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Critiques de Miri Yu (37)
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Sortie parc, gare d'Ueno

C'est un récit émouvant par sa pudeur et qui dévoile le côté sombre de la réalité japonaise que l'on connaît si peu; loin de la fascination et des contrastes culturels nippon-occidentaux, nous voila devant un témoignage poignant d'un exclu vivant aux environs d'un charmant parc de Ueno. Sans domicile fixe ou plutôt domicilié parmi les parias du système japonais prônant le travail acharné garant de la réussite, ayant consacré toute sa vie à servir l'Empire du Soleil Levant, l'homme fait le bilan de son existence en basculant dans l'abîme de détresse. Quand on se balade à Tokyo, aux abords des terrains verts, on aperçoit les petites cases faites de bâches bleues en plastique où, à l'abri des regards, vivent des gens honnêtes et valeureux mais couverts de honte par ce qui ne leur a pas réussi.
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Le Berceau au bord de l'eau

La critique de @hordeducontrevent sur les Fables et légendes coréennes de Anne-Claire Duval a ravivé en moi des souvenirs.



En 2016-17, j'ai été membre d'une association pour la promotion de la Corée, une expérience passionnante.



En 2019, dans le cadre d'un club de lecture consacré au Japon, j'ai lu le Berceau au bord de l'eau.



Je reprends ici mes notes éparses.



Le Japon est un pays particulièrement xénophobe. Jusqu'à l'époque du Meiji (1868-1912), il vivait en totale autarcie sans aucun échange avec le reste du monde. La fin du protectionnisme est marquée par une politique d'expansion :

-1894-95 Guerre sino-japonaise

-1895 Annexion de Taiwan

-1904-5 Guerre russo-japonaise

- 1905-1945 Colonisation de la Corée



De nos jours, le pays du Soleil Levant a une politique d'immigration draconienne. Il y a très peu d'étrangers. La plus grosse communauté est coréenne : 650 000 en 2013. Les coréens sont méprisés. Beaucoup vivent en ghetto (Okubo, Tokyo, quartier coréen).



Miri Yu est fille d'émigrés coréens. le Berceau au bord de l'eau est un roman autobiographique. Son récit suit l'ordre chronologique de sa naissance le 22 juin 1968 à ses vingt-huit ans. L'autrice insiste pour nous dire qu'elle colle autant que possible à la réalité, que si elle la trahit c'est parce que sa mémoire est défaillante.



Son père parlait parfois du « Genkainada » (je reprends une note en bas de page 20) :



« Mer au nord-ouest de l'île de Kyüshu, parsemée de nombreuses îles posées comme des pierres de jardin permettant le passage entre le Japon et la Corée et se prolongeant à l'ouest par le détroit de Tsushima et le Chenal d'Iki ; redoutable l'hiver pour ses tempêtes et ses vagues furieuses. Clandestinement, légalement ou recrutés de force comme travailleurs, des millions de Coréens ont dût franchir cette mer dans le courant du XXème siècle pour venir chercher fortune au Japon ».



Le berceau au bord de l'eau est un témoignage poignant. Rien ne nous est épargné sur la misère, la saleté, la violence, les tentatives de suicide de Miri Yu, les problèmes familiaux, les difficultés d'intégration…



Voici la description du logement familial :



« Ce que nous avions loué n'était en fait qu'une petite bâtisse sans étage, à vocation de remise, construite sur le terrain occupé par la maison du propriétaire.

Par un grand trou béant dans le mur de la salle d'eau entraient des limaces qui allaient se coller sur le petit bac à savon et de gros grillons aux longues pattes que l'on retrouvait inertes, flottant dans l'eau de la baignoire. Mais murs et plafonds étaient aussi criblés de trous dans les autres pièces et à chaque grosse averse c'était un véritable branle-bas de combat. Nous dormions avec tout ce que nous possédions de récipients, bouilloires, casseroles et bassines, disposés aux points névralgiques et quand la pluie s'intensifiait, le martèlement des gouttes tombant dans tous ces récipients devenait une cacophonie si lancinante que nous n'arrivions pas à nous endormir ». (p.21)



La famille de Miri Yu s'efforce de masquer ses origines. Les prénoms sont japonisés. « Miri » c'est le « Hanbe » (grand-père) qui avait cherché des idéogrammes dont la prononciation soit identique en Corée et au Japon. « Saule », nom de famille se lit « Yu » en coréen et « Yanagi » en japonais.



Harcelée à l'école, livrée à elle-même chez elle, témoin de violences domestiques, Miri devient une enfant dure et perverse qui s'amuse à torturer des fourmis et jouit de les voir souffrir, qui ne s'émeut pas de la mort des bébés chatons dont les yeux ne sont pas encore ouverts, tués par son père (se référer à la citation correspondante).



Le berceau au bord de l'eau n'est pas qu'un nid de violence, c'est aussi un lieu de poésie où l'âme coréenne se réveille. Je n'ai pas le livre sous les yeux, juste quelques pages que j'ai photocopiées.



« Juste au milieu de l'arrière-jardin s'élevait un plaqueminier qui semblait délimiter les territoires des deux maisons. le long de l'étroit sentier menant à l'arrière-cour fleurissaient, rouges, roses ou blanches, des impatientes plantées par mon père. Dès qu'on les touchait, leurs capsules éclataient, pour projeter leurs graines au loin ». (p.21)



Miri Yu est une écrivaine sensible : elle décrit bien la violence intérieure générée par les traumas familiaux. C'est très cru mais il y a aussi de belles évocations sur les traditions coréennes. C'est un beau roman qui nous sert d'entrée dans l'âme coréenne.



Triste sort pour la brillante civilisation coréenne.



L'invention de l'imprimerie est faussement attribuée à Gutenberg :



« le Jikji est le plus ancien livre au monde, connu à ce jour, imprimé au moyen de caractères métalliques mobiles. Son impression en 1377 à Cheongju, dans l'actuelle République de Corée, est antérieure de 78 ans à celle de la Bible de Gutenberg ». (Extrait de la notice de la BNF).



Les japonais ont pillé le patrimoine culturel coréen.



Les coréens du Sud, maintenant sous l'emprise des Etats-Unis, s'efforcent de reprendre leur identité.
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Sortie parc, gare d'Ueno

Kazu nous raconte sa vie, comment il est parti travailler à Tokyo pour subvenir à la vie de sa famille, comment il n'a plus eu envie de revenir et a survécu tant bien que mal dans le parc, pourquoi il est malgré tout revenu auprès de sa femme après la mort de son fils puis a nouveau parti.



C'est une photographie du Japon vue de l'intérieur, qui nous est offerte ici. Nous y découvrons le Japon des apparences et celui des difficultés à vivre par manque de moyens, l'exil pour aider les siens à vivre et la difficulté de renouer. C'est un roman malgré tout assez doux, poétique et lent comme les asiatiques savent les écrire.
Lien : http://keskonfe.eklablog.com..
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Sortie parc, gare d'Ueno

Un livre qui ne va pas redonner le moral si vous en avez besoin.

Le personnage principal tente sa chance à Tokyo pour subvenir aux besoins de sa famille en se faisant embaucher sur les sites de construction des futurs Jeux Olympiques.

Travaillant beaucoup, il ne rentre que très peu souvent chez lui, si bien que ses enfants commencent à ne plus le reconnaître.

Quand il rentre enfin chez lui, son fils est décédé et sa femme va bientôt le suivre...

Et voilà, quand je vous dis que c'est plombant ... et encore vous n'êtes pas au bout du roman pourtant court.

Tiré de son expérience , de la rencontre avec des SDF de cette gare d'Ueno, le roman relaie les douleurs de chacun et montre les problématiques du Japon mais je l'ai trouvé vraiment trop plombant bien que bien écrit (et traduit)







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Jeux de famille

Deux nouvelles composent cet ouvrage. Dans la première, nous suivons une jeune femme dont le père tente de reproduire leur foyer familial. Il achète une grande maison et souhaite que ses filles devenues indépendantes et adultes, et sa femme qui l'a quitté reviennent vivre avec lui. On comprend très vite que ce père est à l'origine de beaucoup de problèmes familiaux et qu'il a sans doute abusé de sa fille. Dans la deuxième nouvelle, une jeune illustratrice a une relation avec un homme marié, la femme de ce dernier l'apprend et ne cesse de rentrer en contact avec elle. Ces nouvelles m'ont rendu vraiment mal à l'aise. On sent que les narratrices souffrent d'un certain mal-être, qu'elles sont hantées par des traumatismes. L'ambiance des nouvelles est particulièrement froide. Je n'ai pas réussi à rentrer dans ce recueil.

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Sortie parc, gare d'Ueno

A la mort de sa femme, sa petite fille est venue à la maison pour s’occuper de lui. Mais il n’a pas supporté d’être un fardeau, un poids inutile pourrissant la vie de ses proches. Alors un jour il a quitté Fukushima en prenant le train pour Tokyo sans prévenir personne, avec un maigre bagage et quelques sous en poche. Et après avoir dormi pour la première fois de sa vie à la belle étoile, il est devenu un SDF sexagénaire, sous une tente de fortune, dans le parc d’Ueno.

Il raconte les jours mornes, les magazines ramassés ici où là et revendus pour quelques pièces à des soldeurs. Il raconte le froid mordant de l’hiver, la pluie incessante du printemps et la chaleur étouffante de l’été. Il raconte les jours particuliers où un membre de la famille impériale doit venir dans le parc. Ces jours-là les SDF ont l’obligation de démonter leurs abris, de faire place nette et d’attendre la fin de la visite pour s’installer à nouveau. Il raconte ses années de labeur sur les chantiers à travers le Japon. Des années loin des siens avant une retraite bien méritée dont il aura peu profité. Il raconte le décès de son fils dans son sommeil alors qu’il n’avait que 21 ans et un brillant avenir devant lui. Sans jamais s’apitoyer, il raconte une vie qui ne l’aura pas épargné. Au-delà de son propre cas, il parle aussi de ses compagnons d’infortune. De la violence, de la misère, du regard méprisant d’une société qui voudrait faire d’eux des invisibles.



Le désespoir ne prend pas ici la couleur de la colère, il s’exprime plutôt dans une forme de résignation tout en retenue. La douleur se drape dans les habits de la dignité, le narrateur semble murmurer son histoire, comme pour ne pas déranger. C’est beau, c’est triste, c’est cruel, ça ressemble à la vie dans ce qu’elle a de plus dur à offrir. Un court roman poignant et pétri d’humanité.


Lien : https://litterature-a-blog.b..
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Sortie parc, gare d'Ueno

Le vieil homme déroule son histoire. Triste comme un jour de pluie sous les cerisiers. Il est un de ceux que l'on nomme "johatsu", ceux qu'on ne voit pas, les sans abris qui peuplent le parc d'Ueno.

Au fil du récit, on apprend qu'il a dû travailler très tôt, très jeune pour aider sa famille. Puis, jeune adulte, il s'est marié, a eu deux enfants qu'il a peu vus, peu connus, car obligé de partir ailleurs gagner de quoi faire vivre la famille. Il a enterré son fils, mort trop tôt dans la jeune vingtaine, enterré aussi ses parents...Que d'épreuves ! Que de résilience. Et, au crépuscule de sa vie, il revient au village, vers son épouse pour tenir des jours tranquilles. Des jours qui ne se dérouleront pas nécessairement comme espérés. Ce sera sa petite fille qui viendra s'installer avec lui pour en prendre soin. Mais lui, il choisira autre chose, une autre vie en lui laissant une note, un petit mot sur la table: "Toutes mes excuses pour cette disparition soudaine. Je pars à Tokyo. Je ne reviendrai pas dans cette maison. Ne me cherche pas. Je te remercie pour tous les délicieux petits-déjeuners que tu m'as préparés."

Et voilà que ce pan de vie se termine là...

Et au-delà de la chronique, Yu Miri, l'autrice, nous parle d'un Japon bien propre, bien soucieux des apparences, pour qui le devoir est plus important que l'humain. Un Japon qui tolère mal les laissés pour compte, les pauvres, les démunis. Un Japon qui ne se gêne pas pour démanteler les tentes des sans abris dans le parc juste pour le passage de la voiture d'un membre de la famille royale. On sait bien qu'il faut cacher la misère aux yeux impériaux.

Ce sont donc les voix de ces dépouillés que nous entendons dans Sortie parc, gare d'Ueno. Des voix nobles et dignes empreintes de toute la poésie de l'autrice.
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Sortie parc, gare d'Ueno

A la gare d'Ueno, j'ai pris la sortie du parc. Là, je m'y suis installé. Las, j'ai regardé la nature environnante, les cerisiers en fleurs, les diverses espèces de plantes variées. Là, j'ai vu des abris de fortune, Las, je suis las d'être là.



Un roman profondément introspectif où le narrateur nous conte des bribes de son existence. Des fragments d'instantanés passés. Des fragments de soi décomposés. Un narrateur qui vit à la rue, parmi d'autres rejetés de la vie en société et qui tente de survivre dans un Tokyo qui ne voit qu'une chose. Les visites de l'Empereur et les Jeux Olympiques de 2020.



Comment en arrive t-on ici. La déclassification sociale qui vous broie. Malgré tout, même si l'histoire est triste, il y a une belle poésie tout au long des pages. Un style qui vous glisse dessus comme un foulard lorsqu'une petite brise se lève. Les cerisiers du Japon ploient sous la pluie comme un profond vague à l'âme qui ne veut pas passer.



Tout au long des pages, nous glissons, marchons, ricochons à travers l'abri et les abris. Au fil de la découverte de la vie du protagoniste où le bonheur qui échappe, car il n'a pas réussi à le saisir. Malgré la jolie couverture, on y lit bien cette insidieuse descente vers le rien. Une poétique douceur pour bercer une prégnante mélancolie.



Un moment doux malgré tout. L'autrice a pris une bonne dizaine d'années pour écrire se livre et s'y imprégner d'histoire qu'elle voulait nous narrer. C'était, ma foi, joli.
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Sortie parc, gare d'Ueno

Il n’est pas rare en se promenant dans le parc impérial d’Ueno de voir fleurir de grandes bâches bleues sur lesquelles les familles s’installent pour profiter de la beauté des cerisiers en fleurs.

Mais pour les SDF japonais, ces mêmes bâches ne sont pas synonymes de douceur de vivre. Ils s’en servent pour se protéger de la pluie dans leurs cabanes faites de bric et de broc.

Kazu était l’un de ceux qui vivaient dans le parc. Après une longue vie de labeur sur différents chantiers de la péninsule japonaise, il était retourné chez lui, près de Fukushima, pour découvrir que ses enfants avaient grandi sans lui et qu’il ne les connaissait pas. Restait sa femme, seule rocher auquel s’accrocher après une vie conjugale marquée par ses absences. Mais sa mort, suivant de peu celle de son fils, lui avait fait fuir sa région natale pour revenir à Tokyo et s’installer à Ueno.

Ueno, cadeau de l’empereur aux habitants de la capitale, poumon vert de Tokyo. Ueno et son zoo, ses temples, ses musées. Ueno et ses laissés-pour-compte, souvent des provinciaux échoués ici après un drame familial, une perte d’emploi, un revers du destin.



Souvenirs d’une vie d’un homme qui, comme il le dit lui-même, n’a pas eu de chance. Il a travaillé depuis son plus jeune âge, s’est sacrifié pour nourrir sa famille et finalement est passé à côté du bonheur.

A travers le destin de Kazu, Miri Yû raconte tous ceux qui ont échoué dans le parc d’Ueno, toutes ces vies en marge qui se débrouillent avec des bouts de rien pour maintenir un semblant de vie. Invisibles au milieu des promeneurs, ils sont carrément effacés quand le parc est visité par un membre de la famille impériale. Commence alors la ‘’battue’’. Ils ont quelques jours pour démonter leurs abris, entreposer leurs maigres biens dans des lieux dédiés et se fondre dans l’anonymat d’une salle de cinéma ou d’un cybercafé. Cachons ces indésirables que l’empereur ne saurait voir !

Douceur et mélancolie pour un livre fort qui réussit à mettre de la poésie dans la noirceur. Car il ne faut pas se fier à sa couverture rose bonbon. Sortie parc, gare d’Ueno est un récit triste et dur qui donne à voir la triste réalité des SDF au Japon. Souvent des campagnards ‘’montés’’ à Tokyo pour travailler et qui ont subi de plein fouet les crises financières successives, ils ont été rejoints par les réfugiés de Fukushima chassés de leur région par la catastrophe nucléaire de 2011. Une minorité invisible que l’on chasse au gré des visites des puissants.

Un sujet intéressant et douloureux traité avec pudeur et poésie.

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Sortie parc, gare d'Ueno

Les SDF des grandes villes sont toujours plus contraints à l'invisibilité. Au Japon, la propreté, l'ordre et la perfection sont de mises et ces relégués de la société n'y ont pas leur place.

Ce petit roman touchant, sans animosité ni pathos, nous montre les difficultés de cette pauvreté des villes au travers de l'histoire de cet homme âgé, vivant dans l'anonymat de Tokyo.
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Jeux de famille

Peu de relief. Froid, voire glacial.
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Jeux de famille

Les histoires de familles nœuds de vipère sont de tous les temps et tous les pays , mais les deux récits de Yu Miri qui composent ce volume nous entraînent aux limites de l’étrangeté , entre cauchemars et hallucinations , portés par un style très cinématographique semé d’éclairs de poésie : « [j’] enroulai autour de moi le fil du temps, comme un ver à soie fabriquant son cocon. » Une lecture qui secoue et déconcerte.
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Jeux de famille

Deux nouvelles ayant pour titre, Jeux de famille et Pousses de soja, composent ce livre. La lecture en est très abordable, mais il faut aimer ne pas avoir toutes les explications, et ne pas tout comprendre.

Deux jeunes femmes sont au coeur de ces histoires. Des histoires de famille.

Dans la première, un père séparé depuis très longtemps, a construit une maison et espère que son-ex femme et ses deux filles vont rejoindre ce nouveau foyer. Full House est le vrai titre de la nouvelle. A défaut de pouvoir réunir sa famille – certains passages laissent supposer des relations troubles – il héberge une famille à la rue qu’il a décidé d’aider (chez eux aussi des relations équivoques entre parents et enfants, la fillette ne parle plus, le père a des réactions violentes).

Dans la seconde, la narratrice, Kyôko, travaille comme illustratrice, et a comme amant un homme avec qui parfois elle collabore. S’en mêle la femme - personnage très très fantasque, qui peint et cultive des pousses de soja- de cet homme, ainsi que la mère de Kyôko qui lui arrange un omiaï (rencontre pour un mariage), avec un homme, Yukito, un peu attardé mentalement.

Pousses de soja ? Cordon ombilical ?

Chaque famille est un petit microcosme, avec ses relations, singulières et tourmentées.

Yu Miri ne donne pas d’interprétation , et les récits partent parfois vers l’onirisme (souvenir d’enfance ou rêve). Ces personnages sont en quête d’une place : « Yukito et moi, nous sommes des infirmes. Chaque fois que j’ai essayé de nouer des relations avec une autre personne, ce n’était pas pour construire quelque chose comme de l’amitié ou de l’affection. Je voulais juste vérifier de quel manque souffrait l’autre. »
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Sortie parc, gare d'Ueno

Posé sur la table des nouveautés à la médiathèque, voici déjà trois ans, cette explosion de fleurs de cerisier m'a attrapée sans que je puisse m'en détacher. Bravo aux éditions Acte Sud pour leur couverture magnifique.



Une fois le livre ouvert, j'ai découvert un monde bien moins rose que les sakura en illustration. Il est vrai que le parc Ueno à Tokyo est renommé pour la célébration annuelle du "hanami" (la contemplation des cerisiers en fleurs, qui donne lieu à de joyeuses festivités entre amis, collègues ou en famille). Pourtant la sortie parc de la gare de Ueno ouvre sur une perspective autrement plus dérangeante : un véritable village constitué de bâches et cartons, servant d'habitat précaire aux personnes tombées à la rue.



Le narrateur est un homme âgé, SDF alors qu'il a travaillé comme une bête des années pour entretenir sa famille. Lorsque sa femme et son fils unique meurent, il réalise qu'il ne les a quasiment pas vus tout ce temps où il se vouait à son entreprise (mentalité et situation récurrentes chez les salary-men nippons).



Reclus dans la cité des invisibles de Ueno, il détaille misères et beautés de la nature. Je dis invisibles mais pas toujours car les services de nettoyage leur tombent régulièrement dessus pour faire disparaître cette tache sur le paysage urbain tokyoïte. Qui plus est lorsqu'un membre de la famille impériale vient à traverser le parc. Cacher ce pauvre que je ne saurais voir (ça, ce n'est pas propre au Japon mais se retrouve partout où des personnes sont à la rue).

L'esprit du narrateur force l'admiration à contempler le passage des saisons et leurs expressions florales et végétales, à encaisser les battues des services de nettoyage avec un fatalisme incroyable, à écouter les discussions des "vrais" citoyens tokyoïtes dans le parc, etc. Il est pourtant des moments où la mort serait délivrance d'une vie dont le sens lui apparaît pathétique et inutile.



Yu Miri, d'origine coréenne, signe avec ce roman une histoire troublante et qui dérange énormément. Si elle mêle à son texte des touches poétiques et une écriture raffinée, son propos reste grave et concerne nombre d'êtres humains tombés dans la déchéance. Elle a longuement enquêté pour rédiger son ouvrage, qui lui prit douze années. Son approche sensible fait la part belle à une profonde humanité. Un livre très fort, très émouvant, qui conduit aussi à se demander ce que vont devenir ces villages de bâches lors des Jeux Olympiques d'été dans la capitale japonaise en 2020.
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Sortie parc, gare d'Ueno

Découverte, c'est le mot qui me vient à l'esprit au terme de la lecture de ce roman. Découverte de la vie d'une personne sans abris dans un parc de TOkyo mais aussi découverte plus avant des coutumes et des mœurs de ce pays. Découverte de la manière dont, comme partout dans le monde, on chasse si facilement les indésirables au "profit" de certains grands évènements pour riches tels que la visite d'un chef d'état ou l'organisation des jeux olympiques. Découverte également de certaines des choses mises en place pour les sans abris à Tokyo, quelque peu différent de ce que l'on retrouve chez nous. Est ce mieux? Moins bien?

J'ai moins apprécié les nombreux passages où le narrateur repart dans son passé, surtout lors du décès de son fils. Si ces passages nous en apprennent plus sur la culture locale, j'y ai trouvé aussi quelques longueurs et aurait préféré en savoir plus sur la vie parallèle de ce charmant petit parc de Tokyo.

Bon moment de lecture malgré tout :-)
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Sortie parc, gare d'Ueno

A travers ce récit, Kazu, vieil homme de 80 ans, raconte son quotidien de SDF et les raisons pour lesquelles il a choisit d'attendre la mort en vivotant dans la rue - sortie "parc" de la gare d'Ueno - de Tokyo, avec pour seul abris, une fragile cabane le protégeant des intempéries grâce à une fine bâche plastique.



En tant que SDF, il est invisible aux yeux de ceux qui vivent et s'activent autour de lui dans cette ville qui grouille. Il assiste aux conversations des petits tracas du quotidiens des habitants de Tokyo. Il est entouré d'une multitude d'images, de sons, et d'histoires racontées par ces gens qui ne font que passer,donnant une sensation de patchwork constitué de mouvements perpétuels et étourdissants autour de lui, un peu comme si le monde défilait à toute allure, alors que lui, prisonnier de son tragique passé, est condamné à rester sur le quai.



Comme toile de fond, le parc d'Ueno dont la douce beauté contraste avec la dureté des conditions de vie de ces hommes et femmes, laissés pour compte.



L'auteur utilise un style fait de retours en arrière, qui impose une lenteur dans la lecture comme pour mieux prendre la mesure des drames qui ont marqué cet homme au point de décider de vivre de cette façon :

« Exerce ta volonté à renoncer à tout ce que tu redoutes de perdre un jour... » rappelle judicieusement l'adage.....

Au risque d'en mourir !

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Sortie parc, gare d'Ueno

On découvre une facette du Japon qui est rarement montrée
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Sortie parc, gare d'Ueno

Je n'ai pas vraiment été conquis par les déboires de ce pauvre homme. Le récit part un peu dans tous les sens, aussi bien dans le temps que dans l'espace. Bien sûr, on ne peut que s'attendrir à l'évocation de la vie de ce SDF. Mais ce roman me semble trop lyrique pour s'ancrer véritablement dans la réalité des sans-abris, qui, à Tokyo comme ailleurs est certainement une horreur. Pour autant, on apprend beaucoup de choses sur l'histoire du Japon et de ce parc, devenu, avec la statue d'Hachiko à la gare de Shibuya, un des principaux lieux de rendez-vous touristiques de la capitale. (Les jeux olympiques prévus en 2020 ne vont certainement rien arranger pour les SDF.)
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Sortie parc, gare d'Ueno

Le parc impérial d'Ueno, est un lieu de promenade et de passage, un lieu que personne n'imaginerait peuplé, où personne ne s'attendrait à y voir des habitants....et pourtant derrière les fourrés, s'élèvent des tentes faites de bric et de broc, en toile bleue, celles-là même que l'on étend pour la floraison des cerisiers, mais qui là, ne constituent que des abris de fortune pour les laissés-pour-compte de la société japonaise.

En point d'orgue les préparatifs pour les jeux olympiques de Tokyo de 2020 et pour lesquels on fait place nette.......et l'on s'apprête à déloger sans ménagement ces hôtes indésirables. le narrateur septuagénaire dont on ne connaît pas le nom se souvient les jeux olympiques de 1964, il les a connus, il a même travaillé pour les projets de l'époque, mais là s'arrête la comparaison : entre ces deux références le Japon triomphant a fait place à une économie et une crise qui a écrasé les plus faibles. Au gré de ses souvenirs, on découvre la vie de cet homme, une vie heureuse en famille, qui va basculer après plusieurs drames, vers une vie de solitude et de retrait jusqu'à une vie d'errance et de refuge dans le parc.

Une construction intéressante du roman qui nous plonge au coeur du parc, alternant les souvenirs du narrateur, les conversations des promeneurs, les bruits familiers de construction, les bruits familiers que l'on croise dans un parc.



Malgré le sujet intéressant qui oppose deux périodes de référence liées au même sujet - les jeux olympiques - je n'ai pas vraiment été conquise par Sortie parc, gare d'Ueno, je n'ai pas vraiment ressenti de l'empathie pour le personnage principal, peut-être le style trop neutre et quelquefois distancié de Yu Miri et des développements concernant la secte d'appartenance du héros qui ne m'ont pas intéressée plus que cela.

Sortie parc, gare d'Ueno reste une une lecture instructive sur les laissés pour compte mais mais cela n'a pas été un coup de coeur.
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Sortie parc, gare d'Ueno

Un tout petit roman ou une longue nouvelle de 170 toutes petites pages. Yȗ Miri est un écrivain japonais d'origine coréenne. Nous sommes à Tokyo, dans le parc Ueno où se sont installés des SDF. Des gens qui n'ont pas eu de chances, qui souvent ont travaillé, ont eu des familles, puis des malheurs, qui sont trop vieux pour un travail régulier. Alors ils survivent comme ils peuvent, dans des tentes, des abris de fortune. Qu'il leur faut démonter à chaque venue d'illustres visiteurs, de la famille impériale.



Parmi tous ces vagabonds, nous suivons surtout un homme, et son destin. Il est venu chercher du travail dans la capitale, il a trimé des années loin de sa famille, au point que ses enfants sont des étrangers. Ils en prend conscience lorsque meurt son fils, juste à la fin de ses études, sans raison apparente. Et à la mort de sa femme, le seul être dont il se sentait un peu proche, il ne peut supporter sa maison, fuit et devient lui aussi un sans abri. Qui observe, en essayant de survivre.



Un beau livre, même si beaucoup de choses m'ont échappées, faute de connaître suffisamment la culture du pays. J'ai trouvé particulièrement passionnants les rites funéraires propres à la communauté religieuse du personnage principal, ainsi que tous les aspects historiques et sociologiques liés à ces travailleurs venus des campagnes pour construire un nouveau Japon, dans lequel ils n'ont pas leur place, comme ils n'ont plus leur place dans leur communauté d'origine et même leur propre famille.



Un auteur à suivre.
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