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Critiques de Pierre Bayard (303)
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Comment parler des lieux où l'on n'a pas été ?

Si vous pensez, en lisant ce lire, pouvoir ensuite rivaliser avec vos amis de retour d'un voyage au Mexique, c'est raté. Vous ne pourrez pas briller en échangeant vos points de vue sur Mexico, capitale où vous n'avez jamais mis les pieds, sauf si vous vous êtes énormément documenté avant et que vos interlocuteurs demeurent polis ou prêts à plonger dans vos délires.

Non, ici, on a affaire à un essai de type universitaire mais lisible car plein d'humour et pas trop bourré de termes savants. Il vous faudra uniquement appréhender le terme "atopique", qui n'est pas ici une allergie, mais le concept d'espace littéraire et artistique d'une oeuvre dont on étudier la perméabilité des frontières entre réalité et fiction. (Enfin, j'espère avoir bien compris...). Pour faire simple, l'auteur nous parle de tous ces écrivains, considérés comme grands voyageurs mais qui ne sont, pour la plupart, jamais sortis de chez eux.

Et, ils sont assez nombreux. Ainsi, Marco Polo, dont les récits de ses voyages en Chine ont fait rêver des générations, n'est jamais allé au delà de Constantinople, inventant ses récits pour plaire à sa fiancée. Pierre Bayard multiplie les exemples : Chateaubriand décrit des régions des Etats Unis qu'il n'a jamais foulées, Blaise Cendrars n'a jamais effectué le trajet fondateur de son oeuvre, c'est à dire son voyage en transsibérien de Moscou à Vladivostock. Margaret Mead, la célèbre anthropologue, n'a jamais observé les moeurs sexuelles des habitants des îles Samoa, se contentant de rapporter les récits débridés d'informatrices pas vraiment scientifiques de formation mais débordantes d'imagination.

En multipliant les exemples, l'auteur nous balade dans des contrées littéraires où se mêlent imaginaire, histoire et psychanalyse. C'est relativement facile à lire et on apprend, mine de rien, une foule de choses car l'auteur n'est pas avare de partage de connaissances, qualité suffisamment rare dans ce genre d'ouvrage pour être soulignée.

Pour conclure, je retiendrai le portrait de cet écrivain allemand, Karl May (1842-1912), grand classique dans son pays pour ses romans d'aventures dans le Far West où il n'avait jamais posé le moindre orteil. Son imagination lui a fait représenter une réalité de la conquête de l'Ouest américain et du massacre des indiens très éloignée des concepts colonialistes de l'époque ou des récits de ceux qui étaient sur place.

La fin sur le blog :

http://sansconnivence.blogspot.com/2012/02/comment-parler-des-lieux-ou-lon-na-pas.html
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L'affaire du chien des Baskerville

Après la lecture de cet essai, je me suis sentie plus qu'idiote. Comment en effet passer à côté de tout cela. L'avoir lu en VO n'excuse rien.

Cependant, la lecture en est réjouissante et stimulante, elle oblige à revoir sa manière de lire.

Bien que Pierre Bayard égratigne le mythe "Sherlock", il donne plus de profondeur et de richesse à l'oeuvre. Comment en effet un meurtre a-t-il pu se produire à l'insu de Conan Doyle. Etait-il à ce point en colère contre son personnage qu'il s'est laissé abuser par un autre des personnages ?

Une analyse, qui malgré la complexité des notions se lit sans difficulté majeure.

Un bel ouvrage sur la littérature et ses multiples implications dans la réalité. Du moins dans notre réalité.
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Comment parler des livres que l'on n'a pas ..

Quel délicieux snobisme, lorsqu'on est libraire ou bibliothécaire, de poser cet excellent essai bien en évidence sur une pile de livres ! On jubile, rien qu'à voir la mine ahurie des lecteurs...
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Comment parler des livres que l'on n'a pas ..

J'ai une relation conflictuelle avec les éditions de Minuit...

Le titre est intriguant et provocateur, il marque les esprits et on se demande comment un éditeur si prestigieux, quoique révolutionnaire, peut promouvoir la non-lecture ?

Je pensais m'amuser, ça m'a déprimée.

Ça m'attriste de pas me souvenir assez de mes lectures et de ne pas avoir une mémoire encyclopédique capable de me souvenir de TOUT et de TOUT connaitre (le passage sur Montaigne m'a fait beaucoup de peine).

Je pars du principe que pour pouvoir donner son avis sur une histoire, un livre, il faut avoir tout lu. Que l'œuvre, peu importe sa qualité, mérite qu'on la respecte suffisamment pour la considérer dans son entièreté (ou à défaut, assumer ne pas l'avoir lu ou préciser qu'on l'a lâché en cours de route).

Et, ce livre dit presque que ça ne sert à rien de lire, car dans tous les cas personne ne s'y attache réellement et puis à la fin, on s'en souvient plus.

Le livre partait bien avec sa table des abréviations, mais il y a beaucoup trop de citation et d'exemple tiré d'autres livres pour quelqu'un qui fait l'éloge de la non-lecture et nous montre clairement qu'un commentaire de surface avec des jolis mots suffit à donner l'impression de s'y connaitre.

Autrement, on peut dire que j'ai apprécié ou du moins trouvé intéressant les réflexions sur le contexte et la bibliothèque collective qui prime sur le texte en lui-même, aussi sur la subjectivité du livre-écran et la représentation personnel que l'on a de chacune des histoires. L'idée de désacraliser la culture (et la culture de la lecture) part d'une bonne intention, mais je la trouve mal orchestrée (je préfère Daniel Pennac et ses 10 droits du lecteur ~).

Je ne sais pas à quoi je m'attendais, après tout, je déteste l'hypocrisie. Moral de l'histoire : il faut avoir la confiance d'un homme blanc pour réussir dans la vie.
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La vérite sur ''Ils étaient dix'' (La vérité sur ''..

J’ai lu Dix petits nègres (Ils étaient dix, désormais) d’Agatha Christie il y a quelques années, et quand est sorti celui-ci je me suis dit que ce serait intéressant de voir ce qu’était cette « vérité » sur le roman ! Et ça l’est !

Pierre Bayard nous propose en quelque sorte une relecture du roman de Christie sous forme de témoignage… celui du (ou de la) réel(le) meurtrier(e), qui n’est pas celui (ou celle) désigné par Agatha Christie. Point par point, l’auteur/autrice des meurtres démontre en quoi le roman initial se plante et en quoi sa propre version des faits est la bonne. C’est malin, c’est bien vu, c’est bien fait ! J’aurais malgré tout pensé qu’il serait question de la suspension consentie de crédulité, mais comme il ne s’agit pas d’une analyse d’œuvre à proprement parler, et bel et bien d’une analyse d’enquête et de témoignages, ça me paraît finalement normal. Bien sûr il vaut mieux avoir lu le roman original avant (surtout pour ne pas être spoilé(e)), mais pas besoin de l’avoir fraîchement en tête car tout est rappelé et cité dans l’analyse. Par contre (comme pour Huit crimes parfaits) d’autres romans de Christie sont divulgâchés, dont Le Meurtre de Roger Ackroyd et A.B.C. contre Poirot.

C’est très bien fait et intelligent, les amateurs et amatrices du genre policier apprécieront certainement !
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Oedipe n'est pas coupable

Après avoir rétabli la vérité sur le meurtre de Roger Ackroyd, Hamlet, Le chien des Baskerville et Ils étaient dix (le mot qu'on ne doit plus prononcer), il s'attaque à Oedipe, carrément. C'est l'occasion de revoir ses classiques, de faire un tour chez Freud, de découvrir qui est réellement coupable (pas Oedipe), et de s'inquiéter pour l'auteur qui s'attaque à forte partie...
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Comment parler des faits qui ne se sont pas..

Fidèle à son esprit provocateur et à sa pensée à contre-courant, Pierre Bayard se fait cette fois-ci le défenseur de celles et ceux qui colportent de fausses informations. L'avocat des menteurs ? Pas exactement. Car, comme toujours avec l'auteur de Demain est écrit, tout est une question de subtilité.



Un auteur qui altère ou améliore la vérité est-il nécessairement un menteur ? Et d'ailleurs que signifie, en littérature, écrire un récit faux ? S'appuyant sur de nombreux exemples - des récits présentés comme authentiques mais dont la véracité semble discutable ou a été mise en défaut -, il parvient à séparer des ordres de vérités différentes. Il s'interroge alors sur l'espace intermédiaire entre le vrai et le faux, ce lieu d'invention original où surgit une forme particulière d'authenticité. Puis il invite à réfléchir à la notion de subjectivité, à repenser le concept de vérité et la conception même que nous en avons. Car il existe une forme de vérité littéraire irréductible à la vérité factuelle et qui possède sa propre légitimité.



Il prêche alors pour un droit à la fabulation et prend la défense de ceux qui fabulent, allant jusqu'à affirmer que mieux vaut valoriser cette pratique que la dénoncer. Il rend ainsi un bel hommage aux conteurs, que cet essai tente de déculpabiliser, et loue ceux qui parviennent à s'adresser à l'enfant qui sommeille en chaque lecteur, qui lui permettent de revenir à cet état psychique où la réalité ne constituait pas un obstacle insurmontable à ses désirs et où ceux-ci pouvaient s'accomplir sans se heurter à des contraintes et des interdictions.



C'est un beau combat que mène Pierre Bayard avec ce passionnant ouvrage, finalement très psychanalytique.
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La vérite sur ''Ils étaient dix'' (La vérité sur ''..

Pierre Bayard se livre à un jeu habile et tout à fait plaisant. Mais des incohérences et des faits invraisemblables, on en trouve dans la plupart des romans policiers. En particulier chez Agatha Christie, qui n'hésite pas à substituer les personnages, à faire passer un cousin lointain pour un fils naturel, ou encore à glisser des impostures plus ou moins vraisemblables, en l'occurrence plutôt moins que plus, sans parler de circonstances de meurtre qui ne sont possibles que dans ses romans. Le crible de lecture de Pierre Bayard est amusant et même réjouissant, mais il peut s'appliquer à bon nombre de romans policiers.
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La vérite sur ''Ils étaient dix'' (La vérité sur ''..

Et Pierre Bayard, l'impertinent, le provocateur, réussit une fois de plus son pari. Si la solution proposée par Agatha Christie tenait la route mais semblait assez invraisemblable, cette version alternative est indéniablement plus cohérente. Un essai brillant qui propose de nouvelles perspectives, bouscule les certitudes les mieux ancrées et qui, au passage, (re)met Agathe Christie en boîte.

L'article complet sur mon blog.
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Qui a tué Roger Ackroyd ?

Avertissement : l'essai de Pierre Bayard raconte intégralement le roman policier, et donne la solution de l'énigme proposée par Agatha Christie, ainsi que celles de nombreux autres de ses romans. Il sera dommage qu'un lecteur novice s'y fourvoie.

Mais pour tout lecteur vorace d'Agatha Christie, pas de problème, bien au contraire, il ne risque qu'une envie dévorante de relire quelques titres...



En effet Pierre Bayard ne se propose pas seulement d'écrire "un roman policier sur un roman policier", proposant à son lecteur une autre solution, après avoir dévoilé les invraisemblances chez Agatha Christie. Comme il se doit, ce nouveau nom ne sera révélé qu'après déduction à la Poirot, à la toute fin du livre. Il se propose aussi d'écrire sur le 'délire d'interprétation' puisque considérant comme 'délirante' la solution d'Hercule Poirot. Là ça s'est compliqué, et dans la troisième partie, consacrée au délire, j'ai un peu levé le pied, perdue entre réalité et falsifié et dois-je le dire un peu de psychanalyse; je retiens cependant que 'les trois oeuvres littéraires les plus marquantes de la théorie psychanalytique -Oedipe-roi, Hamlet et La lettre volée- soient toutes trois des œuvres policières."



Déguisement, détournement, puis exhibition sont les moyens utilisés dans ce genre de policier pour détourner le lecteur de la solution. Je ne peux trop en dire car les exemples reviennent à spoiler. Mais Bayard est redoutable et conduit à remettre en question les solutions d'autres romans policiers et même à s'interroger sur des faits littéraires non éclaircis (que devient Madame de Merteuil? qui est vraiment le colonel Chabert? qui a déclenché la catastrophe de Germinal?)
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Comment parler des livres que l'on n'a pas ..

Si je m'en étais tenu à la suggestion contenue dans l'essai, je me serais inventé ce livre sous forme de pamphlet humoristique érudit, genre Paul Watzlawick ou Georges Picard, dont je raffole d'ailleurs, jouant de l'art subtil du paradoxe, maniant avec doigté l'hyperbole et l'antiphrase... Et c'eût été un autre livre.

Ma dernière lecture d'Eco - qui ne cite pas Bayard, dont cet essai est postérieur - pas plus que le souvenir presque opaque du célèbre ouvrage d'Alberto Manguel (devrais-je déjà le compter parmi mes livres oubliés, suivant une autre préconisation dudit Bayard ?) n'ont suffi à faire germer en moi le soupçon qu'il pourrait avoir esquissé, comme il l'a fait, une très cohérente et probante théorie de la lecture - de la réception, de l'interprétation, de la critique des textes littéraires.

En effet, au-delà de l'apparente facétie des différents types de non-lecture et de leur supériorité vis-à-vis de la lecture, eu égard au critère de la créativité inhérente au discours autour des livres, sont introduits de manière presque liminaire des concepts extrêmement importants : la distinction entre "livre-fantôme" (objet du discours), "livre-écran" (renvoi psychanalytique), "livre-intérieur" (en relation avec la question de la mémoire) d'une part, et leurs correspondants se déclinant en "bibliothèque virtuelle", "bibliothèque collective" et "bibliothèque intérieure" d'autre part.

Il est également clair dès les premières pages que la théorie de la lecture proposée se fonde aussi sur le concept d'intertextualité - issu du structuralisme et de la sémiotique - en relation avec la culture conçue comme un système de références dans laquelle la "vue d'ensemble" prime sur l'oeuvre particulière et spécifique ; il s'agit là d'une théorie largement acceptée de nos jours, mais quand même historique [elle n'est jamais expressément évoquée]...

Encore, au-delà de l'aspect utilement pédagogique de la démarche de l'auteur, qui se réclame sans cesse de la désacralisation de la lecture voire du texte idolâtré comme élément inchangeable par les lecteurs, et donc de la déculpabilisation de (certaines formes quand même particulières de...) la non-lecture, allant jusqu'à recommander une durée de six minutes à consacrer opportunément à chaque livre - au-delà desquelles on se laisserait trop influencer, l'on décèle une solide approche psychanalytique dans le rapport entre le savoir (les livres) et la genèse archaïque des sentiments de honte ainsi que l'image de soi :

"Et comme les mots, les livres, en nous représentant, déforment ce que nous sommes. Nous ne pouvons en effet coïncider complètement avec l'image qu'ils donnent de nous, image partielle, idéale ou dévalorisante, derrière laquelle nos particularités s'évanouissent. [...]

En parlant des livres, c'est donc bien plus que des éléments étrangers de la culture que nous échangeons, ce sont des parties de nous-mêmes qui nous servent, dans les situations angoissantes de menace narcissique, à assurer notre cohérence intérieure. Derrière le sentiment de honte, notre identité même est menacée par ces échanges, d'où la nécessité que cet espace virtuel de notre mise en scène demeure marqué par l'ambiguïté." (118-119)



Ce qui est formidable dans cet essai, c'est que malgré ces contenus et leur solidité conceptuelle qui font la force de persuasion et la limpidité de la structure, la prose est toujours très accessible, légère même ; chaque chapitre est introduit (et chaque concept illustré) non par quelque discours abstrait et hermétique mais par un texte littéraire (Musil, Valéry, Eco, Montaigne, Graham Greene, Shakespeare, Pierre Siniac, David Lodge, Balzac, Sôseki, Oscar Wilde) et l'on peut très bien se limiter à un niveau de lecture ludique de ces textes qui met joyeusement en scène les paradoxes de la non-lecture (parmi lesquels le plus flagrant : Bayard cite très minutieusement des textes tirés de livres qu'il qualifie toujours de "LP - livre parcouru" ou "LE - livre évoqué", parfois "LO - livre oublié"). Si c'est ainsi qu'il parcourt ses textes, et s'il le fait en 6 minutes, je veux bien apprendre à non-lire comme lui...

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Qui a tué Roger Ackroyd ?

Voilà un essai que j'ai beaucoup apprécié parce qu'i mêle sérieux et légèreté. Pierre Bayard reprend à zéro l'enquête d'Agatha Christie "le meurtre de Roger Ackoyrd". Il s'agit d'un des premiers romans policiers de l'écrivain qui a notamment assuré sa notoriété par un procédé narratif novateur : le narrateur était le meurtrier.

Sur un ton très docte et très sérieux assez décalé qui a dû beaucoup l'amuser (en tout cas il m'a amusée, moi), Bayard reprend l'enquête sur un roman policier, symbole de littérature distractive et plutôt légère. Selon lui Hercule Poirot trop sûr de lui aurait conclu un peu vite, victime d'un "délire d'interprétation". Il démonte sa thèse et découvre un autre coupable.

Mais ce roman policier sur le roman policier est en même temps un essai sur la littérature, sur sa polysémie. Le choix du roman policier est volontaire car il s'agit du symbole du roman clos où la solution est apportée au lecteur et ne supporte aucune contradiction et dans lequel l'enquêteur .est réputé infaillible.

Bayart a réitéré sa démonstration dans "L'affaire du chien des Baskerville".

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Comment parler des livres que l'on n'a pas ..

J’ai mis plusieurs mois à rédiger cet avis car je crois qu’il me fallait du temps pour me remettre de cette lecture. Il s’agit tout simplement de la lecture la plus agaçante qu’il m’ait été de faire. A aucun moment, l’auteur, professeur de littérature française à l’université Paris 8, ne parle de l’élément premier d’une bonne lecture : le plaisir de lire.



Pour moi, en tant que lectrice passionnée, et future professionnelle du métier, il m’est tout simplement inconcevable de ne pas aborder ce sujet. L’auteur voit la lecture comme une corvée dont il faut s’émanciper, car après tout on ne peut pas tout lire, on va oublier la plupart des éléments lus et on a autre chose à faire (notamment écrire et parler de soi)…



Certes il est évident que cet essai est destiné d’abord et avant tout aux professionnels et futurs professionnels du livre. C’est d’ailleurs dans le cadre de ma formation qu’on me l’a conseillé. Bien entendu, je sais que je ne pourrais pas tout lire et que je dois cesser d’être gênée de ne pas avoir lu certains classiques de la littérature par exemple. En ça, ce livre fut intéressant car on y apprend que de grands auteurs étaient des non-lecteurs assumés et revendiqués (ou pas). Néanmoins, je ne peux m’empêcher de souligner la beauté de la lecture, et des apports qu’elle nous procure. Que se soit par curiosité ou par simple plaisir, lire nous permet de nous évader, de nous cultiver et de réfléchir sur le monde dans lequel on vit. Par conséquent, ne nous privons pas de parler des livres que l’on a pas lus, mais surtout ne nous privons pas de lire!



Je ne conseille ce livre qu’aux professionnels du livre, et encore vous pouvez vous en passer aisément…
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Aurais-je été résistant ou bourreau ?

Un bien beau livre que nous offre Pierre Bayard... L'analyse des comportements résistants / bourreaux n'est pas nouvelle, mais l'originalité du livre est d'aborder la question sous l'angle très concret de savoir quel camp on aurait choisi soi-même. Avec honnêteté, humilité et rigueur, il développe une méthodologie lui permettant d'explorer les mécanismes intimes qui gouvernent nos décisions dans des contextes fortement perturbants et déstabilisants, où tous les repères habituels sont bousculés.

Loin des attitudes de censeur si spontanément endossées aujourd'hui, il détricote patiemment les apparences et les idées reçues, et élabore une trame nouvelle, riche en éclairages nuancés qui tiennent compte de la complexité des contextes historiques et de l'âme humaine. Ceci afin de "montrer avec autant de précision que possible l'intrication des forces qui conduisent les êtres à basculer dans telle ou telle voie."



Au terme de sa démarche, il constate : "Si l'on peut s'approcher très près du point de bascule, celui-ci demeure cependant inaccessible, comme ce lieu d'énigme en chacun où se mêlent les forces antagonistes dont nous sommes la résultante et qui nous portent vers la décision."



Bref, l'antidote idéal au conformisme lénifiant et au manichéisme réducteur de Indignez-vous !
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Aurais-je été résistant ou bourreau ?

Pierre Bayard, universitaire à Paris VIII s'interroge sur les agissements qu'il aurait pu avoir lors de la Second Guerre Mondiale?Combien de fois, cette question a t-il été posé? Combien de fois, lors de mes années d'études n'ai-je pas entendu ou même dit Mais comment ont-ils bien pu faire cela? Moi, j'aurais fait ça..." On se rêve résistant, on se veut défenseur des droits de l'homme, oui mais voilà... On n'invente pas l'histoire.



Pierre Bayard choisit la Seconde Guerre Mondiale. Il avance qu'il aurait pu choisir n'importe quels autres conflits. Mais la Seconde Guerre Mondiale a mobilisé tous les fronts. La période 39-45 a été édifiante par sa Crise des valeurs humaines.



Trois voies s'offraient alors: celui d'être un bourreau, s'engager en résistance ou bien celui du milieu: j'emploie le terme "passivité" mais il n'est pas à prendre au péjoratif.



Bayard aurait-il été un résistant ou un bourreau? C'est la question qui se pose. Issu de la génération du baby boom. L'auteur tente de répondre à cette question en prenant en modèle de référence: son père. Pourquoi son père? Parce-qu'ils sont semblables sur de nombreux points: même parcours universitaire et même caractère.



Il s'appuie sur de nombreux travaux menés par des psychanalystes. Notamment l'expérience de Milgram. Organisée par l'Université de Yale, elle visait à comprendre les agissements collaborationnistes durant la Seconde Guerre Mondiale. Il y-a des dizaines de témoignages, notamment ceux de gendarmes lors de la Rafle du Vel'd'hiv qui se sont levés pour dire qu'ils ne voulait pas obéir mais qu'ils avaient peur. Et qu'un ordre doit être exécuté.

Cette expérience visait donc à évaluer le degré d’obéissance chez individu. En bref, l'expérience de Milgram c'est trois entités: celui sur qui/quoi l'ordre est donné, celui qui doit répondre à cet ordre, et celui qui donne l'ordre (l'instance moral). Le sujet évalué est celui qui doit répondre à l'ordre. Une émission passée sur France 2 a reconstitué l'expérience de Milgram:



- La victime (un comédien) voulait gagner de l'argent. Il devait apprendre par cœur une série de réponses. Il était attaché sur une chaise électrique. A chaque mauvaises réponses, il recevait des décharges électriques. Il n'avait aucuns pouvoir sur le jeu. L'arrêt du jeu était donné par celui qui infligeait les décharges et posait les questions. (le piégé, le sujet) Il n'y a aucuns liens visuels entre les deux protagonistes (le piégé et la victime).Ils communiquent seulement par la voix.



- Le sujet celui qui reçoit les ordres. Il est derrière une machine et pose les questions. A chaque mauvaises réponses, il délivre une décharge éléctrique. A mesure que le jeu avance, les décharges se font plus fortes. Le but qu'il lui a été donné est d'aller le plus loin possible et de faire gagner de l'argent à la victime. Des premières décharges, on entend le rire de la victime mais au fur et à mesure que le jeu et que les nerfs sont à cran: les rires sont remplacés par les supplications.



- Là intervient l'instance supérieur, ici le Public et l'animatrice. Son rôle est de rendre le plus vulnérable possible le sujet. Il doit sentir que ses actes ne lui appartiennent plus. Il le dépénalise. Qu'il ne porte pas en lui le poids de la responsabilité. En l’occurrence dans ce jeu, on lui dit que la Production a prit toutes les mesures nécessaires et que le jeu est sans risque pour la victime. Il est également poussé par la masse, par le public qui le pousse à continuer.



Ce qui en a résulté: certains sujets ne sont pas arrêtés malgré les supplications de la victime. Ils ont nié la douleur, ils ont nié jusqu'à l'existence de l'autre parce-que l'ordre émanait d'une instance supérieure. D'autres se sont arrêtés quand bien-même tous les rouages derrière. Pierre Bayard dit qu'aucuns être n'est prédestiné à choisir une voie d'une autre. C'est également une question de circonstances, de vécu personnel, de coïncidences.Il a donc pour but comme Milgram de comprendre la bifurcation d'un homme à un instant donné par sentiment d'indignation, d'empathie, de conformisme, d'argument d'autorité..



Il s'appuie sur la personnalité potentielle. Celle qui surgit à un moment donné lors de situations extrêmes. Un homme qui semble avoir une sympathie pour la violence ne deviendra pas forcément un tueur de masse. Il se peut qu'à un instant X, un trait de sa personnalité qu'il ignorait lui-même se révèle. Il prend l'exemple très juste, de Cordier, nationaliste et royaliste. Fervent de Pétain qu'il considère comme son père spirituel. Il e sentira trahira lors de la signature de l'armistice et se ralliera à De Gaulle.



Un livre très agréable, une écriture soignée, un plan structuré. Une belle réussite!
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Et si les oeuvres changeaient d'auteur ?

Une nouvelle facétie de méta-littérature par Pierre Bayard, particulièrement réussie !



Dernier livre en date de Pierre Bayard, qui poursuit sur la lancée du "Comment améliorer les oeuvres ratées" (2000) et du "Plagiat par anticipation" (2009) en se proposant cette fois, dans la tradition du Pierre Ménard de Borges, de "relire" certaines oeuvres en ayant changé leur auteur.



Après avoir "préparé le terrain" de son projet en nous entraînant à sa suite dans les auteurs inconnus (Homère était-il en fait une écrivaine, avec Samuel Butler ?, Edward de Vere était-il Shakespeare ?), dans les attributions spéculées (Dom Juan, de Pierre Corneille) ou dans les doubles littéraires (Gary / Ajar, Vian / Sullivan, ou le plagiat surréaliste par anticipation de Lewis Carroll), il nous conduit dans le vif du sujet... "L'Etranger" de Kafka ou "Autant en emporte le vent" de Tolstoï sont bons, mais à la limite un peu évidents. Les choses se corsent, et deviennent franchement hilarantes avec l'échange des deux Lawrence de "L'amant de Lady Chatterley" et des "Sept piliers de la sagesse", puis avec "L'éthique" de Freud et "Le cuirassé Potemkine" d'Hitchcock.



Parmi d'autres, deux exemples issus de ces analyses, toujours aussi sérieuses en apparence, et toujours aussi drôles :

"Aussi étrange que des textes comme "Totem et tabou" ou "Moïse et le monothéisme", l' "Ethique" nous révèle ainsi un autre Freud, plus secret, moins scientiste que le Freud officiel, contempteur de la religion, un Freud qui s'efforce de dépasser les contraintes de la science pour retrouver ses racines juives et tenter de réconcilier la psychanalyse avec une forme minimale de croyance."

Ou encore : "Il y a donc bien une veine historique d'une grande constance dans l'oeuvre de Hitchcock, même si elle n'est pas prédominante. Ne voir en lui, comme on le fait la plupart du temps, qu'un cinéaste désincarné et an-historique, préoccupé essentiellement de raconter habilement des histoires policières et de mettre en scène des blondes énigmatiques, relève donc d'une profonde méconnaissance de son oeuvre."



Un grand Bayard !

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Aurais-je été résistant ou bourreau ?

Dans ces moments de retour sur soi factices, ceux dans lesquels entrent en jeu plus d’illusions que de vérité introspective, nous aimons tous à penser que, dans des situations critiques, ces évènements qui poussent les hommes à faire des choix et à se dépasser eux-mêmes, et notamment lors des guerres où il faut savoir choisir son camps, celui du juste ou du salaud, nous serions des héros, des résistants, luttant pour la justice et boutant le mal loin de nos semblables au péril de nos existences. Et pourtant, que ce soit durant la seconde guerre mondiale, au cœur de la France occupée, ou dans tous les conflits, dans tous ces génocides dont l’humanité se sera rendue coupable, la frange de ceux qui choisirent de dire non à l’inacceptable, de s’engager pour sauver des vies et pour une conception plus élevée de l’humain fût dérisoire eût égard au reste de la population.



Pierre Bayard, avec son fantastique essai « Aurais-je été résistant ou bourreau ? », met les pieds dans le plat,... La suite sur www.livredelire.com
Lien : http://livredelire.com/2013/..
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Et si les oeuvres changeaient d'auteur ?

et si on apprenait déjà à connaître les auteurs et leurs oeuvres avant de se mélanger les pinceaux ? Distrayant, sans plus.
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L'affaire du chien des Baskerville

Pierre Bayard revisite la plus célèbre des aventures de Sherlock Holmes, en proposant une interprétation totalement différente des éléments de l'enquête. Sa démonstration est construite en quatre volets : 1) un rappel des faits ; 2) une mise en évidence des incohérences de l'enquête officielle ; 3) un essai théorique tentant de prouver l'existence d'un espace intermédiaire situé entre la fiction et le monde réel, lieu de passage où les personnages de fiction peuvent interagir avec les vrais gens et réciproquement, dans cet endroit étrange se déroule un combat mortel entre Sherlock Holmes et Conan Doyle lui-même (si j'ai bien tout compris) ; 4) une nouvelle interprétation du roman et de l'enquête, débouchant sur un autre coupable. Dommage, les digressions psychanalytiques sur la reconstruction des univers fictionnels dans l'imaginaire de chaque lecteur et sur les motivations supposées de Conan Doyle à l'égard de son personnage de roman le plus célèbre encombrent un peu la beauté du raisonnement purement policier, et si l'exercice de style tient sa promesse en fin de parcours, nous devons pour y arriver subir une interminable démonstration sans réel rapport avec l'affaire du Chien des Baskerville.
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Comment parler des livres que l'on n'a pas ..

Je l'ai lu et je n'en parlerai pas...
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Comment parler des livres que l'on n'a pas lus ?

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