Citations de Ta-Nehisi Coates (123)
En 1840, le coton récolté grâce aux travail des Noirs représente 59% des exportations du pays. Les ramifications de cette société esclavagiste s’étendent vers le Nord, jusqu’aux métiers à tisser de la Nouvelle-Angleterre et de l’autre côté de l’Atlantique, jusqu’en Grande-Bretagne, où a lieu une transformation économique majeur qui va modifier le cours de l’histoire mondiale.
Célébrer la liberté et la démocratie tout en oubliant que l’Amérique prend ses origines dans l’économie de l’esclavage, c’est du patriotisme à la carte.
Je ne parle pas seulement d’indemnisation pour les injustices d’autrefois, je ne parle pas d’une aumône, d’une enveloppe, d’un dessous-de-table. Je parle d’une prise de conscience collective qui déboucherait sur une renouveau spirituel.
.je me suis demandé comment il était possible de vivre libre dans ce corps noir. C’est une question profonde, parce que l’Amérique se perçoit comme l’œuvre de Dieu, mais le corps noir est la preuve manifeste qu’elle n’est que la création de l’homme.
Cette interrogation permanente, cette confrontation avec la brutalité de mon pays m’a donné la plus grande récompense : me libérer des fantômes et me préparer à affronter la terreur pure de la désincarnation, de la perte de mon corps.
Et j’ai peur. Cette peur augmente à chaque fois que tu me quittes. Mais j’ai découvert cette peur bien avant ta naissance
Ce pillage se manifestait par des dos fouettés à vif, des membres enchaînés, des rebelles étranglés, des familles détruites, le viol des mères, le trafic de leurs enfants, et bien d’autres choses, toutes conçues, d’abord et avant tout, pour nous confisquer, à toi et à moi, le droit de protéger et de maîtriser notre propre corps
Je te parle comme je l’ai toujours fait - comme l’homme sobre et sérieux que j’ai toujours voulu que tu sois, qui ne s’excuse pas de ses sentiments, qui ne s’excuse pas non plus de sa stature, de ses longs bras, de son beau et large sourire. Tu es en train de grandir en prenant conscience de toutes ces chose, et mon souhait, en ce qui te concerne, est que tu n’éprouves jamais le besoin de te contorsionner pour procurer à d’autres leur confort. Rien de tout ça ne peut changer la donne de toute façon. Je n’ai jamais voulu que tu sois deux fois meilleur qu’eux. J’ai toujours voulu que tu attaques chaque jour de ta vie en luttant. [...] Je ne voudrais pas que tu te couches dans un rêve. Je voudrais que tu sois un citoyen de ce monde beau et terrible à la fois, un citoyen conscient.
"Prince Jones tué alors qu'il était dans sa Jeep
Trayvon Martin est mort à cause de son sweat à capuche
Pareil pour Iordan Davis c'était la musique trop fort
Iohn Crawford n'aurait jamais dû toucher le fusil sur le présentoir
Kajieme Powell aurait dû apprendre à ne pas être fou.
Tu as appris ça pour la première fois avec Michael Brown"
Nous sommes, comme l'a écrit un jour Derrick Bell, "les visages au fond du puits".
De l'autre côté, moi l'Africain je n'étais pas pour autant libre dans mon continent. Il y avait la présence du colonisateur qui prétendait être investi d'une mission de civilisation. Il devait apporter les Lumières aux barbares, à nous autres qui, pour reprendre les termes d'Aimé Césaire dans Le Cahier d'un retour au pays natal, n'avions rien inventé, "ni la poudre, ni la boussole, à nous autres qui n'avions jamais "su dompter la vapeur ni l'électricité" , à nous autres qui n'avions exploré "ni les mers ni le ciel". Or nous voulions changer notre terre, notre "pays réel", dessaisir le colonisateur du pouvoir de décider à notre place puisque lorsque la chèvre est là il ne faut surtout pas bêler à sa place.
Je voulais que tu sois conscient, que tu comprennes que mettre la peur à distance, ne serait-ce qu'un
instant, n'offre aucun laissez-passer pour fuir la lutte
A mes yeux, ils n'étaient pas humains Noirs, blancs, peu importe, ils étaient les grandes catastrophes naturelles ; ils étaient le feu, la comète, la tempête, qui pouvait sans aucune justification réduire nos corps en miette.
jamais je n'imaginais que quiconque serait puni. Mais toi tu étais jeune ; tu y croyais encore. Tu es resté
de jusqu'à vingt-trois heures ce soir-là, en attendant la nouvelle d'une condamnation, et lorsqu'on
annoncé qu'il n'y aurait aucune condamnation, tu as dit : « Faut que j'y aille », tu es allé te réfugie
dans ta chambre, et je t'ai entendu pleure.
Les corps étaient pulvérisés, ils étaient devenus un simple stock, pour lequel on contractait une assurance. Les corps, aussi lucratifs que les terres indiennes, permettaient de rêver à une véranda, à une belle épouse ou à une maison de vacances à la montagne. Pour les hommes qui avaient besoin de se croire blancs, les corps étaient le sésame d'un club mondain ; le droit de casser les corps était la marque de la civilisation.
Mais tu es un garçon noir, et tu dois rester responsable de ton corps d'une manière inconnue des autres garçons. En fait, tu dois rester responsable des pires actes commis par d'autres corps noirs qui, d'une façon ou d'une autre, te seront toujours attribués. Et tu dois rester responsable des corps des puissants - le policier qui te frappe avec sa matraque sera prompt à trouver une justification dans le plus ténu de tes mouvements. Et ça ne se réduit pas simplement à toi - les femmes qui t'entourent doivent rester responsables de leurs corps d'une manière que tu ne pourras jamais connaître. Tu dois faire la paix avec le chaos, mais tu ne peux pas mentir. Tu ne peux pas oublier tout ce qu'ils nous ont pris et la façon dont ils ont transfiguré nos corps pour en faire du sucre, du tabac, du coton et de l'or.
Le rêve, c'est cette mauvaise habitude qui met la planète en danger,cette mauvaise habitude qui entasse nos corps dans des prisons et des ghettos.
C'est à ce moment là que ça s'est passé. Le fait de comprendre que j'étais très loin, la peur, le mystère des possibles, tout ça à la fois - l'horreur, l'émerveillement et la joie - a fusionné dans un frisson érotique. Ce frisson ne m'était pas totalement étranger. ... À cet instant, j'ai compris que tous ces changements, avec toute la souffrance, le malaise et la confusion qui les accompagnaient, étaient ce qui définissait ma vie. Pour la première fois, j'ai compris que j'étais vivant , en train d'étudier et d'observer pour de vrai, non seulement à ce moment précis, mais depuis longtemps ... J'avais toujours été vivant. Je traduisais le monde qui m'entourait depuis toujours.
N'oublie jamais que nous avons été esclaves dans ce pays plus longtemps que nous n'avons été libres.
À l'époque de l'esclavage, la loi ne nous protégeait pas. Aujourd'hui - à ton époque -, la loi est devenue une excuse pour pouvoir t'arrêter et te fouiller. Autrement dit, elle n'est que le prolongement de cette agression physique.
Je travaillais dur. J'étais un homme estimé en tant qu'esclave - autrement dit, je n'étais pas estimé en tant qu'homme.