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Critiques de Kazushige Abe (20)
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Sin semillas

J’ai du louper quelque chose.

Presenté par un pompeux « livre monde », ce titre n’est qu’un enchaînement de vulgarités sans aucun intérêt. J’ai tenu 300 pages en me disant que l’histoire allait enfin commencer pour m’apercevoir que visiblement il en était de même sur les mille pages de cette enclume.



Quant à la traduction, elle est d’une lourdeur rare avec o combien de tournures alambiquées. Ça sent la traduction littérale sans aucun soucis d’adaptation.











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Projection privée

Derrière cette couverture se cache un thriller psychologique déstabilisant et efficace.



Le scénario s’y déploie en mêlant le présent aux flashbacks de la vie du narrateur, et en gagnant en obscurité. Le personnage principal y évolue autour des milieux sectaires et mafieux propres au Japon.



Le dénouement est saisissant et permet de donner toute sa profondeur à l’intrigue.



La galerie des personnages aurait peut être gagné à être plus succincte. Cette lecture a néanmoins été très agréable.
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Nipponia nippon

Adolescent perturbé et solitaire, Tôya Haruo a quitté sa ville natale pour s'installer seul à Tokyo, banni par sa famille pour avoir harcelé une de ses camarades de classe. Désormais, il a arrêté ses études, passe son temps sur internet, sort très peu et continue à bénéficier des largesses de ses parents.

Persuadé que son patronyme, Tôya, est lié à ‘'toki'', l'autre nom du Nipponia Nippon, l'ibis japonais, un symbole du pays, menacé d'extinction, il est passionné depuis toujours par ces oiseaux. Cette lubie est devenue sa raison de vivre. Il sait tout sur ces volatiles et sur le Centre de sauvegarde de l'île de Sadô. Là-bas, les Nipponia Nippon ne sont plus tout à fait japonais puisque les spécimens qu'on tente de faire se reproduire, sont un cadeau de la Chine.

Remonté contre ses parents, la société, les Hommes, Haruo forme le projet de se rendre sur l'île avec trois possibilités en tête : apprivoiser les oiseaux, les libérer ou les tuer.



Il ne faut pas se laisser abuser par la jolie couverture de ce roman japonais. Nipponia Nippon est un roman sombre dont le héros s'avère de plus en plus inquiétant au fil des pages. Illustration d'une partie de la jeunesse japonaise qui se rebelle en s'isolant, Haruo est un obsessionnel paranoïaque qui sort très peu de chez lui mais qui a le monde à portée de main grâce à sa connexion internet. C'est derrière son écran qu'il se documente de façon méticuleuse sur sa passion du moment, le Nipponia Nippon, et qu'il peut aussi faire divers achats afin de mettre son projet à exécution.

Si, au départ, on croit naïvement à sa volonté de sauver des oiseaux en voie d'extinction, très vite, on découvre des motivations moins glorieuses. Ses interrogations sur l'origine ethnique des ibis laissent deviner un nationalisme sous-jacent. Sont-ils japonais ces oiseaux nés au Japon de parents chinois ? Peuvent-ils encore être un symbole du pays alors qu'ils vivent prisonniers, incapables de survivre en liberté ?

Autant d'interrogations ressassées qui le conduisent à choisir une solution extrême…

Etrange personnage pour un étrange roman dont on a du mal à comprendre la finalité. Qu'a voulu dénoncer l'auteur ? le mal-être des jeunes Japonais ? L'extinction des espèces ? Mystère…

Une lecture courte (moins de deux cents pages) et pourtant assez laborieuse, plombée par quelques passages scientifiques abscons.

La belle couverture aura été trompeuse…

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Nipponia nippon

Le jeune Tôya Haruo développe une fascination pour les nipponia nippon, ibis japonais en voie de disparition. L'adolescent un brin perturbé mais attachant dans sa démarche exclusive en début de lecture se révèle être un personnage trouble, obsessionnel, maniaque voire violent. La fascination pour les ibis dissimule frustration et colère contre un système dans lequel il n'a su s'insérer que ce soit dans sa famille, son école ou son quartier. Un roman sur la société japonaise et sa jeunesse en dérive sur le thème des Hikikomori et du harcèlement. Ce roman m'a fait penser à celui de Ryu Murakami que j'ai lu précédemment Love and Pop. Les thèmes des valeurs, de la moralité, de la distinction entre bien et mal que perdent les jeunes japonais s'y retrouvent.
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Nipponia nippon

Très heureuse d'avoir découvert ce livre. Ce que j'aime avec la littérature japonaise c'est d'être surprise, de lire des ovnis, de se demander ce que je suis en train de lire à chaque page. Ce livre coche toutes les cases.



On suit un jeune homme qui est obsédé par un oiseau du Japon, l'Ibis. On comprend très vite que cet homme a déjà eu des phases d'obsession très violente notamment avec une fille dans le passé. Là toute son attention est tournée vers ces oiseaux, et son envie de les libérer. On assiste à la moindre de ses pensées, à sa névrose, à ses justifications face à ses actes irraisonnés. On le voit s'enfoncer, se radicaliser de plus en plus.



Le roman a un ton très ironique, sombre, il y a des réflexions très intéressantes sur notre société, on a l'impression que l'on ne peut être sauvé, il y a un grand fatalisme. C'est un roman très intéressant et très original.
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Projection privée

Lorsque j'ai découvert ce livre, on le comparait au célèbre ''Fight Club'' de Chuck Palahniuk. Paru dans l'année qui suivit la parution de ce dernier (le roman et non le film), on lui attribue de troublantes similitudes. Par ailleurs, le résumé augurait bien ; aussi, je tentai l'aventure dans de bonnes dispositions.



La similitude #1 arrive très rapidement, et c'est un simple détail. J'estime donc pouvoir élaborer sans divulgâcher : le personnage principal de ''Projection privée'' est projectionniste, et il nous explique une petite facétie à laquelle il se livre sur les bobines... Bon, est-ce un emprunt ? Peut-être en effet. Mais quand on écrit un roman, on s'inspire d'un bon nombre de choses, qui nous traînent dans la mémoire, ou aperçues de-ci de-là. M. Palahniuk lui-même ne l'a pas inventé cette pratique, elle est véridique, il l'a pêchée quelque part. Autre considération : Kazushige Abe a fait des études de cinéma, il a baigné dans le milieu, et il y a plusieurs allusions au cinéma dans ses livres précédents, par exemple le titre de l'un d'eux ''La nuit américaine'' qui est un style de plan. Alors, d'où lui vient ce détail ?



Un peu plus loin, je croise la similitude #2, cette fois un concept avec une implication beaucoup plus profonde dans le roman. Mais après un temps je me dis : mais finalement cela prend des directions bien différentes, il faut être bien sévère pour y voir une intention malhonnête, si ce n'est que ça... Et en effet, cela ne demeure que ''ça'' pendant un long moment. Puis, en approchant de la fin, je sens poindre quelque chose : si ce que je soupçonne se produit, cela ravive le débat. C'est le cas : la similitude #3 se matérialise. Elle est de taille elle aussi, mais encore une fois, le développement en atténue la portée.



Les deux romans sont très différents, que ce soit pour l'histoire ou le style. M. Palahniuk nous arrivait avec une prose originale tout à fait inédite, alors que le style du présent roman est conventionnel et sobre. ''Fight Club'' discutait de l'aliénation des individus produite par la société de consommation, ce qui est totalement absent ici. Le roman de Palahniuk nous berçait de sa nouveauté jusqu'à un retournement stupéfiant, mais avant comme après, la situation est fixée et parfaitement claire, alors que l'ambiguïté et le mystère sont cultivés tout au long de ''Projection privée''. Cette comparaison faite, je peux vous dire que le roman de M. Abe m'a beaucoup plu, et que je le conseille fortement pour lui-même. Être à l'affût de la filiation a constitué un plaisir supplémentaire non-négligeable.



Alors, est-il possible que l'auteur ait eu connaissance de la première publication d'un américain inconnu et s'en soit inspiré pour son roman ? Cela est possible vu les similitudes et le rapprochement dans le temps. Si c'est le cas, est-ce répréhensible ? Je ne le pense pas, pour les raisons exprimées plus haut. Se peut-il que les similitudes soient pure coïncidence ? Je me demande ce qu'en aurait pensé M. Wolfgang Pauli...
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Sin semillas

Fist f*****g et pâtes à l'ail.

Pour être tout à fait honnête, s'il y a essais, il n'y a pas vraiment de Fist f*****g. Mais bon, comme c'est une volonté d'un personnage et que c'est souligné par l'usage du gras dès le troisième chapitre, ça marque.

Ce roman de 1000 pages est ce que je lu de meilleur cette année, voire plus. C'est excellemment écrit, pas tant par un style à la Proust ou à la Kawabata, mais par sa construction où des dizaines d'histoires se mêlent ou pas et où chaque personnage (il y a un une table avec les 61 personnages qu'on croise le plus souvent, et il est bien utile car les noms/prénoms japonais se retiennent moins bien que des noms occidentaux pour le lecteur que je suis) a une voix particulière.

Il y a aussi un énorme biais de confirmation en ce qui me concerne: la façon dont sont présentés les êtres humains. C'est pas glorieux, pour utiliser un euphémisme. On est dans une petite ville de province et c'est aussi acerbe que du Chabrol. Tous ont d'énormes ambitions pour un lieu qui ne peut décemment pas les accomplir, mais ce n'est pas grave, ils foncent tous dans le mur avec application. On est aussi du côté des frères Coen avec des film comme Fargo ou Burn after reading pour l'absurdité des ambitions des personnages mais on a aussi le droit à du No Country For Old Men par ses poussées de violence crues et perturbantes. On pourrait dire aussi qu'on y retrouve du Takeshi Miike dans le côté un peu foutraque mais ce dernier manque de la subtilité qui fait le style de Kazushige ABE.

L'attention du lecteur est tout le temps en éveil car on commence par l'historique de la ville de Jinmachi avec l'occupation américaine qui entraîne de la prostitution et semble être le péché originel qui traverse tout le roman. Puis on a l'histoire d'une des familles influentes de la ville, les Tamiya, des boulangers. Oui, une des familles influentes est boulangère. Lorsque je vous disais que les ambitions ne sont pas corrélées à la réalité de la ville, je ne mentais pas. Enfin le roman commence avec un meurtre, et comme dans Twin Peaks, c'est la non résolution de ce meurtre qui permet d'ouvrir sur les autres mystères de la ville et de ses habitants. Il y est question de fantômes*, d'extra-terrestres*, de violences sexuelles/physiques/mentales, d'accidents, de suicides, de disparitions, de catastrophes naturelles, d'une roche mystérieuse et j'en passe. Comme dans Twin Peaks, si la solution du meurtre initial est donnée, le roman et les autres mystères n'ont plus lieu d'être.

Si l'auteur ne prend aucun parti pris par rapport à ses personnages et qu'il n'y a pas réellement de morale, ce n'est pas un livre vidé d'émotions, bien au contraire. Même si la plupart des habitants sont répugnants, pathétiques et/ou repoussants, on reste avec eux malgré ces défauts plutôt importants. Un paradoxe à ajouter aux autres nombreuses qualités du roman.



*réels ou fantasmés, allez savoir...
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Nipponia nippon

J’avais adoré « Sin semillas » et j’ai voulu lire ce nouveau roman traduit en français. Un peu déçu. On a du mal à avancer dans les premières cent pages. On dirait un roman pour illustrer la réalité des ados isolés et seulement connectés dans le net. On retrouve un bon métier d’écrivain mais plus proche du journalisme que de la vrai littérature. On observe toute l’histoire avec une certaine distance. Les adolescents solitaires qui vivent en dehors de la réalité. On dirait un bon début mais malheureusement sabe semble dans ce roman y rester là. Quand même c’est bien construit et l’ensemble reste passable. Mais j’attendais davantage après le magistral Sisemillas
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Projection privée

Roman étrange parce qu'au fil des pages, le personnage-narrateur (on est censé lire son journal) nous raconte des faits improbables et de plus en plus délirants (lui-même n'est-il pas un peu parano ?) : entre le mouvement, limite sectaire, qui forme aux exercices physiques et aux technique de renseignement, le cinéma où le narrateur travaille comme projectionniste et où des yakuzas passent sans cesse plus pour discuter que pour voir des films, des jeunes collègues plus que bagarreurs... et une boule de plutonium, on se demande où on est.

Des personnages troubles (le gourou et ses disciples ; certains de ces disciples meurent accidentellement semble-t-il ; d'autres réapparaissent, tout comme un film qu'il faut cacher ; une collégienne qui se prostitue ; des yakuzas), dans une ambiance de violence latente.

Je me suis demandé si le journal n'était pas un scénario que le personnage (il a fait des études de cinéma) écrivait... d'où le titre "Projection privée".

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Sin semillas

Une série d’incidents sordides dans une petite ville dévoile les secrets peu ragoûtants de la localité , une sorte de « Twin Peaks » mais à la sauce japonaise ! Hyper violence , drogue ,voyeurisme , yakusa pathétiques mais dangereux , catastrophes naturelles , emportent les nombreux personnages dans un crescendo cruel dont les racines naissent des plaies toujours suppurantes de la guerre et de l’occupation américaine . Un roman fleuve à la construction savante et maîtrisée qui secoue le lecteur.
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Nipponia nippon

Toya Haruo est mal dans sa peau , l’un de ces adolescents japonais qui se coupent de leur entourage et s’enferment peu à peu dans le monde virtuel d’Internet qu’ils meublent de leurs obsessions . Pour lui , c’est une fille puis , L’Ibis japonais menacé d’extinction . Le livre conte la dérive de plus en plus délirante qui le fera passer du dérisoire au tragique . Un regard acéré sur l’une des faces inquiétantes de la société japonaise.
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Nipponia nippon

Comparer au vaste projet et au texte ample (800 pages) qui allait de pair - Sin semillas - , ce Nipponia Nippon de seulement 140 pages n’en ait pas moins aussi intéressant.

Abe Kazushige est toujours aussi sombre - réaliste ? - sur la société japonaise. Son personnage principal a dix sept ans ; ce n'est pas totalement un hikikomori, mais c'est un solitaire, mal dans sa peau, incompris, et banni par ses parents suite à sa passion pathologique pour une lycéenne. Il vit seul à Tokyo et s'est donné pour mission de résoudre le problème des ibis japonais (nom savant Nipponia Nippon) en voie de disparition. L'interrogation sur l'espèce animale ( qui n'est plus japonaise que de nom car pour sauver les derniers représentants on effectue des croisement avec des ibis chinois) se double d'une interrogation sur l'identité du jeune homme.

Dans son isolement, ses recherches (le texte est truffé de données documentaires - qu'elles soient vraies ou fausses a peu d'importance) et ses réflexions le conduisent à planifier une opération "commando" vers l'île de Sado où les ibis sont sauvegardés.

Le texte déroule, avec des retours sur la vie du jeune homme avant son exil tokyoite, cette montée vers le dramatique dénouement.
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Sin semillas

En 4ème de couverture, on nous annonce un "livre-monde". Un peu prétentieux et effrayant. En fait il s'agit plutôt d'un livre -ville où l'on suit un certain nombre d'habitants dans leurs habitudes, manies, secrets (honteux), perversions, et penchants le plus souvent malsains. A cela s'ajoute une histoire de meurtres, de relations politico-mafieuses, de catastrophe naturelle et d'apparition (sois-disant) de revenant et autres extra terrestres ! C'est assez dense mais très bien ficelé et accrocheur, particulièrement dans les jeux de pouvoirs ou d'influence entre les protagonistes. Seul bémol, les dialogues, que je n'ai pas trouvé très naturels (mais c'est la faute à la traduction, pas celle de l'auteur ;-)).

PS : il y a une liste des personnages à la fin du livre pour s'y retrouver !
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Projection privée

J’ai fait les choses à l’envers : après avoir lu et beaucoup aimé le pavé Sin semillas puis le très court Nipponia nippon, je suis retourné à la première publication française d’Abe Kazushige, Projection privée (et, sauf erreur, il n’y en a pas eu d’autre au-delà des trois citées). Ce livre a compté dans la carrière de l’auteur (alors âgé d’une trentaine d’années), en remportant un beau succès au Japon – clairement, c’est le livre qui l’a fait connaître.







Avec quelque chose d’opportun ? Projection privée paraît en 1997 – soit l’année suivant la parution d’un autre roman, très célèbre, et dont on ne peut pas ne pas parler en l’espèce : Fight Club, de Chuck Palahniuk. De fait, le roman d’Abe fait beaucoup, beaucoup penser à celui de l’écrivain américain, au point où c’en est un peu suspect… Plagiat, commentaire critique, pastiche, parodie ? Ou seulement l’air du temps, en toute... innocence ? Je n’ose pas trancher – même si je vais tâcher d’avancer quelques éléments dans cette chronique un peu désabusée. Mais les liens entre les deux romans me paraissent vraiment marqués, et j’ai vraiment du mal à envisager la possibilité qu’Abe Kazushige ait pu écrire son roman sans rien savoir de celui de Palahniuk. Or, je le crains, cela joue déjà en défaveur de celui d’Abe ; c’est que celui de Palahniuk est vraiment bon…







Projection privée adopte la forme d’un journal intime, tenu par un certain Onuma, projectionniste dans un cinéma de second ordre à Shibuya. Un boulot pépère – rien de très ambitieux, pour l’étudiant en cinéma qu’il était (comme l’auteur), même s’il lui offre, de manière discrète, les pouvoirs d’un démiurge secret, quand il insère dans les films qu’il projette des bandes issues d’autres films… Tiens, comme dans Fight Club, sauf erreur.







Mais Onuma a son côté sombre – je veux dire, au-delà de son goût douteux pour les chansons de Julio Iglesias (exégèses à la clef) : une certaine attirance pour la violence, et un certain talent pour ça. Une expédition punitive, à la requête d’un collègue jeune et falot, contre des lycéens décidément très mal élevés, en fait bientôt l’éloquente démonstration – il y en aura d’autres.







C’est qu’il a suivi le Cours. L’institution, fondée par le mystérieux Masaki, peut être envisagée originellement comme un club de formation à l’autodéfense, qui enseigne des techniques de fight, et au-delà de survie, et, comme de juste, se révèle finalement bien davantage, quelque part entre la secte façon Aum Shinrikyô, la société secrète insurrectionnelle vaguement fascisante et le centre de formation pour yakuzas d’élite… ou pour espions lambda, ou pour navrants voyeurs, notamment via les techniques de surveillance (un thème qui, décidément, obsède Abe Kzaushige, il est présent dans ses trois romans traduits en français !). Mais, globalement, c’est comme dans, en gros, oui. Onuma et ses copains de l’école de cinéma devaient simplement, à la base, tourner un documentaire de fin d’études sur Masaki, mais ils se sont retrouvés embrigadés dans son Cours, laissant tomber tout le reste. Masaki est un de nos Tyler Durden, du coup. On en dérive sans surprise le rôle d’Onuma.







Le Cours, pour lui, c’était supposément du passé – mais voilà qu’Onuma apprend la mort, dans un « accident de voiture », de quatre de ses anciens condisciples, tandis qu’un autre, Inoue, reprend contact avec lui, révélant certaines choses, en dissimulant d’autres, et mentant plus qu’à son tour. Exactement ce qu’il faut faire avec un paranoïaque ! Car Onuma a visiblement quelques petits problèmes à cet égard. De l’accident, il élabore une complexe théorie du grand complot global anti-Lui, où les assertions d’Inoue ont leur part ; bientôt, les yakuzas sont de la partie – plusieurs gangs, qui s’affrontent, avec Onuma au milieu ; et un film secret, forcément bourré d’indices, mais cryptés, il faut en percer le code ; du sordide, à base de pédopornographie et de prostitution juvénile (enjo kôsai) ; et même un deal de plutonium !







Tout cela dans un monde de mensonges et de tromperies – Onuma ne peut avoir confiance en personne… et surtout pas en lui-même. Nous ne devons donc pas avoir confiance en lui nous non plus – dès les premières pages, c’est comme s’il nous braillait : « JE SUIS UN NARRATEUR NON FIABLE ! JE SUIS UN NARRATEUR NON FIABLE ! » On en conclut sans trop de peine que, s’il se fait un film, ou semble se faire un film, il en fait peut-être un aussi pour un spectateur privilégié…







Et notre projectionniste qui fut (?) documentariste parsème bien sûr son journal de tableaux d’un Japon en crise, morale en même temps qu’économique, une société folle et aliénante, faite de travers mesquins et de vices plus ou moins avoués ou plus ou moins conscients, une société où la violence a assurément sa place. Cette fois, malgré le plutonium, Abe Kazushige ne vire peut-être pas autant dans le délire apocalyptique que Chuck Palahniuk, il adopte un point de vue peut-être plus intime, mais les liens ne manquent cependant pas à cet égard – jusque dans le côté « la philo pour les nuls », délibérément chez les deux supposé-je.







C’est que nous avons affaire à deux petits malins. Et, comme souvent, c’est là à la fois un atout et un handicap. À la comparaison, cependant, je tends à croire que Palahniuk est celui qui s’en sort le mieux à cet égard : Fight Club est un roman roublard, il scintille de trucs de petit malin, mais il fonctionne très bien en tant que tel, et le petit jeu entretenu par l’auteur avec son lecteur, même très méta-machin ou post-bidule, ne va pas jusqu’à transformer le roman entier en plaisanterie d’un goût plus ou moins douteux – il y a davantage, et déjà, c’est un peu la base, une bonne histoire, de bons personnages. Chez Abe Kazushige, le dispositif trop voyant ne m’a pas permis de m’immiscer véritablement dans une histoire dont les outrances dénoncent sans cesse le caractère de blague (pas si drôle) ; la conclusion est comme de juste le point culminant de ce dispositif, mais fonctionne plus ou moins bien – là où l’auteur, tout sourire, semble nous balancer enfin un « Ah, ah ! Je t’ai bien eu ! », le lecteur (nébalien en tout cas) est tenté de lui répondre que, non, pas vraiment, car cela n’a pas vraiment fonctionné ; c’était trop voyant, on s'attendait dès le départ à quelque chose du genre… L’air du temps, admettons, a pu seul justifier l’écriture de ce roman, mais ce dispositif incite tout de même sacrément à chercher du côté des hypothèses du commentaire critique ou de la parodie. Et, au jeu du petit malin, j’ai bien peur qu’Abe Kazushige, en désirant en rajouter encore une couche, est finalement tombé dans le piège plus ou moins consciemment tendu par Palahniuk, méta-machin ou post-bidule – ceci étant, Palahniuk lui-même l’a fait par la suite…







Mais il faut enfin évoquer un ultime gros problème de Projection privée… La plume est très, très lourde, et bien trop (maladroitement) « soutenue », même dans les dialogues, pour convaincre – ces gens-là ne parlent pas comme des yakuzas à la petite semaine, etc. Tous leurs mots sonnent faux. Absolument tous. Et, là, non, je refuse qu’on me réponde « méta-machin ou post-bidule », ça serait pousser le petit jeu bien trop loin. Est-ce le style originel, est-ce la traduction ? Sans la possibilité de recourir au texte japonais, je ne peux sans doute pas me montrer catégorique, ici, mais je tends tout de même à pencher vers la deuxième hypothèse – d’autant que j’y trouve souvent un rendu bien trop « littéral » qu’on s’expliquerait mal dans l’original. Le traducteur, plus tard, accomplirait un bon voire très bon travail sur, entre autres, les deux autres romans d’Abe Kazushige disponibles en français, Sin semillas et Nipponia nippon, mais, dans Projection privée, non, ça ne va pas…







Grosse déception, donc, que cette Projection privée, qui me paraît rater son coup et m’a plus ennuyé qu’autre chose, en dépit de son format assez bref. L’auteur a assurément démontré par la suite qu’il pouvait écrire des choses bien plus intéressantes, et je serais tout à fait preneur d’autres traductions – mais ce premier titre traduit, disons-le, m’a fait l’effet d’être… mauvais.







Hélas.
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Nipponia nippon

Quand je suis tombé sur ce bouquin à la bibliothèque, Nipponia Nippon, deux éléments ont capté mon attention : son auteur japonais, Abe Kazushige, et le dessin d’un oiseau. J’aurais dû me rappeler le dicton : « On ne juge pas un livre à sa couverture. » Bref, une petite déception. Ça fait une semaine que j’ai terminé le roman et, plus j’y repense, plus je crois avoir perdu mon temps à le lire. Il raconte l’histoire du jeune Tôya Haruo. C’est un adolescent japonais, presque un adulte, qui vit une relation trouble avec ses parents, s’absorbe dans ses études, broie du noir. Sa camaraderie (et sa passion secrète mais impossible) avec une fille de sa classe le plonge encore plus dans ses pensées sombres. D’où l’obsession sur l’ibis japonais (nom scientifique : nipponia nippon), auquel il s’identifie. Je peux comprendre qu'un garçon solitaire, en colère ou dépressif cherche à se rattacher à quelque chose, parfois même à des trucs complètement étranges, alors cette fascination pour un oiseau rare pourrait être crédible mais il y a quelque chose dans son développement qui fait en sorte que je n'accroche pas, que je n'arrive pas à y croire.



Pourtant, l’auteur Kazushige a étudié cet animal, son livre est truffé d’informations non seulement sur l’ibis mais également sur sa situation (l’oiseau est un animal protégé, en voie d’extinction), les parcs fauniques et la nature. Un fait intéressant, les trois derniers ibis au pays sont des oiseaux nés au Japon mais de « parents » d’origine chinoise. Donc, ces ibis, sont-ils japonais ou chinois ? Pendant que les instances gouvernementales et les groupes environnementalistes discutent, les animaux risquent de disparaître pour de bon et il faut agir. Pour le jeune garçon, tout le monde a tout faux. La solution est la liberté, et il prend sur lui de l’accorder aux derniers ibis. C'est peut-être là que j'ai trouvé toute cette histoire un peu exagéré. Dans tous les cas, le scénario imaginé par Tôya Haruo ne se passe pas comme prévu et tourne mal. Il s’agit sans conteste d’un roman noir. Quel contraste avec l’ibis, un si bel oiseau blanc et rose pâle. Mais une question m’a accompagnée tout au long de ma lecture : « pourquoi ? » Et je n’ai pas de réponse. Je me demande encore ce à quoi l’auteur Kazushige Abe essaie de nous convier. Le sort des oiseaux ? Celui des jeunes japonais désabusés ? Le problème de l’identité ? Dans tous les cas, il a raté sa cible avec moi.
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Nipponia nippon

Haruo est un jeune perturbé. Solitaire, entretenant des rapports orageux avec ses parents, il est amoureux malheureux de sa camarade de classe Sakura. Il a des pulsions agressives et perverses qui le conduisent à la harceler, à l'espionner, et même à pénétrer par effraction chez ses parents pour y lire son journal intime. Il y découvre qu'elle n'a d'yeux que pour son professeur de maths.



Par dépit, par ennui, par vengeance contre cette société qui ne l'aime pas, il se trouve une cause à défendre, se mettant en tête de réaliser une action de folie qui fera parler de lui et changera le cours de l'histoire.



Cette obsession, ce sera élever, libérer ou tuer les derniers spécimens de Nipponia Nippon captifs du centre de sauvegarde de l'île de Sado, dernier sanctuaire de ces magnifiques ibis japonais. Cette espèce d'oiseau n'existe encore que par le recours à une souche chinoise et des tentatives, souvent infructueuses, d'inséminations artificielles et fécondations très organisées via la coopération sino-japonaise.

Car pour lui c'est clair, ces oiseaux que les autorités s'entêtent à vouloir sauver d'abord pour le symbole, l'emblème, sont comme lui victime du « scénario écrit par les hommes ».



Dès lors, il passe ses jours et ses nuits sur internet pour se documenter sur les ibis, concevant le plan qu'il compte mettre à exécution pour « réponse définitive à la question Nipponia Nippon », et s'armer, avec un certain manque de prudence dans ses contacts.



Le jour J, son voyage vers et dans l'île de Sado est perturbé par l'omni-présence d'une troublante adolescente, Fumio, qui lui avoue sa détresse suite à la mort accidentelle de son petit frère…le destin va-t-il réunir ces deux êtres endeuillés ? (Sakura a fini par se suicider à cause de son prof marié et muté)…Haruo mettra-t-il son plan à exécution ?



Kazushige Abe, enfant terrible de la nouvelle vague d'écrivains nippons, nous propose un roman très sombre de bout en bout, montrant un aspect consternant et assez inquiétant de la jeunesse japonaise d'aujourd'hui : solitude, enfermement psychologique avec déviances agressives, désoeuvrement et apathie…



Son intrigue est originale, et le suspense est maintenu jusqu'au bout, même si le style, sans être mauvais ni désagréable, ne fait pas dans les belles envolées lyriques.



Un beau sujet aussi sur cette superbe espèce d'oiseaux (quelle photo de couverture !), au sort tragique, sur lesquels Abe a fait un travail de recherche documentaire remarquable.
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Nipponia nippon

Nouvelle sortie d'un roman japonais : « Nipponia Nippon », c'est le nom de l'ibis japonais. Cet oiseau emblème du Japon est une espèce en voie d'extinction. le narrateur de ce roman Tôya Haruo, un adolescent a une passion pour l'ibis japonais, mais ses intentions sont troublantes. L'incipit donne le ton :



"Trois solutions : les élever, les libérer ou les abattre.

Mais le choix allait se restreindre s'il s'en tenait à ce qui était réalisable.

Parmi les trois, l'idée de les élever devait être écartée. Il ne serait pas facile de les transporter de l'île de Sado à Tokyo et en plus ces oiseaux étaient bien trop grands pour être gardés dans une pièce de six tatamis."





Basé sur la véritable histoire de ces Ibis Japonais. le roman nous narre le malaise de la jeunesse d'un adolescent japonais. En marge de la société, à la recherche d'une quête d'absolu, il fait face à l'incompréhension et la solitude. (...)
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Sin semillas

Il y a tellement de personnages que malheureusement je n'ai pas pu aller jusqu'au bout. Mais quel Japon il nous est permis de découvrir ! Un Japon romancé sans doute. Je classerai ce livre dans le genre : roman noir !
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Sin semillas

Incandescent, Sin semillas oscille entre le violent et l’effervescent, le grotesque et le pathétique dans une langue enlevée fourmillante d’images, d’argot, d’obscénités, de dialogues servis par Jacques Lévy.
Lien : http://rss.feedsportal.com/c..
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Projection privée

Nom : Onuma

Age : 33 ans

Profession : Projectionniste dans un vieux cinéma de quartier détenu par des yakusas

Signe Particulier : A une érection dès qu’il entend un air de Julio Iglesias (et en particulier sa chanson « mes trente-trois ans »)



Un article dans le quotidien du jour lui apprend que quatre membres de son ancienne bande sont décédés des suites d’un accident de voiture. Accident ou Meurtre ? Toujours est-il que pour Onuma qui ne croit pas en cette coïncidence du destin, il est temps de rédiger sous la forme d’un journal intime les faits troubles d’un passé obscur. Il se sent menacé et pressent être bientôt la prochaine victime d’une vengeance tardive. Tout commença quelques années auparavant lorsque pour le besoin d’un devoir universitaire en cinéma, son groupe et lui réalisèrent un documentaire sur un étrange personnage...



Tel un devoir scolaire, Onuma décrira, avec précisions et anecdotes, son embrigadement progressif à l’intérieur d’un groupe mystérieux. Pourtant simple étudiant en cinématographie, son monde se tournera petit à petit vers la violence, l’espionnage et la paranoïa. Dans ce Japon moderne et entre les petites guerres que se livrent les clans des yakusas, la violence reste l’unique échappatoire pour exister et sortir de l’anonymat dans lequel il s’est projeté. Son esprit est devenu tel qu’à chaque nouvel acte de « bravoure », il semble se rapprocher toujours un peu plus de la folie, comme si sa vie n’était plus tout à fait réel, comme si Onuma marchait tel un équilibriste sur une corde raide où d’un coté se trouve la folie inévitable et de l’autre la mort inéluctable...



Il y avait le « Fight Club » de Chuck Palahniuk, il faudra désormais compter aussi sur les activités du Cours de l’Eminence...



En grand format, chez Actes Sud ; En format poche, chez 10/18... Voilà un peu ce qu’en dit Actes Sud : Dans le décor de Shibuya, un quartier branché de Tokyo, objet de tous les fantasmes et de toutes les convoitises, Kazushige Abe offre un regard saisissant sur la société japonaise d’aujourd’hui - un petit pays policé et moderne, qui laisse pourtant la place à d’infernales machinations dans lesquelles l’individu disparaît, aliéné par des organisations secrètes paramilitaires, fascistes, ou pseudo-religieuses. On se souvient alors du meilleur roman de Murakami : La Course au mouton sauvage.



La course au mouton sauvage... La comparaison est flatteuse, car en matière de romans japonais contemporains, ce Murakami est tout en haut de l’affiche. Indétrônable dans mon cœur et esprit que par moment je me prends moi-même pour un mouton sauvage gambadant et folâtrant sur les versants enneigés en Hokkaïdo... Cependant, je n’aurai tout de même pas oser et proposer une telle comparaison...
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