Citations de Jean-Claude Ameisen (116)
De la conception à la naissance, de l'enfance à l'âge adulte, et de la vieillesse à la mort, se construit puis se défait notre univers singulier et éphémère.
Dans la mythologie nordique, le dieu Odin était accompagné de deux corbeaux.
Hugin, le symbole de la pensée.
Et Munni, le symbole de la mémoire.
La mémoire et la pensée, qui s'envolaient, parcouraient les terres et les mers, et revenaient de leur voyage pour permettre au dieu de connaître l'état du monde.
Et puis il y a un autre sens, plus mystérieux au mot hasard : ce qui serait véritablement aléatoire, ce qui non seulement serait imprévisible, mais surgirait de nulle part, en l'absence de toute cause. C'était le cas pour la foudre avant la découverte de l'électricité, et le tremblements de terre avant la découverte de la tectonique des plaques. A ma connaissance, le seul domaine des sciences dans lequel on considère aujourd'hui qu'une forme de hasard vrai opère est la mécanique quantique, l'exploration du comportement de la matière à son échelle la plus élémentaire. Mais dès qu'on change d'échelle, dès que ces éléments interagissent les uns avec les autres en formant des ensembles, les relations de causalité prennent le pas sur ce hasard vrai.
Entretien avec Jean-Claude Ameisen par Jean-Michel Djian.
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Il y a en nous un savoir sur le monde dont nous sommes le plus souvent inconscients, et qui émerge durant nos périodes de calme, et durant la nuit, au cœur de ces périodes de sommeil où nous semblons nous retirer du monde.
Une inscription, déjà, dans notre mémoire, de ce que nous n'avons pas encore vécu.
Et que nous ne vivrons peut-être jamais.
Comme l'art, la science est une tentative toujours renouvelée d'appréhender, de manière de plus en plus riche, la réalité de l'univers au-delà de ses reflets.
Nous avons une étonnante capacité à animer le monde. A entrevoir, dans ce qui nous entoure, la présence d'un autre. Est-ce un visage ? Une réminiscence ? Une illusion ?
L’inépuisable signification de la musique, qui défie la traduction. (Georges Steiner)
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La musique est un appel, une invitation au voyage.
Elle est un chemin vers l’autre. Un appel au dialogue.
Elle est un langage d’avant les mots, d’avant les mots humains.
Ceux qui ont de la mémoire peuvent vivre dans le fragile temps présent, dit Patricio Guzman. Ceux qui n'ont pas de mémoire ne vivent nulle part.
Tout vrai regard que nous portons sur le monde est un échange, un partage, un dialogue. Tout vrai regard que nous portons sur le monde est un départ.
Depuis les temps immémoriaux, les cultures humaines ont mêlé, sous des formes toujours nouvelles, l'art, la science, la technique et leur sens du sacré.
Les chercheurs du FMI estiment que le coût des morts prématurées causées par l'utilisation des énergies fossiles s'élève à 4.900 milliards de dollars par an.
Le temps viendra
où, avec allégresse,
tu t'accueilleras toi-même, arrivant
à ta propre porte
et chacun sourira et souhaitera la bienvenue à l'autre
et dira, assieds-toi là. Mange.
Tu aimeras à nouveau l'étranger que tu étais.
Donne du vin. Donne du pain. Redonne ton coeur
à toi-même, à l'étranger qui t'a aimé
toute ta vie, que tu as ignoré
qui te connaît par cœur.
Assieds-toi, Fais-toi une fête de ta vie.
[Derek Walcott]
L'environnement extérieur est plus qu'un simple filtre — un simple goulet d'étranglement — à travers lequel sont sélectionnés ou éliminés les individus et les espèces. L'environnement extérieur peut exercer une influence directe sur la manière même dont les cellules et les corps utilisent leurs potentialités génétiques et donc sur les modalités de construction des embryons.
[page 406 de l'édition poche 2003]
En partageant et en intégrant ces informations individuelles, parcellaires et incomplètes, la colonie, dans son ensemble, fait émerger une forme d'intelligence collective qui permet à chacune des abeilles de la colonie de s'adapter à un environnement complexe et changeant dont aucune abeille n'a, à elle seule, une représentation globale.
Les horloges biologiques circadiennes sont une exception. Elles n'accélèrent pas le rythme de leurs oscillations quand la température interne des cellules et du corps augmente, et ne diminuent pas ce rythme quand la température interne diminue.
Cette propriété est l'une des causes de la robustesse de ces horloges - de la résistance de leur période de vingt-quatre heures aux fluctuations permanentes de leur environnement. Mais résistance aux changements de l'environnement ne dit pas déconnexion de l'environnement.
« Mais la notion de programme en biologie est une notion ambiguë. Étymologiquement, le terme de programme signifie pré-écrit. Il suggère l'existence d'une prédétermination rigide et favorise implicitement une confusion entre la nature des informations contenues – pré-écrites – dans nos gènes et l'ensemble des interactions – des opérations – qui déterminent la manière dont nos cellules et notre corps consultent et utilisent ces informations. Ambiguïté que le biologiste et philosophe Henri Atlan a soulignée, à la fin des années 1970, de la manière suivante : « Il s'agit d'un programme qui a besoin [des produits] de sa lecture et de son exécution […] pour [pouvoir] être lu et exécuté. » Qu'en est-il de la mort cellulaire « programmée » ? Où, et de quelle manière, dans quel langage et sur quel support, est déterminée le destin des cellules qui composent le corps en train de se construire ? Comment, dans l'espace et le temps, durant les innombrables étapes du développement, c'est réglée la chorégraphie de la vie et de la mort qui sculpte l'embryon en devenir ? »
Peut-étre avons-nous peint sur notre propre peau, avec l'ocre et le charbon, longtemps avant d'avoir peint sur la pierre, dit la poétesse et romancière canadienne Anne Michaels, il y a quarante mille ans, nous avons laissé des empreinte de mains peintes sur les parois des cavernes de Lascaux Ardennes, Chauvet.
Le pigment noir utilisé pour peindre les animaux à Lascaux était fait de dioxyde de manganèse et de quartz ; et près de moitié du mélange était du phosphate de calcium. Le phophate de calcium est produit en chauffant l'os à quatre cents degrés Celsius, puis en le broyant.
Nous avons fabriqué nos peintures d partir des os des animaux que nous peignions.
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La motivation la plus profonde de la recherche scientifique n'est pas l'exploration de l'inconnu: l'inconnu est trop vaste. Tout chercheur part à la découverte de ce qu'il a déjà entrevu, imaginé, de ce qu'il pense présent mais caché aux regards. D'où l'importance en science des hypothèses, des théories, des paradigmes, des constructions et des projections intellectuelles. La découverte est presque toujours une redécouverte. Même si souvent elle ne correspond pas à ce qu'on attendait.
Lire et plonger soudain dans des mondes inconnus, partir, voyager, immobiles... nous perdre puis revenir et renaître plus riches de ce que nous avons vécu.
La lecture est une conversation.. mais une sorte de conversation étrange. C'est une communication avec d'autres, au milieu de la solitude, en leur absence.
Emission Sur les épaules de Darwin du 2 novembre 2013
"Le passé n'est pas mort",dit William Faulkner
"Le passé n'est pas mort - Il n'est même pas passé."
Parce qu'il continue à vivre en nous .
Parce que nous sommes ce qu'il est devenu.