Citations de Jean d` Aillon (601)
Parce que la charte se terminait par une terrible malédiction. Il y était précisé que quiconque tenterait de la falsifier ou de la corrompre recevrait la malédiction de tous les saints de Dieu, des anges, des archanges, des patriarches, des prophètes, des apôtres et des martyrs. Ceux-ci confondraient les tricheurs et les falsificateurs, et les feraient disparaître de la face de la terre. Ils seraient damnés en ville et dans les champs, debout et assis, reposant ou marchant, endormis ou éveillés. Ils perdraient ce qu’ils possèdent et ils ne pourraient obtenir ce qu’ils n’avaient pas. Enfin ils seraient dévastés par l’épée à l’extérieur et par la peur à l’intérieur.
Menacer n’est pas meurtrir.
Dans cette agitation, Guilhem tentait de distinguer les bruits provenant d’animaux de ceux imités par des hommes des bois pour communiquer entre eux.
Mais tant qu’ils dérangeaient un lièvre et le voyaient s’enfuir, tant qu’ils apercevaient un daim ou une biche derrière un fourré, l’animal restant un instant à les examiner avec de grands yeux inquiets avant de détaler, tant qu’ils croisaient un héron pensif se reposant sur les joncs d’un ruisseau, Guilhem savait les hommes absents.
« Tu es libre, sire de Rouvrais. Je te rends ta liberté sans aucune condition. Un cheval t’attend avec tes armes. »
— Je me suis jeté à ses genoux en louant sa générosité et sa clémence, mais il a secoué la tête.
« Il n’y a ici aucune générosité, Franc. Simplement, je connais ton roi. Il recevra ta liberté comme une insulte. Il veut paraître grand et noble, alors qu’il n’est qu’un mesquin roitelet. Il comprendra mon mépris en te voyant, et tant que tu seras près de lui, tu seras le vivant reproche de sa petitesse et de sa bassesse. »
Dans l'ivresse des plaisirs et des fêtes qui suivirent ce succès, celui qu’on nommait le cœur de Lion oublia la conquête de Jérusalem, pour laquelle il était venu en Terre Sainte. J’essayais, comme d’autres, comme toi, Sassy, de lui rappeler notre vœu, mais il n’écoutait pas. Puis vint ce funeste jour où nous partîmes à la chasse dans la forêt de Saron. Il avait tant bu au cours du repas qu’il décida de faire un somme sous un arbre. C’est ainsi que les Sarrasins nous surprirent. Pour laisser le temps à Richard de gagner son cheval et de fuir, je me suis précipité devant les infidèles et je leur ai dit en arabe : « Je suis le roi, sauvez ma vie ! »
Il va vivre encore aujourd’hui, peut-être demain, mais seules les prières pourront le sauver.
De taille médiocre, le chevalier troubadour était quand même plus grand que Tillières et surtout plus jeune. Mais l’abus de la bonne chère l’avait doté d’un embonpoint précoce et d’une trogne rubiconde. Tout en lui exprimait la bonhomie. Cependant rien n’était plus faux dans la fureur d’une bataille.
Tout le monde a un prix. Je connais bien des chevaliers normands qui changeraient de fidélité pour quelques centaines d’esterlins assortis d’un riche fief.
Le loup est un animal intelligent et patient, propre à échafauder des plans pour attaquer ses proies.
Les loups ne se rapprochent autant des hommes qu’en hiver, et quand ils ont faim. Nous n’en avons pas vu depuis des années. Peut-être arriveront-ils si l’eau continue à manquer, car bien du gibier va périr et ils manqueront de nourriture.
Le loup ne hurle que pour avertir ses compagnons, pour les rassembler.
Les loups sont comme les hommes, Guilhem. Ils peuvent être aussi méchants que nous, aussi rancuniers.
Le hurlement tira Guilhem de son sommeil. Il resta un instant dans un état de semi-conscience, croyant se trouver encore dans un rêve, mais la hurlerie ne cessa pas et il se réveilla complètement.
Un loup ou plusieurs ? Il écouta attentivement. Non, il s’agissait d’un seul animal. Dans une meute, le chef hurlait le premier, puis ses compagnons poursuivaient avec des hurlements différents. Or le cri qu’il entendait gardait la même ampleur.
Commencèrent alors les aboiements des mâtins du château. Les chiens répondaient au loup, désireux d’en découdre avec lui.
Guilhem réprima une moue, ne croyant pas au châtiment divin. Sa courte expérience de la vie lui avait même appris que celui-ci s'exerçait parfois à mauvais escient.
Les six hommes étaient assis autour d'une table ronde, sous un énorme ventilateur. Le sol était recouvert de tapis d'Orient et une carte du monde occupait tout un mur, une carte de l'empire britannique qui avait cinquante ans.
Sur la table se dressait une inquiétante statuette romaine en bronze : un faune dansant. Ce faune était le dieu maléfique des forêts, celui qui trompe les hommes avant de les perdre. C'était aussi l'emblème et la marque de la London Controlling Section.
- Elle m'a trompé, Gilbert, comme d'autres. Comme Béatrix de Chissey.
- La Dame de Thury ?
- Oui.
- Pourquoi vous a-t-elle dit que son époux était seigneur de Crèvecoeur, seigneur ?
- Je l'ignore, mentit Guilhem, se refusant malgré tout à accuser Jeanne sans preuves.
Le silence se fit entre euxet Gilbert ne l'interrogea pas davantage. Il suivait son maître.
A un embranchement, Guilhem prit à dextre.
- Où allons nous, seigneur ?
- Où la destinée guidera nos pas.
Submergé par un mélange de dépit et de tristesse, Guilhem se promit de ne plus écouter les femmes. Il ne savait que se battre et il s'netiendrait là.
Désormais sa devise serait : férir ou périr. (p.262)
Le cabaret s'appelait la Carpe d'Argent. Longtemps lieu de rendez-vous des batelier et des haleurs, la taverne était devenue, depuis quelques années, le refuge de soldats débandés, d'estropiats de grand chemin et de laboureurs sans terre.
L'homme à l'oreille unique s'était arrêté de ranger son étagère et écoutait en considérant Trois-Sueurs avec intérêt. Ses yeux s'étant habitués à l'obscurité, Esquinette remarqua alors son cou massif, voûté, ses épaules anormalement larges : c'était un ancien forçat.
Cette douce température pouvait expliquer pourquoi le premier des cavaliers gardait son manteau redingote gris déboutonné. Il laissait ainsi voir une lourde rapière qui pendait sur sa poitrine, en haut d'un baudrier de buffle. Mis à part les soldats et les archers du guet. rares étaient les gens armés en ville, car seule la noblesse en avait le privilège. En outre, les magistrats ou les gentilshommes aixois, ne portaient guère que des épées de parade, aussi les passants et les badauds examinaient-ils les nouveaux venus avec un certain étonnement, mêlé peut-être d'une légère inquiétude.