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Critiques de Ken Bugul (25)
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Le Baobab fou

Lorsqu'elle écrivit ce premier roman, paru en 1984, Ken Bugul avait 33 ans, elle vivait dans la rue à Dakar et elle avait déjà vécu une vie d'une rare intensité, dont elle dit elle-même qu'il faudrait mille ans (...sous-entendu, à une personne normale) pour vivre une telle vie.



« Le baobab fou », premier récit d'une trilogie autobiographique, raconte ce destin hors du commun, celui d'une enfant d'un petit village du Sénégal, brillante élève de l'école française, une enfant coupée de ses parents avec un père âgé de 85 ans à sa naissance et qu'elle prenait pour son grand-père, et une mère ayant quitté la maison familiale quand elle avait cinq ans, une enfant qui découvre en grandissant les dégâts du colonialisme, puis l'Europe quand elle se rend en Belgique pour ses études.



« J'avais avancé dans les rues. Comme ils marchaient vite, ces gens-là. Et moi qui étais si habituée à plonger mes pieds dans le sable chaud et réconfortant. Ici tout le monde marchait trop vite. J'avançais aussi nonchalamment qu'un fauve rassasié en promenade dans la brousse. J'étais bousculée, parfois projetée de tous les côtés. Je m'étais arrêtée à plusieurs reprises pour chercher à me faufiler entre ces personnes qui couraient presque dans tous les sens.

[…] Un monde comme poursuivi par quelque monstre. »



C'est un livre fondateur car Ken Bugul fut une des premières femmes africaines à écrire une autobiographie, un livre dans lequel elle parle sans tabous des sujets qui faisaient scandale à l'époque, la sexualité, la prostitution, son expérience de la drogue, ainsi que de l'impact dévastateur du colonialisme et des attitudes africaines et européennes dans la période post-coloniale.



Mais, au-delà de son analyse critique de la société, ce qui domine ce récit de vie d'une intensité rare et le désir immense de communiquer de Ken Bugul, c'est la blessure d'enfance de l'abandon, pansée progressivement par cette écriture-thérapie, l' absence du père trop âgé pour jouer son rôle de père et surtout l'abandon de la mère partie de la maison.



« Il ne faut jamais laisser l'enfant seul sous le baobab. La mère ne devait jamais partir. Pourquoi était-elle partie ? »
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La folie et la mort

4e roman et révélation d'une stylistique polyphonique au service d'une impitoyable charge politique.



Publié en 2000, le quatrième roman de Ken Bugul rompait avec le cycle des trois précédents, à très forte dominante autobiographique, pour affronter, dans toute sa cruauté, la réalité sociale et politique d'une certaine Afrique post-coloniale.



Ayant puissamment digéré la forme multiple et le recours à des champs stylistiques extrêmement variés, à l'instar des grands aînés Sonny Labou Tansi ou Ahmadou Kourouma, Ken Bugul peut ainsi nous proposer un récit à trois voix (un narrateur et deux narratrices), naviguant entre le réalisme micro-social (dont on la sait capable depuis ses débuts avec "Le baobab fou"), l'insertion de passages oniriques (où les contes traditionnels astucieusement remaniés prennent une présence et une actualité bien au-delà de leur rôle habituel de parabole), le détournement de discours officiels puisés auprès de divers despotes africains, et enfin la source intacte et caustique d'introspection et de réflexivité apportée par ses personnages principaux, lorsqu'ils se plongent dans les méandres de leurs pensées et de leurs émotions.



Au pays du Timonier, où règnent la corruption, la fausse modernité et l'impasse économique qui écrase et déracine les pauvres, pays désormais rythmé par les discours omniprésents à la radio (qui en devient presque un personnage à part entière), une jeune fille, Mom Dioum, revient au village, désespérée, voulant "renaître" après un terrible échec et une non moins terrible révélation, à la ville où le succès de ses études l'avait conduite. Las, ne parvenant pas davantage à se refondre dans la tradition qu'à digérer l'atroce modernité, elle disparaît, et sa meilleure amie, Fatou Ngouye, et son cousin Yoro devront à leur tour affronter la ville, à sa recherche.



Sous la formidable couche d'écriture aux voix si poignantes, avec leur rage et leur humour, il s'agit d'un récit de désespoir face à une impasse gigantesque, où les personnages, tout au long de leur tragique et brève destinée, devront peu à peu accepter le choix, le seul choix qui se présente au fond à eux : celui entre la folie et la mort, que la psychose corrompue mise en oeuvre par les cliques au service du Timonier ne fait que confondre de plus en plus.



Sous sa grande dureté, un livre d'une brillante légèreté.



"Tout d'un coup la foule se tut.

Fatou Ngouye n'avait pas bougé et pourtant elle brûlait comme de la paille.

Pas un son n'était sorti de sa bouche.

Rien.

Son corps était devenu comme une statue.

Pour certains qui commençaient à avoir peur, cela rappela les Écritures Saintes, quand la femme de Loth, à qui celui-ci avait demandé de marcher droit devant elle, désobéit et se retourna quand Dieu consum

a Sodome et Gomorrhe.

Le corps de Fatou Ngouye ressemblait à une statue au milieu de ce marché.

Personne n'osa s'approcher de cette statue au ventre dilaté, si dilaté qu'on avait l'impression que quelque chose de terrible allait en sortir.

Il n'y avait plus de traits sur son visage.

C'était une statue sans visage.

Fatou Ngouye finit ainsi sa vie à la grande ville.

Elle qui était venue chercher Mom Dioum dans cette ville, elle faisait désormais partie de cette ville, pour toujours.

Fixée dans la ville."



"Au village tout le monde rêvait d'autre chose.

Et tous voulaient aller à la ville pour faire fortune rapidement.

La débrouillardise était la clé de la réussite, de la survie, sans scrupules, sans morale.

S'en sortir.

S'enrichir.

À tout prix.

Pour des millions de personnes de ces pays maudits du Continent.

Pour ceux qui avaient été un peu à l'école, c'était un atout de plus.

Et puis la ville, c'ét

ait la porte pour le grand exil, là-bas au loin.

L'Italie, les États-Unis ou à défaut la France qui n'était plus la destination de prédilection.

La Thaïlande, le Japon, Singapour, Hong Kong devenaient de plus en plus les pays convoités.

Surtout par ces temps du décret.

La circulation qui devenait de plus en plus dense souhaita la bienvenue à Fatou Ngouye et à Yoro le cousin de Mom Dioum à la ville.

Ils étaient émerveillés.

Par la circulation.

Par les odeurs.

Par le bruit.

Des voitures partout, des cris partout, du bruit partout, des odeurs partout, des tas d'immondices partout, des carcasses de toutes sortes partout.

Des carcasses de véhicules, de motos, de moutons, de chats, ils étaient émerveillés.

Ça pétaradait de partout.

Les gens criaient fort.

Les haut-parleurs déversaient des musiques de toutes sortes à qui mieux mieux.

Sans retenue.

Tout était permis donc à la ville."

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Le Baobab fou

Une jeune boursière africaine jette l’ancre en Belgique. C’est dans les années 60, une période charnière où des marginaux, hippies et beatniks, rêvent de réinventer l’Occident. S’enclenche alors une chute libre, une véritable descente en enfer de notre narratrice, dépassée par le choc culturel et le bouillonnement d’un monde qui se récrée.



Dédoublement de la personnalité



Le nom qu’elle porte, Ken Bugul, « personne n’en veut » en wolof, incarne parfaitement son enfance traumatisante. Très tôt, sa mère la quitte pour une destination inconnue. Même si la narratrice la retrouve une année après, ce départ inopiné laisse en elle un inextinguible sentiment de solitude qui ne favorise guère une quelconque complicité avec les siens. Rejetée, elle se rabat corps et âme sur l’école française coloniale tout en rêvant de devenir une occidentale à un peu à l’image de son frère intellectuel qui vit à Dakar. Dès lors son âme se dédouble, une partie occupée par la petite fille solitaire, l’autre par celle qui entend grâce à l’alchimie de l’école des Blancs se muer en femme occidentale, civilisée.



Ken la solitaire



C’est un personnage triplement solitaire. Le départ de la mère à bas âge lui a tout simplement ravi son enfance et imprimé dans son for intérieur une solitude incurable. Elle continuera d’en porter les traces même à l’âge adulte. Le ressentiment contre celle qui l’a mise au monde est si grand qu’elle la considère déjà comme morte. Ensuite, la mort du père est un second couteau insinué dans sa chair. Le plus dur est que ce moment tragique la trouve loin du pays, en Occident. Certes, ses rapports avec le père sont ambigus, troubles. « Je le regardais, l’aimais, et souhaitais ardemment le connaître plus. Je le voulais père ; je le voulais mon père, mais c’était plutôt l’aïeul. Je ne partageais avec lui que poésie et rêve. J’aurais voulu que d’autres sentiments nous ébranlent… » Effondrée, elle a l’impression d’avoir perdu ses deux parents quoique sa mère vive encore. Sans doute c’est la voix du sang qui parle puisque notre héroïne s’est toujours sentie exclue de sa famille. Il semble qu’elle ignore jusqu’à leur nom propre, se contentant de les nommer, le père, la mère, le frère, la sœur. La neutralité de l’article défini prouvant à plus d’un titre cette distanciation familiale. Troisièmement, c’est le mal du pays qui la submerge, l’attriste, la pousse à tout bout de champ à faire des comparaisons sur les détails de la vie en Europe avec la naïve simplicité de sa vie villageoise. Elle se sent terriblement solitaire dans ce monde qui la dépayse, l’ignore à tel point qu’elle se décide de rentrer au bercail, frustrée en plus de ne pas avoir retrouvé ses racines identitaires « gauloises » (Vos ancêtres les Gaulois, lui apprenait-on à l’école).



Ken l’occidentale



Mise sur une voie de garage, elle pense, dès sa tendre enfance, trouver son salut dans la femme occidentale qu’elle se projette de devenir. L’école française est un exutoire, un tremplin. Boursière, elle débarque en Belgique dans le grand but de se frotter avec le monde de ses délires et de ses rêves de réincarnation, de transmutation identitaire. Par malheur, elle arrive dans un monde qui doute et ne pense qu’à se réinventer sous la houlette d’une jeune génération insatisfaite. Happée par ce courant, elle tombe facilement dans l’insouciance à la mode, la drogue, la prostitution, fréquente des lieux mal famés, s’essaie à l’homosexualité. C’est en effet le mode de vie des jeunes Blancs avec lesquels elle fraie au détriment de ses compatriotes. Comme on dit dis-moi qui tu fréquentes, je te dirai qui tu es. Malheureusement, elle se rend rapidement compte qu’on ne l’accepte que par le simple fait qu’elle est différente, et avoir une amie africaine dans un monde qui veut se déculpabiliser de son passé colonial, s’ouvrir à d’autres horizons, est un sceau d’originalité suscitant l’admiration. Cette reconnaissance, cette identité nouvelle pour laquelle elle se bat depuis des années ne lui est point accordée. Son chaos intérieur s’exacerbe et précipite sa chute libre. Ken justifie sa perte de repères, son aliénation par son enfance non vécue conjuguée au complexe de l’ancien colonisé.



Une quête inassouvie d’une identité



Ce roman de formation est aussi un roman psychologique. La narratrice entraine doucement le lecteur dans la profondeur de son monde intérieur, aidée par une écriture sans prétention qui alterne sobriété et poésie, profondeur et méditation, abysses et crête. Toute sa vie est la quête perpétuelle d’un soi éparpillé, sans essence. Elle ressemble à une apatride qui parcourt le monde à la recherche d’une identité qu’elle n’a jamais possédée. Qu’elle ne possédera jamais. Même quand elle rentre à la fin du livre au pays, elle se rend compte que « le rétablissement était devenu impossible ». Elle a manqué en effet son rendez-vous avec le baobab de son village natal, qui en est devenu fou et en est mort. Ce rendez-vous manqué est sans doute aussi celui de l’Afrique avec ses racines, son histoire, son identité profonde bafouée par les civilisations qui l’ont occupée et aliénée ? En conflit avec sa propre âme, l’Afrique a voulu se réconcilier avec l’avenir, à l’aube des indépendances, en oubliant malheureusement ses racines sous les décombres de l’histoire.



Roman ou autobiographie



Bien que la catégorisation du livre dans le domaine du roman rejette systématiquement son caractère autobiographique, le lecteur se pose des questions touchant la même identité portée par l’auteur, la narratrice et le personnage principal. Selon Philippe Lejeune le récit autobiographique est principalement fondé sur la fusion de ces trois « je », constituant une seule et même personne. Et c’est exactement le cas dans cette œuvre quoique l’auteur l’ait intitulée roman. Sans doute une recette de Ken Bugul pour ne pas assumer le chaos d’une vie dissipée, déréglée, éparpillée. Tout compte fait l’histoire démarre lentement et ne prend véritablement de la consistance et de la vitesse que vers le quart du livre. Le lecteur est alors plongé dans le vif des événements et n’a pas un autre choix que celui de suivre Ken Bugul sur le chemin cahoteux de son aventure européenne. Un électrochoc subi par la plupart des primo-arrivants.
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Riwan, ou, Le chemin de sable

Troisième roman de la trilogie autobiographique de Ken Bugul, après « Le Baobab fou » et « Cendres et braises », Riwan est le roman du retour au Sénégal et de l’apaisement.



Après avoir vécu en France pendant plusieurs années, Ken Bugul est revenue dans son village. Sans mari et sans enfants, elle n’y a pas sa place. Sa rencontre et son union avec le Serigne, haut responsable du mouvement religieux mouride et homme d’une grande spiritualité, dont elle devient la vingt-huitième épouse, lui font trouver cette place et arriver au bout du chemin chaotique de sa quête identitaire de jeunesse. Auprès de cet homme sage et d’une grande tendresse, Ken Bugul apporte un regard inattendu sur la polygamie.



Riwan est un témoignage précieux sur les femmes, un roman qui séduit par l’humanité du Serigne et de ceux qui le côtoient, avec des portraits de femmes d’une grande sensualité, un livre dans lequel les vagues de l’indignation (d’abord au sujet du sort fait aux femmes, le mariage imposé, qui les empêche de vivre libres, mais aussi contre la corruption et le gâchis des ressources à grande échelle) et de la sérénité progressent dans un même mouvement.

Néanmoins l’absence du travail d’un éditeur se fait sentir dans ce récit inégal qui aurait pu briller d’un éclat beaucoup plus important.



« Qui ne se souvenait pas de Djagua Sylla ?

La sublime femme que Mademba Seck avait épousée, alors qu’elle venait de perdre son mari un an avant.

Djagua Sylla !

Le teint si lumineux qu’il donnait envie de la toucher. Géante, potelée comme une bonne mangue de Banfora, le sourire et le rire faciles, les gencives bleu indigo, couleur obtenue par un tatouage régulier avec de la coque d’arachide grillée. Ce tatouage consolidait les gencives et donnait des dents éclatantes. Quand par mégarde ou exprès, son mouchoir de tête glissait de sa tête, on découvrait au milieu de ses tresses, des rangées d’amulettes dont certaines étaient en bronze, d’autres cousues dans du simili cuir de toutes les couleurs où un rouge vif rehaussait l’éclat du blanc et du noir. Ces amulettes étaient si bien agencées qu’on se demandait si elles étaient des amulettes normales ou des suggestions ensorcelantes. Cela devait être les deux à la fois. Assise, elle allongeait ses grandes jambes devant elle, les croisant et décroisant par moments pour laisser voir une peau encore plus lumineuse et encore plus lisse que recouvrait à peine un petit pagne fatal dont les deux pans ne pouvaient se toucher. Ainsi, quand vint pour Djagua Sylla l’heure de rejoindre le domicile conjugal, malgré ses quarante ans, ses co-épouses furent dans tous leurs états. »
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Cendres et braises

Tragique histoire de soumission par amour dans ce 2ème volet de la trilogie autobiographique.



Deuxième roman de Ken Bugul, paru en 1994, "Cendres et braises" est à la fois la suite "logique" du "Baobab fou" et la clé de voûte de ce qui deviendra, avec "Riwan ou le chemin de sable", en 1999, la "trilogie autobiographique".



Revenue "en catastrophe" au Sénégal, où la réinsertion sociale est particulièrement délicate pour la narratrice rebelle aux catégories établies, après de longues années vécues en Europe, celle-ci nous raconte, dans plusieurs longs flashbacks, sa terrible histoire d'amour avec un cadre supérieur français, terriblement bourgeois, pour lequel elle a quitté son pays pour venir vivre à Paris et y découvrir avec une certaine horreur qu'il ne s'agissait pas de la belle histoire espérée et voulue, mais de devenir la maîtresse permanente et entretenue d'un homme infiniment moins stable et plus violent qu'il ne le laissait supposer.



Si la dégradation progressive de la situation, et sa bascule dans des accès de plus en plus fréquents de rage et de haine de la part de l'homme, divorcé à ses torts au bout d'un moment, est aggravée par les barrières raciale et culturelle, il s'agit pourtant avant tout d'une histoire "classique", tragique et contée "tout près du terrain", de transformation en "femme-bibelot" d'une part, de soumission par amour à la violence masculine d'autre part.



Le grand talent de l'écrivain reste de nous faire partager "de l'intérieur", incrédules et souffrant avec elle, cette mystérieuse alchimie qui la conduit à rester, alors que les conditions en deviennent de plus en plus abominables, aux côtés de cet homme manifestement déséquilibré (ou pire), parce qu'elle l'aime. Jusqu'à ce qu'une tentative d'internement forcé, grosse goutte d'eau, ne fasse presque déborder le vase, et la conduise enfin à fuir, et à rentrer au Sénégal où, totalement désagrégée intérieurement, tout un travail de reconstruction et de réancrage (ici seulement esquissé, et qui sera l'objet romancé de "Riwan") reste à faire...



Histoire indiscutablement poignante, d'autant plus que l'on a en tête la fière et indomptable héroïne du "Baobab fou", et que la narration est renforcée par la "distance ex post" qui est venue peu à peu solidifier et mettre en perspective les faits les plus terribles parmi ceux qui sont racontés...



"Je sentais un bonheur secret, indicible, à me retrouver dans ce décor.

"Tu sais, repris-je : je n'ai pas faim ; j'ai mangé beaucoup de choses dans le train. J'ai voyagé avec des personnes généreuses et j'ai partagé avec elles tout ce qu'elles mangeaient."

Le mot de l'espoir : générosité.

"Mais si tu tiens à ce que je prenne quelque chose, je vais boire du lait caillé frais, du vrai."

Le plaisir et la nostalgie.

Comme la Mère se donnait.

Elle était comme rétablie dans l'instinct.

Elle frémissait :

"Ah ! oui, viens voir."

Elle m'avait entraînée dans la petite pièce servant à ranger son monde d'ustensiles, d'objets, de feuilles séchées, de mil, d'arachide, de graisses de mouton et de toutes sortes de pots. Des cafetières anciennes aux couleurs fidèles, même si par endroits, un choc avait fait sauter l'émail ; des pots de confiseries, tous ces articles que la grand-mère trouvait dans les magasins coloniaux, tous ces établissements qui s'étaient installés loin, à l'intérieur du pays.

Cette époque avait laissé partout une architecture, un objet ou un sang."

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Le Baobab fou

La formidable quête personnelle d'une jeune Sénégalaise écartelée entre Europe et Afrique.



Publié en 1984, le premier roman de la Sénégalaise Ken Bugul causa un certain scandale, car cette subtile trame d'inspiration autobiographique ne faisait pas dans la dentelle. Mêlant étroitement l'attachement à la fois indispensable et aliénant au "village" et à la tradition en Afrique, et le désir puissant de découverte et d'insertion dans l'Europe (à travers l'arrivée à Bruxelles de la jeune boursière protagoniste du récit), terre de toutes les ambitions, de tous les désespoirs et de tous les constats d'étrangeté, plus ou moins radicale.



La fine mais parfois brutale description de ce choc culturel, servie par une écriture précise, poétique en permanence et crue lorsque nécessaire, annonce aussi les deux romans à contenu autobiographique qui suivront, avant que Ken Bugul, débarrassée de son fardeau personnel ainsi brillamment digéré et sublimé, ne devienne une voix totalement unique, capable de tracer une route étonamment puissante et surprenante (comme par exemple dans son magnifique "Rue Félix-Faure" de 2005).



Le coup d'éclat initial d'une auteur majeure, et pas uniquement au sein de la "francophonie".



"Les cases étaient jaunes, les hautes herbes jaunes, le sable jaune, les animaux jaunes, les êtres humains jaunes. Il faisait très sec et le soleil craquait sourdement tant il faisait chaud. Le village continuait sa vie. Les habitants la leur.



Une fois, la mère était allée chercher de l'eau au puits, en fin d'après-midi. Sur le petit chemin tracé par les pas depuis des années, elle marchait perdue en elle-même, elle ne sentait rien. C'était chaque fois ainsi ; son regard était posé devant elle, mais elle ne regardait rien, elle ne voyait rien. Ce calme, cette sérénité règne dans tous les villages, sur tous les visages. Était-ce résignation ou paix ?"



"J'avais pris l'avion, folle de rage et de désespoir. Le non-retour des choses avait amputé la conscience. Le rétablissement était devenu impossible. Rétablissement de l'enfance perdue, envolée un après-midi, la première fois que j'avais vu un Blanc.

Le sublime se superpose à l'irréel et j'étais incapable de rêver. Le rêve m'était interdit comme par la suite tout ce qui consistait en la survie de

l'irréel, cette illusion qui donnait envie de poursuivre. j'étais arrivée comme le diable engageant le combat avec l'adversaire.

J'avais essayé de me défier, ce fut presque la victoire, mais le jeu valait-il la peine ? J'avais repris conscience à temps.

Les retrouvailles furent applaudies par le baobab mort depuis longtemps. "Ce baobab que tu vois là, il est mort depuis longtemps." "Mais comment est-ce possible ? Il est là, debout, il a toutes ses branches."

"Oui, mais il est mort." "

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Le Baobab fou

Je m'attendais à un livre dans le genre conte africain et euh pas du tout. Récit qui raconte et rend compte du désarroi apocalyptique d'une jeune africaine élevée dans la pure tradition d'un village africain, qui sous la propagande colonialisme, grandira dans l'utopie de la culture occidentale. Elle obtiendra le graal de venir en Occident pour poursuivre ses études. Récit sans tabou et bouleversant.
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Rue Félix-Faure

Une rue hors du commun : vivante, cosmopolite, misérable, joyeuse, débonnaire. Ses habitants se méfient surtout des faux-religieux, faux-moqadems imbus de leurs pouvoirs.

Ce matin-là, on y découvre un cadavre de lépreux découpé en morceaux ( et pire encore !) Il va dévoiler son histoire et celle de toutes ces femmes qu'il a, au nom de son Dieu, séduites, exploitées, détruites.

L'écriture est étonnante avec des phrases lyriques qui se répètent, se font écho. Elles font penser aux traditions orales africaines, aux litanies religieuses, aux épithètes homériques. En mêlant réalisme et merveilleux l'auteur dresse de beaux portraits de femmes et défend une certaine idée de l'humanité.

A découvrir...
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Riwan, ou, Le chemin de sable

La narratrice est une jeune femme africaine qui a reçu une éducation européenne, qui a vécu un peu partout dans le monde, mais qui n’a trouvé de bonheur nulle part et qui revient dans son village africain, où elle n’a plus non plus sa place. Elle se rend tous les jours dans la demeure du Grand Serigne, une sorte de marabout très renommé et respecté. Elle assiste à la façon dont il guérit un homme fou chargé de chaîne, Riwan, qui va devenir son serviteur, le seul autorisé à aller dans la partie de la maison réservée aux femmes. Car le Serigne en a plus de vingt, et tous les deux ans il en épouse une nouvelle. Nous suivons le destin d’une d’entre elles, Rama. Et puis un jour le Sergne décide aussi d’épouser la Narratrice, qui sera sa 28eme épouse.



J’ai bien aimé au début le style de l’auteur, l’alternance entre des paragraphes très écrits, et des phrases très courtes, très haché qui reproduisent le langage parlé. Et les dons de conteuse de Ken Bugul sont évidents. Mais j’avoue que j’ai complètement décroché au moment où elle s’est mise à faire l’apologie de la polygamie au nom des traditions et des racines. Moi qui trouvait l’existence de ces femmes cloîtrées, remplacées systématiquement au bout de deux ans terrible, insupportable, je ne suis pas arrivée à croire que vivre comme cela était la seule manière de trouver le bonheur, dans l’acceptation, la soumission, l’attente. Et la fin de Rama est atroce. Cela ne me donne pas vraiment envie de continuer avec cet auteur.

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Le Baobab fou

Un classique dans la littérature sénégalaise. Un roman scandaleux pour son époque, et qui je pense le serait encore aujourd’hui. Le parcours de Codou, à quelques différences près, est semblable à celui de bien de jeunes filles sénégalaises qui ont quitté leur terre natale, l’esprit empli de rêves de réussite, et de bonheur… Mais le bonheur rime-t-il forcément avec la dissolution de ses valeurs, dans un monde occidental animé par la quête perpétuelle de la liberté ?

Ces mêmes valeurs ne constituaient-elles pas un carcan dans lequel l’étranger se trouvait prisonnier sur sa terre natale ?

Peu d’immigrés sont préparés au choc ressenti lors de leur arrivée en Europe. Le parcours de Codou, bien qu’un tantinet sulfureux, reflète bien l’introspection qui s’opère en chacun de nous, étrangers... Une quête de soi, pour savoir comment marier avec succès sa propre culture à celle de l’Occident…

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Riwan, ou, Le chemin de sable

Une excellente réflexion féminine sur une certaine société africaine, la polygamie, la nature de l’être humain, les progrès qui restent à faire sur ce continent. Un style déconcertant parfois, mais qui reflète parfaitement un ailleurs et des modes de pensée qui nous sont inconnus.

Une agréable lecture, marquée par les pensées d’une Africaine ayant découvert le monde face à la société traditionaliste.

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Le trio bleu

Cocktail rare de rage et d’apaisement, de pamphlet et de poésie, un surprenant roman systémique, alerte et irrévérencieux, de la relation mortifère contemporaine entre Afrique et Europe.



Sur le blog Charybde 27 : https://charybde2.wordpress.com/2022/07/07/note-de-lecture-le-trio-bleu-ken-bugul/



Immigré clandestin ouest-africain à Paris, orphelin de père et de mère, Góora a été régularisé assez rapidement, notamment parce qu’il disposait d’un vrai métier (plombier) ayant su convaincre ses employeurs de sa valeur. Devenu au hasard des logements membre solide d’un trio d’amis hautement improbable et superbement poétique, avec François, ex-taulard victime d’une erreur judiciaire, et Suleiman, gravement traumatisé par la guerre au Moyen-Orient, il prépare désormais un séjour tout ce qu’il y a de plus légal au pays, où il se voit revenir à la fois humble et triomphant, mais en tout cas en ayant de quoi satisfaire les omniprésentes langues déliées de la pression sociale, pour se marier avec sa fiancée d’adolescence et pour superviser l’achèvement de la maison qu’il a fait construire par son oncle, grassement rémunéré en conséquence au fil de ces sept années d’absence. Tout en préparant ce voyage décisif de retour provisoire, il se remémore dans la douleur et l’exaltation le parcours cruel, à travers désert et mer, à travers vols et exactions, qui lui avait alors permis de rejoindre la France.



Huit ans après les deux faces presque symétriques de « Aller et retour » et de « Cacophonie », voici donc le onzième roman de la grande Ken Bugul, que – subodore-t-on – bien des nouvelles lectrices et lecteurs auront découvert à l’automne 2021 sous les traits subtilement romancés de Marème Siga D., dans « La plus secrète mémoire des hommes » – couronné du prix Goncourt – de Mohamed Mbougar Sarr. Publié chez Présence Africaine en janvier 2022, ce texte alerte et virevoltant délaisse les formidables abîmes intimes et néanmoins puissamment politiques du « Baobab fou », de « Cendres et braises » et de « Riwan ou le chemin de sable », mais aussi les rusées fantasmagories farceuses et cruelles de « La folie et la mort », de « Rue Félix-Faure » et de « La pièce d’or », pour nous offrir une redoutable synthèse provisoire, épurée et pamphlétaire, du regard de l’autrice sur le rapport entre l’Afrique (de l’Ouest) et l’Europe (plus particulièrement la France). Si le ton du récit peut aisément naviguer au fil de ses 250 pages entre celui de la fable désormais presque immémoriale de l’immigration clandestine contemporaine (et des embûches mortelles qui la jalonnent) et celui d’une prose plus nettement théâtrale (on songera ainsi à des excursions du côté du Koffi Kwahulé de « Monsieur Ki » ou du Kossi Efoui de « Solo d’un revenant »), « Le trio bleu » s’impose vite par son mélange unique et rare de poésie intime et de vision politique pleinement systémique : peu de composantes de la déréliction globale échappent en effet ici à l’œil et à la verve de Ken Bugul. Si le poids de l’Histoire (et particulièrement des facettes les moins avouables, à la décolonisation, de celle-ci, telles qu’on les trouve par exemple chez Yambo Ouologuem, Ahmadou Kourouma ou plus récemment Gauz) prélève sa dîme indispensable, la corruption actuelle de trop d’élites africaines, l’emprise des religions et la mutation à rebours vers une société de consommation effrénée et de paraître superlatif reçoivent leur juste part des causes du marasme, se répondant les unes aux autres. Sans afro-pessimisme mortifère et sans afro-optimisme superficiel, « Le trio bleu » engendre sa propre poésie surprenante, associant contre toutes attentes raisonnables un degré élevé de rage et une conscience forte d’un apaisement possible, si l’on veut bien, ensemble, mépriser suffisamment les langues déliées qui dictent le malheur.
Lien : https://charybde2.wordpress...
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La Pièce d'or

Ken bugul(pseudonyme de Marietou Mbaye) livre içi un roman fort et traçant, un cri de désespoir mais aussi de rage contre les dérives de l'Afrique.

La pièce d'or est un pièce mythique qui apporte richesse bonheur et peut-être même immortalité à celui qui la possède. Autant dire qu'elle un objet de convoitise sans fin. Un objet qui incarne, sous la plume de Ken bugul, un carotte que l'on brandit au bout du bâton, ces faux espoirs qui font avancer l'Afrique droit dans le mur, avec ou sans son consentement.



Le récit se déroule à Yaakar, à une époque troublée oú les habitants désertent la campagne pour les villes et puis les villes pour la capital.Une ville qui attire le monde et contribue à la désertion des villages. Même Moïse , pour sauver sa famille et sa peau,consent à ce long voyage, à cette immigration qui lui fait quitter sa terre dans l'espoir de trouver une vie meilleure à Yaakar. Avec en tête,le rêve d'une pièce magique.............





Ce récit de transhumance est l'occasion pour Ken bugul de dénoncer avec violence l'urbanisme anarchique de l'Afrique, la perte des repères et des valeurs sociales , l'effondrement des valeurs traditionnelles et le malheur dans lequel s'engouffre l'Afrique en courant.Pour fuir la misère de la campagne , les gens se réfugient en ville où ils côtoient la violence ,la prostitution ,la misère sociale et économique , la solitude et l'inhumanité.

La ville,c'est le symbole de l'espoir trahi. Trahi par l'occident qui a puisé les richesses de l'Afrique et la regarde aujourd'hui d'un oeil méfiant.Trahi par les nouveaux systèmes économiques qui prennent place en Afrique dont le libéralisme laisse de nombreux personnes sur le côté.Trahi par une certaine culture africaine qui rime avec fatalisme ou insouciance.

Ken bugul se révolte et le fait savoir. Ce n'est pas un cri d'alarme qu'elle lance, c'est un appel au sursaut. Il est temps de réagir avant que l'Afrique ne sombre plus encore.Son écriture riche, large, assez chargée, apporte au récit une touche d'expression supplémentaire qui rend la situation plus dramatique encore. J'ai apprécié la manière avec laquelle Ken bugul parle de cette situation, sans compromission , avec franchise et brutalité. Comme elle éprouvait le besoin d'en finir avec les contes africains qui font rêver les voyageurs et voulait qu'on ouvre les yeux pour de bon sur le drame qui se joue.
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Riwan, ou, Le chemin de sable

C'est éducatif
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Le Baobab fou

Un récit autobiographique très beau, très fort... Sexe, drogue, homosexualité, désillusion par rapport à l'image de l'Europe, mais aussi amitiés, fêtes, vie dans le milieu artistique de la fin des années 1970, ce livre ne laisse pas le lecteur indifférent. Le retour sur l'enfance, en fin de récit, éclaire beaucoup le début... Au passage, dans le contexte actuel belge, elle signale le sort d'un des ses amis africains. Repéré un jour par un religieux qui lui propose de lui payer ses études s'il vient dans son couvent, ce dernier vient dès le lendemain dans sa chambre lui demander un "paiement en nature"... Le jeune homme réussi à s'enfuir, renonce aux études, mais n'en sort pas indemne.
Lien : http://vdujardin.over-blog.c..
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Riwan, ou, Le chemin de sable

L’écriture de Ken Bugul est fluide, poétique et vive.

Le tableau brossé sur les vies polygames, le fonctionnement de certaines sociétés sénégalaises est magnifique et super instructif. Au travers des portraits de ces femmes on "voit" la vie, la société telle qu’elle se présente pour elles.

Et ce livre est particulier.

J’ai adoré le lire, tout en détestant certains messages sous-jacents.



La femme décrite est manifestement une blessée, aigrie, qui a subit surement - on le lit entre les lignes - une vie amoureuse chaotique lors de sa vie en Europe, et elle retrouve un second souffle en se réfugiant dans sa culture. De fait, on a l’impression qu’elle en sublime même les aspects les plus rétrograde !

Tout devient "superbe culture africaine" par ses mots.

Toutes les 28 femmes semblent "parfaitement heureuses de leur sort". A peine nous laisse-t-elle deviner que Sokhna Rama n’est pas si bien que ça, vu sa fin tragique, mais là encore, c’est presque par amour !

Très peu de mots sur le fait que ces femmes n’ont absolument pas eu le choix qu’elle a eu.

La narratrice a fait le choix de revenir dans cette société polygame (être la 28e femme par choix) où la place de la femme est toute tracée dans l’arrière-court à attendre son tour de nuit d’amour. Les autres n’ont eu aucun choix. Elles ont été "offertes" parfois à douze ans au "Sérigne" en signe d’allégeance spirituelle.

De plus, elle a la place, enviable, d’épouse "intellectuelle", donc particulière et qui joui des libertés que n’ont pas les autres femmes.



J’ai trouvé que ce livre était une ode au mouridisme que le meilleur agent de communication aurait pu faire.

Le fonctionnement de ce cloaque familiale fait penser à la pire des sectes Moon ou Raelien en tête, mais dans les pages de ce livre ça devient "valeur des cultures africaines"...

Et, connaissant les réalités de ce Sénégal traditionnel, Quid de l’excision ? Aucun mot. Pas une ligne sur cette pratique. Venant d’un livre qui parle de femmes, qui dresse leurs portraits dans un contexte culturel ouest-africain... je trouve ça limite. Très limite.



Et globalement mon sentiment de gêne vient de là. Très peu de critique, d’auto-critique des aspects négatifs de ces sociétés. Le diable c’est l’occident et ses valeurs.

Sans cesse cette "comparaison" en formant d’attaque de l’occident (immigration, sans papier, discrimination) quand on préférerait que la narratrice restât sur ces portraits de femmes qui ne sauront sans doute jamais ce qu’est cette réalité. Mais l’on perçoit que cela vient des blessures de cette narratrice que la vie occidentale à trahie.



Au final, c’est un livre que je conseillerai à tous de lire car c’est une très belle lecture et une très belle plongée dans ce monde des mourides et dans la réalité des femmes de cette société. Avec toutes les réserves qu’il faut y mettre.
Lien : http://www.loumeto.com/spip...
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Le Baobab fou

Une belle écriture qui nous plonge dans l'intimité de la narratrice à la recherche d'elle-même. Elle est confrontée à une culture qu'elle maîtrise mal et qui ne la comprend pas ou du moins très maladroitement. Le choc des cultures, le racisme, la difficulté d'appréhender l'autre, les préjugés, c'est par exemple la maladresse de supposer que tous les Noirs qui vivent en Belgique sont originaires du Congo, de complimenter sans cesse l'héroïne sur la beauté de sa peau ; ce sont aussi tous les fantasmes qu'elle inspire aux hommes.

Un livre qui fait réfléchir sur soi aussi et sur son propre rapport aux autres.
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Aller et retour

Impressionnante synthèse poétique et politique, dans les rues de Dakar, pour ce neuvième Ken Bugul.



Errer dans les rues de Dakar pour "retrouver sa tête", et rêver à une indépendance africaine qui aurait fait de même. Désormais sur mon blog : http://charybde2.wordpress.com/2014/02/08/note-de-lecture-aller-et-retour-ken-bugul/

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Mes Hommes a Moi

Retour à l'intime dans ce huitième roman : les hommes d'une vie, dans un décor inattendu.



Publié en 2008, le huitième et dernier en date des romans de Ken Bugul, après le feu d'artifice de "La pièce d'or" en 2006, marquait le retour, dans une volute dont l'auteur a le secret depuis sa "trilogie autobiographique" (1984-1999) et la volte audacieuse de "La folie et la mort" (2000), vers un horizon plus intime, où son humour caustique et ravageur peut se déployer pleinement.



Après s'être cherchée avec rage, et en partie trouvée dans "Riwan ou le chemin de sable", qui concluait la trilogie autobiographique, après avoir parlé à titre posthume avec sa mère absente (dans "De l'autre côté du regard" en 2003), c'est au tour des hommes de sa vie, formidable père de 85 ans à sa propre naissance et frère le plus proche, de 2 ans son aîné, de passer sur le grill de l'introspection subtile de Ken Bugul, qui a choisi pour cela le plus surprenant des terrains et des miroirs, à savoir un café traditionnel du 11ème arrondissement de Paris, dans lequel, au fil de ses séjours français, la narratrice déploie sa curiosité, son sens de l'observation mais aussi, assumées, ses possibles erreurs d'interprétation, pour imaginer les vies des habituées et habitués du lieu, dont l'un, promu un jour confesseur de fait, devient le témoin et le "sparring partner" d'une quête violente, certes, mais toujours désormais quelque peu amusée, de l'élucidation de la relation aux hommes.



Brio de la conteuse à son sommet et subjectivité totalement libérée dévident ainsi enquêtes et obsessions dans de magnifiques boucles quasiment musicales, incluant donc lancinantes répétitions thématiques comme fulgurantes percées nées d'une remarque d'apparence anodine, jusqu'au sourire légèrement désenchanté, mais parfaitement espiègle, des dernières pages.

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De l'autre côté du regard

De l’autre côté du regard de ken bugul, c’est un chef d’œuvre dans la littérature africaine dans la mesure où le narrateur montre son état d’âme. C’est un livre plein d’humanisme qui montre la condition humaine avec un style d’écriture particulière propre à ken bugul
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