AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Critiques de Owen Matthews (52)
Classer par:   Titre   Date   Les plus appréciées


Richard Sorge : Un espion parfait

Après quelques pages , j'ai vite décroché, j'ai perdu le fil du récit, trop de détails, un personnage noceur, alcoolique, séducteur, avec lequel je n'ai pas eu beaucoup d'empathie.

La vie de Richard Sorge est bien confuse, né dans l'empire tsariste, il s'engage dans l'armée allemande en 1914, blessé, il profite de sa convalescence pour lire Marx, adhère à l'idéologie communiste , part à Moscou, revient à Berlin, devient un agent de l'Abweh et en même temps espionne vraiment pour le compte du  NKVD soviétique, on le retrouve à Tokyo. Toutes ses déambulations, tous ses périples sont assez contraignants à suivre.

L'histoire de cet espion est intéressante , ses efforts d'espion ne seront pas toujours appréciés à leur vraie valeur puisque le maître l'URSS, Staline, n'a pas toujours cru à la véracité des informations communiquées, et pourtant Richard Sorge passe pour être un espion hors pair, un des plus fameux du XXème siècle.

Je pense que je reprendrai cette biographie avec un autre auteur.
Commenter  J’apprécie          430
Nicolaï Rezanov : Le rêve d'une Amérique russe

Owen Matthews a quinze ans lorsque, se rendant à Moscou en 1986, chez une tante il assiste à la représentation d'un opéra rock "Junona i Avos" : "... l'intrigue débute par l'arrivée en Californie espagnole de Nikolaï Rezanov, bel aristocrate russe et intime du tsar, à la tête des deux navires qui donne son titre à l'oeuvre ...." p 22-23

Cette première rencontre de Owen Matthews avec Nikolaï Rezanov a fait son chemin et abouti à ce livre volumineux de 400 pages qui, s'il n'a pas le romantisme de l'opéra-rock n'en est pas moins passionnant. L'auteur s'est lancé sur les traces de Nikolaï Rezanov personnage très peu connu, artisan de la création de la Compagnie Russe d'Amérique. Pour cela il s'appuie sur une abondante documentation (journaux de Rezanov et d'autres voyageurs et explorateurs, et correspondances) et mets également ses pas dans les siens.

Ce livre dense m'a permis de découvrir toute l'effervescence qui accompagnent au cours des XVIIIe et XIXe siècles la lutte pour la domination et la colonisation de terres autour du Pacifique de la part de la Russie, de l'Angleterre, de la France et de l'Espagne ; foisonnement d'échanges commerciaux et appétit de découvertes, appât du gain et désir de conquérir des terres inconnues, d'ouvrir de nouveaux marchés qui entraînent de violentes rivalités.

De plus il m'a fallu regarder la carte du monde de manière entièrement nouvelle vu d'en haut avec la Russie et l'Amérique face à face séparée par seulement 90 km et le Japon qui se trouve dans la prolongation des îles Kouriles qui apparaissent comme autant de petits pavés le reliant à la Russie. Et l'on comprend alors qu'envisager une domination de la Russie sur le Pacifique n'est pas seulement une utopie mais découle logiquement de sa position géographique privilégiée.

Des comptoirs commerciaux et des compagnies russes existaient avant que Nikolaï Rezanov ne pense à la création d'une Compagnie Russe d'Amérique mais elles n'avaient pas l'efficacité et l'organisation nécessaires pour faire face à la concurrence.

Le plus de Rezanov est qu'il a su durant des années, en sachant trouver des appuis, se faire une place à la cour en particulier dans le cercle de Zoubov, le jeune et dernier favori de l'impératrice Catherine, qui "attirait aventuriers, crapules et opportunistes." p 112

Rezanov ne cherche pas à s'enrichir. " Rezanov raisonnait à plus long terme. Il se servait de cette période au service de Zoubov pour étudier de près les mécanismes du pouvoir et les divers moyens --- flatterie , lobbying ou corruption --- par lesquels obtenir de l'avancement. p 114



C'est cette connaissance des intrigues de la cour et son habileté à les utiliser qu'il va mettre au service d'un marchand venu y demander soutien, Grigori Chelikov.

Rezanov, chargé par Zoukov de vérifier si les accords passés avec le marchand sont bien respectés se rend à Irkoutsk terminus des routes russes. Et là il réalise que l'avenir est dans le commerce maritime, et non terrestre. "Si les Hollandais pouvaient commercer avec le Japon à Nagasaki et les Anglais avec la Chine à Canton, pourquoi la Russie, plus important empire d'Asie, ne pourrait-elle pas elle aussi profiter des échanges transpacifiques -- ou même les dominer, d'ailleurs ?" p 134-135

L'aide financière et les connaissances du marchand de fourrures Chelikhov auquel il se liera en épousant la plus jeune de ses filles, Anna, lui permettra de faire aboutir ses efforts et son projet qui ne se concrétisera pourtant, après bien des contre-temps, que sous le règne du Tsar Paul Ier, lors de la signature le 4 juillet 1799 de la Charte créant la nouvelle Compagnie Russe d'Amérique "sous la protection spéciale de Sa Majesté".

Les périples maritimes de Nikolaï Rezanov débutent sous le règne d'Alexandre Ier qui décide d'envoyer une ambassade autour du monde et nomme Rezanov comme ambassadeur.

"Au petit matin du 26 juillet 1803, le hiéromoine Gidéon vint chanter un Te Deum sur le gaillard d'arrière de la "Nadejda" avant de rejoindre ses quartiers sur la "Neva". A huit heures après minuit, sous une brise fraîche soufflant à douze verstes à l'heure, les deux vaisseaux quittèrent doucement l'abri de l'île fortifiée de Krondstadt, à l'embouchure de la Neva pour gagner la pleine mer. Derrière eux, la flèche dorée de la forteresse Pierre et Paul continuait de luire au soleil telle une aiguille de feu, même après que la capitale eut disparu dans la fine brume matinale. Nikolaï Rezanov ne reverrait jamais sa ville natale." p185

Mais à bord de la Nadejda ses talents de courtisan ne seront d'aucun secours à Nikolaï Rezanov qui va se heurter à un équipage hostile et à une lutte de pouvoir avec Krusenstern qui avait eu l'idée de monter cette circumnavigation et n'acceptait pas sa nomination par le tsar. Tout le voyage sera pourri par leur animosité réciproque et le rejet que fera naître le caractère belliqueux de Rezanov.

La rencontre de nombre de personnages aventuriers violents et grands buveurs, marchands entreprenants et audacieux mais aussi explorateurs qui rendent compte de la flore, de la faune et des coutumes des natifs des pays abordés m'ont particulièrement intéressée parfois plus que le destin tragique de Rezanov qui après bien des déceptions et des souffrances ne réussira finalement pas à établir durablement la suprématie russe sur la Californie et le Pacifique.



Merci aux Éditions Noir sur Blanc et à l'opération masse critique de Babelio qui m'ont permis de découvrir cette passionnante aventure dont je ne connaissais pas l'existence.

J'ajoute que toutes les illustrations qui accompagnent ce livre agrémentent et permettent de mieux l'apprécier ainsi que ceux qui y ont participé.







Commenter  J’apprécie          393
Moscou Babylone

La Russie des années 90: de quoi mettre à l'envers la basilique de Basile le Bienheureux!



Quand le très sélect et très britannique Roman Lambert commence à mourir d'ennui dans son smoking de bonne société londonienne, l'occasion de partir travailler à Moscou, dans la Russie post soviétique, apparait comme une aubaine "merveilleusement exotique".



Une double chance puisqu'il parle russe, assez pour se retrouver immédiatement plongé dans les délires, débordements et excès d'une société sans repère après la chute du communisme. Son vernis de jeune occidental aisé, séduisant et conquérant, son emploi dans une société de communication l'entraine en vie dissolue, dans un monde interlope où fêtes, alcools, sexe, argent, drogue et capitalisme sauvage sont devenus les piliers d'un pays à la dérive.



La vision de la Russie post-pérestroïka que décrypte Owen Matthews est passionnante: peu de romans ( à ma connaissance) ont trouvé leur place dans cet entre-deux incertain, ce flou étatique qui a manqué renvoyer le pays vers ses heures les plus noires. Un microcosme de nouveaux riches suçait un Etat en déconfiture et se partagait le gâteau, avec la bénédiction de Eltsine, quand la population vivait d'expédients et se battait au quotidien pour conserver sa dignité.

On a peu compris dans nos certitudes d'occidentaux angéliques combien a été difficile ce passage sociétal vers un semblant de démocratie, et combien une grande partie la population a souffert et regretté l'ère communiste.



L'auteur nous accompagne en découverte et compréhension avec une subtile utilisation du sarcasme et de l'ironie qui donne du piment au propos. Il dézingue notre vision du pays et de l'identité slave si éloignée de nos décodeurs sociaux. La plume est fluide, piquante, crue, la lecture en est joyeuse. Si la description des fêtes débridées et de la fange des nuits moscovites m'a fait risquer l'overdose, l'auteur a su au bon moment faire rebondir la narration en forme de thriller et accompagner son personnage vers une prise de conscience pour justifier l'irréparable.



Une peinture vivante et cruelle d'un pays attachant et souvent incompréhensible, où la fin justifie toujours les moyens.

Un plaisir de lecture.













Commenter  J’apprécie          343
L'ombre du sabre

Au début des années 90, Alexeï, jeune journaliste moscovite, est envoyé en Tchétchénie pour couvrir le conflit qui oppose le petit état du Caucase à la Russie. Installé avec les soldats russes d'occupation dans une caserne aux pieds des montagnes, il découvre la vie de garnison, la camaraderie, mais aussi la peur des attaques ennemies et les missions dans les villages rebelles. A Chatoï, non loin du camp russe, le journaliste rencontre Zéliha, la belle institutrice. C'est le coup de foudre, la passion, des moments volés à la guerre et aux traditions. Mais quand les rebelles tchétchènes attaquent, l'armée russe riposte et ne fait pas de quartier. Zéliha est arrêtée, Alexeï est exfiltré et renvoyé à Moscou, laissant derrière lui cet amour éphémère.

Des années plus tard, alors qu'il est installé à Istanbul avec femme et enfants, il tombe par hasard sur Zéliha, elle aussi mère, d'une adolescente rebelle qui ne sait rien de ses origines et fréquente une mosquée radicale. Quand, imprudent, Alexeï raconte un peu du passé de sa mère à la jeune fille, celle-ci s'enfuit et s'enrôle dans le djihad, décidée à se venger. Eperdue d'angoisse, Zéliha supplie le journaliste de lui ramener sa fille. En souvenir de son amour pour elle et pour compenser sa lâcheté d'antan, Alexeï s'envole pour l'Ukraine où ses anciens amis soldats ont repris du service.



Un roman intense, violent où si l'amour et l'amitié font de brèves apparitions, ils sont vite balayés par les horreurs de la guerre. La Tchétchénie vue par les yeux d'un jeune journaliste russe est un pays en ruines où subsiste l'étincelle de la rébellion. Lui a peur, peur des tchétchènes, peur des russes, peur de mourir. Sa relation avec Zéliha est une parenthèse enchantée dans les combats, un amour impossible sur lequel il tourne la page en retournant à Moscou. Il la laisse aux mains de l'ennemi sans avoir eu le courage de la protéger, de la sauver. Reste un immense sentiment de culpabilité. Pour se racheter, il veut sauver sa fille et pour cela il doit quitter sa famille et retourner à une vie plus aventureuse, encore une fois au cœur des combats, en Ukraine cette fois. Un autre lieu, une autre guerre mais la même violence, les mêmes soldats, la même opposition à la présence russe.

Dans un tel contexte, les personnages d'Owen Matthews tentent de survivre aux traumatismes. Ni bons, ni mauvais, ils partagent le même sentiment de culpabilité. De retour chez eux, les soldats ne peuvent oublier leurs exactions. Leur seul choix est de se rejeter dans l'enfer de la guerre. Le journaliste est pris entre deux feux : témoigner de ce qu'il a vu, raconter une vérité qui ne plaira pas au pouvoir ou encore une fois se taire et trahir. Tous sont juste des hommes et des femmes incapables de se comprendre, pris dans le cours d'une vie qu'ils ne maîtrisent pas.

Le roman se termine là où il a commencé, dans la haine et le sang, le pardon impossible, la mort. Puissant et sans concessions.
Commenter  J’apprécie          312
Moscou Babylone

Années 90. Fin de l'union soviétique. Roman Lambert, de père anglais et de mère russe, s'ennuie à Londres et décide de s'aventurer dans la jungle moscovite. Moscou, capitale d'un empire déchu, où règne la corruption, le fatalisme et le non-sens. Le peuple russe bercé d'illusion depuis des décennies se confronte aux réalités d'un monde impitoyable et désenchanté où l'argent est roi. Le personnage principal découvre cet univers dans lequel il est un privilégié. Il explore les milieux branchés de Moscou et profite de ses orgies, de son luxe, de ses excès, ... Il réussit professionnellement, tombe amoureux d'une fille russe, ... mais va brusquement et violemment tout perdre. Par ce roman, l'auteur tente de nous dévoiler sa perception de l'âme russe. Il a lui-même été un expatrié anglais d'origine russe à Moscou ce qui renforce sa vision de la Russie des années 90. Il est simplement dommage que l'intensité du récit apparaisse seulement dans ses dernières pages.
Commenter  J’apprécie          190
Les enfants de Staline

C'est un livre qui joue sur plusieurs registres: à la fois document historique, bien sûr mais également une histoire de famille, d'espionnage et surtout, d'amour.

Le narrateur enquête sur le passé de ses parents et grands-parents maternels et l'on va rencontrer des personnages à la volonté et la ténacité hors du commun dans l' URSS des purges, de la seconde guerre mondiale et de la guerre froide.

C'est également une quête sur sa propre identité. Lorsqu'il se rend en Russie en tant que reporter dans les années 90, le récit n'est plus linéaire et il mêle sa propre histoire avec celle de son père dans l'URSS des années 60. Ce procédé volontaire qui met en parallèle les histoires du père et du fils ne clarifie pas vraiment le récit mais j'étais tellement emportée que ça ne m'a pas gênée.

Dans ce témoignage émouvant c'est la Russie qui ressort comme personnage principal.

Alors qu'on fêtait les vingt ans de la chute du mur de Berlin en 2009 (année de parution de ce livre), il semble qu'une certaine nostalgie du communisme "du bon vieux temps de l'URSS "et de ses pays satellites soit parfois dans l'air du temps.

Le récit d'Owen Matthews, même s'il met en exergue les dérives actuelles d'un certain capitalisme débridé qui laisse de côté une bonne partie de la population, a le mérite de nous rappeler que ce pays a connu des années noires pour l'immense majorité de son population.

Commenter  J’apprécie          160
Moscou Babylone

Un roman déprimant dans le cadre du Moscou décadent des années Eltsine. Découverte du capitalisme sauvage, argent sale et excès en tous genre d'une faune opportuniste et sans scrupule, d'une part, masses populaires décontenancées par la perte de tous leurs repères d'autre part. Ce roman, inspiré de scènes vécues, n'est qu'une vision partiale, mais on sent que ce qui y est décrit comporte une part de réalité, et il s'en dégage un point de vue pessimiste qui me rappelle American psycho de Bret Easton Ellis en plus triste, car plus plausible. Le livre est bon, bien écrit et facile à lire, même si j'ai détesté ce que j'y ai lu.
Commenter  J’apprécie          120
Les enfants de Staline

Passionnante et magnifique évocation de l'URSS et de la Russie d'aujourd'hui à travers le destin tourmenté des parents de l'auteur. J’ai beaucoup aimé ce récit qui se lit comme un roman et ressuscite le destin brisé de ses ancêtres et celui de la Russie.

On y découvre son grand-père apparatchik soviétique victime des terribles purges staliniennes, sa mère élevée avec sa sœur dans les orphelinats du régime, la vie des russes sous Staline puis pendant la guerre froide, pour finir avec une description sans complaisance de la Russie postcommuniste des années 90, déboussolée par les tragédies qui l'ont transformée. On y découvre également la personnalité atypique de son père, anglais russophile et patriote qui refusa les avances du KGB, et l’histoire d’amour incroyable de ses parents à travers une correspondance passionnée.

Un récit qui nous offre une vision très complète de ce qu'a pu être le quotidien des Russes pendant cette période tragique de l’histoire, et une lecture incontournable pour tous ceux, nés après 1990, qui ne peuvent concevoir ce que furent la guerre froide et le rideau de fer.

Commenter  J’apprécie          120
Moscou Babylone

Drôle d'impression en lisant ce roman : l'action se déroule principalement au moment de l'élection de Boris Eltsine et de la dissolution de l'Union Soviétique début des années 90.



On ressent la fin de cette époque comme une période post-apocalyptique, presque en dehors de la réalité avec d'une part le commun des futurs-ex soviétiques qui apparait complètement paumé , n'ayant plus les repères qui ont dicté leur existence ni la manne étatique qui même si la vie n'était pas brillante , au moins avait un sens et le quotidien était assuré.



Cette vision crue est à mille lieux de ce que j'ai pu moi-même imaginer, la fin du communisme représentant à mes yeux naïfs plutôt le début de la liberté pour le peuple russe ...



L'autre versant, c'est celui dans lequel évolue notre héros, Roman Lambert, un jeune anglais, russe par sa mère et qui a décidé de travailler à Moscou et de faire émerger cette moitié russe en rejetant son éducation anglaise .



Milieu perverti, corrompu avec tout ce qu'il y a de plus vil chez l'homme: la recherche de l'argent facile, la corruption,la drogue, l'alcool et les filles, souvent très jeunes, arrivant de la campagne et à qui on promet une vie meilleure et qui deviennent des prostituées .



Mais n'est pas slave qui veut , même avec une partie de ses gènes russes, Roman Lambert reste un étranger et un homme finalement médiocre .



Récit sans faux-fuyant d'une intégration ratée inspirée de l'expérience même d'Owen Matthews.



J'ai hâte de lire Les Enfants de Staline du même auteur !
Commenter  J’apprécie          113
Les enfants de Staline

Journaliste, Owen Matthews correspondant du "Newsweek" à Moscou, brosse le portrait de ses parents (séparés par la guerre froide et qui vont garder intacte leur amour grâce à une correspondance de six années) et de ces grands parents (victimes des purges Staliniennes). Dans cette plongée dans l'URSS d'hier et la Russie d' aujourd'hui, Matthews signe une enquête passionnante, à la fois sur la quête de ces racines, sur ce peuple meurtrie et fataliste et sur l'espionnage l'une des marottes du pays. Si la Pérestroika a fait souffler le vent de l'espoir, c'est un peuple désabusé qui regarde une poignée d'hommes devenus milliardaires et une violence et une corruption qui sont devenues monnaie courante. Comment écrire pour échapper à l'oubli et redonner dignité et salut aux siens. Matthews réussit ce pari avec un immense talent; Eblouissant et passionnant.
Commenter  J’apprécie          110
Moscou Babylone

Un livre surprenant a propos de la Russie des années 90.

mais que nous raconte "Moscou Babylone"

Un voyage au coeur de l'âme russe à travers le récit de Roman Lambert, un jeune Anglais élégant qui arrive à Moscou en 1995, déterminé à profiter de la démesure postsoviétique. Sa rencontre avec Sonia précipite une métamorphose qui l'amène bientôt à commettre l'irréparable.

Un livre qui dénonce un système oligarchique sans pitié tout en expliquant la mentalité russe qui ne manque pas d'attraits mais aussi de contradictions. Certains diront Que cela est restrictif mais cela mérite d'être lu.
Lien : https://collectifpolar.com/
Commenter  J’apprécie          90
Nicolaï Rezanov : Le rêve d'une Amérique russe

En 1867, le tsar Alexandre II vend aux États-Unis du président Andrew Johnson un immense territoire correspondant à l'actuel état de l'Alaska. Ainsi prend fin la tentative de colonisation russe en Amérique du Nord entamée un siècle plus tôt, à la suite des explorations de Vitus Béring dans ces régions sauvages et reculées.



L'idée d'expéditions et de colonies russes dans les actuels état d'Oregon, de Californie, ou même à Hawaï, peut aujourd'hui paraître farfelue, tant ce chapitre de l'histoire est tombé dans l'oubli. le nombre de livres en français abordant la question est famélique. Par mes lectures sur la Sibérie, j'avais déjà eu vent de l'Amérique russe mais sans jamais avoir eu l'occasion d'approfondir le sujet. Je remercie donc Babelio et les éditions Noir sur Blanc de m'avoir permis dans le cadre de Masse Critique de lire cet ouvrage centré sur l'une des figures principales de cette étonnante aventure : Nikolaï Rezanov.



La vie et l'oeuvre de cet aristocrate et homme politique né en 1764 peut être grossièrement découpée en trois grandes parties. La première période est ce que l'on pourrait qualifier d'années d'apprentissage, à la Cour de Saint-Pétersbourg et dans l'administration impériale, jusqu'à sa nomination à la tête de la Compagnie russe d'Amérique. La deuxième période correspond au tour du monde, le premier effectué par des Russes, à bord de la "Nadejda" : au Brésil, en Polynésie, à Hawaï, et enfin au Japon où l'ambassadeur Rezanov, chargé d'y nouer des relations commerciales, se heurte à l'immobilisme de la dynastie des Tokugawa. La troisième et dernière étape, enfin, l'amène à se préoccuper plus précisément du développement des colonies d'Amérique alors à l'état embryonnaire, le poussant jusqu'en Californie, possession espagnole du bout du monde n'abritant que quelques centaines d'âmes.



Le journaliste anglais Owen Matthews nous livre une étude sérieuse sur les événements méconnus de cette période, jusqu'à la mort de Rezanov en 1807. le récit peine un peu à démarrer, l'auteur prenant le temps de revenir en détail sur des aspects indirectement liés à l'Amérique russe, tels que la conquête de la Sibérie par les cosaques ou le fonctionnement de la Cour de Catherine II. Si je ne pense pas avoir appris grand-chose dans ces premiers chapitres, ceux-ci sont néanmoins nécessaires, ne serait-ce qu'afin de planter le décor pour les lecteurs connaissant peu l'histoire de la Russie. En revanche la suite, à partir du départ de Rezanov de Saint-Pétersbourg, est passionnante. Tout au long de sa lecture, l'amateur d'uchronie ne pourra s'empêcher de se demander le tour qu'aurait pu prendre l'histoire si... et si... Car cette colonisation russe de l'Amérique s'apparente à une suite ininterrompue de rendez-vous manqués. Par d'incroyables malchances, d'inexcusables maladresses ou de terribles incompétences, les projets grandioses de Rezanov ne se concrétiseront jamais : il meurt prématurément, à l'âge de quarante-deux ans, sans avoir pu aller jusqu'au bout de son "rêve d'une Amérique russe". On ne verra jamais l'empire des tsars s'étendre sur tout le Pacifique, ou San Francisco et Los Angeles devenir des soeurs de Saint-Pétersbourg et de Moscou... Mais quelle formidable aventure malgré tout !



Au chapitre des regrets, il est dommage que l'histoire de Fort Ross, le plus méridional des établissements russes en Amérique (tout près de San Francisco), ou l'éphémère tentative de colonisation d'Hawaï, autant d'épisodes de toute évidence passionnants, ne soient qu'évoqués dans l'épilogue... Mais le livre étant centré sur le personnage de Rezanov, il n'a pas la prétention d'aborder tous les aspects de l'Amérique russe. Il s'agit dans tous les cas d'une très bonne porte d'accès à un sujet historique aussi méconnu que fascinant.
Commenter  J’apprécie          90
Les enfants de Staline

En 1937, dans l'URSS de Staline, Boris Bibikov, bolchevique convaincu et pur « homo sovieticus », se retrouve victime des purges. Il est arrêté et déporté au Goulag dont il ne reviendra jamais. Sa femme suit le même chemin et ses deux filles Lenina et Ludmila, trois ans, se retrouvent d'abord placées dans un orphelinat avant d'être séparées dans le chaos de la Seconde Guerre Mondiale. Toutes trois survivront à la tourmente après mille tribulations. Brillante étudiante puis documentaliste à Moscou, Ludmila rencontrera ensuite Merwyn Matthews, jeune prof anglais russophile qui sera rapidement expulsé d'URSS sans avoir pu se marier avec elle. Pendant cinq années, Merwyn devra se battre pour reformer leur couple, lui, étant interdit de séjour en URSS et elle, étant condamnée à rester pour toujours derrière le rideau de fer. Parviendront-ils à se rejoindre malgré toutes les difficultés ?

Une émouvante chronique familiale hors du commun qui est également une condamnation sans appel de 70 ans d'un régime inhumain. La saga débute dans les années trente, le temps de fer où la Révolution dévorait les meilleurs de ses enfants, le temps des exécutions d'une balle dans la nuque, le temps des famines organisés. Et elle s'achève après la chute du communisme dans les années 2000 avec le bling-bling et le capitalisme triomphant dans lequel se perd l'auteur, fils de Ludmila et de Merwyn, journaliste tiraillé dans sa dualité russo-anglaise. Cette saga foisonnante qui se perd un peu parfois dans les dérives du fils, reste toujours passionnante et apprend autant sur les années de plomb que sur la société russe d'aujourd'hui dont le plus russe des auteurs anglais est un fin connaisseur.
Lien : http://www.etpourquoidonc.fr/
Commenter  J’apprécie          80
L'ombre du sabre

Nous sommes en Tchétchénie, dans les années 1990. Alexei n'est alors qu'un jeune reporter, couvrant l'occupant d'un village des montagnes par l'armée russe. Il partage le quotidien de l'armée, que ce soit pour les repas, les sorties ou les discussions. Un jour, Alexei va rencontrer l'institutrice du village, une femme forte appelée Zeliha et qui n'hésite pas à tenir tête aux soldats. Il va vivre avec elle une histoire secrète, jusqu'au jour où des rebelles tchétchènes bombardent le camp russe... Les soldats mènent une expédition punitive, n'hésitant pas à recourir aux pires châtiments.

Quelques années après ces événements, Alexei vit à Istanbul, et rencontre tout à fait par hasard Zeliha et sa fille Dilara, une adolescente rebelle et attirée par le Djihad. Dilara profite de la présence de ce vieil ami de sa mère pour découvrir l'histoire de sa mère, ce qui la conduit à s'enfuir pour tenter de venger sa mère et d'apaiser son propre mal-être. Pour se faire pardonner, Alexei accepte de partir à la recherche de la jeune fille.

En commençant L'ombre du sabre, j'étais attirée d'abord par la (très belle) couverture, mais aussi, évidemment, par le résumé, qui promettait un récit fort en émotions. Plus qu'un récit sur la guerre ou sur le Djihad, Owen Matthews nous parle surtout de personnages forts, en proie à des émotions violentes. Alexei se débat avec les souvenirs horribles qu'il a vu pendant la guerre et l'occupation, avec la culpabilité d'avoir fuit et d'avoir laissé tant de choses derrière lui ; Zeliha lutte avec ses souvenirs pour qu'ils n'envahissent pas sa vie actuelle avec sa fille ; mais les secrets et les non-dits poussent Dilara à faire des choix douloureux.

L'ombre du sabre est un livre vraiment percutant, souvent très dur, et qui aborde des thèmes difficiles...

(Mon avis complet sur mon blog.)
Lien : http://chezlechatducheshire...
Commenter  J’apprécie          70
Les enfants de Staline

Quand j'ai emprunté ce livre à la bibliothèque,les gens n'arrivaient pas à croire que je le lise par plaisir.Pourtant,qu'est ce que c'était bon.Toute ces phrases qui sonnaient si justes que j'aurais aimé les avoir écrites moi-même.

Je ne suis pas russe,mais je suis slave.Lorsqu'il parlait de leur âme,de leur esprit,de leur forêt,j'avais envie de serrer le livre dans mes bras tellement les choses semblaient vraies,tellement nos analyses étaient proches.

J'étais un peu inquiète au début,que cela ne me plaise pas,l'auteur ne semblait pas très à l'aise dans la description de son ancêtre,hésitant entre excuse et mise en avant des horreurs.Par exemple,la photo qu'il a cité était vraiment trash.

A l'inverse,le mec a une finesse d'analyse que je n'avais jamais vu avant,et j'adore,j'adore,quand je lis un livre,m'arrêter sur une citation reflétant mes propres sentiments et mes propres impressions.Je ne connais pas la Russie,je n'y suis même jamais allée,mais tout correspondait à l'idée que je m'en faisais.

L'auteur a également un don certain pour la formulation:

-Si c'était un personnage de mon roman,moi aussi je l'aurais tuée.

Donc oui,monsieur j'ai lu ce livre par plaisir...
Commenter  J’apprécie          70
L'ombre du sabre

Owen Matthews est un écrivain né à Londres, dont le père est anglais et la mère, russe. Ce qui explique que la Russie puisse le hanter et l’habiter au point d’occuper une place prépondérante dans son œuvre. Dans Les enfants de Staline (que je n’ai pas lu), il dépeignait à travers l’histoire de sa propre famille la période soviétique de ce pays ; dans Moscou-Babylone, il brossait avec brio le tableau de l’ère Eltsine, au moment où, après la Glasnost, une nouvelle caste s’emparait fiévreusement du pouvoir dans un écoeurant étalage de richesse. Avec ce nouveau roman, Owen Matthews nous plonge dans la Russie du XXIe siècle, alors que le conflit avec la Tchétchénie fait rage et que d’anciennes républiques cherchent à arracher armes à la main l’indépendance que leur refuse l’implacable Poutine.



Le roman s’ouvre sur une scène très brève, qui voit son héros Alexei, reporter de guerre, assister dans un paysage apocalyptique à la mort brutale d’un couple, avant d’être lui-même violenté par des soldats. Nous sommes en Ukraine en septembre 2014. Qui sont l’homme et la femme qui viennent de perdre la vie ? Quel est le rôle d’Alexei ? Existe-t-il un lien entre ces personnages ? Pour le savoir, il nous faut revenir quatorze ans en arrière, en mars 2000. Alexei est alors un tout jeune homme qui s’apprête à embrasser la carrière de journaliste. Il est envoyé en Tchétchénie, où Youri, photographe expérimenté, lui apprend les ficelles du métier. Alexei est alors encore bien tendre. Il va connaître la peur, le sentiment d’impuissance... et l’amour. Mais tomber amoureux d’une femme issue des rangs des rebelles lorsqu’on se trouve du côté de l’armée russe, c’est s’aventurer sur un terrain plus que dangereux... Aussi, lorsque Zeliha est capturée par les soldats russes, Alexei ne peut lui porter secours sans risquer d’y perdre la vie. De la terreur qui le paralyse alors naît un sentiment de culpabilité dont il ne parviendra jamais à se déprendre, tandis que les halètements qu’il perçoit venant de l’homme qui viole la jeune femme ne cesseront de le poursuivre...



Retour au printemps 2014. Lorsque Zeliha et Alexei se croisent par hasard à Istanbul, ils se reconnaissent immédiatement. Zeliha est parvenue à survivre, mais elle en a payé le prix fort. Aujourd’hui elle a besoin d’aide et Alexei ne peut la lui refuser. Il doit alors retrouver les protagonistes du front tchétchène et revenir sur les traces du douloureux passé...



Si les fils de l’intrigue que noue Mathews apparaissent tout d’abord assez flous, il faut néanmoins accepter de le suivre et se laisser immerger dans le chaos de la guerre. Chaque élément finit en effet par trouver sa place et, lorsqu’on referme le livre, on est tenté de relire les premières pages qui apparaissent alors dans toute leur netteté. Entretemps, Owen Matthews nous aura à nouveau offert une peinture de cet incroyable pays qu’est la Russie, un portrait sans concession qui, malgré sa violence, laisse transparaître aussi ce qui fait la grandeur de ce peuple et de sa culture.


Lien : http://delphine-olympe.blogs..
Commenter  J’apprécie          60
Les enfants de Staline

Avec « Les enfants de Staline », Owen MATTHEWS tente d’écrire à la fois l’histoire de sa famille russe et celle de la Russie de Staline avec sa collectivisation forcée, ses goulags et sa bureaucratie, et la Russie d’aujourd’hui avec sa capitale à la vie débridée.



Dès le prologue de ces presque 400 pages, l’auteur introduit son lecteur de plain-pied dans l’histoire sombre des années Staline avec la lecture du dossier d’accusation de son grand-père Boris Lvovitch Bibikov , fusillé par la police secrète de Staline en 1937.



Dans le grenier de ses parents Owen Matthews prend connaissance des centaines de lettres échangées entre son père, Mervyn Matthews, jeune professeur d’université et sa mère, Ludmilla Bibikova, jeune étudiante moscovite. Grâce à cet abondant courrier, l’auteur raconte avec une précision d’entomologiste la rencontre à Moscou entre son père anglais et sa mère russe et l’amour insensé qui en découle. Ils durent attendre six longues années avant d’être à nouveau réunis. Leur odyssée nous est contée comme un roman avec, en toile de fond, l’histoire terrible de la Russie au début du XXème siècle : les purges et les condamnations à mort, les projets de grandeur d’un dictateur et la famine de 1930, responsables de milliers de morts, les goulags. L’auteur fait ressurgir aussi la vie quotidienne des gens de sa famille, de leurs amis et de la vie simple dans les datchas durant l’été.



Owen Matthews, russophile, a parcouru en sens inverse le chemin suivi par ses parents et, avant eux, ses grands-parents. Il a retrouvé sa tante, ses cousines et leurs amis. Il a connu les folles nuits de Moscou et a même été approché par le KGB qui tentait de le recruter.

Le passé patiemment reconstitué se mêle tout naturellement à ses errances d’aujourd’hui en quête de son histoire.



Ce livre est à la fois une grande fresque historique, l’histoire de trois générations et le reportage enquête de terrain que nous livre O. Matthews. C’est écrit avec un véritable talent de romancier, un romancier qui sait nous émouvoir sans mièvrerie et nous surprendre sans cesse, un conteur qui sait faire ressurgir sans rancœur ni regrets un passé troublé. Et c’est ce qui donne tant d’humaine épaisseur à ce document et le rend aussi passionnant.



Commenter  J’apprécie          50
Nicolaï Rezanov : Le rêve d'une Amérique russe

C'est dans le cadre de l'opération Masse Critique que j'ai reçu Nicolaï Rezanov : le rêve d'une Amérique russe. Je tiens donc à remercier chaleureusement Babelio ainsi que les éditions Noir sur Blanc. Pour ceux qui ne connaissent pas cette maison d'édition, Noir sur Blanc est synonyme de qualité : Mariusz Wilk, John Vaillant, Samouraï William de Gilles Milton, Sur les traces du prêtre Jean de Nicholas Jubber et bien d'autres pépites composent leur catalogue.



Beaucoup de gens l'ignorent mais l'Alaska avant de faire partie intégrante des Etats-Unis a appartenu à la Russie. Ce n'est qu'en 1867 que le tsar Alexandre II vend cet immense territoire aux jeunes Etats-Unis d'Amérique contre la somme de sept millions deux cent mille dollars. Un homme symbolise ce rêve fou d'Amérique russe : Nikolaï Rezanov. Owen Matthews s'attache donc à nous restituer, de manière exhaustive et fidèle, ce pan de l'histoire russe (des balbutiements à la cession du territoire) à travers le portrait d'un homme.



On suit le destin de Rezanov, ancien officier et ancien juge, qui devient un homme de cour habile et précieux et se retrouve à Saint-Pétersbourg à travailler pour le puissant prince Zoubov, amant influent de l'impératrice. Très vite, le jeune Rezanov se trouve dans le sillage de Chelikhov, le plus riche des marchands de fourrures sibériens, qui souhaite installer des colonies russes en Amérique afin de développer son commerce. C'est comme cela que germe dans son esprit une idée qui ne le quittera plus : "dans sa vision, la société serait rebaptisée Compagnie Russe d'Amérique et elle aurait pour mission d'amener toute l'Amérique pacifique, de l'Alaska à la Californie, sous la couronne russe", s'inspirant de la Compagnie Britannique des Indes orientales. Mais son projet est colossal et il doit faire preuve d'ingéniosité pour convaincre trois monarques successifs de l'utilité de son entreprise. Les contre-temps sont nombreux comme cette mission diplomatique au Japon, qui se solde par un échec ou encore son union avec la belle Conchita Arguello (qui va de pair avec ses rêves de s'emparer de la Californie aux mains des Espagnols), qui ne verra jamais le jour car Rezanov meurt avant.

Cet homme excentrique, fin diplomate, détesté et jalousé, à la recherche de son passé glorieux s'est également révélé patriote, romantique mais surtout un grand visionnaire. L'histoire lui a donné raison "tant sur la promesse fantastique que renfermaient les terres de Californie et du Nord-Ouest pacifique que sur l'incapacité de son pays à se montrer à la hauteur du défi que représentaient le Nouveau Monde".



Ce livre est passionnant, on y apprend l'anecdote incroyable que la Juno de Rezanov se trouvait à moins de dix kilomètres de l'expédition de Lewis et Clark (p.321) ou encore l'origine de l'île d'Alcatraz (p.332 pour les curieux).

Un vrai coup de coeur !
Commenter  J’apprécie          52
Moscou Babylone



Le titre de ce roman est sans équivoque. L’auteur nous convie à un voyage dans la capitale russe, à un moment particulier de son développement : nous sommes dans les années 90, après la Glasnost, alors que Gorbatchev a cédé la place à Eltsine et qu’une nouvelle caste est en train de s’emparer du pouvoir. A l’austérité de l’ère communiste a succédé une ère que l’on qualifierait aujourd’hui de «bling-bling» où les signes extérieurs de richesse font l’objet d’une surenchère effrénée.



C’est dans ce cadre que vient s’introduire Roman Lambert, jeune citoyen britannique tout juste diplômé d’Oxford, russe par sa mère, qui, las de sa vie londonienne sans éclat, s’envole pour Moscou, à la recherche d’une vie qu’il imagine plus flamboyante.



Au début du roman, les images se superposent entre une Russie éternelle, celle du narrateur, qui a lu Tolstoï et Dostoïevski, et le pays qu’il découvre, dans lequel des hommes ayant rapidement fait fortune se livrent à des soirées orgiaques et ne semblent connaître ni limite ni morale. Moscou est alors une sorte d’eldorado où se mêlent des hommes de tous horizons, de toutes nationalités.



Roman raconte son irrésistible ascension. Plus ou moins fasciné par les bad boys qu’il côtoie, il se rêve comme eux, tout en ayant conscience qu’il lui est moralement impossible d’y parvenir. De par son origine étrangère, il vit un décalage entre ce qu’il est, ce qu’il s’était imaginé et ce qu’il rencontre.

Et c’est là la force de ce roman. Comme d’autres avant lui, - et c’est aussi le cas notamment de Patrick McGuinness dans Les cent derniers jours - Owen Matthews use de ce procédé ultra-classique, mais ô combien efficace, qui consiste à sortir un personnage de son milieu pour le propulser dans un autre, extrêmement différent. Ainsi peuvent être mis en lumière certains caractères d’un pays et d’un peuple, émanant d’une tradition, d’une culture, de contraintes géographiques ou climatiques, dans un tableau mêlant à la fois humour et tendresse.



Ce qui est particulièrement intéressant ici c’est que le dialogue entre deux cultures se double de celui entre un pays rêvé, la Russie de l’époque tsariste, et la Russie post-communiste. Pris en étau, Roman a du mal à trouver sa place. Il perd ses propres repères et, dans une réminiscence sans doute des héros dostoievskiens, en vient à accomplir un meurtre qui le dépasse, dont il ne serait que l’instrument d’une justice qu’il ne contrôle pas.



Avec talent, Owen Matthews nous offre le portrait d’une ville qu’à n’en pas douter il aime profondément, en dépit de ses travers et de ses excès. Dans une sorte de postface, il prend soin toutefois de nous rappeler qu’il s’agit d’un roman, et donc d’une vision personnelle qui ne saurait prétendre à l’universalité.

En tout cas, un roman réussi !


Lien : http://delphine-olympe.blogs..
Commenter  J’apprécie          51
Les enfants de Staline

L'auteur, Owen Matthews, directeur de rédaction de Newsweek à Moscou, enquête sur le passé des siens: son père, diplomate, a vécu longtemps à Moscou avant de rencontrer sa femme russe. C'est un tableau de la Russie sur plusieurs époques qui se déploie devant nous..Passionnant et émouvant...éditions Belfond
Commenter  J’apprécie          50




Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Owen Matthews (228)Voir plus

Quiz Voir plus

Au Moulin Rouge

Le Moulin-Rouge, fondé en 1889, est situé sur le boulevard de Clichy dans le 18e arrondissement, quartier:

Montparnasse
Pigalle
Les Halles

10 questions
20 lecteurs ont répondu
Thèmes : Paris (France) , cabaret , moulin rouge , nuits blanches , danse , culture générale , littérature , peinture , cinema , adapté au cinémaCréer un quiz sur cet auteur

{* *}