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Citations de Jean-Philippe Jaworski (729)


Après toute la soudure que j'avais déjà envoyée pour lui, me faire porter la médaille ! La charogne rupine ! Le marle crapoteux ! La croqueuse embourdillée ! (p. 468)
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Au monde, rien ne va de droit fil. Avez-vous déjà suivi un chemin qui vous mène tout droit à destination ? Avez-vous déjà descendu une rivière qui va se jeter tout droit dans la mer ? Avez-vous déjà vu la lune ou le soleil traverser tout droit le firmament ? Même les étoiles dansent de lentes farandoles. L'existence n'est qu'un immense canevas de lacets, de virages, d'embranchements et de méandres. Tout est capricieux et infléchi, et la vie entière est un entrelacs d'arabesques. Seuls les lances et les javelots sont droits...
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Situation irritante, quand un souvenir rétif vous nargue comme un truand tapi dans les ombres.
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Blandin était plus doué pour peindre que pour parler. Quand il se décida enfin à me livrer son histoire, je m'attendais à je ne sais quel roman tragique, à une ballade poignante, voire à quelque conte de fées qui aurait pu donner sens au charisme énigmatique d'Alma... Je fus quelque peu déçu. Le récit qu'il me rapporta, heurté d'hésitations et de langueurs, s'ouvrit sur un béguin d'une grande banalité.
Alma avait été le premier amour de Blandin. Il s'agissait d'une novice qui avait reçu son éducation à Havreval. Comme la plupart des monastères de la Vieille Déesse, cette maison accueillait une double communauté, masculine et féminine. Toutefois, les deux chapitres étaient bien séparés et, hormis les offices, frères et moniales n'avaient que de rares occasions de se croiser. Ainsi, Blandin avait-il passé une grande partie de son enfance à deux pas d'Alma sans même soupçonner son existence. Quand il avait commencé son apprentissage de miniaturiste, le garçon avait participé à des sorties hors du monastère afin d'identifier les différentes terres qui fournissent les pigments des couleurs chaudes ou des nuances de vert. A cette occasion, il avait fait la connaissance d'élèves de la soeur apothicaire, qui apprenaient à herboriser. Parmi elles, il y avait Alma.
Cette première rencontre avait été rien de moins que superficielle et timide. Elle avait toutefois été parée par une impression de liberté et d'espace, conférée par cette promenade hors de l'enceinte du monastère. Quoique Blandin ne m'eût pas présenté les choses ainsi, je compris qu'il avait confondu l'éblouissement provoqué par la beauté d'Alma avec l'ivresse que lui avaient apportée le ciel, les prés et les bois, la découverte d'horizons immenses au-delà des murailles monastiques. La jeune fille, qu'il continuait à voir à l'autre bout de la nef pendant les offices, avait formé son échappée belle dans l'austérité du monastère.
(Comment Blandin fut perdu)
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Le souvenir joua ainsi à cache-cache pendant deux ou trois jours. A l'improviste, je saisissais une bribe, je me sentais gagné par l'émotion ; mais au moment où j'allais me rappeler, le fragment estival se délitait, me plantait tout dérouté, plein de cette irritation que vous laisse le mot sur le bout de la langue. (p. 653)
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Dans les collines autour de la cité, le vacarme braillard des cigales était probablement en train de se clairsemer ; en quelques jours, les dernières crécerelles, gagnées par la torpeur, allaient s'enrouer et se taire. Sur les bois de chênes verts, de pins et d'oliviers allait tomber un grand silence méditatif, bizarrement assourdissant. (p. 262)
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_ Parler de ça, ça n'est guère utile, grommela l'officier. Ni glorieux. Son excellence Cladestini a été tuée au service de la République, ça devait suffire.
_Simplification, soupira Regalio Cladestini... Réduction... Mais là où j'en suis, je mesure... combien la vérité est nécessaire... Oublier, même une catastrophe... c'est le début de la décomposition d'une nation. (p. 136)
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J'adressai au sorcier un sourire qui se voulait incisif, et puis me repris un peu tard en réalisant que je découvrais une gencive dégarnie.
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Diplomatiquement, je faisais mine de regarder ailleurs, mais je n’en perdais pas une miette. Finalement, l’horrifique Psammétique se résolut à grimper à califourchon sur le dos d’un janissaire, et franchit dans cette posture impériale (les genoux un peu plus haut que son maigre postère) l’espace intermédiaire entre la marine de la République et la flotte du Sublime Souverain.

Ce genre d’aventure, ça vous froisse toujours une susceptibilité ; aussi je pris bien soin d’éviter d’avoir la fossette qui se creuse ou l’œil qui pétille. Le sorcier renvoya avec raideur son bidet bipède et se drapa dans son autorité, en faisant semblant de ne pas voir que je faisais semblant de n’avoir rien vu. C’est le style d’imposture qui me met toujours de bonne humeur, parce que ces simagrées hypocrites humilient l’objet de votre sollicitude tout en faisant de lui votre débiteur.
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Car c'est la guerre qui se rue derrière le cerf. Cette fringale carnassière pousse sur ses voies les pires tueurs du Gué d'Avara. Coude à coude se pressent des vieux et des jeunes, des gros et des maigres, des vifs et des forts. Mais tous, nous arborons la prestance tape-à--l’œil des guerriers. Les fibules qui accrochent nos sayons, les torques qui ceignent nos cous, les bracelets qui galbent nos muscles valent plus que dix vies d'hommes : ils publient notre mépris du danger. Des tatouages bleus s'enroulent sur nos bras et cyanosent nos mufles ; sabrés qui sur la joue, qui sur le nez, qui dans l'orbite par de méchantes balafres, nos faciès de guède et de coutures grimacent la cruauté.
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Les hurlements des argousins couvrirent les braillées des mourants, une grêle de coups de corde et de coups de fouet s'abattit sur les épaules des forçats qui paniquaient, et le temps de siffler un godet, nous repartions fringants faire du rentre-dedans aux lascars de Ressine.
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Tout est opinion à la guerre, opinion sur l'ennemi, opinion sur ses propres soldats. Après une bataille perdue, la différence du vaincu au vainqueur est peu de chose.
Napoléon Bonarparte.
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Sous nos pieds résonnaient l'ahanement rauque des forçats et les vulgarités aboyées par les argousins. De la misère des bas-fonds à la vanité fleurie des élites, il n'y avait guère qu'une toise de distance. La galère, en définitive, offrait un raccourci saisissant de la République : esquif pestilentiel et pédant, qui franchissait avec une célérité orgueilleuse les gouffres amers.
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- Flatter une dame, lança-t-elle, c'est déjà se proposer d'abuser d'elle.
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Abandonner les canassons, je n'avais rien contre. Nous avancerions plus lentement, mais au moins je ne soupirerais plus après un bain de siège... Cela dit, la feinte du sorcier ma paraissait cousue de fil blanc. Un groupe de quatre personnes comprenant un métèque bien foncé et deux barbares tatoués, ça ne risquait pas de passer inaperçu dans l'arrière-pays ciudalien... (p. 553)
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À fréquenter ainsi les riches et les nobles, j'ai développé ma connaissance des usages, mon sens du paraître, des subtilités sophistiques de diplomate. À trop vivre dans le siècle, je polissais des vertus futiles. Je cultivais ma vanité. Heureusement, tôt ou tard, le coup d’œil effrayé d'un enfant ou la moue indisposée d'un élégant me renvoyait brutalement à moi-même, me remémoraient les stigmates gravés sur mon visage.
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La trouille, pour moi longue sangsue visqueuse, c'est une vieille maîtresse. Une longue sangsue visqueuse, nichée dans les replis de mon ventre et dans le canal de mes vertèbres, furtive comme un ver solitaire, mais toujours prompte à mordre quand la situation patine, quand les couteaux sont tirés, quand l'ennemi charge. Elle s'y connaît pour m'entortiller l'intestin, pour me sucer l'échine, pour me coller une gentille chair grenue. (p. 448)
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Quand le périple s'étire, long et incertain, la destination n'a d'attraits que tant qu'on y a pas encore touché. Même une terre aimée demeure vaguement étrangère si l'on y retourne après une longue absence.
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Je me rappelle que juste avant de tomber dans l'embuscade des bergers ausques, là-bas, dans le causse, je me suis presque rêvé corbeau porté par le vent des cimes ; quand j'ai chassé avec mon frère, mon oncle et tous nos hommes, je me suis senti loup au milieu de la meute ; et quel est donc ce grand cerf que je cours, dans ce monde et dans l'autre, en compagnie des vivants et des morts, sinon un souvenir qui continuera à se dérober tant que je n'aurai pas compris que c'est moi que je chasse ? Le Forestier en personne m'a traité de chien ; je n'y ai entendu que l'injure, mais peut-être l'image recelait-elle une vérité primitive. Je suis corbeau ; je suis loup ; je suis cerf ; je suis chien - et c'est pourquoi la mort de ma pauvre Uimpa me fait encore saigner le cœur... Je suis entretissé des existences animales que j'ai traversées avant de sortir du ventre de ma mère, et leur mémoire palpite, plus vive que jamais, dans l'exaltation de la course, dans les rituels de pouvoir et de défi, dans le goût du sang. En fait, ce collier et ces fers qui m'écorchent ne se révèlent pas si lourds. Ils me fixent un instant dans la nature du captif ; ils me rappellent une condition que j'ai connue entre la sauvagerie et l'humanité ; ils enrichissent le cycle de mes incarnations. Après tout, je suis déjà mort et je suis déjà revenu. J'ai tous les avenirs devant moi. C'est ce qu'avait bien compris Excingomar : quel que soit le terme de ma captivité, je serai bientôt libéré. Je reviendrai : chagrin, corbeau, loup, chanson ou chien... Ou héros vengeur. Je reviendrai.
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La mer, c'est votre cuite la plus calamiteuse, en pire et sans l'ivresse.
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