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Citations de Roy Jacobsen (149)


Sur une île où il ne vit presque personne, la moindre venue met des choses en branle, même s’il ne s’agit que du modeste ramassage du lait. Aujourd’hui, le capitaine s’est penché au bastingage du vieux bateau, il a tendu le journal à Ingrid, quasiment comme un reçu pour les bidons de lait qu’il a hissés à bord, avec soin et lenteur. C’est pour ces gestes que l’on se souviendra de lui, Johannes Hartvigsen, lui, le lent et le minutieux.

Mais en ce jour, une lettre est tombée du journal, une lettre de Trondheim, avec des timbres qu’Ingrid n’avait jamais vus, avec le nom de l’expéditeur et son adresse au dos. Ingrid a rougi, a abandonné le journal sur le quai, pour se diriger vers le sud de l’île.

Ingrid est passée par la remise des Suédois, par le piton dans la roche, en face des écueils des Lundeskjærene, elle a marché vite et pieds nus, sur les galets et les rochers réchauffés, à travers la bruyère sèche et l’herbe jaunie, avec une lettre qu’il fallait lire dans la solitude, cela ne faisait aucun doute, une lettre de Mariann Vollheim, cette personne imprévisible dont Ingrid n’avait pas eu de nouvelles depuis plus de deux ans et qu’elle s’était efforcée d’oublier, sans y parvenir, comme cela lui apparaissait avec une évidence frappante.

Elle a longé le Bosquet de l’Amour, traversé les buttes vers le Jardin des Gorges, pour une raison quelconque, elle a encore sur la rétine l’image du capitaine du bateau laitier, la main de Johannes, calleuse et rude comme l’écorce, cette main qui lui a tendu le journal avec aujourd’hui une lettre dedans, et c’est en soi un mystère car Barrøy ne reçoit de lettres qu’à la saison des pêches aux Lofoten, et encore, ce sont des lettres rares et minces, écrites par les hommes de l’île pour assurer qu’ils sont encore en vie.
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"l'homme qui vient de rentrer est content de voir que rien n'a changé, car c'est toujours celui qui s'absente qui préfère que le temps s'arrête.
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Cela fut mis en place, tout comme les gens trouvent soudain un nouveau chemin à travers les broussailles et l’empruntent si souvent qu’il devient un sentier, ce qui, au fond, n’est qu’un autre mot pour décrire une habitude.
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On se lève pour deux raisons, en premier lieu pour contenir les pensées de la nuit par le travail, ensuite parce que le travail doit être fait.
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Ingrid répondit oui aux deux questions et, regardant par-dessus le dos du cheval, elle déclara qu’elle avait beaucoup voyagé au cours de cet été, mais qu’elle n’avait pas encore rencontré une seule personne sincèrement contente que la guerre soit finie.
(p. 213-214, Chapitre 30).
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Et puis, les habitations d’une quantité de gens avec qui elle avait parlé et dont elle connaissait les noms, des femmes, des hommes et des enfants qu avaient commencé à la traiter comme un élément identifié de la vielle, une habitante, un des leurs, en même temps qu’ils oubliaient lentement mais sûrement la raison exacte de sa présence, de la manière dont le quotidien va tous nous dévorer tôt ou tard, et nous rendre banals, anonymes et invisibles.
(p. 65-66, Chapitre 10).
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Ça, c'est typique de la mentalité norvégienne, de la mentalité de perdant, papa. En Norvège, on t'apprécie parce que tu es le dernier qui a réussi un vieux truc. Partout ailleurs, on t'apprécie parce que tu es le premier qui réussit un truc nouveau.
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La pauvreté, c'est comme une gomme. Elle n'efface pas seulement la fierté et l'estime d'un homme, elle lui fait courber le dos, elle lui vole son pain quotidien et lui ronge ses nerfs noirs.
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Parce que les gamins, ils veulent rester où ils ont toujours vécu, et élever un enfant, ce n'est pas comme édifier une maison, les enfants, ils grandissent d'eux-mêmes, et ils grandissent vite dans leur tête, impossible de les redresser avec la règle et l'équerre quand ils vont de travers, impossible de combler les manques ou de couper ce qui dépasse, ils sont là, et ce sont des personnes dès le premier cri, ils ne comprennent pas la langue, ils sont bêtes et nus, étrangers et affamés, débordants de hurlements.
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Un visiteur créé un vide. Il montre aux îliens qu’il leur manque quelque chose, que ce manque existait aussi avant sa venue, et qu’il va continuer.
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Il n’y a pas beaucoup d’arbres sur l’île, mais il y a aussi beaucoup d’arbustes à baies, de bouleaux nains et de saules qui, à la fin de l’été, ont des feuilles jaunes qui virent au marron et au rouge à des vitesses variées, si bien que l’île ressemble à un arc-en-ciel sur terre pendant quelques jours de septembre. Elle garde cette allure jusqu’à ce que cette petite tempête attaque les feuilles par surprise et les emporte dans la mer et métamorphose Barrøy en un animal loqueteux à fourrure marron.
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Je suis plus lent que jamais, je ne sais pas ce que je veux, je ne sais pas si je peux continuer à faire seulement ce que je veux, mais comment découvres-tu ce que tu dois faire ? Peut-être qu'il faut demander à papa ? Demander à Harald ? Demander à maman ?
"Moi je trouve que tu devrais faire comme tu veux Rogern." Ca c'est maman.
Papa : "T'as qu'à essayer un peu maintenant, trouillard, ça durera un an ou deux. Et là, tu feras ce que tu veux après."
Bref, là coince, et en plus, j'ai le sentiment que je ne peux pas continuer à les écouter, même si leurs conseils pouvaient marcher. Ecoute-toi Rogern, l'homme sans voix, vingt ans et sans enthousiasme, "un homme qui cherche" comme on dit, une victime reconnaissante de l'offre intellectuelle abondante, allant du socialisme armé d'un coté à un doux pacifisme homéopathique de l'autre.
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Evidemment, personne ne fait une pause d'un an pour son "développement personnel". Le "développement personnel", c'est un truc que l'obtient par la lutte, et ça ne s'appelle pas "développement personnel", ça s'appelle grandir et devenir adulte, et c'est synonyme de boulot, factures, une famille dont il faut s'occuper et autres valeurs de base.
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... peut-être parce qu'il a été le premier à comprendre que le plus important n'est pas qu'une histoire soit vraie, mais de laisser aux gens la possibilité d'en remplir les blancs.
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Les années d'enfance sont ainsi une sorte d'errance entre le crime et l'obéissance, entre la volonté d'obtenir un statut en étant bon à l'école et un bon fauteur de troubles, puis ça change au lycée, où il est possible d'être à la fois un fouteur de merde et bon en maths, même si cette combinaisons n'est qu'une carrière temporaire car la plupart optent pour la voie légale, et l'énervé en eux s'efface peu à peu pour mourir complètement, et ne ressortir que dans des situations tendues avec l'épouse et les enfants.
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... une personne qui, pour une raison ou une autre, n'avait pas pu continuer là où elle était née, comme maman, qui était montée en ville pour recommencer à zéro, comme si elle s'extrayait de là en se tirant elle-même par les cheveux, pour se sortir de la guerre et de la misère, pour s'arracher de l'emprise brutale de l'Histoire sur ceux qui créent les valeurs, pour s'améliorer, pour offrir à ses enfants des possibilités supplémentaires, un paradoxe, évidemment, car ce n'est pas facile quand les rejetons commencent le lycée - car c'est là où ils vont - et que, soudain, ils en savent plus que les parents et se mettent à mettre en doute leurs valeurs, ces mêmes valeurs qui leur ont permis d'aller au lycée, et ça cause une sacrée pagaille pour les deux parties ...
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Si la guerre appartenait aux puissants possédant la langue et l'argent, tout comme leur appartenait la paix passée, la paix nouvelle semble leur appartenir aussi, avec une évidence brutale. Dès l'été, ils détruisent le bonheur en rasant la tête de Dagny, car ce n'est pas seulement son manteau qui a été en contact avec les Allemands
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Parce que les gamins, ils veulent rester où ils ont toujours vécu, et élever un enfant, ce n'est pas comme édifier une maison, les enfants, ils grandissent d'eux-mêmes, et ils grandissent vite dans leur tête, impossible de les redresser avec la règle et l'équerre quand ils vont de travers, impossible de combler les manques ou de couper ce qui dépasse, ils sont là, et ce sont des personnes dès le premier cri, ils ne comprennent pas la langue, ils sont bêtes et nus, étrangers et affamés, débordants de hurlements.
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Comme tout marcheur, elle découvrit que ceux qui sont les premiers à arriver à un endroit et qui s’y sont installés ont plus peur que ceux qui les suivent, car ils ont peur de perdre ce qu’ils ont.
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car tout le monde a le droit d'être le héros de sa propre vie, même les boiteux et les aveugles, même ceux qui ont des boutons purulents sur la figure, à condition de recevoir un petit coup de main, car que serions-nous sans un peu d'aide?
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