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3.8/5 (sur 66 notes)

Nationalité : France
Né(e) à : Paris , le 13/08/1938
Biographie :

Philippe Lejeune est un universitaire français spécialiste de l'autobiographie.

Il est élève de l’École Normale Supérieure de 1959 à 1963. Il obtient l'agrégation de Lettres classiques en 1962. En 1963-1964, il est instructor à l'Université de Yale.

Il enseigne de 1972 à 2004 à l’Université Paris-Nord. En 1999, il devient membre de l'Institut Universitaire de France.

Philippe Lejeune est l'auteur de nombreux ouvrages portant essentiellement sur l'autobiographie et les journaux personnels. Il est co-fondateur de l'Association pour l'autobiographie, créée en 1992.

Il a eu l’initiative d’organiser en 1997 la première exposition consacrée au Journal intime.


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Philippe Lejeune Conférence à Varsovie.


Citations et extraits (17) Voir plus Ajouter une citation
L'homme n'est pas un système causal, il est une liberté; placé dans une certaine situation, il ne la subit pas, il lui invente une issue, à l'intérieur du champs du possible. Cette invention de l'avenir ne se situe pas dans le cadre du temps: c'est elle qui constitue le temps.
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Philippe Lejeune
" Cher cahier… "
Pourquoi tient-on un journal intime ? Pour y noter, ses amours, ses chagrins, ses résultats scolaires. Pour trouver un guide à sa vie.

" Cher cahier, j'ai enfin un peu de temps, j'ai décidé de te reprendre. Mais je me fixe une règle du jeu ; ce que je dirai doit être vrai. Je ne l'inventerai pas. Je l'écrirai avec franchise sans le déguiser ou lui donner un visage plus agréable. Voilà ! ".
C'est le début d'une série de huit carnets épais tenus par une jeune fille entre quatorze et dix-sept ans. Elle y raconte au jour le jour tout ce qui lui arrive, tout ce qui la bouleverse. Elle écrit pour elle pour faire le point, se confier, pouvoir regarder sa propre évolution. Maintenant elle a seize ans. " Mon passé me laisse songeuse et rêveuse en même temps. Mais n'aurais-je pas pu faire mieux, beaucoup mieux ? Mais le passé n'est pas raccommodable… ". Au début, elle montrait son journal à ses amis intimes. " " Maintenant que j'ai décidé de ne plus le faire lire, je peux y écrire tout ce que je pense sans craindre de vexer ou de contredire quelqu'un ". Les cahiers suivent le fil des jours, chroniques, récits, méditations…. Ils sont illustrés de photos, de dessins… Accompagnés de documents liés à la vie quotidienne, bouts de journaux, tickets d'autobus, réclames… Ses notes de classe, ses rêves d'amour. Elle aime, elle se croit laide. Ne se croit pas aimée. Puis découvre qu'elle l'est, et du coup le journal s'achève. " Je regretterai plus tard de n'avoir pas tout raconté tout de suite. Mais un journal, c'est fait pour raconter ses ennuis, ses cafards. Quand on est heureux, à quoi bon mettre tout cela sur le papier ? "
Il y a sans doute actuellement, en France des milliers de journaux comme celui-là, cachés au fond d'un tiroir, surtout des journaux d'adolescents, qui les aident à vivre, loin de toute idée littéraire. Mais aussi des journaux d'adultes. On écrit pour surmonter une crise. Pour aider sa mémoire. Pour guider sa vie. On tient un journal de ses vacances. De ses amours. Ou le journal de l'éducation de ses enfants. Etc. On écrit aussi parfois pour écrire, pour essayer ses idées, jouer avec les mots ou les émotions. Des petits bouts de poèmes. On note des phrases qui vous ont plu dans un livre. Telle lettre qu'on a reçue. On tresse son nid avec tous ces petits bouts de langage, et cela aide. Quand on en a moins besoin, on cesse presque sans s'en rendre compte. Parfois, solennellement, on détruit son journal, on l'immole par le feu. Plus souvent, vingt ans après, on ne sait plus où on l'a mis ou bien on le retrouve au fond d'un carton.
C'est cela sans doute, le vrai journal intime. Intime par son contenu, et surtout par sa fonction. C'est la plante naturelle, non greffée et bouturée de littérature, une vigne vierge proliférante, très différente de la variété cultivée, produite en serre, qu'est le journal d'écrivain, variété qu'on vend en petits pots tous les automnes et tous les printemps : les angoisses de X, les dragues de Y, l'âme de Z, le journal intime de Monsieur Tout- le- Monde, c'est vrai, n'est guère vendable. Pas lisible. Il a chance d'être allusif, répétitif, instructuré. Il n'est pas écrit pour séduire. Pas un effet à chaque phrase pour avoir l'ai malin ou profond. Mais est-ce sûr qu'il soit aussi peu lisible ? Sans doute demande-t-il à être accompagné avec plus de patience, d'amitié. L'objet, lui-même, par exemple ces huit carnets dont j'ai extrait quelques phrases, l'écriture qui change avec les années, ces images qui l'harmonisent, tout cela est émouvant. Et tien ne dit qu'on ne puisse pas écrire bien, loin de regard du lecteur, ce destinataire idéal auquel on s'adresse dans la solitude. D'ailleurs, pour décider que de tels journaux sont peu lisibles, il faudrait en avoir lu. Or, comment les lire ?
On en trouve guère sur le marché, puisque justement, ils n'ont pas été écrits pour être diffusés. Ce sont souvent des posthumes, édités à cause de la qualité même du texte, mais aussi des circonstances qui le rendent exemplaires : l'admirable " Journal d'Anne Franck ", qui n'aurait sans doute pas été publié si elle avait survécue, et qui a suscité tant de vocations de diaristes. Ou bien " L'herbe bleue ", journal d'une jeune droguée. Ou bien " des cornichons au chocolat " de Stéphanie mais là on s'éloigne déjà de l'intimité et de l'authenticité. L'adolescente envoie elle-même son texte à un éditeur, qui le lui fait récrire avec l'aide de Philippe Labro. On entre en littérature.

Philippe Lejeune, Magazine Littéraire n°252-253, Ecrits intimes, de Montaigne à Peter Handke, avril 1988
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On est toujours tenté de croire qu'on est le seul: le seul à se trouver seul, le seul à être bête, malhabile, malheureux et un peu trop mal à l'aise.
J'ai toujours demandé deux choses à la parole des vivants et aux livres: m'enchanter, et m'aider à déchanter. Enchantement et désenchantement, -Poésie et Vérité: c'est le titre que notre bob vieil oncle Goethe donnait à son autobiographie.
Je garde une reconnaissance sans fin à ceux qui m'ont aidé à découvrir qu'on n'est jamais seul: aux confessions de Saint-Augustin et de Michel Leiris, de Montaigne et de Stendhal, de Scott Fitzgerald et de Sartre. A tous ceux qui m'ont rappelé que dire -Moi je- n'est pas poli, mais parfois utile pour apprendre enfin à dire -Nous- (p. 165 / Moi je, Gallimard, 1969)
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L'autobiographie a d'abord été victime de la biographie. Les récits et journaux d'écrivains apparaissaient, avec leur correspondance, comme appartenant à la "vie", cette vie où l'on cherchait la clef ou le secret de l'oeuvre. Ce statut de document les faisait passer du côté du non-texte. On s'y intéressait au coup par coup, dans le cadre de l'étude d'un écrivain particulier, pour l'information livrée. Jamais on ne les envisageait en série, comme des textes construits, obéissant à des règles communes, comme un genre. C'est le contraire qui s'est passé en peinture. L'autoportrait peint a été vite identifié comme un genre. (p.19)
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La littérature n'est pas pour moi " l'ensemble des réussites verbales", un panthéon sacralisé de chefs-d'oeuvre, elle est une pratique merveilleuse, difficile certes, mais aussi imprévisible, qui aide les gens à vivre et à communiquer. (p. 27)
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On dit que le journal n'a pas de forme propre, qu'il est la proie de la facilité, "l'art de ceux qui ne sont pas artistes", comme disait Thibaudet de l'autobiographie. Je me fais fort de prouver le contraire.
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Nous parlons fatalement avec les mots des autres. Nous privilégions dans nos lectures (autobiographiques ou pas – poésie, chansons, romans aussi bien) ce qui nous aide, en vivant, à donner forme à notre vie. L’écriture est une double digestion, de nos lectures et de notre expérience, avec, comme première étape, la citation. Bien des journaux intimes ont commencé par un carnet de lectures. Comme des oiseaux, nous cueillons des brindilles pour faire notre nid. La citation est le contraire du plagiat : elle n’est pas vol mais emprunt, et hommage. Elle doit être courte, et indiquer le nom de l’auteur et la source (article 41 de la loi de 1957). Son emploi est, habituellement, limité : phrases mises en exergue du livre, ou du chapitre, par exemple. Pour le reste, l’assimilation de nos lectures ne laisse apparemment pas de trace. Pourtant elles sont là, en filigrane, partout.

Je repense à deux livres, l’un naïf, l’autre rusé, qui mettaient en scène le travail de la citation.

Henry Hirsch, né en 1907, a publié en 1981 à La Pensée universelle son autobiographie, La Vie derrière soi… Ce texte de 250 pages comporte 27 pages de citations, soit 10 %. Peut-être pensera-t-on que ce n’est pas énorme. Mais les citations, placées aux moments cruciaux, se substituent au récit de sa vie. Sa chasteté prolongée et son mariage tardif seront évoqués à travers des pages du livre de Léon Blum, Du mariage (1907) et de celui du docteur Carnot, Au service de l’amour (1939). Ses rapports difficiles avec un père autoritaire par trois pages de citations d’une pièce d’Henri Clerc, L’Autoritaire (1922). Sa douleur à la mort de sa femme, en 1965, trouvera son expression par sept pages de citations du livre de Marc Bernard, La Mort de la bien-aimée (1973), citations entrecoupées de brèves remarques signifiant toutes « moi aussi ». Henry Hirsch justifie ces emprunts de manière modeste et émouvante : « Ce que cet écrivain a ressenti depuis son veuvage en 1969, je le ressens depuis 1965, mais n’étant qu’un écrivain de rencontre, je ne sais pas traduire en paroles les souffrances endurées depuis lors. Je me permets – et je pense qu’il ne m’en voudra pas dans nos communes infortunes – de citer ici les passages de son livre que j’aurais pu écrire si j’avais son talent. »

Exactement à l’opposé, un écrivain appartenant à l’Oulipo, Marcel Bénabou a construit une sorte de récit parodique, "Pourquoi je n’ai écrit aucun de mes livres" (Hachette, 1986), où il s’ingénie à fondre de manière irrepérable une foule de phrases ou d’expressions qui, dans ses lectures, lui ont semblé consonner avec sa vie. Jeu de connivence et de taquinerie, certes, mais le propos est, au fond, allégorique : il s’agit de nous suggérer que notre autobiographie est déjà écrite, que les phrases en sont éparpillées dans la littérature universelle, et que notre travail consiste essentiellement à les repérer pour les rassembler sous notre signature…

Notre vie est singulière, elle n’est pas originale. Elle est tissée des mêmes éléments, elle obéit aux mêmes contraintes que les autres, et son récit est fatalement une variante d’un modèle commun. Il ne s’agit pas seulement du stock d’émotions et d’expériences dont tant de livres antérieurs nous proposent des modèles où nous puisons. Mais de sa structure d’ensemble, de son argumentation et jusqu’à son style. Évitons le plagiat, copie littérale et honteuse, et la singerie des autres. Pratiquons avec modération la citation. Et pour le reste, suivons tranquillement le conseil du vieux Sénèque (Lettres à Lucilius) : « Les aliments absorbés, tant qu’ils se conservent tels quels, tant qu’ils nagent à l’état solide dans l’estomac, sont une charge pour l’organisme. La transformation accomplie, c’est alors qu’ils deviennent de la force et du sang. Procédons de même pour la nourriture de l’esprit. Ne souffrons pas que rien de ce qui entre en nous demeure intact, de peur qu’il ne soit jamais assimilé. Digérons la matière : autrement elle passera dans notre mémoire, non dans notre intelligence… Voilà comment doit travailler notre esprit : qu’il cèle tout ce de quoi il a été secouru et ne produise que ce qu’il en a fait. »
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L'esprit est entièrement langagier, et les structures de la connaissances (à défaut des structures du monde) sont donc métaphoriques
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Souvent l'autobiographie inquiète...Et puis, ce n'est pas bien de parler de soi...On attaque tant l'autobiographie, il faut bien qu'elle se défende. qu'on s'associe pour elle. .. elle est partage. elle est recherche. (p. 7)
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Refus de tout travail d'écriture pour embellir ou faire vibrer le souvenir. Présence envahissante d'un narrateur hypercritique, qui traque l'erreur, l'inexactitude, l'affabulation
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