Citations de Marie Desplechin (438)
Tu sais comment ils sont, dans les écoles, ils n'y connaissent rien aux enfants. Un enfant qui n'est pas protégé, ils te le démolissent.
C'est fou comme deux personnes qui se ressemblent peuvent être pareilles et différentes.
Je nageais dans la satisfaction bien particulière que seul connaît l'homme qui se gave de crêpes après une série d'émotions fortes.
- Elle est gentille, a dit ma mère en rangeant la boîte de gâteaux en haut de l'armoire. Elle est jolie.
- C'est tout ?
Ma mère a ri.
- Je pense que toi, tu en penses beaucoup de bien, voilà ce que je pense.
Et elle avait raison, bien sûr.
Elle pouvait me transformer en scarabée d'un simple mouvement de la main, et voilà qu'elle préférait m'expliquer le mystère de sa vie. Quelle fille fantastique. Traîtresse mais fantastique.
C'est pas la main qu'il avait de verte, c'était tout le bras.
Dans ce siècle matérialiste, les gens ne croient plus aux sorcières. Voilà pourquoi ils ne les brûlent plus. Parce qu'ils ne les voient plus. Quand ils ont envie de faire du mal à leurs voisins, ils préfèrent tomber à bras raccourcis sur les étrangers. Aujourd'hui, ils sont plus repérables que les sorcières.
J'avais atteint l'âge de savoir qu'on ne peut faire confiance à personne. On n'est jamais si bien trahi que par sa famille.
L'atelier. A moins de l'avoir vu de ses propres yeux, personne ne peut se représenter un endroit plus sordide. Cette dingue avait rassemblé dans un coin de sa cave tout un lot de déchets dont même les décharges ne voudraient pas.
[...]
On se serait cru à la foire, stand du train fantôme.
Il n'était pas question d'inviter des amis. D'une part, il y a fort à parier qu'ils ne lui auraient pas plu. D'autre part, je n'avais pas envie qu'ils la voient en train de bricoler dans sa cuisine, parlant toute seule à sa Cocotte-Minute, habillée comme l'as de pique, un fichu sur la tête, entourée de fioles inquiétantes et e cadavres d'insectes (dans le meilleur des cas).
Elle aurait pu faire l'effort de m'appeler Violette. Mais non, il a fallu qu'elle choisisse Verte. Quelquefois j'ai envie de l'attaquer en justice. Mais quelquefois je l'aime et j'ai envie de lui offrir des vacances de rêve à Honolulu.
La pauvre fille croyait sincèrement que sa mère était le modèle de toutes les sorcières du monde. J'adore Ursule, d'accord. Mais enfin, il faut avouer que pour une gamine de onze ans, elle faisait un modèle plutôt déprimant.
Encore aujourd'hui, je regrette que ma mère ne m'ait pas nommée Germaine ou Simone, plutôt que de m'affubler d'un prénom absurde. Anastabotte, je vous demande un peu ! Imaginez un jeune homme amoureux qui chante sous vos fenêtres une chanson composée en votre honneur. Avec quoi fait-il rimer Anastabotte ? Avec botte ? hotte ? chipote ?
Verte criait, je ricanais et les voisins du dessous ont tapé à toute force avec leur balai dans les tuyauteries. S'ils n'aimaient pas le bruit, ils n'avaient qu'à changer d'appartement, ces demeurés.
Elle estimait sûrement ressembler à une sorcière, mais croyez-moi elle ressemblait d'abord à une folle.
je l'écoutais d'une oreille en préparant un magnifique brouet brun destiné à empoisonner le chien de nos voisins, un animal de cauchemar qui ne cessait de pisser contre la porte de l'immeuble.
A choisir, je préférais savoir ma fille avec ma mère que de l'avoir dans les pattes.
Son père, un certain Gérard si j'ai bonne mémoire, avait décidé de l'appeler Rose. Rose... On fait difficilement plus tarte.
[...]
Peu importe ce qu'il a bredouillé à la mairie : du fond de mon lit, j'avais ensorcelé l'employé de l'état civil. Ma fille a donc été enregistrée sous le joli nom de Verte, autrement plus seyant pour une future sorcière que celui de Rose.
Je ne sais pas si c'est cette histoire de prénom qui a vexé le papa. Toujours est-il que, rapidement, nous ne l'avons plus revu. Bon, j'avoue que je ne lui ai pas facilité les choses. Verte avait juste quelques semaines quand j'ai déménagé sans lui laisser d'adresse.
Il m'est bien arrivé de rencontrer quelques vieux magiciens foireux, reconvertis dans la prestidigitation. Mais de véritable sorcier, non. Je ne crois pas que les hommes aient beaucoup à voir avec la sorcellerie.
Sur terre, tout le monde a le droit de se plaindre. Les hommes, les femmes, les jeunes, les vieux, les animaux eux-mêmes se plaignent. De l'excès d'amour, de l'absence d'amour, de la famille, de la solitude, du travail, de l'ennui, du temps qui passe, du temps qu'il fait... Le monde râle, c'est ainsi.