Cercle polar : Histoires de familles .
"La découronnée" de Claude Amoz (Rivages) "La fille de la peur" d'Alex Berg (Jacqueline Chambon) "Savana Padana" de Matteo Righetto (Le dernière goutte) Claude Amoz a le goût des archéologies familiales et des enfances meurtries. Sa nouvelle valse des fantômes, lente et entêtante, est une réussite. L'Allemande Alex Berg orchestre sur le même registre, mais avec un tempo beaucoup plus rapide, la course éperdue de familles brisées par la guerre et l'exil. Quant à l'Italien Matteo Righetto, ce sont les familles mafieuses qui l'inspirent et dont il joue savoureusement, façon Donald Westlake ou Dino Risi. La famille sur tous les tons au menu de ce Cercle polar.
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Notre existence changea, mais ce ne fut ni en mieux ni en moins bien. Elle changea, un point c’est tout. Comme le ciel dès l’aurore ni ou après le coucher du soleil, comme le cerisier après la floraison ou bin sous la neige.
Et depuis ce jour-là, notre conception et notre perception changèrent aussi. Doucement, sans pouvoir nous en rendre compte, le rythme de notre vie commença à s’accélérer.
Le temps, les choses de tous les jours… Le temps. Les choses.
Et nous avons commencé à nous dire, en plaisantant, que c’était bien que les mois passent sans que l’on s’en rende compte. C’était bien vrai, au fond, que la vie elle-même nous échappait, avec le risque d’affadir petit à petit l’intimité et la beauté de notre relation de couple.
Giulio grandissait, il faisait ses premiers pas, il disait ses premiers mots, et dès que c’était possible il respirait l’air des montagnes.
Il grandissait. Il découvrait en même temps que notre amour les premières émotions importantes de la vie.
Tu auras l'impression de reconnaitre la vieille odeur de cet appartement où tu as passé une partie de ta vie : l'odeur des murs, celle de la cuisine, celle du salon ; mélangées à son odeur à lui, parce qu'un homme laisse toujours sa marque là où il habite. Comme un animal.
- Ils ont dit qu’il allait faire beau.
- Qui craint les nuages ne part jamais.
Les années quatre-vingt nous promettaient un avenir sans surprise : aisance matérielle, vide facile.
De nombreux indices nous laissaient imaginer qu’un futur sans problème, riche de succès, nous attendait. Question de perceptions, de signes, d’illusions aussi évanescentes que des bulles de savon.
Il se penche enfin sur lui, et tout doucement lui dit:
- Tu es prêt Giulio? Un... Deux... Trois... Maintenant, ouvre les yeux.
Mais Giulio ne bouge pas.
Et Luigi pleure en silence, comme un père doit pleurer.
Vous vous sentirez plongés dans un dialogue, profond et intime, avec l'isolement total . Cela avait toujours été votre façon de vivre la montagne lorsque vous étiez un couple heureux : un lieu où grimper mais surtout pour descendre en soi-même pour mieux se connaître.
Au fond la vie est tellement bête…On essaie de chercher un sens à tout cela mais ensuite, tout ce qui nous semble fondamental, essentiel, vital, disparaît comme si de rien n’était. (Page 119)
"Tu penseras que tout a changé dans ta vie pendant ces longues années mais que cette montagne est restée la même. Parce que les montagnes ne changent pas. Les montagnes ne trahissent pas".
- Si dans une histoire, il y a un moment ou l’on tombe amoureux, il doit bien y en avoir un ou l’on cesse d’aimer, non ? (Page 117)
Tu rajouteras du bois, petit à petit, parce que le feu a besoin d’amour constant : sans heurts, sans accros, sans déséquilibres, sans excès et sans faiblesse, sinon il s’éteint. (…)
Et elle ajoutera
-Un feu c’est comme un enfant.