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Citations de Sofia Aouine (104)


J'ai levé les yeux avec flemme du livre qu'Odette m'avait forcé à me taper. Le truc de Marcel Machin, sur ses histoires d'amour de puceau qui ne baise jamais. C'est chiant mais bien écrit et ça fait paravent avec le monde.
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Ma rue raconte l'histoire du monde avec une odeur de poubelles. Elle s'appelle rue Léon, un nom de bon Français avec que des métèques et des visages bruns dedans.
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Les souvenirs traversent la peau des familles.
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Je cours, je cours, je ne m'arrête plus. Les larmes m'inondent le visage. Le jour se lève à peine et le paysage défile. Du bleu, du vert, du gris, j'en ai plein la tête. J'aperçois enfin l'horizon. Mes pieds touchent l'eau saumâtre de la baie de Somme. Je n'avais pas revu la mer depuis l'enfance. Je cours comme un fou vers le large. Je ne me souviens plus si je sais nager. L'infini m'appelle. Je ne sais que ça. Je plonge la tête la première dans le froid de la Manche en hurlant cette phrase que ma mère me chuchotait tendrement à l'oreille, ces fois où mon père n'en était plus un : "C'est pas grave, fils, quand tu grandiras, tu auras oublié."
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Ma mère est un fantôme de lait et de rose. Silencieuse et discrète. Le genre de femme qui mourra dans les limbes de mots qu'elle n'a jamais osé dire. Le regard droit et le poing fermé par la rage avortée.
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Je suis triste et en colère, le matin quand je regarde par la fenêtre de ma chambre. Ma rue a des airs de Kaboul avant la tempête. Les sons et les odeurs d'avant ont été remplacés par le genre de silence à rendre fou, comme quand tu mets tes doigts contre tes tympans et que tu presses tellement fort que ton sang arrête d'irriguer ta tête. Je me dis qu'il faut faire quelque chose pour sauver ce qui peut encore l'être dans cette putain de rue.
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Alors que dans la vraie vie, celle qui pue la merde, c'est la rue qui nous gouverne et pas l'inverse. C'est la rue qui nous appelle et pas l'inverse. Et pour ceux qui n'ont pas de mère, il n'y a qu'elle pour les comprendre, les aimer, et donner un sens à leur vie. Ceux qui habitent là où ça sent les fleurs peuvent pas piger.
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Gervaise avait grandi mal et trop vite en passant des nattes et chaussettes blanches aux strings ficelle en l'espace de quelques années, parce qu'il fallait bosser pour rembourser l'argent des grosses dettes de sa daronne accro au jeu, à la bringue et aux amours qui n'en sont pas avec des bleus aux yeux.
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La secte séduisait à coups de billets qui sentaient la Terre sainte et le shit, les promesses du pays de Sham et d'un paradis peuplé des soixante-douze vierges dignes d'un calendrier Pirelli. Certaines familles semblaient y trouver leur compte et préféraient voir leur fils faire le jihadiste de pacotille au quartier plutôt que la victime au mitard.
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La première réflexion a fusé: "Oh la victime, il a une tête de chelou!", "Obligé, c'est un cassos de la Ddass!", "Regarde ses pompes, abusé!", "La honte wallah… Moldavie wesh, sa daronne fait la manche au marché de Barbès… Attention, cache ton iPhone, ah c'bâtard, il va nous dépouiller…".
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On est pas si différents, avec la dame d’ouvrir dedans, au fond. C’est l’histoire de ce pays : on a presque tous, d’où que l’on vienne, d’où qu’on parle, peu importe notre Dieu, une histoire de valises à vivre et à raconter.
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J’ai découvert un monde à part. La république des sans-sommeil, ceux qui ne veulent pas sentir la lumière parce qu’ils ont peur de se voir eux-mêmes. J’en ai rencontré des gens, je pourrais pas tout vous dire, mais il s’en passe des choses la nuit à Barbès. Je crois qu’il y a rien de plus beau qu’une ville qui dort. Je cours, je cours, je cours et quand mon coeur est au bord de mes lèvres, je monte sur le toit de mon immeuble pour sentir l’aube qui s’empare de la nuit. Juste les premières minutes. Là, Paris, où j’étouffe, se laisse enfin voir. Loin des abysses du vice et de la morsure du jour qui brûle.
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Ma rue a la gueule d’une ville bombardée, une gueule de décharge à ciel ouvert, une rue qui ne dort jamais, où les murs ressemblent à des visages qui pleurent. Des murs qui n’ont jamais été blancs et qui semblent hurler sur toi quand tu passes devant. Je suis arrivé dans ce bordel il y a à peine trois ans et j’ai déjà l’impression d’avoir vieilli de dix piges, rien qu’en me posant sur le banc du square Léon. Juste à regarder les gens. Les enfants ont l’air de centenaires. Des yeux de vieux sur des gueules d’anges.
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Je ne suis pas un Emmaüs de l'amitié
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J’ai levé les yeux avec flemme du livre qu’Odette m’avait forcé à me taper. Le truc de Marcel Machin, sur ses histoires d’amour de puceau qui ne baise jamais. C’est chiant mais bien écrit et ça fait paravent avec le monde.
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Je suis arrivé dans ce bordel il y a à peine trois ans et j'ai déjà l'impression d'avoir vieilli de dix piges, rien qu'en me posant sur le square Léon. Juste à regarder les gens. Les enfants on l'air de centenaires. Des yeux de vieux, sur des gueules d'anges. Surtout les petits Noirs. On dirait qu'à force de vivre les uns sur les autres, ils ont une âme pour cinq.
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Adossé à la cheminée, je regarde les grosses lettres rose et bleu de Tati qui clignotent…Tati…Tati… Le magasin préféré des daronnes et des blédards, notre tour Eiffel à nous. Un truc que le monde entier nous envie et qui est connu au fin fond de l’Afrique et de la Papouasie. Tati or, Tati maison, Tati chaussures, Tati slips, Tati mariage : la Mecque des jeunes pucelles prêtes à se marier et des mères hystériques qui aimeraient redevenir pucelles le temps d’une nuit de noces. La plus grande salle de jeu du monde, caverne d’Ali Baba des pauvres où tu trouves de tout. Tu peux te marier, manger, vivre et peut-être même mourir un jour. Je suis sûr qu’ils finiront par y vendre des cercueils en vichy rose et bleu. Tatillywod, notre Hollywood à nous les métèques avec ses grosses lettres que tu vois de loin, des Champs-Élysées au boulevard Magenta.
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Dans ma rue t’as pas le droit d’être un faible, les faibles ça finit sur un trottoir comme les putes de Porte de Clichy et les crackers de Porte de la Chapelle.
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Ma rue raconte l'histoire du monde avec une odeur de poubelles. Elle s'appelle rue Léon, un nom de bon français avec que des métèques et des visages bruns dedans. C’est mon père qui a choisi qu’on débarque ici. Je me dis souvent que ce vieux doit aimer la misère, comme si c’était la femme de sa vie. Une espère de seconde peau que tu aurais beau laver. Inscrite dans tes gênes, à jamais. Ici, c’est Barbès, Goutte-d’Or, Paris XVIIIe, une planète de martiens, un refuge d’éclopés, de cassos, d’âmes fragiles, de « ceux qui ont réussi à dépasser Lampedusa », de vieux Arabes d’avant avec des turbans sur la tête et et des têtes d’avant, de grosses mamans avec leurs gros culs et leurs gros chariots qui te bloquent le passage quand tu veux traverser le boulevard. Des gens honnêtes qui ont toujours l’air de voleurs et qui rasent les murs pour pas qu’on les voie. Une rue où il n’y a pas de femmes qui marchent toutes seules. Une ville dans la ville, monstrueuse et géante, une verrue pourrie sur la carte. […] Ma rue a la gueule d’une ville bombardée, une gueule de décharge à ciel ouvert, une rue qui ne dort jamais, où les murs ressemblent à des visages qui pleurent. Des murs qui n’ont jamais été blancs et qui semblent hurler sur toi quand tu passes devant.
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La principale religion à la maison s’appelle le silence. Pour éviter les problèmes et espérer être un peu heureux, la tactique à employer est de fermer sa gueule, baisser la tête, raser les murs.
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