Un jour je peignais, le noir avait envahi toute la surface de la toile, sans formes, sans contrastes, sans transparences.
Dans cet extrême j'ai vu en quelque sorte la négation du noir.
Les différences de texture réfléchissaient plus ou moins faiblement la lumière et du sombre émanait une clarté, une lumière picturale, dont le pouvoir émotionnel particulier animait mon désir de peindre.
Mon instrument n'était plus le noir, mais cette lumière secrète venue du noir.
L’œuvre vit du regard qu’on lui porte. Elle ne se limite ni à ce qu’elle est ni à celui qui l’a produite, elle est faite aussi de celui qui la regarde. Ma peinture est un espace de questionnement et de méditation où les sens qu’on lui prête peuvent venir se faire et se défaire.
La réalité d'une oeuvre, c'est le triple rapport qui s'établit entre la chose qu'elle est, le peintre qui l'a produite et celui qui la regarde.
Enfant, j'aimais peindre, dessiner. On me donnait des couleurs mais je préférais tremper mon pinceau dans l'encrier.
"Que dessines-tu ?" m'avait demandé ma mère, en me voyant peindre à l'encre noire. J'avais répondu "De la neige."
Tout le monde avait bien ri, mais j'avais saisi quelque chose, le contraste.
(Interview "Le Monde" du 25 Novembre 2019)
"L'artisan sait toujours où il va. L'artiste, pas forcément"
Le Nouvel Obs Mai 2014
Outrenoir : le noir devient émetteur de clarté. Ce sont des différences de textures, lisses, fibreuses, calmes, tendues ou agitées qui captant ou refusant la lumière font naître les noirs gris ou les noirs profonds. Le reflet est pris en compte et devient partie intégrante de l'oeuvre : il y intègre la lumière que reçoit la peinture et la restitue avec sa couleur transmutée par le noir.
Dans la centième année, j’ai toujours plaisir à peindre.
(Très bon anniversaire, Monsieur Soulages.
Et un joyeux Noël à tous)
« Lorsque j'ai eu 14 ans, c'est devant l'abbatiale de Conques que j'ai décidé que seul l'art m'intéressait dans la vie. Conques est le lieu de mes premières émotions artistiques » -
Pierre Soulages, peintre né à Rodez en 1919.
Il faut surtout se garder de répéter ce qui a réussi. On tombe très vite dans son propre académisme. Tous les académismes sont mauvais. Mais le pire, c’est encore celui de soi-même.
(p.124)
Cette lumière secrète venue du noir.