Par Annette WIEVIORKA, directrice de recherche émérite au CNRS
Tout historien, et même préhistorien, établit un lien avec "ses" morts dont il tente de restituer l'histoire, de la Lucy d'Yves Coppens aux morts qui sont ses contemporains. L'opération historiographique a souvent été décrite, de Jules Michelet à Michel de Certeau, comme opération de résurrection des morts et oeuvre de sépulture de ces morts qui hantent notre présent.
Il y a aussi d'autres morts. Ceux des siens qui sont autant de dibbouk pour l'historien parce qu'ils ont orienté sa vie. Ce sont des morts fauchés avant d'avoir été au bout de leur vie, des morts scandaleuses. "Je suis le fils de la morte". Ce sont les premiers mots de l'essai d'égo-histoire de Pierre Chaunu. Ces morts nourrissent les récits familiaux, devenu un nouveau genre historique, de Jeanne et les siens de Michel Winock (2003)("La mort était chez nous comme chez elle") à mes Tombeaux (2023).
Les morts de la Shoah occupent une place tout à la fois semblable et autre. C'est la tentative d'éradiquer un peuple, la disparition du monde yiddish dont ceux qui en furent victimes prirent conscience alors même que le génocide était mis en oeuvre. Ecrits des ghettos, archives des ghettos, rédaction de livres du souvenir, ces mémoriaux juifs de Pologne écrits collectivement pour décrire la vie d'avant, recherche des noms des morts, plaques, murs des noms, bases de données.... Toute une construction mémorielle. Vint ensuite le temps du "je"(qui n'est pas spécifique à cette histoire) , celui des descendants des victimes, deuxième, troisième génération, restituant l'histoire des leurs. Chaque année, plusieurs récits paraissent, oeuvres d'historiens ou d'écrivains, qui usent désormais des mêmes sources, témoignages et archives, causant un trouble dans les genres.
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“Je ne voulus point vivre de ma plume. Je voulus un vrai métier ; je pris celui que mes études me facilitaient, l'enseignement. Je pensai dès lors, comme Rousseau, que la littérature doit être la chose réservée, le beau luxe de la vie, la fleur intérieure de l’âme."
L’Europe n’est point un assemblage fortuit, une simple juxtaposition de peuples, c’est un grand instrument harmonique, une lyre, dont chaque nationalité est une corde et représente un ton. Il n’y rien là d’arbitraire ; chacune est nécessaire en elle-même, nécessaire par rapport aux autres. En ôter une seule, c’est altérer tout l’ensemble, rendre impossible, dissonante et muette, cette gamme des nations.
La Terre ne peut pas finir si un seul homme vit encore.
Ayez pitié de la Terre fatiguée, qui sans l'amour n'aurait plus de raison d'être.
... Et le règne du café sera celui de la tempérance et de la causerie.
En nationalité, c'est comme en géologie, la chaleur est en bas.
Aux couches inférieurs, elle brûle.
Quel froid, si je monte plus haut. Que je monte encore un degré, c'est l'égoïsme pur du calculateur sans patrie; plus d'hommes mais des chiffres.
Les pauvres aiment la France, comme lui ayant obligation, ayant des devoirs envers elle.Les riches l'aiment comme leur appartenant, leur étant obligée.
La patriotisme des premiers, c'est le sentiment du devoir. celui des autres, l'exigence, la prétention d'un droit.
Même dans une société libre, il y aura toujours des captifs, ceux de la misère, ceux de l'âge, ceux des préjugés, des passions.
( " La Femme")
Cher ami,
Personne ne veut la guerre.
Or, on va la faire, ou faire croire à l’Europe que nous la voulons.
Ceci est un coup de surprise et d’escamotage.
Des millions de paysans ont voté hier à l’aveugle.
Pourquoi ? Croyant éviter une secousse qui les effrayait.
Est-ce qu’ils ont cru voter la guerre, la mort de leurs enfants ?
Il est horrible qu’on abuse de ce vote irréfléchi.
Mais le comble de la honte, la mort de la mort morale, serait que la France se laissât faire à ce point, contre tous les sentiments, tous les intérêts !
Faisons notre plébiscite, et celui-ci sérieux.
Consultons, classe par classe, des plus riches aux plus pauvres, des urbains aux paysans, consultons la nation.
Prenons ceux qui tout à l’heure ont fait cette majorité, oublieuse de ses promesses.
A chacun d’eux on a dit : Oui, mais surtout point de guerre !
Ils ne s’en souviennent pas. La France s’en souvient.
Elle signera avec nous une adresse de fraternité pour l’Europe, de respect pour l’indépendance espagnole.
Plantons le drapeau de la paix !
Guerre à ceux-là seuls qui pourraient vouloir la guerre en ce monde !
(12 juillet 1870 - Journal le Rappel)
Ceux qui sont riches à l'intérieur, ont toujours assez de ressources.
Ce qu'ils ont, ils l'étendent, le fécondent par la pensée, le poussent jusque dans l'infini. Au lieu d'envier ce monde de boue, ils s'en font un à eux, tout d'or et de lumière. Ils disent à celui-ci :
" Garde ta pauvreté que tu appelles richesse, je suis plus riche en moi".
L'amour est le frère de la mort, on l'a dit et répété, mais qui a sondé encore à quelle profondeur il est le frère de la douleur ?
Pendant les jours saints de chaque semaine ( du mercredi soir au lundi matin), toute guerre était interdite: c'est ce qu'on appela la paix, plus tard la trêve de Dieu.