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Citations de Julien Green (916)


Pendant quelques minutes il considéra ce paysage heureux et calme, si peu en accord avec la tristesse et l'inquiétude qui lui déchiraient le coeur. Il devenait trop vieux pour apaiser son chagrin avec de faux espoirs, il se sentait trop fatigué aussi. Après des années et des années d'aventures, de désillusions, de dégoûts, il arrive un moment où l'âme n'en peut plus et refuse d'obéir au corps, de le suivre dans sa honte.

Première partie
Chapitre VI
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Ce jour-là, il se laissa tomber sur un banc non loin du parapet. Une brise légère soufflait en murmurant dans les branches au-dessus de sa tête et il sentait sur la chair de ses mains la faible caresse du soleil d'automne. Dans le ciel pâle des oiseaux poussaient des cris qui ressemblaient à des adieux. L'air était clair, la vue se portait au loin sans effort et découvrait, par-delà les maisons de l'autre rive, une route bordée de champs noirs, (...).

Première partie
Chapitre VI
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Aussi par un bel après-midi d'octobre, si le vent n'était pas trop rude, il faisait bon s'asseoir sous les tilleuls de la promenade et rêver en écoutant le bruit tumultueux et continu de cette rivière si pressée d'arriver et de s'enfuir.

Première partie
Chapitre VI
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Cette véhémence de la nature offrait un si rude contraste avec tout ce qu'il y avait de médiocre et de lourd dans cette pièce où il était enfermé ! Une mince plaque de verre le séparait de l'air frais et vif, des cris du vent dans les arbres; une vitre, il n'en fallait pas plus pour qu'il se sentît prisonnier.

Première partie
Chapitre V
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Cette somptueuse pièce aux rideaux de velours, aux tapis épais, il lui semblait l'avoir connue depuis son enfance, car certaines heures d'ennui paraissent longues comme une vie entière et c'était là qu'il s'ennuyait le plus cruellement. Parfois, lorsque cela devenait intolérable, son regard s'évadait du livre de lecture pour errer le long des murs tout couverts de tableaux. Il les examinait avec soin, notait tous les détails qu'il savait par coeur, mais où il s'efforçait de découvrir quelque chose de nouveau .

Première partie
Chapitre V
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Depuis des années elle vivait près de lui sans même se douter de ses pensées. Elle n'avait rien vu, rien deviné; on ne lui avait rien dit. Elle cousait du matin au soir et une fois par semaine elle se rendait à Paris, au grand magasin qui lui payait son travail. Sa vie tout entière était là, il le savait. dans l'âme tranquille de cette femme, jamais un désir, jamais une inquiétude ne venait troubler la sérénité des heures laborieuses. (...) Elle devait son bonheur à la pauvreté dans laquelle on l'avait élevée, mais c'était un bonheur monotone et sans élan, dont le spectacle irritait son mari parce qu'il savait la crédulité qui en était l'origine. Il lui semblait quelquefois qu'il eût préféré l'acrimonie d'une femme jalouse à l'éternelle douceur de Marie et il détestait l'humilité avec laquelle elle acceptait qu'il la rudoyât, ses manières obéissantes, sa bonté, jusqu'à sa bonté qu'il voyait, croyait-il, dans tous ses gestes.

Première partie
Chapitre IV

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Il ne se défendit point de comparer mentalement ce visage à celui d'Angèle et il se demanda quelle force, quelle convention l'empêchait de se lever tout d'un coup et de dire la vérité à cette femme, de lui expliquer qu'en lui parlant il ne faisait que penser à une autre, que son coeur et son esprit se détournaient d'elle et la fuyaient.

Première partie
Chapitre IV
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Dans ce nouveau paysage où il avait cru qu'il oublierait son ennui, au moins pour quelques temps, il ne lui avait fallu que peu de jours pour se retrouver tel qu'il se connaissait. Et il posa la main sur la rampe, à un endroit où il avait vu Angèle poser la sienne. Souffrir pour un être qu'il oublierait un jour comme il en avait oublié tant d'autres et quitter cet être pour porter ailleurs ses désirs, toujours les m^mes désirs, quelle destinée rebutante !

Première partie
Chapitre IV
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Au début d'une journée comme celle-là, il avait le sentiment que des années s'étaient écoulées dans l'espace de quelques heures, et que tout d'un coup il était devenu vieux. Alors, des larmes montaient brusquement à ses yeux et il songeait à sa jeunesse que le temps lui volait. (...)
Et ce monde entrevu dans un rêve délicieux, qu'était-ce donc ? A quoi se réduisait cet enchantement de l'adolescence ? Dans les souvenirs qui lui revenaient à présent, il ne trouvait plus que l'amertume des premières déconvenues, les misères d'une réalité avare, l'horreur des paroles, des gestes, de l'argent donné et reçu sans un mot; puis le mariage, ses blessures et ses rancunes, la patience qu'il fallait déployer pour vivre tous les jours avec un être dont il était las depuis des années, l'empoisonnement graduel de sa vie entière.

Première partie
Chapitre IV
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Comme Guéret refermait derrière lui la porte du restaurant, une pensée lui vint à l'esprit, une pensée familière qui le visitait depuis des années, dans des moments de grand trouble :" C'est le destin, c'est mon destin." Et cette constatation le rassurait, comme tout être faible est rassuré lorsque son sort est mis entre les mains d'une puissance supérieure, même s'il doit en souffrir, même s'il doit perdre la vie. Désormais, il n'aurait plus rien à décider de lui-même; les événements, bons et mauvais, se produiraient tout seuls.

Première partie
Chapitre IV
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La mort, les hasards de l'existence t'en prendront un ou deux, de temps en temps, jusqu'au jour où la mort te prendra, toi aussi. Alors on fermera ton restaurant, on dispensera tes biens, on parlera un peu de cette Mme Londe qui faisait des prix si doux, puis ton souvenir s'effacera de toutes les mémoires, et tu aurais pu aussi bien ne pas vivre."

Première partie
Chapitre III
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(...) : elle connaissait ces gens, leurs occupations, leurs petites aventures, leurs soucis, leurs dettes, leur avoir. Pas un instant de leur vie ne paraissait lui échapper, car elle s'entendait à leur poser des questions, lorsqu'ils passaient à la caisse, et les uns la renseignaient sur les autres. Une grande partie de son prestige dépendait, en effet, de la manière dont elle était informée. Personne ne se souvenait de plus de scandales, de plus de misères. Sa mémoire ne laissait rien échapper et tout lui semblait précieux dans les cent petits détails qu'elle glanait chaque jour de droite et de gauche, tout pouvait servir.

Première partie
Chapitre III
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Quelles pensées menaient cette femme ? elle ne semblait ni heureuse, ni malheureuse. Un peu courbée en avant, les mains mollement posées sur les cuisses, elle se tenait dans l'attitude de quelqu'un qui observe un spectacle. (...)
Elle était vêtue de taffetas noir, le buste serré dans un corsage qui emprisonnait le cou jusqu'au menton mais laissait libres, sous des volants de guipure, des poignets ronds et potelés. Une améthyste à la main droite, une broche sur le haut de la poitrine laissaient percer un souci d'élégance, mais il y avait dans l'étoffe autour de la taille quatre ou cinq vilaines reprises qui avouaient des temps difficiles et une gêne mal dissimulée. Le rose de la coiffeuse contrastait fortement avec ce qu'il y avait de pauvre et de triste dans ces hardes usées, dans ce visage dur; c'était au milieu d'un sombre tableau une note gaie, jetée comme par dérision, ou pour accentuer l'âpreté des couleurs et la cruelle énergie du dessin.

Première partie
Chapitre III
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A quelques six cent mètres de là et au moment même où cette conversation avait lieu, Mme Georges Londe méditait devant son miroir en attendant qu'il fût l'heure de pénétrer dans la salle à manger. c'était une sorte de cérémonie qui n'allait pas sans certains apprêts, car Mme Londe n'était plus jeune, mais elle gardait la coquetterie de ses vingt-cinq ans et jamais elle n'eût consenti à paraître devant ses clients avant d'avoir prodigué à sa beauté défaillante les encouragements de la poudre et du rouge.

Première partie
Chapitre III
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Une pensée singulière lui vint. Qui l'empêchait de remonter vers la ville, de rentrer chez lui ? Par un caprice de l'esprit comme en connaissent les natures mélancoliques, il se vit faisant tout le contraire de ce qu'il voulait, tournant le dos à cette jeune fille dont les pas se perdaient à présent dans le silence, et il imagina qu'il regagnait sa chambre d'où la tristesse et le désir l'avaient chassé depuis le matin.

Première partie
Chapitre 2
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Maintenant il était installé devant un verre de café noir dont l'odeur et le goût se mêlaient, avec bien d'autres petites choses, à la triste et banale aventure qu'il poursuivait de semaine en semaine, et il approchait son visage de la vitre avec une anxiété que l'habitude n'avait pas apaisée.

Première partie
Chapitre 1
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Il était jeune encore, mais avec ce je ne sais quoi de flétri et d'amer que l'on remarque chez ceux dont les soucis ont dévoré les premières années de la vie. Son visage était plein, sans couleur, avec une chair molle qui prédisait pour plus tard des joues avalées et de ces rides profondes qui dessinent, vers la quarantaine, une espèce de rire silencieux autour de la bouche. Ses yeux gris clair s'attachaient fortement à ce qu'ils considéraient. Son nez large et charnu, ses lèvres épaisses trahissaient un homme de peu de volonté, mais épris de son bien-être et de ses habitudes et capable de quelque fermeté lorsqu'il s'agissait de les défendre. Il était rasé avec beaucoup de soin, fort proprement vêtu de gris foncé, avec une cravate noire et, fantaisie naive, un mouchoir de soie violette qui sortait à moitié de la poche supérieure de son veston.

Première partie
Chapitre 1
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Certaines heures semblent impossibles à vivre. Il faudrait pouvoir les sauter, les omettre et rejoindre la vie un peu plus loin.
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L'Homme est une bête qui ne se laisse bien prendre que si on l'assomme du premier coup. Une maladresse au début est irrémédiable.
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Rien n'est plus proche d'une femme ensorcelée qu' une femme éprise.
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