'amertume. de courage aussi. J'ai eu l'impression parfois de sentir les sanglots ravalés avec rage tant son écriture était parfois appuyé, transperçant le papier, fébrilement. Notons que ce très beau livre, chef d'oeuvre de la littérature colombienne, a été transposé au cinéma par Javier Camara. Souhaitons que cet écrit ait été salvateur pour cet orphelin de père, qui plus est d'un père absolument exceptionnel…

Pour le portrait bouleversant de ce père si bon idéologiquement, hybride, « chrétien en religion, marxiste en économie et libéral en politique », pour l'analyse de la société colombienne des années 1980 et la critique de son pouvoir corrompu, pour le courage qu'il met en valeur, pour l'ode à la littérature et à la musique que ce livre représente (quel bel hommage à Proust d'ailleurs, à Borgès aussi, le titre du livre provenant d'un de ses poèmes) qui permettent de contrer l'oubli, pour les anecdotes pittoresques distillées telles des friandises tout au long du récit, pour les questions existentielles et le rapport à la mort de nos proches qu'il permet de sonder avec pudeur, pour l'humanisme lumineux et flamboyant qu'il nous offre et qui fait un bien fou, je comprends tellement qu'il puisse être mis sur une île déserte. Merci infiniment Idil !



« C'est un des paradoxes les plus tristes de ma vie : presque tout ce que j'ai écrit, je l'ai écrit pour quelqu'un qui ne peut pas me lire, et ce livre même n'est rien d'autre que la lettre adressée à une ombre ».





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L'oubli que nous serons

Vingt ans, c'est le temps écoulé entre l'assassinat du père de l'auteur le 25 août 1987 et l'écriture du livre en sa mémoire.



L' ouvrage décrit un homme exceptionnel tant dans sa vie privée : homme chaleureux et aimant, bon époux et bon père de famille (cinq fille et un garçon) que dans sa vie publique, homme engagé, généreux, médecin spécialiste de santé publique.

L'histoire se passe à Medellin en Colombie. Le catholicisme s'impose dans la vie quotidienne puis sera débordé par la violence politique, maffieuse, et les assassinats.



Cet ouvrage comporte des pages intéressantes sur les activités de son père, plaisantes quant il évoque le quotidien de la famille, et les très nombreux grand-parents, oncles, tantes, cousins (souvent membre du clergé ou religieux), d'autres sensibles quant il raconte la mort de sa sœur Martha, et l'assassinat de son père, enfin atterrantes quand il décrit les tortures subies par les détenus politiques, syndicaux et corporatifs.



Bel hommage à un père aimé et aimant.
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L'oubli que nous serons

La sortie du film de l'espagnol Fernando Trueba est l'occasion de découvrir ce bouquin de 2006 qui avait belle réputation et qui a surtout le mérite de nous faire voyager en ce pays méconnu qu'est la Colombie.

L'oubli que nous serons est comme une lettre du fils Héctor Abad à son père, médecin hygiéniste assassiné en 1987 à Medellìn.

Une relation père-fils très forte avec un Abad junior seul garçon élevé au milieu d'un véritable gynécée : cinq sœurs (!), sa mère bien sûr, une nonne, des bonnes, des tantes, des grands-mères, ...

Un garçon écartelé entre sa mère enracinée dans son monde ultra catholique d'obédience franquiste (Opus Dei et compagnie, ils font même des processions dans leur maison).

Et son père à l'exact opposé, docteur et professeur d'université, agnostique, optimiste, le type même de l'humaniste éclairé.

La prose d'Héctor Abad est d'une belle élégance, riche et soignée, et lorsqu'il nous décrit son enfance, ses longues phrases nous bercent d'une douce musique nostalgique. Avouons tout de même que cette première partie du bouquin est un peu longuette, impatients que nous sommes d'en savoir plus sur le bon docteur Abad.

Malheureusement l'auteur aura bien du mal à sortir de son auto apitoiement sur sa condition de fils éploré et d'écrivain inspiré. Même s'il est intéressant à plus d'un titre (la Colombie, le docteur assassiné, le film, ...), le bouquin est plombé par un style et un propos un peu lourds à digérer.

Le titre du bouquin (et du film) est tiré d'un poème de Jorge Luis Borges trouvé dans l'une des poches d'Héctor Abad Gómez lors de son assassinat.

Pour celles et ceux qui aiment les bons docteurs.
Lien : https://bmr-mam.blogspot.com..
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L'oubli que nous serons

Genre : livre hommage au père



L’auteur raconte son admiration pour son père.

Dans une Colombie où règne misère et maladies, le docteur Abad est docteur et fait tout son possible pour venir en aide à ses contemporains.

Hector le narrateur est le seul garçon de la fratrie (il a cinq soeurs)

Il s’agit là d’une chronique familiale sur fonds de chroniques sociales.

Des passages m’ont touchée même si je suis un peu restée en dehors de l’histoire : peut-être trop hagiographique pour être honnête ?
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La Secrète

J’ai vraiment du mal avec ces lectures desquelles je ressors sans savoir si je les ai aimé ou non.



Dans ce livre, on suit 3 personnages: Eva, Pilar et Antonio, trois adelphes qui nous racontent leur histoire mais surtout celle de la secrète, cette terre sur laquelle vit leur famille depuis des générations. Il y a donc Pilar, l’aînée, qui a une vision de la vie qu’on pourrait qualifier de traditionnelle: elle est restée avec le même homme toute sa vie, Alberto, a eu des enfants, est croyante et c’est elle qui est la plus attachée à la secrète. Eva, qui est l’opposée de sa soeur: elle ne reste jamais plus de quelques temps avec le même homme, et refuse de croire certaines idées véhiculées par la religion, comme celle qui décrit le corps d’une femme comme un temple. Et enfin, Antonio: il aime l’histoire et il aimerait surtout raconter l’histoire de son village et de sa famille, malgré qu’il ait quitté les lieux des années auparavant pour vivre son homosexualité à New York.



J’ai beaucoup aimé les parties sur Eva, j’ai trouvé ses anecdotes très intéressantes. Celles de Pilar étaient plus tristes, mais je ne me suis pas du tout senti emporté dans son récit comme dans celui d’Eva. Un extrait du texte est d’ailleurs consacré à la tristesse de ses histoires:



Et dire que j’étais toujours morte de rire et que mes histoires faisaient toujours rigoler. Maintenant elles sont plutôt chagrines, des récits teintés d’amertume par les maladies et la vieillesse, qui contaminent le passé de leur tristesse alors que ce n’était pas le cas, car nous avons eu tant d’années lumineuses et heureuses, ce qu’inconsidérément, aux jours sombres, je tends à oublier. Nous avons perdu, au cours des ans, le sens de l’humour et de la joie. Accumulation de peines, d’ennuis de santé, de douleurs, de ressentiment. Il est difficile de rire quand on a mal aux dents, le coccyx endolori, ou avec cette toux qui me secoue chaque matin parce que je fume trop. Et pourtant nous rions parfois, nous aussi, de nous-mêmes. Lorsque la vie cesse d’être intéressante et que chaque jour n’apporte plus son lot de choses mémorables, que le futur se raccourcit, nous nous réfugions dans les choses du passé, et la mémoire devient comme une toupie dans un tourbillon, tournant tout le temps autour du même axe.



Les parties d’Antonio m’ont ennuyé. Même si j’ai apprécié comprendre comment le village s’était construit, ce ne m’a pas fasciné et j’aurais bien du mal à me rappeler d’une anecdote qu’il a raconté. Les parties où il parlait de sa vie, de sa façon de voir les choses étaient bien plus intéressantes.



La fin m’a rendu sincèrement triste. C’est la seule fois où j’ai vraiment compris les émotions de Pilar, d’ailleurs.



À lire si vous aimez l’histoire et les arbres généalogiques complexes.
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L'oubli que nous serons

C'est le livre qui m'a fait connaitre cet auteur colombien, un livre autobiographique qui m'avait enchanté, tellement il débordait d'amour filial.

Il narre l'assassinat par des paramilitaires en 1988, de son père médecin à Medellin, ville gangrenée par la guerrilla, les paramilitaires, les assassinats politiques, et surtout le narcotrafic.

L'écrivain raconte aussi l'histoire de sa famille et la sienne propre puisqu'il a dû fuir la Colombie suite à l'assassinat et se réfugier en Italie.
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Traiciones de la memoria

Trahisons de la mémoire (2009) serait la suite de L'oubli que nous serons , et c'est un livre excellent avec une bonne prose ( lu en VO), original dans sa présentation et qui comporte trois récits : le premier, narre les recherches de l'auteur pour trouver l'origine du poème retrouvé dans les poches de son père assassiné, qui s'est avéré être un poème inédit de Jose Luis Borges.

Les deux autres récits-essais racontent la fuite de l'auteur de Colombie et le dernier aborde les "moi" fictionnels.

Par ailleurs dans le livre sont exposées quelques idées sur la mémoire, laquelle, au fil du temps oublie, superpose et invente.
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La Secrète

J'ai tenu cinq jours, lu des centaines de pages sans parvenir à entrer dans l'histoire.

Trois personnes d'une même famille parlent tour à tour de leurs souvenirs, de l'attachement qu'ils éprouvent pour la maison " La Secrète", en Colombie.

C'est interminable, et je me suis souvent surprise à penser à autre chose...Donc j'abandonne!
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Traité culinaire à l'usage des femmes tristes

« Chacun de mes livres est associé à un amour de ma vie » a confié l'auteur de ce Traité culinaire à l'usage des femmes tristes, et c'est Irène dont il s'est finalement séparé qui est l'inspiratrice première de cet ouvrage d'Hector Abad Faciolince. Mais c'est dans un contexte plus profond que celui sentimental qu'a été construit ce Traité culinaire à l'usage des femmes tristes : la douleur des femmes de sa famille (sa mère et ses soeurs), confrontées à l'assassinat du père de l'écrivain par des paramilitaires. Tristesse familiale et personnelle comme une allégorie de la tristesse historique et politique de la Colombie : l'auteur ne les sépare jamais dans son oeuvre littéraire.



Dans ce traité qui n'en est pas un, sauf avec une lecture littérale peu soucieuse de la dimension philosophique de l'oeuvre de cet écrivain (dans ce cas, lire d'urgence « dangers de la lecture et remèdes littéraires, 1883-1914 » pour comprendre les enjeux intellectuels d'une lecture enfin nuancée), la cuisine n'en est pas une et les femmes ne sont pas particulièrement visées mais bien tout le genre humain : la tristesse existentielle des femmes n'est qu'un prolongement de celle des hommes et vice-versa. C'est bien de tristesse humaine qu'il s'agit et cette affliction n'est pas coupable.

Traitant avec humour le principe du traité médico-culinaire déjà présent dans l'antiquité et surtout au Moyen Age, ce traité de cuisine d'Héctor Abad Faciolince, comme pour Mayra Santos Febres et son Traité de médecine naturelle pour hommes mélancoliques, reprend cette tradition historique médico-culinaire pour la détourner en genre fictionnel volontairement incertain, combinant antidotes et sortilèges à un vadémécum littéraire et à un journal intime sentimental.

Juxtaposant avec une prose mêlée de fantaisie et de poésie des recettes aux ingrédients improbables avec d'autres plus plausibles, sur un ton d'apothicaire frivole, l'auteur semble proposer à la psychologie féminine de traiter ses maux existentiels. "Semble" seulement. Car ces propositions culinaires ne sont remarquables que pour leur valeur littéraire.



Comme Abad Faciolince le déclare en évoquant le poète anglais qui réclame du musc à l'apothicaire pour parfumer son imagination, l'ambition de ce livre est de soigner la mélancolie du monde par un excès à la fois de raison et de fantaisie : suivre une cure salvatrice de mots, c'est-à-dire opter pour un revigorant excès de littérature.
Lien : https://tandisquemoiquatrenu..
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L'oubli que nous serons

Dans cet ouvrage, Héctor Abad Faciolince se souvient de son amour inconditionnel pour son père, lâchement assassiné en Colombie dans les années 1980.

D’un côté, nous avons le volet individuel, personnel, intime, la souffrance de perdre un père, un mari, un frère, un ami.

On ne peut que penser à nos propres morts, de maladie, d’accident, de vieillesse, et essayer d’imaginer l’excès de souffrance causé par une mort criminelle.

De l’autre côté, nous avons le volet public, l’engagement politique, le personnage public, la douleur de perdre un homme bon, naïf, engagé pour le bien commun.

Qu’il est décourageant d’assister au massacre des « bons », parce qu’ils sont pacifistes, parce que les « mauvais , eux, n’hésitent pas à les tuer.

Toutes ces vies fracassées, tous ces destins qui auraient pu changer le monde, tous ces points d’interrogation sur un avenir dans lequel ils n’auraient pas été assassinés.
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L'oubli que nous serons

Il a fallu à Hector Abad Faciolince une vingtaine d’années pour réussir à libérer ses souvenirs personnels de leur gangue de douleur insoutenable et pouvoir s’atteler à la rédaction de ce livre-témoignage époustouflant.

Comment trouver alors tout de suite des mots susceptibles de retranscrire avec exactitude ce qui fait à mes yeux de L'OUBLI QUE NOUS SERONS une œuvre aussi extraordinaire, rare et unique, et tout particulièrement la grâce, la pudeur et la délicatesse qui y sont convoquées en sublime contrepoids à la dimension tragique, au sentiment d’injustice et à la violence des événements présents à l’origine de sa rédaction?

Si ce livre était un arcane du Tarot de Marseille, ce serait à mon avis, sans aucun doute, le numéro 11, «La Force», cette planche où l’on voit l’image d’une frêle jeune femme en train d’ouvrir, à mains nues et sans le moindre effort apparent, la gueule d’un lion : symbole du courage moral et spirituel triomphant en toute sérénité sur la brutalité et la bestialité.

Au risque de paraître mièvre, peu importe, je dirai tout simplement que L'OUBLI QUE NOUS SERONS est de ces livres souverains, écrits avec le cœur, et qui en tout premier lieu touchent les lecteurs aussi, droit au cœur. Sans une once de sentimentalisme justement, sans aucune mièvrerie lénifiante. Merveilleusement bien écrit. Adroit, entier, sans autre artifice que l’immense talent de l’auteur à pétrir une langue littéraire qui, de prime abord directe et spontanée, se révèle en vérité d’une grande subtilité et pénétrante. Émotionnelle et sensorielle, mais aussi capable de retenue, de prendre de la distance par rapport aux événements traumatiques qu’elle décrit. De la belle littérature, en somme, située à des années-lumière de celle qui se fait habituellement dans le genre avec de braves intentions et autres poncifs édifiants.

L'OUBLI QUE NOUS SERONS est avant tout la chronique biographique d’un homme, fascinant et libre-penseur, médecin spécialiste en santé publique, personnage public consacré en son pays en tant que défenseur intrépide et «apôtre des droits humains», le père de l’écrivain, Héctor Abad Gomez, brutalement assassiné en 1987 par des milices paramilitaires associées à l’État colombien, ce dernier ayant été très probablement commanditaire du meurtre ; en même temps, c’est la chronique personnelle d’un amour fusionnel en version masculine, entre Héctor-père et Héctor-fils, sorte d’Œdipe «inversé» assez inouï, rarement abordé (à ma connaissance, en tout cas) en littérature; une chronique familiale également, riche en faits et couleurs -allant du plus exubérant et cocasse au plus douloureusement impensable et inacceptable-, d’une famille latino-américaine dont certains aspects évoqués au travers des souvenirs d’enfance de l’auteur seraient par ailleurs dignes de figurer dans une des fictions de son plus célèbre confrère, «Gabo» (les passages, entre autres, narrant les séances de prières collectives organisées chez la grand-mère en sont de véritables morceaux d’anthologie !) ; c’est enfin la chronique glaçante et l’autopsie sinistre d’une ville, Medellin, devenue mondialement emblématique durant le dernier quart du vingtième siècle comme l’une des agglomérations urbaines les plus violentes de la planète (l’on disait qu’il y avait alors, par jour, davantage de morts par balles à Medellin qu’au Liban, pourtant en pleine guerre civile à la même époque!).

Évitant scrupuleusement tout piège hagiographique autour du personnage central qui l’inspire, père ô combien vénéré et en même temps, donc, véritable martyr de la barbarie de l’une des périodes les plus funestes de l’histoire récente de son pays, Héctor Abad résistera également à toute tentation facile d’idéaliser un bonheur familial et mythique d’avant les épisodes tragiques survenus dans la famille. Il ne cessera, au passage, non seulement de désacraliser ces années, (« Ce furent des années de bonheur, dis-je, mais la félicité est faite d'une substance si légère qu'elle se fond facilement dans le souvenir, et si elle remonte à la mémoire, c'est avec ce sentiment écœurant que j'ai toujours rejeté comme inutile, mièvre et finalement nuisible à la vie au présent: la nostalgie. »), mais aussi la personnalité de uns et des autres avec leurs contradictions et zones d’ombre, à commencer par celle de son fantasque de père et la sienne propre...

Selon les propos dithyrambiques de son prestigieux préfacier, Mario Vargas LLosa, L'OUBLI QUE NOUS SERONS serait un «chef d’œuvre», difficile à synthétiser «parce qu’il est plusieurs choses à la fois». En ce qui me concerne, ce livre figure en tout cas désormais parmi les plus belles chroniques autobiographiques et familiales qu’il m’ait été donné de lire à ce jour.

En miroir à l’esprit qui aura présidé son écriture, il s’agit bien d’une expérience possible de lecture pleine, «entière». Être complètement suspendu et étreint par ce qu’on lit, éprouver un instant ce fragile sentiment continental qui nous manque parfois si cruellement, voilà ce que l’on cherche au fond en ouvrant un livre. «Si les mots tracent une carte approximative de notre esprit, une bonne partie de ma mémoire a été transportée dans ce livre, et comme nous les hommes sommes tous frères, dans un certain sens, parce que ce que nous pensons et disons se ressemble, parce que notre façon de sentir est presque identique, j’espère avoir en vous , lecteurs, des alliés, des complices, capables de jouer sur les mêmes cordes dans cette caisse obscure de l’âme. ». C’est fait.

«Souviens-toi, âme endormie»! Souviens-toi de cet inexorable oubli auquel nous serons tous voué, dont ce livre, paradoxalement, nous console. Ce magnifique titre est extrait d’un poème attribué à Borges, recopié à la main par Héctor Abad Gomez et trouvé par son fils dans la poche du costume que son père portait au moment où l’on l’assassina sur le trottoir d’une rue de Medellin.



Post-scriptum

Le dossier d’instruction criminelle ouvert après l’homicide du père de l’auteur en 1987, «exercice de camouflage et de complicité avec les assassins pour favoriser l’impunité » sera classé sans suite quelques années après, sans aucune arrestation ou élucidation.

Héctor Abad Facolince a écrit et publié son livre en 2006.

En 2014, le Ministère Public colombien requalifierait les assassinats systématiques commis à l’époque par les différentes factions paramilitaires colombiennes, en «crimes contre l’humanité», les rendant désormais imprescriptibles.

En cette même année, pour la première fois, un homme, suspecté d’avoir abattu à sang froid Héctor Abad Gomez sous les ordres du « clan Castaño » (et d’avoir par ailleurs participé dans les années 90 au massacre de 40 autres personnes à Antioquia – département colombien dont Medellin est la capitale), Manuel Salvador Ospina Cifuentes, est arrêté et mis en accusation.

Sur Internet, j’ai vu une photo prise quelques instants après le meurtre de Héctor Abad Gomez qui nous montre, accroupi sur le trottoir à côté du cadavre de son père, hagard, un jeune Héctor Abad Faciolince dont le regard semblait s’être momentanément détourné de la scène du crime. Dans ce curieux regard, me suis-je dit, sans pouvoir tout à fait me l’expliquer pourquoi, se retrouvait condensé, rétrospectivement, en une sorte d’étrange «flashforward», le long processus qui devait aboutir vingt ans après à la rédaction de ce livre. Il n’y pas de légende à cette photo, mais je reste malgré tout convaincu qu’il s’agissait bien de lui.

….

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L'oubli que nous serons

« Mon père s’était toujours déclaré : chrétien en religion, marxiste en économie, libéral en politique. »



Ce livre, je l’ai refermé avec regret. Hector Abad Faciolince a su me faire passer toutes ses émotions, tout son amour, sa tendresse, pour son père, Hector Abad Gomez. Son écriture m’a beaucoup remuée. Au fur et à mesure de ma lecture, l’émotion s’est intensifiée malgré une écriture pudique mais chaleureuse. Mais la deuxième partie m’a emportée, attristée, captivée !



L’auteur-narrateur nous dresse un très beau portrait de son père, celui d’un homme engagé, médecin, très soucieux d’améliorer les conditions de vie dans les quartiers populaires afin d’endiguer la misère. Ses combats au quotidien tournent autour de la médecine préventive : vaccination, alimentation, et surtout, l’eau potable, l’hygiène. Il se rend au contact des plus démunis accompagné de ses étudiants afin de sensibiliser ces derniers au sort des plus démunis et attirer leur attention sur le contraste qui existe entre les riches et les pauvres dans cette Colombie des années 60, à Medellin.



Hector Abad nous conte son enfance heureuse, insouciante, au côté d’un père attentif à ses enfants, leur transmettant la culture, indifférent à la richesse, et d’une mère beaucoup plus pragmatique et qui gère admirablement la petite famille. Cette complicité entre le père et le fils nait dans une famille de dix femmes dont cinq sœurs. On comprend aisément la connivence et l’amour « animal » pour reprendre les termes d’Hector qui se joue entre le père et le fils.

Si l’on ajoute à cette connivence, le portrait d’un homme désintéressé, altruiste, parfois excessif, passionné, idéaliste, le fils comme les filles adulent un homme qui cherche à rester en accord entre ses actes et ses paroles, toujours soucieux d’apporter ses connaissances afin de contribuer au bien-être de ses semblables.



L’auteur nous amène à découvrir la société colombienne sur une vingtaine d’années et plus spécialement la ville de Medellin.



La société civile est entièrement captive de la religion catholique, du dogme religieux. Le catholicisme est considérée comme religion d’Etat jusqu’en 1991et gère le quotidien des colombiens jusqu’à l’Education. La vie des colombiens est rythmée par l’Eglise, les prêtres, les évêques. Certaines scènes m’ont particulièrement angoissées tant l’omniprésence de la religion est étouffante !



La maman est croyante, le papa libre-penseur ! On apprécie de sentir l’amour qui unit cette famille, de les suivre dans leur quotidien, de pénétrer leur univers, de découvrir les us et coutumes de ce pays. On pénètre l’Université avec le père qui y enseigne jusqu’au jour où le drame survient et le mot « drame » est faible.



A compter de cet évènement, il ne sera plus possible, pour aucun membre de la famille d’être pleinement heureux. Plus rien ne sera comme avant. Le désespoir incommensurable de cette famille transforme ce père qui se jette à corps perdu dans la bataille des droits de l’Homme. Son besoin de justice tourne à l’exaltation.



Nous sommes dans les années 1970, à Medellin, ville trop connue et meurtrie par la violence qui a succédé à la guerre civile des années 50 à 60 et qui fera souvent les gros titres des hebdomadaires. Pablo Escobar, les conflits armés entre les différents groupes politiques, la délinquance, les explosions terroristes, les règlements de compte entre maffieux et trafiquants de drogue, marquent à tout jamais Medellin jusque dans les années 90.



Hector Abad Gomez est de tous les combats, il s’expose dans ce monde régit par la violence. Le choix de se faire tuer par un autre devient plus attractif si l’on ne perçoit plus la Lumière. Il est de toutes les marches qui manifestent devant le palais du Gouverneur. Naïf, sa pancarte au bout des bras, parfois il se retourne et s’aperçoit qu’il n’y a plus personne derrière lui : étonnant !!! Il écrit, il prend la parole ! Il se bat pour la liberté d’expression, pour une culture libre, il dénonce la torture, les séquestrations, il dérange. Il faut lire son superbe J’Accuse dans El Mundo de Medellin et El Tiempo de Bogota qui sera publié après l’assassinat d’un ami. Evidemment, on retrouve dans ce récit tous les travers des êtres humains. C’est poignant, ca prend aux tripes ! Je suis passée par toute une palette d’émotions avec ce récit.



Hector Abad Gomez est devenu une cible pour plusieurs groupes armées, il a été assassiné le 25 août 1987 par deux types à moto qui lui ont vidé un chargeur alors qu’il se rendait à l’enterrement d’un ami assassiné : un de plus. La Faculté Nationale de Santé Publique porte aujourd’hui le nom d’Hector Abad Gomez lui qui a tant œuvré pour la santé des Colombiens.



Hector Abad Faciolince nous offre un vibrant hommage d’un fils à son père. L’auteur mettra vingt ans avant de pouvoir écrire ce livre tant les mots qui lui viennent à l’esprit sont toujours accompagnés de larmes. Le traumatisme a été d’une telle violence ! C’est un très beau livre et je comprends pourquoi Booky, ce livre figure dans ceux que tu emmènerais sur une île déserte!



En vidant les poches de son père, le jour de sa mort, Hector Abad a trouvé ce poème de Borges écrit sur un morceau de papier qu’il a trouvé au fond de l’une de ses poches.



« Ici et maintenant, nous voilà devenus l’oubli que nous serons. La poussière élémentaire qui nous ignore……. »



Quant à moi je pense « Mon père ce héros au sourire si doux ….. » Victor Hugo



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L'oubli que nous serons

Seul garçon au milieu de cinq soeurs plus une tante, une grand-mère, une mère, des bonnes et une bonne soeur, l'auteur n'a eu que son père vénéré comme présence masculine dès son entrée dans la vie et on se dit que ça l'a construit et influé sur sa personnalité ouverte, généreuse et intelligente, d'autant que son père était un idéaliste, humaniste, altruiste donc, et bien sûr bon et bienveillant.



Tout en nous racontant son père, médecin, homme engagé contre la misère et l'injustice, Héctor Abad dit beaucoup sur la nature humaine dans son ensemble. Il dresse un panorama de la Colombie des années 60 à 80 et la violence extrême qui y régnait et en fit un temps le pays le plus violent du monde avec entre autre ses escadrons de la mort, ainsi qu'un portrait de sa famille qui est tout sauf ordinaire. C'est foisonnant de personnages tous plus étonnants les uns que les autres. Un père "libéral idéologique, mais conservateur dans la vieille conception patriarcal du mariage", une mère féministe avant la lettre, une famille maternelle très religieuse dans laquelle on trouve deux curés rebelles et un autre extrêmement réactionnaire, sans oublier un archevêque et toutes sortes d'autres représentants de L'Église, et le côté paternel assez peu conventionnel.



J'ai adoré la vision narquoise de la bigoterie ambiante de cette époque dans cet endroit du monde que nous offre l'auteur - la réflexion contre l'aveuglement, l'ouverture d'esprit contre l'intolérance - tout cela observé avec humour.



L'auteur fait presque la description d'un père parfait. Presque !.. Heureusement l'homme a quelques défauts…



Ce livre est tout simplement passionnant, instructif et plein d'amour. Malgré quelques longueurs à mon goût, il offre de grands moments d'émotions et une édifiante page d'histoire de la Colombie.



Ce récit est un cri d'amour et un magnifique hommage rendu à un père adoré, mort assassiné parce qu'il était un homme bon et engagé contre l'injustice et la corruption.
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L'oubli que nous serons

La lecture de ce merveilleux livre est bouleversante, je l'ai lu assez rapidement car on ne peut pas attendre pour connaitre la suite. C'est un témoignage émotif, même si l'auteur avoue n'avoir pas voulu mettre de trop. La seule fois que je me suis sentie éblouie pendant la lecture/écoute d'un ouvrage c'était avec un livre de Romain Gary. Hector Abad a provoqué en moi des frissons. J'ai écouté la version audio livre en espagnol, d'ailleurs cette version est lu par l'auteur, sa voix transmet aussi de l'émotion. J'ai alterné avec la lecture en espagnol. J'espère que la version en français soit aussi claire pour transmettre tout cela. L'auteur dit écrire pour ne pas oublier tout ce qu'il a vécu avec son père. Mais aussi comme une sorte de vengeance pour dire partout sa vérité, il utilise les mots pour dénoncer des injustices contre sa famille. Il s'agit d'un hymne au travail de son père, et à sa relation avec lui. La lecture de différents chapitres nous permet de connaitre son père à travers les yeux du fils, pendant son enfance, adolescence et puis devant la mort de sa soeur. Personnellement, je trouve que ce chapitre est le plus bouleversant de tous. Si je devais choisir un seul livre parmi tous ce que j'ai lu cette année, je pense que je choisirais celui-ci. Abad nous invite à lire son livre dont le titre est inspiré en un extrait de Borges. En quelque sorte il s'agissait d'un extrait choisi pour son père avant de mourir assassiné. Nous apprenons beaucoup sur les difficultés traversées en Colombie pendant les années 70 ; Un passage fait mention à la vie culturelle des années 70 à Mexico, il y a même une sorte de liste de différents plats traditionnels mexicains. Cette année, ce livre a été adapté dans un film.

J’ai attendu l’arrivée de cette ouvrage en version française, pour faire comme d’habitude maintenant une consultation en de deux versions : en espagnol et puis en version française. J’ai tout d’abord lu la préface écrite par Mario Vargas Llosa récemment admis à l’académie française, je préfère d’ajouter la présentation bouleversante et très bien écrite par Vargas Llosa. Quand un grand écrivain fait des compliments d’un autre écrivain ; à mon avis il faut la prendre plus sérieusement. Je transcrits ici un extrait de la préface parue en France en 2010.



Il est très difficile d’essayer de synthétiser ce qu’est « l’oubli que nous serons » sans trahir ce livre, parce que, comme tous les chefs d’œuvre, il est plusieurs choses à la fois. Dire qu’il s’agit d’une mémoire déchirée sur la famille et le père de l’auteur – qui fut assassiné par un tueur- est certain, mais cela reste limité et infime, car ce livre est, aussi, une saisissante immersion dans l’enfer de la violence politique colombienne, dans la vie et l’âme de la ville de Medellin, dans les rites, les petites choses de la vie, l’intimité et la grandeur d’une famille, ainsi qu’un témoignage délicat et subtil d’amour filial, une histoire vraie transfigurée par son écriture et sa construction en une superbe fiction, et l’un des plaidoyers les plus éloquents jamais écrits contre la terreur comme instrument d’action politique.

Ce livre est déchirant mais pas terrifiant, écrit qu’il est dans une prose qui reste en deçà de l’effusion sentimentale, précise, claire, intelligente, savante, sollicitant adroitement et surement l’esprit du lecteur, lui cachant certain données et le distrayant, afin d’exciter sa curiosité et son attente, pour l’obliger de la sorte à participer à la tache créative de l’auteur, main dans la main…

L’oubli que nous serons n’est pas un livre démoralisant malgré, la présence dévastatrice, dans ses pages, de la souffrance, de la nostalgie de la mort. Au contraire, comme il va toujours dans les œuvres d’art réussies, ici la beauté formelle, la qualité d’expression, la lucidité de réflexions, la grâce et la finesse avec est présenté cette famille si attachante et chaleureuse – on aimerait qu’elle soit la sienne propre- font un livre qui élève l’esprit et prouvent que la sensibilité et l’imagination d’un créateur inspiré et généreux peuvent puiser même aux plus viles, aux plus cruelles expériences, pour défendre la vie et montrer qu’il y a en elle, malgré tout, au-delà de la douleur et de la frustration, également de la jouissance, de l’amour, des idéaux, des sentiments élevés, tendresse, piété, fraternité, et même des éclats de rire (préface Vargas Llosa, traduit de l'espagnol par Albert Bensoussan

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L'oubli que nous serons

Une ode à un père adoré et engagé dans un pays où exprimer ses opinions politiques ou ses valeurs n'est pas de tout repos et sans risque. On est au côté de ce père et de toute sa famille impliquée et enthousiaste. Cependant il y a quelques longueurs dans cet ouvrage notamment sur les aspect religieux
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L'oubli que nous serons

Ce médecin fut assassiné à Medellín, en 1987. Fernando Trueba retrace sa vie dans un beau film, faussement léger. Le récit ensoleillé d’une tragédie colombienne.
Lien : https://www.nouvelobs.com/l-..
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L'oubli que nous serons

Une belle découverte, que cet auteur colombien dont je n'avais jusqu'ici parcouru que quelques pages de l'éloge de la paresse, en version originale. Dans L'oubli que nous serons, Hector Abad nous livre les souvenirs d'un amour inconditionnel, celui du père, qu'une mort dramatique, un assassinat, a rendu si douloureux qu'il lui aura fallu vingt ans pour poser des mots sur cette histoire familiale personnelle, retranscrire des tranches de vie gravées dans sa mémoire que l'écrivain voulait libérées du ressentiment, de la haine, de l'idéalisation affective, de la mythification inhérentes aux fins dramatiques, de la distorsion du temps qui passe. Mais, ce travail marque aussi la volonté de prolonger l’existence de l'être aimé, de lutter avec un roman contre la disparition qui deviendrait irrémédiable à mesure que s'éteindraient tous les gens qui l'avaient connu. C'est aussi en filigrane, le portrait de la Colombie, un pays gangréné par la violence politique ou maffieuse durant des décennies qui s'est engagé il y a quelques années dans un processus de pacification, mais le chemin est encore long. Ce fut un bon et beau moment de lecture, même s'il s'agit d'une traduction, le résultat dénote d'une langue originelle riche et soutenue.
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La Secrète

En pleine jungle, au coeur des montagnes de la province d’Antioquia au nord-ouest de la Colombie, la Secrète est la demeure des Angel depuis un siècle et demi et l’arrivée des premiers colons dans la région. Anita, ultime pierre angulaire de la famille, vient de mourir, laissant la demeure et ses plantations de tecks et de caféiers à ses trois enfants. L’aînée Pilar, gardienne des lieux et des traditions familiales, s’est toujours consacrée à la sauvegarde de la propriété et a promis sur le lit de mort de son père de ne jamais vendre le domaine. Antonio, violoniste exilé à New York pour y vivre son homosexualité au grand jour, revient régulièrement passer ses vacances à la Secrète à laquelle il est viscéralement lié. Eva, femme émancipée attachée à son indépendance, a pris la maison en grippe depuis qu’elle y a échappé de justesse aux représailles de racketteurs. Quel sort la fratrie va-t-elle décider pour la Secrète ?





Alternant constamment les voix de chacun des frère et sœurs et leurs récits des liens indéfectibles qu’ils ont noués avec la maison de leur enfance, le roman retrace peu à peu l’histoire de cette famille et, à travers elle, celle du pays tout entier. Terre de pionniers conquise de haute lutte sur la forêt et la montagne, réceptacle de l’attachement viscéral de générations qui se sont éreintées à la domestiquer, la Secrète a traversé avec les Angel tous les soubresauts du pays. Guerres civiles et coups d’état, affrontements entre libéraux et conservateurs, vagues successives d’« envahisseurs » : guérilleros marxistes, paramilitaires, narco-trafiquants et, en dernier lieu, compagnies minières et promoteurs immobiliers … Jusqu’ici, la famille a su plier et rebondir, parfois en payant le prix fort, et rien n’a pu la déraciner de ce lieu défendu bec et ongles contre les agressions, autant humaines que naturelles et climatiques. Pourtant, après tant de péripéties et de dangers traversés, l’éclatement de la dernière génération ainsi que l’envie d’une vie libre et confortable pourraient bien, assez ironiquement, mettre un terme à l‘épopée de la Secrète, rattrapée, comme tant d’autres grandes demeures devenues trop lourdes pour leurs propriétaires, par les contraintes économiques et par l’urbanisation.





Si j’ai apprécié le versant historique du roman et la connotation nostalgique d’un récit que le passage du temps, le poids du destin et la cruauté du hasard imprègnent d’une saveur douce-amère, j’ai trouvé lassante la lenteur d’un texte qui semble souvent tourner autour de son sujet. Même si sa lecture nécessite quelque effort, ce livre aux accents sans doute autobiographiques reste indéniablement une œuvre intéressante sur l’ambivalence humaine entre attachement aux racines et envie d’émancipation, besoin d’ancrage et rêve de liberté. Une chose est sûre : l’exilé ne retrouvera jamais intact ce qu’il a laissé…


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L'oubli que nous serons

"L'oubli que nous serons" : c'est un titre magnifique pour un roman remarquable. Cette phrase, tirée d'un poème de Borges a été retrouvée par l'auteur sur le corps sans vie de son père. Assassiné.

L'auteur raconte avec tendresse et finesse son enfance et son adolescence en Colombie, plus précisément à Medellin dans la seconde moitié du 20ème siècle où les inégalités sociales conduisent à une grande violence réprimée dans le sang. Des hommes et des femmes sont assassinés pour leurs opinions, leurs engagements sociales et/ou politiques.

L'Eglise chrétienne imprègne la société par sa morale rigoureuse.

Dans ce roman, on entre dans l'intimité d'une famille cultivée. le père et médecin et enseignant. Son engagement auprès de la population la plus pauvre le condamnera à une mort violente.

Ce père admiré, aimé est dépeint avec pudeur.

Hector Abad retrace chaque geste, chaque paroles et pensées de son père. Il témoigne de la vie simple et douce d'une famille nombreuse. Ses joies dans la ferme familiales ; ses drames. La mort d'une de ses soeurs bouleverse le clan.

La mort sauvage, féroce s'invite dans les familles.

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