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Critiques de Julie Ewa (269)
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Regarder le noir



Second recueil de nouvelles dirigé par Yvan Fauth, Regarder le noir fait suite en quelque sorte à Ecouter le noir en y variant les auteurs ... et les plaisirs.

Y aura-t-il ensuite sentir le noir, toucher le noir et goûter le noir afin de poursuivre l'exploration des cinq sens ?

L'aspect un peu commercial de ce second volume m'a d'abord un peu rebuté ... Mais ça n'était pas le cas de la majorité des auteurs présents au sommaire alors j'ai fini par me laisser tenter.



Avec un thème imposé autour de la vision, je m'attendais à ce que chaque auteur ou presque évoque la cécité. Si je devais perdre l'un de mes cinq sens, devenir aveugle serait incontestablement le pire des châtiments.

Heureusement, les écrivains à l'honneur dans ce recueil ont beaucoup plus d'imagination et la vue, le regard, offrent des possibilités tellement nombreuses au final qu'aucun de ces courts récits n'est redondant.



Petite pensée pour Ingrid Desjours qui évoquait la cécité de conversion dans son dernier roman adulte, La prunelle de ses yeux, qui remonte déjà à presque trois ans.



Ils sont quand même quelques uns à avoir rédigé un texte autour de l'aveuglement, majoritairement des femmes, à l'instar des deux compères Karine Giébel et Barbara Abel, qui avaient déjà écrit à quatre mains dans le précédent recueil.

Elles clôturent le livre avec "Darkness", nouvelle dans laquelle le capitaine Jérôme Dumas doit enquêter sur une terrible agression : La victime, Hélène Queyllaire, a vu ses yeux se désintégrer de la pire façon qui soit. A l'aide d'un compte-gouttes, son bourreau lui a versé de la soude caustique vingt-quatre durant sur les cornées.

Et pourtant, Hélène se refuse à parler de son calvaire, à identifier celui ou celle qui a commis cette abomination, murée dans un silence presque bienveillant.

En dépit de son horreur apparente, "Darkness" se révèle être une histoire pleine de sensibilité, où le lecteur cherche à faire le lien avec le passé de la jeune Diana, abandonnée peu après la naissance, et la mutilation subie par Hélène, jeune femme d'une vingtaine d'années. Bien malin sera celui qui fera le lien entre les deux histoires avant les dernières lignes, venant éclairer ces ténèbres de façon aussi sublimes que glaçantes.



Julie Ewa également parle de cécité dans "Nuit d'acide", cette fois avec un texte qui se passe au Bengladesh.

Les yeux du jeune Sabbir, enlevé dans la mangrove, seront aspergés d'acide. Arraché à sa famille, il ne devient plus qu'un objet d'enrichissement pour ses tortionnaires, au même titre que le jeune Namur qui lui apprendra à surmonter son handicap et à mendier, tout comme leurs quatre compagnons de cellule. Chaque jour, ils doivent arpenter les rues du marché et ramener l'argent que les touristes auront bien voulu leur confier. Avec pour promesse de retrouver la vue un jour.

Sanjana, policière désireuse de mettre fin à ce trafic d'êtres humains, sera-t-elle le dernier espoir de Sabbir ?

Julie Ewa nous signe ici une histoire d'autant plus douloureuse qu'elle est inspirée de faits réels. Même en France les personnes mutilées sont regroupées sous l'égide de mêmes truands puis dispatchés notamment dans les rues et métros parisiens, exposant leurs membres amputés pour collecter un maximum d'argent en faisant appel à la pitié des passants.

Y a-t-il plus horrible dans ce monde pourtant moderne que de mutiler volontairement un enfant pour pouvoir ensuite s'enrichir sur son dos ?

Il vous faudra arriver aux dernières lignes de "Nuit d'acide" pour le savoir.



Des aveugles, il y en a également dans "Le mur" de Claire Favan, qui a écrit ici une histoire d'anticipation très éloignée de son registre habituel. Pas de tueurs en série cette fois mais un univers futuriste dans lequel les icebergs ont fondu et ont libéré le méthane stocké sous les banquises.

Et vous connaissez l'effet du méthane sur les yeux ? Il provoque de graves lésions.

Le dernier bastion de vie sur terre est donc un porte-conteneur, du nom de Havanay Bay. Les autres bateaux ont fini par sombrer au fond de l'océan unique qui recouvre désormais en totalité la planète.

Et dans ce monde avec de l'eau à perte de vue, qui n'est pas sans rappeler "Juste après la vague" de Sandrine Collette, continuer à voir est devenu le bien le plus précieux.

"La chaîne de commandement repose sur le champ visuel."

En effet, au royaume des aveugles les borgnes sont rois.

Et chacun voit un rôle lui être atribué en fonction de son acuité visuelle, de 0% pour les non voyants à 80% pour le capitaine du navire.

Pour être franc malgré son originalité et son fort message écologique, Claire Favan n'a pas réussi à m'embarquer dans sa vision du futur, et même si j'adore cette auteure je suis resté à quai cette fois.

Trop insensé, trop mièvre, final trop attendu ...



Fred Mars mélange quant à lui le thème du regard sous différents aspects dans "The Ox".

L'un d'eux étant la partouze à l'aveugle. Un concept intéressant.

"Le libertinage à l'aveugle, les corps plongés dans une obscurité totale."

"Seulement un amas de chairs gémissantes qui se mêle au néant."

La beauté et la jeunesse n'importent plus dans un tel contexte où on caresse tout ce qui se présente à nous, où on jouit d'un corps à l'autre.

Les rouages de ce club très select vont cependant être mis à mal avec la découverte d'un cadavre suite à l'une de ces soirées de débauche.

Les inspecteurs en charge de l'enquête ont deux témoins : L'un des participants ainsi que l'homme d'entretien malvoyant.

Parviendront-ils à éclairer les circonstances du crime et l'identité du coupable ?

"The Ox" est une nouvelle policière plutôt originale du début à la fin.

Toute ressemblance avec un personnage existant réellement ne serait pas fortuite.



Mais le regard, c'est aussi le regard des autres. C'est être vu par d'autres yeux.



Ou ne pas être vue dans le cas d'Hélène, dans la nouvelle "Transparente" d'Amélie Antoine. La merveilleuse, magistrale, somptueuse et surdouée Amélie Antoine ( pour ceux qui en douteraient, les émotions dégagées par sa plume unique me transcendent à chaque fois ).

Hélène est de ces madame tout-le-monde relativement effacée. Comme un mantra, il est sans cesse rappelé au lecteur :

"Mais Hélène est toujours polie. Calme, mesurée, aimable. Certains diraient même transparente."

Et cette employée de la Caf, quarante ans, divorcée, va enfin OSER le changement. Comme le symbole de la reprise en main d'une vie trop terne.

Un très léger changement.

Une simple teinture pour cacher ses premiers cheveux gris. Un premier pas vers de nouveaux horizons.

Un tout petit effort pour enfin être vue, pour que son entourage la remarque.

Restera-t-elle invisible ou finira-t-elle par être regardée par ses collègues, ses amies, sa fille, son compagnon ?

Quelles souffrances endure-t-elle en secret ?

Sans surprise, la merveilleuse, magistrale, somptueuse et surdouée Amélie Antoine signe avec "Transparente" l'une des meilleures nouvelles du recueil, tout en sensibilité et subtilité. Son répertoire habituel la situe quelque part entre le thriller psychologique et la littérature générale, mais elle trouve incontestablement sa place parmi les meilleurs auteurs du noir au cas présent.



R.J. Ellory et Olivier Norek se sont tous les deux intéressé à l'observation.



L'auteur britannique met en effet en scène dans "Private eye" un journaliste du nom de Rayond White, dont le métier même consiste à observer, et dévoiler par ses scoops la laideur des hommes, les complots, les mensonges.

Il se rendra compte très vite qu'il est lui même épié, très maladroitement, par un même individu. Qu'il se met à surveiller à son tour.

Qui est le suivi, qui est le suiveur ?

Pourquoi Raymond est-il ainsi guetté ?

Une question qui l'obsède de plus en plus. Ou est-il juste paranoïaque ?

Nouvelle un peu longue à la fin attendue, "Private eye" se laisse néanmoins lire avec plaisir.



Et Olivier Norek lui m'a mis une claque.

Non, rectification, il m'en a mis deux en fait. Voire trois.

Sans trop en dire pour ne pas vous gâcher les petites surprises concoctées par l'auteur d'Entre deux mondes, "Regarder les voitures s'envoler" nous raconte la vie de Joshua, un jeune garçon solitaire dont la mère est paralysée.

"C'est observer qui me plaît."

Sa vie va changer avec l'arrivée de ses nouveaux voisins, et plus particulièrement de leur fille Esther avec laquelle il se liera progressivement d'amitié. Il sera témoin de la violence de son père, des humiliations qu'elle subira à l'école, et ne pourra pas rester les bras croiser à ne rien faire.

Avec ce texte sensationnel qui entame le recueil, vous allez regarder le noir de très près. Avec vos tripes autant qu'avec vos yeux.



René Manzor lui nous parle de voyance ( ou de double vue ) dans son récit sobrement intitulé "Demain".

L'histoire commence par une course poursuite entre un tueur armé et Ganaëlle dont le seul objectif est de sauver sa fille, la petite Chance, au péril de sa propre vie.

Mission accomplie puisque la suite de l'histoire nous projettera dans un avenir où Chance, devenue diseuse de bonne aventure de pacotille, aura une horrible prédiction qui se réalise réellement.

Quel lien y a-t-il entre la tentative de meurtre dont elle a fait l'objet dans son enfance et ses dons prémonitoires ?

Pour le savoir à vous de lire ce mini-thriller qui va à cent à l'heure mais qui ne m'a pas profondément impacté.



Quelle sensibilité dans la plume de Johanna Gustawsson !

Ce qu'elle a cherché à mettre en avant c'est l'intensité et l'expression des regards.

Dans "Tout contre moi" l'amour et la haine semblent se confondre dans un couple qui s'est aimé dès ... le premier regard.

Ici les yeux sont des vecteurs d'émotions et d'expressions entre deux amants.

Mais quand on trahit ses promesses et son engagement, rien de surprenant à se retrouver le couteau sous la gorge.

Au sens littéral.

J'ai vraiment été subjugué par la plume magnifique, fine et féminine, de l'auteure de Mör. Et par le double effet kiss cool final.



Enfin, deux auteurs se sont intéressés aux visions, quand leurs narrateurs sont les seuls à voir quelque chose ou quelqu'un, comme un signe de lente plongée vers la folie.



Je passerai rapidement sur "Anaïs" de Fabrice Papillon auteur que je ne connaissais pas et qui ne m'a pas non plus donné envie de le faire plus ample connaissance.

Victime de ce qui semble être des visions, monsieur Darcy, professeur à l'université, semble être le seul à voir constamment son grand amour Anaïs. Elle ne disparaît que très rarement de son champ de vision et tout ce qu'il fait, y compris des choses pas très jolies jolies, il le fait pour elle et à travers elle.

Hallucination ou réalité ?



Et il ne me reste plus qu'à évoquer La tâche de Philip R... Non, de Gaëlle Perrin-Guillet pour celle-ci, pardonnez moi.

Tout comme Monsieur Darcy, Thomas est le seul à voir ... une petite tâche incrustée dans le mur de sa cuisine. Totalement indélébile.

Il a beau frotter, elle refuse de disparaître et se met à le hanter : Il ne voit plus qu'elle, il est obsédé par elle. D'autant qu'elle grossit telle une moisissure, ne cessant de s'étendre et d'avaler ses repères quotidiens.

Flirtant avec le fantastique, cette nouvelle à l'atmosphère inquiétante m'a rappelé les nouvelles que pouvaient rédiger des auteurs américains comme Robert Bloch, Richard Matheson ou Fredric Brown, dont j'étais extrêmement friand à l'époque.

Jusqu'à ce que la fin me ramène les deux pieds sur terre, ce qui a été une petite déception.



J'insisterais aussi sur les chutes : A chaque reprise l'auteur tente de nous mettre définitivement K.O. avec un dernier rebondissement, une ultime révélation amenant parfois à regarder autrement l'intégralité de la nouvelle.

Chaque auteur a rempli le cahier des charges en essayant tout au moins de nous surprendre.

Mais certains ont mis la barre très haut et m'ont laissé comme un con le cul par terre.

Olivier Norek, Johanna Gustawsson, le tandem infernal Giébel / Abel font partie de ceux là.

Ce sont d'ailleurs les trois nouvelles que j'ai préférées, la quatrième étant celle de la merveilleuse, magistrale, somptueuse et surdouée Amélie Antoine.

Et non, je n'ai pas du tout l'impression de me répéter !



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Les petites filles

Lina est une jeune étudiante française qui part pour un an en Chine. Elle pourra perfectionner l'apprentissage de cette langue tout en s'imprégnant de la culture du pays. Mais quand elle est approchée dès sa descente d'avion par Thomas, un jeune membre d'une ONG, elle ne se doute pas qu'elle va vivre une aventure difficile et éprouvante. Courageuse et tenace, elle ira jusqu'au bout pour arriver à faire éclater la vérité...

Voilà bien longtemps que je n'avais pas lu de thriller... et quelle angoisse !! On plonge dans une histoire de trafic d'enfants en plein cœur de la campagne chinoise. On est aux côtés de cette jeune femme qui découvre les tristes pratiques de ce peuple, engendrées par la politique de l'enfant unique. Un très bon roman, bien écrit, prenant, qui glace les sangs !!!
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Les petites filles

En Chine, la politique de l’enfant unique et tout ce qui en découle.

Lina, 23 ans, sans famille depuis l’âge de 15 ans, est bénévole au cœur de l’association « les blouses roses » où elle s’occupe plus particulièrement des enfants. Elle décide de rejoindre la Chine pour y poursuivre ses études, elle parle couramment le mandarin et signe pour rejoindre Canton.

Elle y rencontre Thomas, bénévole dans une ONG où il enquête sur la disparition de petites filles. Il lui propose de se rendre à Mou di, petit village pour surveiller de plus près ces disparitions.

Ce roman se déroule sur deux périodes 1991 et 2013.

En 1991, Sun Thang, enceinte voit disparaître sa fille Chi-ni, enfant non déclaré (ce qui se pratique couramment à cette époque on ne déclara pas l’enfant féminin pour laisser au couple la chance d’avoir une seconde naissance avec l’espoir que ce soit un garçon). Sun est désemparée et malgré son état, elle court sur les traces de sa fille et fait tout ce qui est en son pouvoir pour la retrouver.

Va-t-elle y arriver ? que vont-elles devenir toutes les deux, et le bébé à naître ?

En 2013, Lina arrive sur place et à son tour, elle enquête sur les disparitions et cherche aussi à savoir ce qu’est devenue Sun. Mais bien vite des meurtres, maquillés en suicides se perpétuent dans cette minuscule contrée. Les policiers Yi et Rong Zhou vont d’ailleurs y mener l’enquête (tout comme en 1991).

Sur les deux époques on retrouve le moine Yao-Shi, ce dernier avait pris Chi-ni sous sa protection et lui transmettait son savoir, un homme dont l’aspect froid et réservé cache une grande bonté.

Un bon livre, bien écrit, les chapitres sont courts et alternent les deux périodes qui ont bien sûr beaucoup de points communs et même un suivi dans les événements.

Ce policier a été récompensé par :

- Le prix sang d’encre des lycéens 2016,

- Le prix du polar historique 2016.

Julie EWA a une très belle écriture, fluide et juste, elle nous fait connaître à travers ce livre :

- La politique de l’enfant unique et ses ravages parmi lesquels l’élimination des bébés féminins à leur naissance,

- Le trafic d’enfants (réseaux d’adoptions clandestins, ou destinés au trafic d’organes et même à la prostitution.

- La mafia chinoise

- Les ripoux chinois (oui il y en a partout !).

Un très bon livre que je recommande, il apporte un certain dépaysement pour y être allée je peux vous dire que les abords de la rivière Li (là où se passe le roman) est un endroit sauvage et magnifique, on est loin de s’imaginer que ces horreurs peuvent se passer dans des lieux aussi retranchés et peu habités.

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Jungle pourpre

Chacune de ses fictions est une part de la réalité de Julie Ewa. Jungle pourpre est sans l’ombre d’un doute son roman le plus personnel. Et les enfants y ont toujours une place prépondérante.



L’autrice nous emmène cette fois-ci en Indonésie, du côté de l’île de Sumatra, à côtoyer les gamins des rues qui sont dans l’obligation de faire appel à la débrouille pour juste survivre. Regardant avec méfiance les rares personnes qui veulent les aider, devant se protéger des fléaux qui les menacent.



C’est à travers les yeux et les expériences d’une fillette de onze ans que l’action se déroule. Dea croit avoir trouvé une seconde famille avec un groupe d’enfants. Mais le mal rode, au point que certains tombent gravement malades.



On qualifie parfois les romans de Julie Ewa d’ethno-polars. Même si je n’aime pas ranger les livres dans des cases, celle-ci lui convient assez bien. Au-delà d’une seule intrigue policière, ses romans nous font découvrir un pays, des coutumes, une communauté.



C’est une véritable plongée dans les rues de Kotanak, ville fictive, à laquelle nous invite l’écrivaine. Qui se rapprochent d’endroits qu’elle connaît bien, du bidonville à la bibliothèque du quartier. Il n’est effectivement pas étonnant que tout sonne si juste, si vrai, puisqu’elle y a vécu plus d’une année, aux côtés de ces gamins, vivant dans un bidonville similaire, à les aider avec son association Kolibri.



C’est bien toute la singularité de ce roman qui en fait bien d’avantage qu’une simple curiosité. Outre l’histoire racontée, et l’attachement fort qu’on ressent envers les personnages, les gamins en tête, c’est un véritable enrichissement personnel.



L’auteure raconte le pays, les conditions de vie, sans manichéisme. Des filles tout particulièrement. Un trésor d’émotions qui permet de mieux comprendre la vie de ces îles de l’autre bout du monde.



Mais il y a aussi une enquête, qui permet d’apporter un autre rythme à l’ensemble, même si elle n’est pas le point de vue essentiel. La part de fiction est bien là aussi, c’est une vraie intrigue, même si ce sont les destins des jeunes qui priment.



Raconté à hauteur d’enfant, cet ethno-polar montre parfaitement combien Julie Ewa est une voix à part dans le milieu du roman noir français. Jungle pourpre est un voyage au plus près de personnages qui marquent les esprits. De la richesse du roman noir.
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Regarder le noir

Les auteurs qui écrivent des nouvelles dansent sur une corde raide car l'exercice n'est jamais facile.



Le format de la nouvelle est frustrant et les lecteurs en voudraient toujours plus.



Il faut donc, en peu de pages, présenter, développer et finir son histoire, si possible sur un twist qui glace ou fige ses lecteurs.



Ma lecture précédente, "De mort lente" de Michaël Mention m'avait glacée jusqu'aux os et j'aurais peut-être dû lire un ancien "Oui-Oui va à la plage" avant d'ouvrir ce recueil de nouvelles Noires parce que l'histoire qui ouvre le bal (Regarder les voitures s'envoler), écrite par Olivier Norek, m'a retournée les tripes, glacée d'effroi et figée, le livre en main.



Monsieur Norek, il faudra un jour qu'on parle de cette sale habitude que vous avez prise avec les chats. Un félin vous aurait-il pissé dessus que vous les assassiniez de si cruelle manière dans vos récits ?? Dans ma kill-list, vous êtes en fluo, maintenant ! Mais je saurai reconnaître que votre histoire ne m'a pas frustrée car elle a un début, un développement et une fin excellente.



Déjà bien ébranlée, je me suis faite de nouveau secouer par l'histoire de Julie Ewa (Nuit d'acide)… J'avais vu venir le final, mais jusqu'au bout, j'avais espéré m'être trompée… Hélas, mon cynisme m'avait fait deviner juste et comme ceci n'est pas un recueil de nouvelles Bisounours, on va oublier les happy end qui seraient des plus malvenus.



Ma petite incursion dans une boîte de libertinage m'a fait sourire. Fred Mars nous offre une douceur bienvenue avec The Ox. Rassurez-vous, il y a du sang, un meurtre horrible mais à la fin, on a un grand sourire. Claire Favan, quant à elle, m'a surprise dans un univers où je ne l'attendais pas… le post-apocalyptique.



Pour les autres nouvelles, si le noir est omniprésent, elles étaient moins glaçantes que les deux premières. L'art de la nouvelle étant dans la chute, les auteur(e)s ne se sont pas privés pour nous faire tomber, parfois de haut et toujours en traître. En littérature, c'est un sentiment puissant qu'on aime ressentir, qu'on recherche.



Mention spéciale à la nouvelle de Johana Gustawsson qui m'a prise par surprise, encore plus en traître. Je n'ai pas vu venir le coup… Joli ! Inattendu. À tel point que je l'ai relue pour voir si j'avais raté quelque chose dans le texte. Je n'avais rien raté mais on m'a fait voir ce que l'on voulait que je voie…



Autre mention aussi à la nouvelle écrite par Barbara Abel et Karine Giebel car je me suis creusée les méninges comme une folle pour tenter de trouver la solution et, si à un moment, un sourire béat s'est affiché sur ma face car "Héhéhé, mesdames, j'ai trouvé" et bien en fait, non, je n'avais rien capté et je me suis faite tacler une fois de plus. C'était vachard mais j'en reprendrais bien un peu.



Ellory, c'est toujours mon Amérique à moi, même s'il est Anglais. Vicieuse, sa nouvelle et même si j'ai senti venir l'oignon, ce fut un régal à lire.



Des nouvelles glaçantes, noires, où la vision est à l'honneur, même si, les auteur(e)s ne se priveront pas de jouer avec votre vue et de vous faire voir, grâce à leur écriture, leurs mots, leur manière de raconter les histoires, ce qu'ils/elles veulent que vous voyiez, vous masquant la pointe effilée de la face cachée de l'iceberg, celui qui vous fera trébucher ou qui vous déchirera les entrailles.



Des histoires qui taclent. Préparez-vous à chuter, victime d'un coup en schmet (en traître) que vous n'aurez pas vu venir car ici, tout le monde se coupe en quatre pour vous brouiller la vue et jouer avec elle.


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Le garçon disparu (Le gamin des ordures)

Les romans de Julie Ewa ont une âme.



Ils sont le parfait exemple (réussi) que la lecture de divertissement peut faire passer des émotions, faire réfléchir, et même faire changer de regard.



Après Les petites filles et leurs sorts en Chine, elle prend le risque de se pencher sur celui des roms. Une vraie gageure, tant la perception de cette population disséminée dans nombre de pays alentours (et donc citoyens européens comme vous et moi) est négative.



A part l’image du mendiant qui toque à votre fenêtre de voiture à l’arrêt, vous êtes-vous jamais posé la question de qui sont-ils et comment vivent-ils, en dehors des gros clichés véhiculés ? Julie Ewa l’a fait, jusqu’à prendre son sac à dos et partir à leur rencontre en France, en Bulgarie et en Hongrie. Comme avec Les petites filles, on est très loin du simple recopiage de Wikipédia… L’écrivaine, avant tout femme, s’intéresse à ses congénères, semblables malgré d’autres traditions et une autre couleur de peau (savez-vous que les roms sont, à la base, originaires d’Inde ? Sans doute que non, moi je l’ai découvert).



Ne vous attendez pas pour autant à une sorte de cours sur les roms, on est à mille lieux de ça ! Le gamin des ordures est un excellent roman où se côtoient suspense et émotions, le tout enrobé d’une belle et sincère humanité.



Julie Ewa ne cherche pas à faire larmoyer dans les chaumières, elle raconte une histoire ; récit de rencontres entre deux personnages engagés dans des actions humanitaires (et déjà vus dans son précédent roman) et une famille roms venue s’échouer dans nos rues. Oui, à la différence de son précédent livre, l’action se déroule principalement en France (mais pas que…).



Même si on ne peut pas exactement parler de thriller, l’auteure utilise (avec talent) les codes qui font les bons livres du genre : chapitres très courts, rythme, changements de perspectives, surprenante évolution de l’intrigue… Des ingrédients qui font que vous ne pouvez pas lâcher le livre.



Le gamin des ordures est un roman prenant, avec des personnages particulièrement attachants, mené avec intelligence et humanité, sur un sujet difficile. Le talent de Julie Ewa est triple, elle raconte des histoires qu’on ne lâche pas, qui prennent aux tripes tout en nous faisant réfléchir sur le monde. Elle propose des clés, sans manichéisme, sans jugement hâtif. Un joli mélange d’émotions et de réflexions, preuve qu’on peut à la fois écouter son cœur et son cerveau.



Julie Ewa s’impose comme une voix à part dans le roman noir français, avec sa sensibilité et un talent qui donne envie de la suivre sur toutes les routes.
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Regarder le noir

Le genre « nouvelle » n’a pas bonne réputation dans la littérature française. Pourtant, il y a des auteurs qui ont un talent fou pour écrire des histoires courtes et percutantes.



Regarder le noir, c’est 11 nouvelles policières autour du sens de la vue ; pas mal d’auteurs ont choisi d’exploiter la cécité tels que Barbara Abel et Karine Giebel dans Darkness ou Julie Ewa dans Nuit acide. D’autres ont choisi le côté espionnage/ surveillance, à l’image de R.J Ellory ou encore la voyance comme René Manzor. Dans tous les cas, beaucoup d’imagination et comme d’habitude, des histoires que j’ai aimées et d’autres moins.

Ma préférée : celle d’Olivier Norek qui m’a mise au tapis. Mais j’ai également passé un bon moment avec Julie Ewa, René Manzor, Giebel/Abel (légèrement moins bien à mon goût que la nouvelle parue dans écouter le noir), Amélie Antoine (fine psychologue !) & Ellory.

Les nouvelles que j’ai le moins aimées : Claire Favan, Johana Gustawsson et Gaëlle Perrin-Guillet.



Toucher le noir, 3ème sens exploité après l’ouïe et la vue, est paru récemment. Je pense que je me laisserais tenter mais maintenant, c’est à votre tour de vous plonger dans les tréfonds de l’âme et de vous faire votre propre idée.

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Les petites filles

Enquête menée par une jeune femme intrépide , Lina , dans un village perdu de la campagne chinoise , décor de rêve pour vie d'enfer lorsque l'on nait fille dans ce pays où la politique de l'enfant unique a créé bien des drames.



Lors de son arrivée en Chine pour faire un stage, Lina est contactée par Thomas, membre d'une ONG alertée sur des faits troublants survenus dans un petit village .



A elle de parvenir à éclaircir le mystère de la disparition de petites filles et d'une jeune mère .



L'histoire est racontée aux deux époques, en 1991 d'une part , année des faits et l'époque actuelle d'autre part.



Bien sûr, je connaissais le sort peu enviable des femmes chinoises , destin qui commence même avant leur naissance , surtout après avoir lu le poignant roman La Route sombre de Ma Jian .



Dans ce roman, l'auteur s'attache plus au sujet de la disparition des fillettes et de l'avenir le plus souvent bien noir qui leur est réservé ainsi que de l'impuissance des mères devant une société régie par des hommes corrompus, gouvernée en sous main par la mafia et les policiers véreux .



Heureusement quelques personnes sortent de ce lot peu recommandable , en particulier le moine bouddhiste et le jeune Tao mais à quel prix ...



Le rythme rapide donné par Julie Ewa rend la lecture haletante même si j'y ai trouvé parfois quelques coïncidences un peu trop bien venues .

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Les petites filles

Un livre qui a été une vraie surprise pour moi. Pleinement émouvant, il retrace une bien triste et sinistre coutume qui a existé dans la Chine populaire et montagnarde à laquelle se confronte une jeune fille engagée dans une mission humanitaire avec ses idéaux ... et qui va se heurter à un véritable choc culturel ! Un roman à découvrir !
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Jungle pourpre

Jungle pourpre de Julie Ewa.

J'apprécie les livres de cette autrice, je ne les ai pas tous lu mais je le ferais avec plaisir.



Toujours une histoire concernant un enfant, mais le pays est différent. Nous visitons en restant sur notre canapé.

Bien écrit, du suspense, la véracité des faits vous frappe en plein coeur. Description de la jungle indonésienne, on s'y croirait. Ses faits ne peuvent pas être plus crédibles, vu que l'auteur vit entre la France et l'Indonésie. Elle a créé l'association Kolibri, pour aider les enfants défavorisés.



"-Alors clocharde, tu as raté la rentrée ?

Dea dévisagea ses ennemis : sept adolescents plus grands et plus âgés qu'elle, drapés de leurs beaux uniformes blanc et rouge flambant neufs. Leurs têtes ne lui étaient pas inconnues : ils l'avaient déjà martyrisée sans relâche sur les bancs de l'école primaire, sous l'oeil indifférent d'une enseignante peu concernée par la réussite des élèves les plus pauvres."

Cette jeune fille de onze ans, ne pouvait pas se défendre. Elle cachait ses bleus et ses blessures à sa famille, pour ne pas leur donner du souci.

Ses parents voulaient qu'elle aille au collège, mais sans argent c'était très dur. Ils se privaient de nourriture et travaillaient énormément.

Elle n'en pouvait plus de tout ça et décida de s'enfuir, malgré son chagrin.

Elle se retrouva à Kotanak, sur l’île de Sumatra. Elle fit connaissance, avec un groupe d'enfants des rues et protégé par Aron, un mystérieux personnage.

Alors qu'elle se croit en sécurité, une mystérieuse maladie s'abat sur les enfants. Plein de rebondissements, vous ne vous ennuierais pas.

Parallèlement, Angka Zahara traque les trafiquants de drogue du célèbre gang du PPS. Sa route croisera celle des enfants lors d'une enquête.



Un policier bien mené, l'autrice nous dépeint, la dure réalité de ce pays écartelé entre les gangs sauvages et la ferveur religieuse du pays, dont les filles sont souvent les premières victimes.



J'ai passé un très bon moment et je vous le conseille.

Bonnes vacances et bonnes lectures à tous.



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Liberté, ma dernière frontière

On n’est pas dans la fiction. Zazai existe, son parcours, il l’a vécu.



Sept frontières, 6 000 kilomètres en 6 mois, à pied à travers les arides montagnes d’Afghanistan, ou encore en bus, caché dans un trou de la carosserie. Et puis le Pakistan, l’Iran, la Turquie, la Bulgarie, la Hongrie, l’Autriche, l’Italie pour enfin arriver en France.



On n’est pas dans la fiction. Celle qu’écrit habituellement Julie Ewa a toujours été fortement teintée de réalité par ses expériences de vie. La romancière s’est cette fois encore plus engagée, avec l’envie de mettre en lumière ceux de l’ombre, les pauvres, les indigents. Et nous montrer leur magnifique part d’humanité malgré les épreuves traversées.



Le livre se lit comme une fiction, parce que le talent de Julie Ewa est d’avoir raconté ce périple sans pathos et en recréant les dialogues échangés par les participants de cette expérience de vie. Ça se lit donc comme un roman, sauf qu’à chaque page on se remémore que tout cela est vrai.



Zazai avait 15 ans quand sa mère et son oncle lui ont demandé de prendre la route, seul, pour une destination inconnue. Son père se cachait des talibans, et lui risquait de se retrouver enrôlé de force dans cette « armée » de mort.



A cet âge-là, on ne demande rien d’autre que de passer du temps avec ses amis. La perte de l’innocence est brutale. Mais que faire à part suivre le vœu de sa famille qui a tout vendu pour pouvoir payer une fortune à un réseau de passeurs… ?



Une telle vie n’est pas un jeu. Et pourtant, migrants et trafiquants d’humains appellent le passage d’une frontière le « game ».



Pour comprendre le monde et réhumaniser ce qui souvent n’est présenté que par des chiffres, un tel récit est important. A la portée de tous, qui devrait être lu par tous.



Pour comprendre et ressentir. A travers des petites choses qui égrainent ce périple terrible, qui font qu’on comprend vraiment ce qui est en jeu. L’empathie est là.



Avec aussi de rares moments positifs, comme de belles amitiés qui se tissent, même si elles sont souvent mises à rude épreuve.



Et parfois ce qui est vécu de pire ne se déroule pas obligatoirement loin de chez nous, le comportement de certains pays européens étant proprement ignoble. Et certaines situation ubuesques…



J’ai eu la chance de rencontrer Zazai et de l’écouter parler de son livre aux côtés de ses amis, dans le club house de son équipe de cricket à Strasbourg.



Son point de chute, là où il s’est créé sa deuxième vie, totalement intégré mais sans oublier ses racines. Il est aujourd’hui naturalisé français, travaille comme électricien, presque 10 ans après le départ de son pays.



Liberté, ma dernière frontière est une leçon. De vie, d’épreuves mais aussi d’espoir. Ce qui reste au final, c’est une grande admiration pour ce gamin devenu homme. Et aussi la démonstration que l’on peut tous y arriver, ensemble. Seulement ensemble.
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Regarder le noir

La nouvelle n'est pas mon format de prédilection mais je dois dire que ce recueil fut un réel plaisir de lecture. Toutes les nouvelles sont bonnes, voire excellente, une seule seulement m'ayant laissé de marbre. Le premier opus, "Écouter le noir" était très bon", ce second le surpasse. Merci à cette panoplie d'auteurs talentueux. La plupart ornent déjà ma bibliothèque. Les autres sont en devenir.
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Les petites filles

Non, je vous raconterai pas l'histoire, vous pourrez facilement la lire dans beaucoup d'autres critiques. J'aurais dû écrire "Deux histoires" : il y a l'enquête menée par Lina en 2013 sur une mystérieuse disparition liée à un trafic de jeunes filles et l'histoire réelle de cette disparition qui a eu lieu en 1991.



Ces deux histoires sont racontées en parallèle dans de courts chapitres, 112 en tout. Cette particularité rend l'histoire plus rythmée et plus facile à lire. Nous vivons le ou les drames de 1991 à peu près en même temps que Lina avance dans son enquête.



L'enquête menée par Lina est un véritable polar qui se transforme en thriller à la fin du livre. Mais pas n'importe quel polar avec beaucoup d'action et peu d'émotions humaines. Non, ce roman vient vous chercher par les tripes en vous racontant en détail les drames vécus par plusieurs familles.



En lisant ce livre, je n'ai pas pu m'empêcher de penser à l'Orangeraie de Larry Tremblay non pas à cause de la similitude des histoires. Non, c'est parce que dans les deux cas, autant l'écriture est l'écriture est belle, colorée, agréable à lire, autant les informations véhiculées sont choquantes, bouleversante.



J'ai beaucoup appris sur La Chine, a un point tel que j'ai cru pendant un certain temps que l'auteur avait fait un long séjour dans ce pays.



Si le premier livre de cet auteur est aussi passionnant, j'ai hâte de lire le suivant.
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Les petites filles

Lorsque Lina s'envole pour la Chine c'est dans le but d'y suivre une année scolaire, mais lors de son arrivée elle rencontre Thomas qui travaille pour une ONG. Celui-ci sait que la jeune femme est bénévole dans une association auprès d'enfants, et lui même travaillant dans le cas de disparitions d'enfants sait que cette cause la touchera. Rapidement la jeune femme travaillera avec et pour lui, n'hésitant pas à aller dans un village reculé pour être au coeur même de cette sombre histoire qui ne fera qu'empirer.



Premier thriller de Julie Ewa, dès les premières pages on est confronté à la politique de l'enfant unique en Chine et à ce qu'elle entraîne, ce qui sera un peu le fil rouge de ce roman.



Entre passé et présent, au fil des pages nous sommes confrontés à deux univers et à deux personnages différents. Avec Lina donc, cette jeune étudiante qui se trouvera bientôt au coeur d'une triste et sombre affaire et Sun Tang cette mère chinoise vivant en 1991. Nous suivons donc deux histoires, deux vies et deux parcours qui rapidement se mêleront.



Impossible de s'imaginer où va nous emmener Les petites filles, les premières pages m'ont presque sidéré même si il faut avouer que ce n'est que le reflet d'événements qui ont pu avoir lieu dans certains coins reculés de Chine.



Avec l'arrivée de Lina dans ce village reculé, le livre prend la tournure d'un véritable thriller implacable. Un piège se referme presque sur elle, alors qu'elle enquête discrètement pour essayer d'en savoir plus sur cette histoire de disparitions d'enfants, tous ceux qui lui parlent plus ou moins sont éliminés un par un et malgré le danger qui règne autour d'elle, la jeune femme continue. Impossible de savoir qui se cache derrière tout cela, tout au long de la lecture le lecteur doute sur l'identité de l'assassin, se fait berner presque parfois en pensant avoir découvert le pot aux roses et quand la vérité éclate c'est une grosse surprise !



Les petites filles est une réussite totale pour un premier roman. Entre l'écriture de Julie Ewa parfaitement maîtrisée et qui nous tient en haleine, le suspens du début à la fin du roman, le rythme soutenu grâce à l'alternance du passé et du présent, un environnement particulier et un sujet si délicat pourtant juste en font un thriller épatant ! Tout est présent pour que le lecteur se plonge totalement dans ce livre.



Ce premier roman de Julie Ewa est pour moi une totale découverte et une jolie surprise de ce début d'année 2016. Je ne m'attendais pas à être touchée par l'histoire de Sun Tang et à être autant tenue en haleine par l'enquête que mène Lina. Au fil des chapitres le roman gagne en intensité, l'histoire prend de l'ampleur encore et encore et que dire du final qui m'a complètement fait halluciner tellement je ne m'attendais pas à cela. Avec tout ça vous l'avez compris, Les petites filles est un roman à lire rapidement !
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Les petites filles

« Les petites filles » est le premier roman de l’auteure française Julie Ewa. Dans ce roman, elle s’aventure sur le terrain sensible du trafic des petites filles, victimes de la politique de l'enfant unique mise en place par le gouvernement chinois pour diminuer la surpopulation. Seulement à cette politique se couple l'idée que l'enfant unique doit être un garçon. Il faut cacher, aller même jusqu’à tuer une fille qui va naître.



Dans « Les petites filles », il y a deux récits, deux époques qui se croisent et s'entremêlent.

D’abord, 2013. Thomas, enquête pour une ONG sur les disparitions d'enfants (principalement des petites filles) dans cette région reculée de la Chine du Sud. Il contacte Lina, une jeune étudiante française qui accepte de rapporter tout ce qui pourrait l’aider sur ces disparitions. Elle est hébergée au monastère du village de Mou Di, village reculé, où Sun Tang, en 1991, enceinte de six mois, a remué ciel et terre pour retrouver sa fille Chi-Ni disparue. Il attend beaucoup de Lina pour faire parler les autochtones qui doivent forcément savoir ce qui se complote. Mais les questions de Lina sèment le trouble. Et l’angoisse monte quand tous ceux qui semblaient savoir quelque chose sont tués petit à petit….



Dès les premières pages, Julie Ewa nous plonge dans un pays très éloigné de la société occidentale et montre clairement la Chine sous un jour peu flatteur : réseaux d'adoption clandestins, mafias chinoises, trafics d'organes, prostitution, corruption…



Les chapitres courts se succèdent à un rythme constant et se lisent facilement. Julie Ewa a pris le parti de raconter une vraie histoire et surtout de construire de vrais personnages. Les chinois du roman sont reprit dans les deux périodes et l’on peut voir leur évolution. Il y a de belles descriptions et les scènes du quotidien des femmes de ce petit village reculé font pencher la balance de l’empathie envers celles qui, en Chine, ne sont que des objets exploités et rejetés.



Une histoire touchante, brutale et sinistre qui révolte, mais qui se lit d'une traite, tant les personnages sont attachants et le rythme soutenu. Merci Julie Ewa pour ce thriller dépaysant, qui tangue entre passé et présent et bien documenté.

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Jungle pourpre

Les Anaks

Ayant bien aimé les deux premiers thrillers de l’auteure (Les petites filles / Le gamin des ordures), c’est sans hésitation et presque les yeux fermés (oui, je sais, ce n’est pas l’idéal pour lire !) que j’ai choisi celui-ci. J’avais aperçu le mot « Sumatra » synonyme de dépaysement (bienvenu en ce début d’année bien gris) et je pensais retrouver Lina, personnage principal des thrillers précédents. Malheureusement, Lina est absente de ce roman… que je referme un peu déçue.

Le dépaysement est bien au rendez-vous : l’intrigue se situe en Indonésie, à Sumatra donc, une quinzaine d’années après le tsunami qui a ravagé l’île et rayé de la carte la ville de Banda Aceh. Nous y rencontrons Dea, une petite fille qui décide de quitter sa famille en voyant ses parents se priver (notamment de manger), pour lui permettre, ainsi qu’à ses sœurs, d’aller à l’école. Dea échoue dans une grande ville, Kotanak, mais le mirage d’une vie plus facile est très rapidement balayé par la très dure réalité : Dea n’a pas d’argent, pas d’endroit où aller… Elle se retrouve à la rue, comme des milliers d’enfants. C’est également à Kotanak que deux amis Aron et Ardi sont arrivés après que leur village et leurs familles aient disparus dans la catastrophe du 26 décembre 2004. Eux seuls ont survécu : ils étaient partis jouer sur les hauteurs. A Kotanak, Aron et Ardi se sont débrouillés : petits boulots, quelques larcins… Jusqu’à ce, qu’inévitablement, ils soient recrutés par le PPS la terrible mafia qui règne sur les trafics, et notamment le trafic de drogue. Mais Aron s’en est sorti : il a quitté le PPS et s’occupe maintenant d’une bande de gamins des rues, les anaks. Certes ils dorment dehors, mais ils vendent aux touristes quelques colliers de leur fabrication, sur les trottoirs de la ville, en attendant de pouvoir louer un local. Aron va prendre Dea sous son aile et l’intégrer aux anaks. Voici Dea sauvée, au moins a-t-elle échappé aux multiples dangers qui guettent les enfants des rues de Sumatra. Vraiment ?

Le contexte du roman n’est pas inintéressant. L’auteure a vécu une année en Indonésie (cf les remerciements, et l’association Kolibri) et son écriture fait bien passer son ressenti. La société indonésienne est multiple : de notre porte (en Europe) on ne connaît finalement que les superbes paysages de Bali, les volcans, les temples, la faune et la flore luxuriante… On ne sait rien, ou pas grand-chose, de la population. A travers les personnages des policiers, l’auteure nous fait entrer dans les contradictions de ce pays multiculturel. En Indonésie, bien que 90% des indonésiens soient musulmans, cinq religions sont reconnues et sensées cohabiter en paix. Le chef Janter proche de la retraite s’est rapproché de l’islam rigoriste. Son collègue Angka Zahara est plus modéré mais il est déboussolé par son divorce. Quant à Namira, une jeune policière brillante, elle est cantonnée à un travail de bureau. Elle milite au sein d’une organisation qui prône l’égalité hommes-femmes et l’exercice libre de sa religion (au grand dam de Janter, elle refuse de porter le voile islamique : « Ce n’est pas obligatoire. Dans la police, le jilbab a même été prohibé pendant des années au nom de la neutralité vestimentaire »). La condition féminine est également l’un des sujets majeurs du roman, et de ce côté-là, il y a beaucoup à faire. On apprend notamment que pour être admises dans la police, les femmes doivent présenter un certificat de virginité. La pauvre Namira, toute intelligente qu’elle soit, ne pourra jamais accéder à un poste d’inspectrice parce qu’elle est une femme… On apprend également que le divorce par consentement mutuel n’existe pas… Pas plus que les mariages inter-religieux : l’épouse de Angka Zahara a du se convertir à l’islam pour l’épouser (et comble de l’horreur, je n’en suis pas encore revenue, accepter d’être excisée… : « As-tu conscience de ce que j’ai dû faire ? Avant toi j’avais une belle vie, un gagne-pain, ma famille, des amis. J’ai tout quitté pour te suivre. Je suis devenue musulmane. Et ce n’est pas tout. J’ai été excisée, Ankga ! On a enlevé un morceau de mon corps. Tous mes proches s’opposaient à cette opération. Je l’ai fait pour toi. »).

En revanche, j’ai moins aimé l’intrigue policière qui m’a semblé brouillonne, oscillant entre la traque du PPS par la police et les assassinats d’enfants. Il y aurait eu largement de quoi faire avec l’un ou l’autre des fils conducteurs du polar…

Au final, un thriller en demi-teinte, avec certains côtés très intéressant et d’autres qui m’ont laissée spectatrice alors que j’attendais d’être assaillie d’émotions (du coup les kleenex se sont avérés inutiles !).

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Regarder le noir

Nouveau recueil de nouvelles autour de la vue cette fois-ci. Après avoir Ecouter le noir, il est l'heure de Regarder le noir.

On attaque directement avec la nouvelle d'Olivier Norek, qui dépote. La fin est juste WAOUH !

Il est toujours intéressant de découvrir différentes approches, différentes idées autour d'un thème commun... On part en Inde avec Julie Ewa, une nouvelle plus sociale pour Amélie Antoine...

J'ai trouvé ce recueil riche par sa variété et cet exercice si particulier de la nouvelle, souvent boudée.

Et puis, cette petite excitation de la lecture : je commence par laquelle ? Mais beau choix d'avoir mis l'explosive nouvelle d'Olivier Norek en 1er.... Et joli final avec le binome Abel-Giebel.
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Regarder le noir

Dans ce recueil de nouvelles, les écrivain.e.s ont choisi des manières différentes de traiter le thème imposé. Pour parler de la vision, ils ont centré leurs histoires sur la perte de la vue, sur le regard d’autrui, sur l’obsession visuelle ou encore sur les hallucinations. Mais dans « Regarder le noir », il y a aussi « noir ». Et là, on peut dire que les auteurs se sont fait plaisir ! Ils n’y sont pas aller avec le dos de la cuillère et chaque épisode est une pépite de noirceur qui va vous retourner le cerveau.



Cet assemblage d’histoires m’a permis de valider le talent d’auteurs que j’avais déjà pratiqués. Ainsi, Frédéric Mars et son enquête sur les milieux pervers, Fabrice Papillon et sa plongée dans un esprit tourmenté, RJ Ellory et sa filature paranoïaque et le duo Barbara Abel / Karine Giebel et leur agression à l’acide, ont confirmés leur maîtrise du genre. Je donnerai une mention spéciale à trois nouvelles qui m’ont particulièrement marqué. Ce sont celles d’Olivier Norek qui nous livre une histoire de voisinage d’une grande perversité vraiment perturbante, de René Manzor qui nous embarque dans un scénario digne d’un très bon film et de Johana Gustawsson qui nous trouble avec un amour puissant et dévastateur.



J’ai aussi profité de ces lectures pour découvrir des auteures que je n’avais jamais lu : Julie Ewa avec ses mendiants et son trafic d’enfants, Claire Favan avec sa dystopie aux airs d’Arche de Noé, Amélie Antoine avec le regard des autres et la confiance en soi, et Gaëlle Perrin Gaillet avec son invasion du noir. J’ai aimé toutes leurs histoires et je serai maintenant à l’affût de leurs prochains romans.



Je ne suis pas adepte de nouvelles mais ce recueil m’a vraiment enthousiasmé. Le plaisir que j’ai pris à passer d’un univers à un autre m’a fait changer d’avis. Bravo Yvan pour cette initiative qui m’a vraiment convaincu. C’est un livre à offrir les yeux fermés à tous les fans du genre !
Lien : http://leslivresdek79.com/20..
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Les petites filles

Autour de l'histoire tragique de la condition des femmes chinoises et surtout des pauvres petites filles nées pendant la politique de l'enfant unique, c'est toute une série d'atmosphères qui émane de ce roman.

Celle des rizières, de la chaleur moite et des moustiques. La pensée bouddhiste à travers Maître Yao-Shi. Les ravages de l'alcool de riz dans ces contrées reculées. La misère des villages dans cette campagne chinoise. La mainmise de la mafia chinoise qui profite des faiblesses des villageois. La honte pour une femme de mettre au monde une fille…

Julie Ewa débute son livre avec l'accouchement d'une villageoise en 1991, année de sa propre naissance en France et l'on ne peut s'empêcher de constater, douloureusement, comme ces deux naissances sont aux antipodes.

Lina, jeune étudiante française, arrive en Chine en cet été 2013. Elle va nous emmener, une vingtaine d'années plus tôt, dans les pas de Sun, jeune mère d'une fillette de 6 ans. Au fur et à mesure de chapitres courts au rythme haletant, nous naviguons entre ces deux époques pour découvrir le destin tragique de cette jeune femme.



L'écriture est jeune, simple et dynamique. L'intrigue est parfaitement maîtrisée même si, à mes yeux, ce n'est pas le suspense que je retiendrai de cette lecture mais plutôt cette intrusion profonde et explicite dans ce milieu campagnard chinois.

C'est un roman riche, profond et bouleversant sur les atrocités perpétrées par l'homme.

Je terminerai juste avec cette petite phrase cinglante, chargée de douleur, de la belle-mère de Li-Li qui vient d'accoucher :

« Ce n'est pas un bébé, juste une fille. »

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Jungle pourpre

Dea, une jeune fille de 11 ans, décide, pour aider ses parents très pauvres, de fuir la jungle indonésienne, pour aller se réfugier dans une grande ville. Elle sera accueillie par Aron, qui dirige un groupe d’enfants. Mais a-t-elle fait le bon choix ? Elle qui croyait améliorer son sort, elle se retrouve au sein d’une histoire sombre de morts mystérieuses. Une histoire qui décrit l’emprise de la mafia, et le sort réservé aux femmes de ce pays encore sous le choc du tsunami de 2004. C’est mon deuxième roman d’Ewa, et j’ai aimé tout autant que mon premier. Une histoire dure à lire, mais qui a suscité mon intérêt tout du long.
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