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Critiques de Patrick Rotman (78)
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La Guerre sans nom : Les appelés d'Algérie (195..

Ce livre est le complément du film documentaire signé Patrick Rotman et Bertrand Tavernier. Le film datant de 1992 offrait le témoignage d’anciens soldats français, des appelés, engagés dans la guerre d’Algérie. Une guerre qui ne portait alors pas ce nom puisqu’il s’agissait avant tout d’une opération de maintien de l’ordre, également appelée « événements d’Algérie »,… du moins officiellement.

Certains témoignages n’apparaissent pas dans le film (qui ne dure que 4 heures !), parfois pour des raisons techniques, parfois pour une certaine pudeur. Toujours est-il que sont interrogés quelques dizaines de cinquantenaires qui ont pour point commun d’avoir été envoyés durant leurs jeunes années en Algérie. Parfois contre leur gré. Souvent avec une méconnaissance de la situation et des enjeux sur place. Des jeunes qui se retrouvent armés mais peu préparés face à un ennemi inconnu.

Construits à la manière de Marcel Ophuls (le film "Le chagrin et la pitié"), le livre et le film nous donnent à voir des témoignages bruts, respectant les silences et prenant le temps avec chaque intervenant, avec le minimum d’interventions du journaliste, et surtout sans le moindre jugement. Ce qui pose parfois certaines limites : si tous ont été témoins ou ont entendu parler de la torture, aucun n’avouera y avoir participé.

Après n’oublions pas qu’il s’agissait de jeunes adultes, plongés dans un conflit qui les dépassait, une situation qu’ils n’avaient pas souhaitée, sans bien sûr le recul que l’on peut avoir aujourd’hui. Ainsi un des témoins (Séraphin Berthier) nous dit : « C’est facile de décanter dans un fauteuil ; c’est facile d’analyser (cinq) ans après. Mais quand tu es pris dans le coup… »

Cet ensemble de témoignages est en tout cas extrêmement émouvant, même si l’on ne partage pas les convictions de certains intervenants, loin s’en faut, et nous montre à quel point cette guerre a marqué à vif tout une génération. Une génération qui pourtant a toujours été oubliée, déconsidérée (ainsi les anciens combattants d’Algérie n’ont-ils pas eu les mêmes droits que les autres anciens combattants !). Une guerre qui laisse au moment du film et du livre et encore aujourd’hui des séquelles au sein de notre société, séquelles dû notamment au silence et à la honte qui ont suivi ce conflit.

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Mitterrand et ses ombres

Cher Vous,

Que voilà une belle bande dessinée fortement intéressante !

Un véritable polar politique sur trois affaires qui ont mis Mitterrand dans la tourmente avant qu’il ne soit élu au poste suprême.

Mitterrand est âgé. Nous sommes en 1994. Il se confie à une journaliste sur son trouble passé, lui demandant de garder le secret sur ses déclarations, ne pouvant faire les révélations qu’un fois qu’un délai de vingt-cinq ans après son décès sera écoulé. Sans demie mesure, Mitterrand raconte avec froideur ses années cinquante.

La manigance des élites, les jeux de pouvoir, la trahison… Un destin politique, celui d’un homme.

Le tout servi par un trait réaliste, un noir et blanc finement travaillé qui vont très bien avec le récit.

Un BD que je recommande à tous les amateurs d’Histoire et de politique.



Stanislas Petrosky




Lien : http://cecibondelire.canalbl..
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Ivo & Jorge

On a tous en tête cette image de Montand dans le film L’Aveu, le visage marqué, des lunettes de soudeur sur les yeux et une corde autour du cou. A l’époque, en 1970, son interprétation avait été unanimement saluée. C’est qu’il ne s’était pas contenté de jouer le rôle d’Arthur London, cet ancien responsable communiste tchèque accusé d’espionnage au profit des Américains : il s’était littéralement senti habité par ce personnage qui le renvoyait à la manière dont il avait lui-même traversé les tragédies de son siècle et à la culpabilité qu’il en ressentait.



C’est ce que met admirablement en lumière le récit de Patrick Rotman dont les quelque trois cent soixante pages tendent vers cette catharsis qu’a constituée le film de Costa-Gavras pour Montand et pour Semprun, qui en avait pour sa part signé le scénario.



Ils n’étaient pas vraiment destinés à se rencontrer, ces deux-là. En tout cas pas à être unis par les liens d’une amitié sincère et profonde. Pourtant, entre le fils d’immigrés italiens ayant poussé dans les quartiers populaires de Marseille et l’intellectuel issu de la bourgeoisie madrilène ayant fui l’Espagne franquiste, l’entente est immédiate, qui se transformera en une durable complicité.



Patrick Rotman semble avoir pris un malin plaisir à alterner à un rythme extrêmement serré, presque étourdissant, les éléments biographiques de chacun des deux protagonistes. De leur enfance à leurs années de maturité, il juxtapose leurs expériences, jetant ainsi une lumière crue sur la dissemblance de leur personnalité et de leur parcours.



A la truculence de l’un répond la discrétion de l’autre, le premier ne songeant qu’à monter sur scène et à percer, ignorant dans une inconscience délibérée les risques pris par les résistants, quand le second engagé aux côtés des communistes est déporté à Buchenwald ; Montand entretient avec le parti communiste un rapport affectif lié à son histoire familiale alors qu’il s’agit pour Semprun d’une démarche d’ordre philosophique que son expérience des camps ne fera que raffermir.



Mais leur chemin finiront cependant par se rejoindre, dès 1952, lors des iniques procès de Prague qui jetteront notamment London en prison. Les deux hommes repoussent le doute qui commence alors à s’immiscer en eux, instillant au passage le poison du sentiment de culpabilité. Un sentiment qu’il ne leur sera plus permis d’ignorer en 1956, avec l’écrasement du peuple hongrois, puis celui du printemps de Prague, douze en plus tard.



Aussi, lorsque après le succès de Z qu’ils avaient déjà réalisé ensemble, leur ami commun Costa-Gavras leur propose d’adapter au cinéma le récit autobiographique de London, L’Aveu, ce projet prend-il une dimension particulière. L'occasion leur est enfin donnée de faire face à leurs doutes, à ce qu’ils considèrent comme leurs erreurs et à dépasser les contradictions dont ils sont la proie. Ce film apparaît alors comme l’aboutissement de deux destinées qui semblent fusionner dans un projet artistique à valeur existentielle.



Au-delà de la trajectoire de ces deux personnalités charismatiques, c’est bien l’histoire d’un siècle tourmenté qui nous est ainsi donnée à voir. Grâce à son judicieux dispositif narratif, Rotman apporte un éclairage à la fois sensible, intelligent et extrêmement pertinent sur les formes que prirent l’espoir et la ferveur suscités par le communisme et la nature du traumatisme qui en découla. Loin de toute posture morale ou dogmatique, en se tenant au plus près de ses personnages qu'il sait rendre extrêmement attachants, l'auteur nous permet de comprendre les mécanismes tant historiques que psychologiques qui purent conduire à l'un des plus grands aveuglements du siècle passé. Un très beau livre.
Lien : https://www.youtube.com/watc..
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Génération, tome 1 : Les années de rêve

C’est agréable à lire, ça fait plaisir de se remettre en mémoire divers événements. C’était l’époque où on pouvait croire que l’imagination arriverait au pouvoir et la soupe spontanément dans les assiettes et l’eau chaude spontanément dans les radiateurs.

C’est agréable à lire mais ça rassemble des souvenirs personnels, partiels, sans chercher si derrière tout cela il n’y avait pas des gens qui tiraient les ficelles.

Dommage.

(Dommage aussi que certains leaders de l’époque soient devenus des stars de télévision).
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Ivo & Jorge

Commençons par des remerciements : merci aux lecteurs de Babelio qui m’ont donné envie de lire ce livre. Cette double biographie est passionnante et présente tout un pan de l’histoire du XX éme siècle.



Ivo, c’est Yves Montand ; Jorge, Jorge Semprun. Deux personnalités que tout oppose dans leur jeunesse. Ivo Livi est le fils d’un immigré italien communiste, élevé dans les quartiers populaires de Marseille ; pas intéressé par l’école, mais débrouillard et enchaînant les petits boulots – dont coiffeur – jusqu’à tenter de percer juste avant guerre dans le music-hall. Jorge de Semprun sort lui d’une famille bourgeoise, impliquée côté maternel dans la vie politique espagnole depuis deux générations, vivant à deux pas du Prado à Madrid, élevé par des gouvernantes. Rotman choisit d’alterner tout le long de l’ouvrage la vie de l’un et celle de l’autre aux mêmes moments. Ces scènes mises en parallèle font penser au générique de la série télé des années 70 the Persuaders (Amicalement vôtre). Des points de départs opposés et des caractères affirmés, d’un côté un volubile, jouant de son corps, mais intérieurement timide, de l’autre un gars plus réservé, marqué tôt par l’histoire de son pays.



Montand va connaître ses premiers succès parisiens pendant la guerre, rencontrer et aimer Piaf, rester toujours sensible à l’idéologie communiste, colportée par son père et son frère aîné, mais sans jamais vraiment s’engager.



Semprun, lui, va connaître l’exil, la déchéance sociale, l’entrée dans la résistance en France, l’arrestation par la Gestapo, le camp de Buchenwald, l’aide des camarades communiste internés. Il sort de la guerre marqué à vie et se lance pendant dix ans dans la vie clandestine pour créer et faire vivre des cellules du parti communiste espagnol sur le sol espagnol durant les années Franco.



Le parcours de Montand, sa volonté de réussir, son goût du travail, l’envie de bien faire, s’expliquent par ses origines. Celui de Semprun est marqué par ce passage dans les bureaux de l'Arbeitsstatistik du camp de Buchenwald. Les communistes avaient pris en main l’administration informelle du camp, aidaient leurs sympathisants. Il y a côtoyé les futurs dirigeants des partis communistes des Pays de l’Est, comme son voisin de bureau Josef Frank, futur membre du comité central du PC tchèque, avant d’être victime d’une parodie de procès sous le stalinisme.



Ces procès de Prague vont commencer à faire douter Semprun… et Montand. Petit à petit, ils s’écartent de leurs idées, envisagent une réforme de l’intérieur du système, avant de constater en Hongrie en 1956, puis en république Tchèque en 1968, l’impossibilité de voir le bloc soviétique changer.



Entretemps, Montand aura connu l’Amérique qui le faisait rêver enfant, Semprun se sera découvert écrivain.



Patrick Rotman explique très bien ces évolutions parallèles qui s’agrègent au final autour d’un film : L’Aveu.



Le style est fluide, les anecdotes nombreuses ; ce récit est passionnant de bout en bout. Avec une mention spéciale sur le passage de Semprun à Buchenwald. Ces quelques pages sur le rôle qu’y ont tenu les « politique » et la solidarité qui les a animés sont impressionnantes.
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Mitterrand et ses ombres

Un gros travail, c'est indéniable, tout en noir et blanc avec toutefois des visages pas très ressemblants. Les BD politiques se multiplient et celle ci propose de lever le voile sur des actions troubles de Mitterand, ou plutôt trois moments sombres de son histoire (et dieu sait s'il y en a eu beaucoup d'autres). On découvre ici l'homme à femmes, toujours en quête de pouvoir, machiavélique te fin connaisseur du monde politique français. Sa force, savoir être nommé à des postes clefs au bon moment. Ce petit bout de vi ces avoués confirme mon image de ce personnage dénué de tout principe, seul le pouvoir compte...

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Ivo & Jorge

Je n'ai pas trouvé tout-à-fait ce que j'attendais dans ce livre, et pourtant je l'ai beaucoup aimé et il m'a profondément touchée.

Comme son titre l'indique, je m'attendais à ce qu'il soit centré sur l'amitié entre Yves Montand et Jorge Semprun, alors qu'en fait il évoque plutôt leurs évolutions parallèles et on ne les croise pas si souvent ensemble au fil du livre. Sur ce point, j'ai été un peu déçue.

Mais c'est le seul bémol que je mettrais à ce livre, car pour le reste c'est une réussite. L'évocation du parcours de chacun de ces deux hommes est passionnante, et on sent dans le style narratif tout le talent de documentariste de Patrick Rotman. Il enchaine les séquences fortes et pleines d'émotion, ménage le suspense en passant d'un personnage à l'autre, on entend presque la voix off!

Il décrit également très intelligemment comment ces deux hommes, venant de milieux sociaux différents, ont tous les deux cru au communisme, et en sont tous les deux revenus. Ce sont ces passages qui m'ont le plus touchée, notamment parce qu'ils faisaient écho à mon histoire familiale.

J'ai donc beaucoup aimé ce livre, que je referme cependant avec une interrogation (que je soumets aux autres lecteurs) : pourquoi l'auteur a-t-il fait figurer le mot Roman sur la couverture?

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Ivo & Jorge

« Le communisme n’était pas la jeunesse du monde » mais c’était la nôtre. Quelques mots pour finir un très beau récit. Quelques mots empreints de tendresse et de nostalgie. Deux hommes, Jorge Semprun et Yves Montand et presqu’un troisième Costa-Gavras. Ivo et Jorge dont la vie est l’épopée d’un siècle, d’erreurs, de rendez-vous manqués, d’idéaux blessés et d’intégrité foncière. De si beaux destins, du courage, du professionnalisme et en commun un éternel jusqu’auboutisme. Montand qui manque le rendez-vous de la résistance obsédé par son succès naissant dans le music-hall et sa volonté de s’extirper de la pauvreté et du dénuement familial, une famille à laquelle il restera indéfectiblement fidèle. Montand qui croit lors que rejoindre le maquis, c’est aller en Corse et qui échappe par miracle à une arrestation planqué dans un réduit. Semprun, sauvé dans le camp de concentration par celui qui, le trompant, refuse de l’inscrire dans les registres comme un étudiant en philosophie, ce qui le destinait à une mort certaine. Semprun qui retrouve, en visitant Buchenwald, des années plus tard le livre d’Hegel qu’il y lisait à l’époque e dans lequel il trouvait la force d’affronter l’indicible. Montand qui découvre l’horreur des camps au cinéma, en voyant les actualités avec Edith Piaf. Montand et Signoret qui font la leçon à Khroutchev lors d’un diner offert en leur honneur au Kremlin. Montand et Signoret avec Kennedy. Semprun dans sa vie clandestine et ses noms d’emprunt : Frederico Sanchez vous salue bien. Compagnons de route, membres du Parti communaliste, ce fut pendant longtemps pour eux préférer avoir tort dans le parti que raison en dehors. Et puis les yeux se dessillent. Il faut se libérer de la gangue, d’une trop longue fidélité, se raconter ce que fait Semprun, avec Montand dans son rôle, dans le film de Resnais « La guerre est finie » ou expier les erreurs d’aiguillage grâce à Costa-Gavras : Z d’abord, mais surtout « L’aveu » dans lequel Montand, acteur, s’inflige les souffrances d’Artur London pour coller à la réalité mais surtout se pardonner à lui-même de s’être trompé. S’imposer un jeûne mais voler en douce un sandwich destiné à l’équipe technique et aussitôt s’en culpabiliser. Et « L’Aveu » projeté à Moscou à la fin de l’ère communiste, et « L’Aveu » projeté à Prague au moment de la Révolution de velours, « L’aveu » déjà dépassé, déjà daté avec cette inscription sur le mur « Lénine, ils sont devenus fous ». Et puis leur amitié, leur joie, la trouille de Montand, son professionnalisme absolu, ses répétitions à la Colombe d’Or, ce récital qu’il fait intégralement dans une chambre pour le seul Semprun. Ivo et Jorge n’étaient pas la jeunesse du monde, c’était la nôtre et elle me manque. Furieusement.
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Ivo & Jorge

Un livre plein de nostalgie sur l'amitié et sur le dévouement militant de deux artistes.



Yves Montand et Jorge Semprun, tous deux issus de milieux sociaux opposés se rencontrèrent et ce fut l'amitié pour la vie.

Le comédien et chanteur, issu d'un milieu modeste, et l'intellectuel, fils d'une famille bourgeoise, furent des frères de lutte.



Le grand moment de cette amitié : leur rencontre avec le cinéaste Costa Gavras qui eut pour résultat des films cultes : Z, L'Aveu...



Un beau, un très beau livre.

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Goulag : Une histoire soviétique

Un ouvrage collectif faisant la part belle aux documents d'époque et la traduction de récits de Gueorgui Demidov offrent une vision saisissante de l'enfer soviétique.
Lien : http://www.nonfiction.fr/art..
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Mai 68 raconté à ceux qui ne l'ont pas vécu

Petit livre extrêmement clair sur Mai 68, la genèse, le déroulement, le contexte et l'héritage. Très explicite et abordable. J'ai appris beaucoupde choses alors que je croyais déjà tout savoir! Belle surprise. J'ai lu ensuite "Le général a disparu" de Georges-Marc Benamou, ce qui a complété cette lecture très agréablement.
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La Guerre sans nom : Les appelés d'Algérie (195..

Ce livre n'est pas un roman. Il rassemble les entretiens que Patrick Rotman et Bernard Tavernier ont recueillis pour la réalisation du film éponyme sorti en 1992. L'évocation de leur guerre d'Algérie, qui officiellement n'en n'était pas une, remue chez les témoins une émotion palpable, leur jeunesse a été ébranlée, martyrisée et tous sont revenus meurtris. Beaucoup diront qu'il ne comprenaient pas ce qu'il faisaient là et comparaient leur présence dans ce pays à celle des Allemands en 40-45 en France.

Une lecture émouvante qui éclaire sur le quotidien de cette jeunesse sacrifiée.
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Mitterrand et ses ombres

Années peu reluisantes dans la carrière du Président français, la période 1954-1959 est racontée ici en forme de secrets révélés a posteriori. Un album à charge, tout en dialogues.
Lien : https://www.actuabd.com/Mitt..
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Ivo & Jorge

Réunir dans une même biographie croisée deux de mes héros, Jorge Semprun et Ivo Livi dit Yves Montand, et sous la plume de Patrick Rotman, il n'en fallait pas beaucoup plus pour m'allécher! Merci Martine toi qui par ta critique enthousiaste m'as littéralement prescrit cette gourmandise !



Le livre a tenu ses promesses et je l'ai dévoré presque trop vite, entre deux lectures plus ardues, comme on croque un éclair au chocolat entre deux plats de quinoa-boulgour bio!



L'aristo et le prolo, le résistant et le chanteur, l'homme de plume et l'homme de scène, l'intellectuel et l'autodidacte, tout opposait Jorge Semprun et Ivo Livi qu'un "coup de foudre amical" finit par réunir en 1963.



Tous deux ont eu un compagnonnage plus ou moins étroit avec le parti communiste. L'un, Ivo, par culture familiale et anti fascisme viscéral (mais sans aller jusqu'à s'encarter), l'autre, Jorge, par choix politique et opposition clandestine au franquisme triomphant, après la guerre civile espagnole.



Indéfectiblement liés ( et formant bientôt un trio inséparable sous la houlette de Costa Gavras) tous deux ont incarné la fascination, la fidélité aveugle puis descillée à l'égard du communisme, et enfin la critique et la dénonciation de ses crimes et de ses abus...comme bien d'autres hommes et femmes de gauche à l'époque de la guerre froide.



Patrick Rotman fait revivre les années de l'avant guerre aux années quatre vingt à travers le prisme de ces deux vies, de ces deux consciences exemplaires.



L'intellectuel comme le baladin ont eu à se poser le problème de l'engagement face au nazisme, puis face au communisme.



Leurs erreurs, leurs ratages, leurs illusions et leurs déconvenues sont celles de toute une génération.



C'est aussi pour cela qu'on admire comment, sans se renier complètement ni hurler avec les loups capitalistes, ces deux hommes si différents ont su apparier leurs qualités complémentaires pour dénoncer avec une vigueur implacable - bien que tardive- l' ignoble mascarade des procès de Moscou en signant, pour Semprun, le scénario du film de Costa Gavras, L'aveu, dont Montand interpréta le rôle principal, celui du "traître" Arthur London.



Cet Aveu extorqué sous la torture à Arthur London c'est aussi le leur:celui d'avoir cru à une idéologie aussi meurtrière que celle du nazisme qu'elle combattait, et d'y avoir cru au point de fermer les yeux sur ses mensonges et ses errements.







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Ivo & Jorge

Patrick Rotman, très talentueux réalisateur de documentaires, mais aussi écrivain à ses heures, nous propose, dans son dernier livre, un sensible et passionnant portrait croisé de Jorge Semprun et Yves Montand, deux hommes qu'il aura eu l'occasion de cotoyer pendant sa longue carrière.



Il sonde les origines et les fondements d'une relation fidèle et loyale entre deux hommes que tout oppose au départ ( leurs originales sociales, leur témpéraments, leur façon de voir la vie) , mais une amitié que leur commun engagement aux côtés des communistes et les films qu'ils firent avec Costa Gavras -Z, L’Aveu-, aida à se matérialiser.



Deux hommes qui se sont trouvés et reconnus, et qui ont vaille que vaille chercher à rester fidèles à leurs convictions de jeunesse malgré les aléas de la vie .Ivo et Jorge donne l'opportunité à Patrick Rotman de brosser des caractères humains complexes et d'une grande profondeur. Il parvient ainsi à démontrer à quel point, l'indéfectible amitié qui lie Montand à Semprun est profondément ancrée dans toute l'histoire politique et culturelle du XXe siècle.



A travers les portraits d'Yves Montand et de Jorge Semprún, l'auteur évoque avec pertinence et une certaine mélancolie ces intellectuels qui ont cru au communisme comme source d'un monde meilleur et qui ont du mettre un voile sur leurs espoirs , quitte à rejeter totalement cette doctrine par la suite .



Patrick Rotman nous donne ainsi à voir et à comprendre une part de l'histoire du siècle passé à travers cette belle et forte histoire d'amitié à la vie à la mort .
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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Ivo & Jorge

« Ivo et Jorge » de Patrick Rotman, Jorge Semprun et Yves Montand, compagnons de route et de doute.
Lien : https://www.sudouest.fr/cult..
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Ivo & Jorge

Je suis amoureuse de Montand depuis toujours, cela doit me venir de ma mère qui l’est aussi... L’amour filial, donc, me destina à lire ce roman.

À partir du moment où Yves et Simone sont mentionnés, en principe je vais apprécier.

Tel fut le cas pour cette lecture grâce à laquelle j’ai appris et mieux compris.

J’ai découvert également Jorge Semprún, son histoire, ses envies, une autre vision de la vie.



Un livre bien documenté et bien écrit, que je recommande aux personnes curieuses et animées par la politique et l’Histoire!

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Mitterrand et ses ombres

On redécouvre des affaires qui ont suivi celles de la guerre, de Vichy, et précéderont celles de ses septennats. Insatiable, il ira jusqu’au bout d’un destin d’exception mais en y mettant le prix.
Lien : https://www.ligneclaire.info..
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Ivo & Jorge

« le communisme n'était pas la jeunesse du monde mais il était notre jeunesse ». Phrase prononcée par Jorge Semprun à l'intention d'Ivo Livi, à la fin du livre, et qui illustre parfaitement l'engagement de Jorge et celui de son ami, Ivo.



Il est évident que ce livre m'a touchée puisqu'il me remémore ma jeunesse. J'ai lu Semprun très jeune comme j'ai aimé Montand chantant « Les feuilles mortes » ou « A bicyclette ». Montand, c'est l'époque du beau cinéma, des grands acteurs comme dans César et Rosalie ou François, Paul et les autres. IL est difficile d'oublier « Z » et « l'Aveu » avec Gavras derrière la caméra ou « le Salaire de la peur » de Clouzot.



Gavras derrière la caméra, Semprun au scénario et Montand l'acteur. Les images défilent devant mes yeux : c'est une authentique félicité, un peu comme le plaisir de la cigarette interdite accompagnant un bon café (ancienne fumeuse) même si ce récit est consacré aussi aux évènements terribles qui ont jalonné l'Histoire de ce XXème siècle et de ces atrocités.



Passionnante, émouvante, vibrante lecture ! Patrick Rotman a un style extrêmement visuel, dynamique, je dirais empathique ! Ami de Semprun et de Montand, il leur donne vie sous nos yeux. C'est lui le narrateur. de questions courtes en réponse sans fard, on remonte le cours du temps jusqu'à la jeunesse de Jorge, issu de la bourgeoisie et aristocratie madrilène, et celle d'Ivo, issu du milieu ouvrier marseillais jusqu'à leur rencontre, en 1960, où, malgré leurs différences sociales, ils vont se « reconnaître ». de ce qui se dégage de ces deux hommes, de ce ciment indicible, ils vont pouvoir, mutuellement, échanger, analyser, leurs illusions, disséquer leurs convictions et surtout devoir, sans se mentir, accepter avec lucidité leurs désillusions quant au vrai visage du communisme. Ce sera une amitié absolue, une véritable collaboration pour mieux dénoncer et régler les comptes avec leur engagement politique.



Le récit s'ouvre en juin 1990. Yves Montand, Simone Signoret, Jorge Semprun et Costa Gavras atterrissent à Moscou où ils viennent présenter l'Aveu qui dénonce les crimes du communisme. Dans cette Russie de Gorbatchev, les trois amis, l'émigré italien, l'émigré espagnol et l'émigré grec sont saisis d'une sensation de miracle : le tout Moscou vient voir l'Aveu.



De la situation présente, Jorge se raconte rétrospectivement : l'exil avec la chute de la République Espagnole, la Résistance, Buchenwald où il découvre la fraternité ; « Quand l'histoire galope, l'abject côtoie le sublime et la fraternité s'oppose au mal absolu », la clandestinité en Espagne afin de prendre des contacts et constituer des réseaux communistes, la foi chevillée au ventre.



Pendant ce temps, on assiste à la montée sur les planches du jeune Yves Montand, on le suit des quartiers insalubres de Marseille à son arrivée à Paris, puis on assiste à son ascension, toujours fidèle à son père Giovanni, ouvrier communiste, ayant fui le fascisme. Avec intelligence, l'auteur met en miroir, aux mêmes époques, les deux destinées, afin de permettre une vue individuelle du chemin de chacun, tout en conservant une vision globale.



Quelle époque et quel bouillonnement intellectuel après cette seconde guerre mondiale : c'est ce qui ressort de cette lecture. Mais aussi que d'aveuglements, qu'il est dur de faire tomber le bandeau quand les douleurs du désenchantement, du renoncement sont tenaces. On replonge dans Prague, dans Budapest. le récit n'est jamais assommant, il est riche d'enseignements sur l'être humain.



Montand est décédé en octobre 1991. Il devait être sur scène en 1992 à Bercy, je n'ai donc jamais pu voir ce cow-boy dans les plaines du Far-West. Il aurait eu cent ans cette année !

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Ivo & Jorge

Dans un portrait croisé de Jorge Semprun et Yves Montand, l’auteur revient sur l’amitié qui lie les deux hommes malgré de nombreuses dissemblances.
Lien : https://www.lefigaro.fr/livr..
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