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Citations de Jesmyn Ward (177)


Pourquoi toute notre colère et notre chagrin accumulés ne produisent que du silence. ça ne va pas, il faut qu'une voix s'élève pour raconter cette histoire...parce que c'est mon histoire et celle de ces jeunes hommes disparus, parce que c'est l'histoire de ma famille en même temps que celle de notre communauté...
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Dunny les conduisit dans le bayou. Ils avaient décidé d’aller pêcher sur une des petites passerelles, pas plus longue que deux voitures bout à bout. Ils n’en avaient croisé aucune en chemin. Le couchant rasait au loin les hautes herbes des marais, entre les pins immobiles où volaient quelques aigrettes.
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Il remettra du bois dans le feu qui brillera comme un phare. Il guettera ses pas dans la boue, sa queue qui claque dans la gadoue. Il regardera au-delà des lendemains et la verra se dresser dans son cercle de feu, fouettée, salie par l’ouragan, sa robe brillante un souvenir, elle n’aura plus que la couleur de ses dents, du blanc de ses yeux, de l’os et du sang, mais la couleur de la vie, et quand il verra, il pleurera des larmes qui, comme l’eau, finissent par user la pierre, la douleur de l’absence.
China. Elle reviendra, grande et droite, sans petits et sans lait. Elle verra tout en bas notre cercle de feu, et elle saura que j’ai veillé, que je me suis battue. Elle aboiera et ça voudra dire : « Ma sœur. » Les étoiles étouffent le ciel mais pas le silence.
Elle le sait, elle, que j’attends un bébé.
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J’attacherai mes petits cailloux avec des ficelles, je les suspendrai au-dessus de mon lit pour qu’ils brillent dans le noir et qu’ils racontent l’histoire de Katrina, la mère qui a envahi le golfe pour tout massacrer, dans un chariot si grand, si noir que les Grecs auraient dit que la tempête chevauchait les dragons. Une mère assassine qui nous prit tout sauf la vie, qui nous laissa nus et groggy comme des nouveau-nés, ridés comme des chiots aveugles, ruisselants comme des serpents dans leur œuf brisé. Le golfe est noir et la terre brûlée par le sel. Il nous faut apprendre à ramper, à fouiller les décombres, à sauver ce qui peut l’être. Katrina est celle qu’on se rappellera jusqu’à ce qu’une autre mère, assoiffée de sang, abatte sur nous ses mains sans pitié.
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Il reste plus que du bois et du fer, tout bousillés, et soudain il y a un grand trou entre avant et maintenant, et je me demande où le monde qui existait ce jour-là est passé, parce qu’on est plus dedans.
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Des fois, je me demande s’il a pas tout oublié, s’il a pas la tête comme une passoire, alors ceux qui lui ont donné le biberon, qui l’ont chouchouté et qui ont bu ses larmes, tout ça, ça passe dans l’égouttoir comme l’eau dans la gouttière, et ça lui laisse plus qu’aujourd’hui, ses trous dans le sable, son petit torse nu, et Randall qui lui crie dessus. Le présent lavé des souvenirs comme les légumes lavés de la terre où ils poussent.
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C’est rien comparé à ce qu’à souffert maman en accouchant de Junior. Comme nous, il a vu le jour dans la chambre des parents, au milieu de la clairière que son père a créée de ses mains avant de nous construire notre maison. On l’appelle maintenant la Fosse. J’avais huit ans, je suis la seule fille de la famille et j’avais rien pu faire. Papa dit que maman voulait pas qu’on l’aide, que Randall et moi étions sortis vite, sous l’ampoule nue au-dessus du lit, alors elle pensait que ça serait pareil avec Junior, mais elle se trompait
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On était comme des branches mouillées, entassées, rien que des débris humains au milieu de tout le reste.
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On arrive au bout de la rue. Ici la tornade a même mordu dans la promenade le long de la plage, laissant des trous pleins d’argile rouge et de coquilles d’huîtres. La station-service, le yacht-club et les vieilles villas blanches à colonnades devant la mer qui nous donnaient l’impression d’être plus petits, plus sales et pauvres encore quand on venait là avec papa, entassés dans le pick-up, acheter de l’essence ou des chips ou des vers pour la pêche, eh ben y a plus rien. C’est pas cassé, c’est pas en ruines, y a juste plus rien. L’ouragan a laissé des poutrelles en fer qui rebiquent sur le béton comme une barbe mal rasée. Et depuis la promenade coulent des rivières. Sur la plage elle-même, y a un canapé. Et sur le bras du canapé un monsieur aux cheveux blancs et à la chemise déboutonnée, et il se tient la tête, ou bien il se frotte les yeux, ou il s’arrange les cheveux ou il pleure, et un gros chien, orange sous le soleil, tourne autour de lui en reniflant, et il aboie comme un fou parce qu’il vient de trouver quelque chose. Un cercueil noir fermé. Il renifle encore, il lève la patte, il pisse.
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Lizbeth, je la revois plus vivante. Assise sur ses genoux, je jouais avec ses cheveux, gris, gros et raides comme du fil électrique. Je l’aidais à prendre ses médicaments : deux poignées de comprimés qu’elle devait avaler tous les jours, je lui donnais l’un après l’autre. Elle, elle me donnait des figues mûres, encore chaudes de l’après-midi, qu’ils cueillaient sur l’arbre derrière la maison. Elle se moquait, comme quoi j’étais un petit oiseau qui avait peur de picorer. Son sourire était noir, sans dents. Des fois aussi, elle était dure, il fallait pas la toucher ni l’embrasser, elle voulait que son fauteuil sur le perron et qu’on lui fiche la paix. Quand elle est morte, maman a dit qu’elle était partie, alors je me suis demandé où ? Et comme tout le monde pleurait, je me suis accrochée à maman comme un singe, mes bras et mes jambes autour d’elle si douce, et j’ai pleuré aussi, l’amour qui me coulait des yeux comme les grosses pluies d’été, quand on voit plus rien à travers. Quand maman est partie, plus tard, j’avais plus personne pour m’accrocher.
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Son mec est noir, et leur amour qui se moque des couleurs est une des raisons pour lesquelles on est devenues copines aussi vite.
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La promotion comprenait cette année presque deux cents élèves, qui tenaient dans une dizaine de rangées à peine. Même en y ajoutant les autres classes, composées d'enfants de St. Catherine et de sa voisine Bois Sauvage, cela restait un petit lycée. Environ la moitié étaient blancs, les autres noirs avec quelques Vietnamiens. Les parents de ceux-ci avaient émigré à la fin de la guerre du Vietnam pour travailler dans diverses branches de la pêche industrielle, tandis que les familles noires et blanches, pour la plupart, habitaient les deux viles depuis leur création. Certaines portaient d'ailleurs le même nom, conséquence de mariages raciaux souvent méconnus. Leur répartition dans le gymnase reflétait les relations qu'elles entretenaient : les deux communautés vivaient indépendamment l'une de l'autre.
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C'est pas bon d'utiliser la colère pour détruire. On prie pour que la colère se change en tempête qui fera jaillir la vérité.
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Malgré la dureté de ses paroles, j'ai entrevu de l'espoir sur son visage. Elle pensait que si elle m'apprenait tout ce qu'elle savait sur la guérison par les plantes, si elle me donnait une carte du monde tel qu'elle le connaissait, un monde organisé selon la volonté divine, où l'esprit est partout, alors je pourrais m'en sortir. Mais je lui en ai voulu à l'époque, je lui en ai voulu pour ses leçons et son espoir mal placé. Et par la suite, parce qu'elle continuait à croire au bien dans un monde qui l'avait condamnée au cancer, qui l'avait essorée comme un torchon et qui l'avait désintégrée.
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Mais j'entends que les pins qui se disent de se taire, les chênes qui se froissent, les grandes feuilles dures des magnolias qui grelottent comme des assiettes en papier agitées par le vent. Les rafales annoncent Katrina là bas dans le golfe, comme une voix grave qui parle dans le couloir avant d'entrer dans la chambre p212
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Un cœur de fille qui se laissait prendre par les autres avant lui, parce qu’ils le voulaient, pas parce que je leur donnais. Je les laissais faire car pendant un moment j’étais Psyché, ou Eurydice ou Daphné
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- Donner la vie... [...] c'est savoir pour quoi on veut se battre. C'est savoir aimer.
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