La vie intellectuelle sous l'
occupationBernard PIVOT propose un débat autour du
théâtre, du
cinéma, et de la
littérature sous l'Occupation, en compagnie d'Hervé LE BOTERF,
journaliste, romancier,
Henri AMOUROUX,
journaliste, ex-directeur de France Soir,
Pierre SEGHERS, poète, éditeur,
Maurice TOESCA, romancier, et
Marcel CARNE, cinéaste.- Hervé LE BOTERF présente son livre "La vie parisienne sous l'Occupation", panorama de...
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Il m'arrive assez souvent de parler devant les adolescents. Pour faire comprendre à mon auditoire la distance qui sépare leur monde du monde de 1940 - un autre monde - , je dis : "Les transistor n'existait pas*."
La télévision, l'avion à réaction, le TGV, les satellites, Internet, qui permet de transmettre, à l'autre bout du monde, en temps réel, textes, sons, images, n'existaient pas d'avantage, mais il me semble que le transistor, compagnon de tout les instants, de tous les lieux, de tous les milieux, véhicule bon marché de l'information immédiate, constitue le plus parfait des symboles.
Volumineux, encombrants et lourds, 5 200 000 postes de TSF diffusaient, avant la guerre, les émissions de Jean Nohain, les chansons de Tino R4osi et les réclames célébrant les vertus de robustesse d'un meuble "signé Lévitan", mais ils étaient tributaires d'une prise de courant**. Ils ne fuiront pas au nombre de ces trésors que le Français, fuyant l'avancé allemande, entasseront dans leurs voitures ou sur leurs charrettes. Sur ces 5 200 000 postes, combien resteront, muets, dans les maisons abandonnées ? On l'ignore. Mais, sur les routes de la défaite, les fuyards, lorsqu'ils voudrons entendre les communiqués militaires français, s'agglutineront devant une fenêtre laissée volontairement ouverte, se regrouperont en silence dans un café, autour du poste d'où tombent les mots qui désespèrent. Pagnol se souviendra de ces images. Dans "La fille du puisatier", elles lui on inspiré l'une des scènes les plus poignantes : ces paysans rassemblés, le 17 juin, pour écouter, dans un silence coupé de sanglots, le Maréchal Pétain annoncer qu'il a demandé l'armistice***.
*La découverte est en 1947; le mot de 1952.
**A l'exception de quelques postes à galènes, le plus souvent fabriqués par des bricoleurs.
*** L'allocution, le 17 juin, du maréchal Pétain, après la Libération, être remplacée, dans la même scène, par l'appel du 18 juin général de Gaulle, ce qui rendait le film incompréhensible.
Mais les enfants? Comment coudre sans trembler, sur leur petite robe ou sur leur veste, un insigne qui risque d'attirer les plaisanteries cruelles et les brimades de toute l'école. Certains d'entre eux refusent d'aller en classe. Il faut les accompagner, presque les traîner de force. Mais, alors, parfois, le miracle se produit. Des camarades se ruent vers eux, éloignent les pères, entraînent les petits juifs qui ont bien vite oublié l'objet de leur terreur.

C'est pour annoncer à Paul Reynaud, que les ministres anglais viennent d'accepter le principe d'une union intime franco-britannique qui ferait de chaque Français un citoyen britannique, de chaque Anglais un citoyen français.
Les deux nations mettraient en commun leurs armées, leurs parlements, leurs ressources, leurs territoires.
A la surprise allemande des blindés et des avions, les alliés, à la veille du désastre, répondraient par la naissance d'une nation tentaculaire, installée sur tous les continents et dont Hitler ne pourrait jamais venir à bout puisque ses armées, sous commandement unique, seraient partout dans le monde et qu'une défaite ne pourrait être que locale et provisoire.
L'idée n'est pas de de Gaulle mais de Jean Monnet...
.../...
Ce document, dont la seule chance réside dans l'ampleur du drame, a ssez vite convaincu Churchill et les ministres britanniques malgré (ou à cause de) tout ce qu'il comporte de flou, de naturellement imprécis.
Va-t-il séduire Paul Reynaud ? Et les ministres français ?
D'ailleurs, malgré les sévérités de leur législation antisémite, Pétain et Vichy gardent, dans toute cette affaire, et au moins pendant plusieurs mois, bonne conscience.
La persécution contre les juifs est, par essence liée à la poursuite des responsables de la défaite française : francs-maçons, parlementaires, juifs donc, et surtout juifs étrangers.
Le sentiment de trahison, commun en juillet et août 1940, impliquait naturellement l'existence des traîtres aisément identifiables.
Seul de Gaulle et avec lui, ayant ou non, entendu son appel, répondant à sa logique ou répondant à la fureur qui les saisit, quelques anonymes, aviateurs, marins, fantassins évadés de tant de colonnes résignées, rompent le charme malsain d'une défaite totale, si totale que tout un peuple acceptera bientôt, sans sourire, d'y voir la vengeance du ciel.
Pourquoi Ouradour-sur-Glane ?
Les Allemands ont-ils confondu Ouradour-sur-Vayres et Ouradour-sur-Glane ? La confusion paraît d'autant plus difficile à admettre que les deux villages, l'un au sud-ouest, l'autre au nord-ouest de Limoges, sont distants de 40 kilomètres et que les officiers allemands savaient lire une carte.
Défavorisé en Angleterre où Churchill attendait soit l'amiral Darlan qui, amenant avec lui la flotte, eût été accueilli avec enthousiasme, soit des hommes politiques connus dont les Anglais pouvaient espérer qu'ils fassent contrepoids au prestige du Maréchal.
De Gaulle arrive seul à Londres le 17 juin. Il va rester seul, ou presque, pendant de nombreux mois. Ce jeune sous-secrétaire d’État qui n'a que onze jours "d'expérience" politique, ce général de brigade à titre temporaire affirme et affirme très haut, représenter la France, ÊTRE la France mais, autour de lui, il ne groupe que très peu de Français, alors que presque tous se retrouvent derrière Pétain.
Dans Combat du 2 septembre 1944, Jean-Paul Sartre allait décrire le spectacle d'une femme tondue, marchant lentement boulevard Saint-Michel, suivie de sa cour dérisoire de mégères hilares. "Elle secouait la tête de droite à gauche en répétant très bas : "Non, non, non ! "
"Eût-elle été criminelle, ce sadisme moyenâgeux, ajoute Sartre, n'en aurait pas moins mérité le dégoût."
La prétention de Rol est naturellement appuyée par Kriegel-Valrimont. Elle l'est également par Chaban. Bien qu'il se soit efforcé de contenir l'insurrection, Chaban n'en trouve pas moins injuste, "sur le plan de l'histoire," que la signature de Rol, représentant du peuple de Paris en armes, ne figure pas sur le document consacrant la capitulation de von Choltitz.
La signature du pacte germano-soviétique a constitué pour beaucoup un signal d'alarme. L'annonce de l'entrée des troupes allemandes en Pologne déclenche les derniers préparatifs. Les habitants de Saint-Louis (Haut-Rhin) qui écoutent, le 1er septembre, à 10 heures, devant le café Philibert, le discours d'Hitler annonçant que ses armées ont envahi la Pologne, rentrent immédiatement chez eux pour équiper leurs enfants et terminer leurs valises.
Comment faire tenir toute une vie dans trente kilos ? Et dans soixante, ou quatre-vingt-dix ? Il faut se livrer à des choix douloureux. Ne rien oublier tout en étant certain que l'on oubliera mille choses et que le souvenir en reviendra, lancinant, dès que le train de l'évacuation se sera mis en route. Que faire de toutes les photos, des lettres, des souvenirs familiaux, de tous ces liens, invisibles aux indifférents, mais que l'on ne peut couper sans mourir un peu ? (page 160).