Citations de Melanie Raabe (83)
L'art de la guerre, c'est soumettre l'ennemi sans combat.
- Maman ?
Je lève la tête.
- Comment on sait qu'on a un bloc de glace à la place du coeur ?
Sa question me prend de court.
On le sait quand on ne ressent plus rien comme avant, me dis-je. Quand la joie n'entraîne plus de vertige mais juste un vague sourire. Quand la colère n'est plus brûlante, mais tiède. Quand les couleurs s'estompent de plus en plus, quand on ne sait plus ce que les gens veulent dire quand ils parlent de bonheur.
... j'aime les livres, j'ai besoin d'eux. J'adore voyager dans tous ces petits mondes indépendants, enserrés dans leur couverture cartonnée. Je m'y plonge chaque fois que j'ai l'impression de ne pas vivre dans le bon univers, ou quand le mien ne me suffit plus, qu'il m'échappe, ou qu'il m'inflige tracas et douleur.
Je me demande s'il en aurait été heureux ou déçu. Puis je me dis que ça n'a pas d'importance. Philipp n'est plus là. Philipp est parti. Philipp a disparu. Philipp est tombé du bord du monde.
Leo avait voulu savoir si son père était mort. Et d'ailleurs, c'était quoi, mourir ? Evidemment, je l'avais rassuré de mon mieux. Non, son père n'était pas mort. Un jour, il reviendrait. Quant à la mort, il n'avait pas à s'en inquiéter, il était encore bien trop jeune pour ça. Assise là au bord de son lit, je lui racontais la plus grande des légendes, l'histoire la plus mensongère de toutes, celle d'un monde sûr, bien ordonné, où le soleil se lève chaque matin et où le printemps succède immanquablement à l'hiver. Je mens à mon fils pour qu'il se sente en sécurité. Pourtant, tout peut arriver, n'importe quand, y compris les pires horreurs.
C'est facile de se faire aimer. Je suis assis, voûté. Ça me donne l'air plus petit, moins menaçant, et ça fait ressortir mon état d'abattement physique. Je me passe la main sur les yeux comme si j'avais du mal à les garder ouverts, cligne un peu des paupières, puis je relève la tête et souris courageusement.
Je bifurque dans la rue où habite les M&Ms, comme Leo surnomme Miriam et Martin.
C'était la plus chaude journée de l'année et Radiohead donnait un concert en plein air . […]
L'espace d'une étouffante soirée, la musique était notre religion. Quand le groupe monta sur scène, il fut accueilli par un cri qui semblait venir d'une seule gorge. […]
La musique si forte, les hauts- parleurs qui se gonflaient vers nous. Cette nuit-là, quinze morceaux furent joués, onze litres de larmes coulèrent, 851 personnes tombèrent amoureuses, tant d'énergie, la pelouse sous nos pieds ne repousserait jamais, des milliers de papillons de nuit s'enflammèrent dans la fournaise des projecteurs et moururent heureux.
Madame Theis a plus de quatre-vingts ans, elle est robuste, très franche et pour le moins excentrique. Elle n'aime pas les enfants (à part Leo) et soutient être bien plus heureuse depuis qu'elle est veuve. Rien à dire contre son mari, ça non, mais certaines personnes sont faites pour vivre seules, et elle est de celles-là.
« Je me demande s’il en aurait été heureux ou déçu.Puis je me dis que ça n’a pas d’importance.
Philipp n’est plus la. Philipp est parti. Philipp a disparu. Philipp est tombé du bord du monde.
En cet instant, les oiseaux se taisent . »
Rien de ce qui arrive n'est bon ni mauvais. Les événements n'ont aucune signification en eux-mêmes. Ils n'ont que celle que nous leur donnons.
MONSTERS
DON'T
SLEEP
UNDER
YOUR
BED
THEY
SLEEP
INSIDE
YOUR
HEAD
Quand on croit aimer quelqu'un… Est-ce qu'on aime vraiment cette personne ? Ou est-ce qu'on aime seulement le sentiment qu'elle nous procure ?
Tu aimes Radiohead parce qu'ils te rendent triste et les Beatles parce qu'ils te rendent gaie.
Je sais la tenir, la charger et la décharger. Pourtant, j'hésite. Il ne faut jamais porter d'arme à moins d'y être absolument obligé.
Les chances se multiplient quand on les saisit.
Méfie-toi de ce que tu souhaites. Tes vœux pourraient se réaliser.
Je me dis que l'amour n'est pas un état et pas non plus un sentiment. L'amour est un organisme qui a faim et soif. Un être vivant qui peut grandir et rétrécir, tomber malade et guérir, s'endormir et mourir.
Mon monde est réduit en poussière. Je suis assise sur mon lit au milieu des décombres et fixe le téléviseur des yeux. Je suis une plaie ouverte. Je suis l'odeur de la chair crue. Je suis béante. Un éclair me traverse le crâne, douloureux et d'une clarté éblouissante. Mon champ de vision se teinte de rouge, je m'aggrippe le coeur, j'ai le vertige, ma conscience vacille, je sais ce que c'est cette sensation crue, rouge, j'ai une crise d'angoisse, je fais de l'hyperventilation, je ne vais pas tarder à m'évanouir, j'espère que je vais m'évanouir. p.13
Mon monde tressaille. Je ne comprends pas ce qui se passe autour de moi mais mon lit tremble, les étagères de livres se mettent à chancelier et finissent par s'effondrer. Des cadres tombent des murs, du verre se brise, des fissures se forment au plafond, d'abord très fines, puis larges comme le doigt. Les murs s'écroulent, le bruit est indescriptible et pourtant tout est silencieux, complètement silencieux. p.12