Len Deighton

Nous allons montrer à nos américains qu’un Président avec une bombe atomique peut se faire réélire, même s’il a chez lui le Roi en exil.

Gardez vos apartés humoristiques pour Harry Woods, fit Huth. Les sergents, eux, sont obligés de rire des plaisanteries de leurs supérieurs.

L'armée, la famille, le collège; ces liens étroitement entrecroisés unissaient plus solidement les Anglais de la grande bourgeoisie que ne le font l'argent ou les affaires. Les totalitaires de droite et de gauche n'ont cessé de décrire la foi qu'ils ont en commun. Mais pour ces hommes-là, et pour des milliers comme eux, les moyens étaient la fin. Jouer dans l'équipe était plus important que le match, à condition de jouer avec des hommes comme eux.

Personne ne critique la police, tout comme aucun individu en son bon sens n'irait dire que le corps des sapeurs-pompiers est déloyal parce qu'il éteint les incendies sous le régime allemand.

- Enfin, bon sang, les Juifs américains doivent bien comprendre qu'il faut arrêter Hitler ? dit Garin.
- Il n'y a pas trop de Juifs au bureau du chef d'état major, répondit sèchement l'Américain.

- Kellerman dit que la Gestapo reçoit directement ses ordres de Berlin.
-Dites-moi, fit Huth en se penchant sur son bureau, de vous a moi, est-ce que vous croyez toujours au Père Noël?" Il joignit ses mains, les doigts entrecroisés et les tordit pour faire craquer les jointures. "Le général Kellerman a arrêté votre ami Harry Wood afin de faire un peu pression sur vous pour que vous me trahissiez. Plus tôt vous comprendrez cela, plus tôt nous pourrons coopérer pour vaincre ce vieux porc.

Un homme peut s'habituer à la fièvre jaune, songea Douglas, mais nombreux sont ceux qui meurent en essayant

- Oui,vous devez savoir ce que c'est, et moi aussi, fit-il. Nous faisons tous les deux le sale boulot. Il m'est arrivé e me rendre à l'Ouest, tout comme vous êtes venus ici. Mais qui a droit aux promotions et aux gros salaires ? Ces salauds du Parti, rivés à leurs bureau. Comme vous avez de la chance de ne pas avoir à vous battre en permanence contre un tel système !
- Nous aussi, nous avons notre Parti, dis-je. Il s'appelle Eton et Oxbridge.

Douglas avait du mal à le croire. Mais on vivait une époque de folie et il était déraisonnable d’éliminer même les idées les plus folles.

- La loi martiale, repondit Douglas. Les Allemands ont décrété la loi martiale sur tout le territoire de la Grande-Bretagne.

Et la conversation avait bifurqué vers des sujets plus légers, comme l'invasion de la Pologne par les troupes allemandes.

Le plus grand compliment que l'on puisse faire à un agent secret est de le prendre pour un peu"demeuré". Tout ce qui lui reste à faire est d'essayer de ne pas agir exactement comme tel. C'était, pour le moment, mon souci majeur.

Elle se surprit à se rappeler son séjour à l'université. Comme elle avait détesté cette époque ! Au point d'avoir totalement oublié les bons moments. Elle revoyait les hommes qu'elle avait connus, et les longues soirées passées en ville à voir quelques étudiants mâles à trop boire et se rendre ridicules, toujours soucieux, en même temps, de faire sentir aux étudiantes qu'elles n'étaient que des créatures inférieures. Des garçons aux préférences sexuelles incertaines, ne se trouvant vraiment heureux qu'en compagnie des mâles, se tenant par le bras, chantant très fort en chœur et s'éloignant en titubant pour aller pisser contre un mur.

Tout comme les gens coincés dans les ascenseurs, les mines effondrées ou les mariages mondains, ils échangeaient courtoisement des propos anodins.

Mayhew picorait son perdreau à la normande. Tirer des perdrix était une chose, les manger en était une autre. Quant à les accommoder suivant des recettes françaises, avec du calvados, voilà, décida Mayhew, qui était parfaitement dégoûtant.

- Est-elle exacte, Sir Robert, demanda Bernard, cette rumeur d'après laquelle Winston Churchill aurait été exécuté ?

Renn était un adepte convaincu de Marx et de ses théories. De son point de vue, Marx, prophète incomparable et source de toute véritable connaissance, était un grand sage allemand. Toutes les petites incohérences et les menues imperfections qu'on pouvait constater dans la pratique du socialisme - et Renn n'avait jamais dit en avoir relevé - étaient dues à des carences essentiellement russes de Lénine et de Staline.

Quand je rencontre une fille, la première chose que je lui demande, c'est si elle a une salle de bains avec de l'eau chaude. [...] Bien sûr, ajouta-t-il, comme on est en Angleterre, elle n'a généralement pas de salle de bains.

Douglas avait l'impression que le colonel Mayhew ne comprenait pas le danger qu'il courait. Peut-être Mayhew croyait-il à toute cette propagande à propos des camps de concentration qui disait qu'on n'y trouvait, après tout, que des lits durs, des douches froides et qu'on y faisait de la culture physique. Si c'était cela, une terrible surprise l'attendait.

Stok dit au chauffeur d'arrêter la radio et sortit de sa poche un flask qu'il me tendit.
- Buvez un coup, dit-il. Ca vous réchauffera.
Je bus une gorgée et me mis à tousser. Le liquide, épais et amer, était presque imbuvable.
- C'est du Riga Balsam, dit Stok. Ca va vous réchauffer.
- Comment est-ce qu'on s'en sert ? On y met le feu ?