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Critiques de Takeda Kazuyoshi (67)
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Peleliu, tome 1

Loin dans le Pacifique Sud, existe l'archipel des Palaos. L'été 1944, il a fait l'objet d'une redoutable bataille, notamment sur l'ile de Peleliu. Notre héros est cantonné dans un régiment sur cette ile. Mangaka, il raconte la vie sur place et la terrible bataille avec de petits bonhommes dotés de grands yeux. On dirait des petits soldats... On y retrouve la maltraitante des militaires, leurs condition de vie, voir de survie et la propagande qui les entoure. La simplification des personnages atténue la rudesse des images.

Toutefois, je trouve qu'il y a beaucoup de similitude avec le second tome de "La vie de Mizuki", l'oeuvre excellente de Sigeru Mizuki
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Peleliu, tome 3

Alors que j'avais eu un peu de mal lors de ma lecture du tome précédent, ce n'est plus du tout à l'ordre du jour avec celui-ci où le thème de la survie m'a plu de bout en bout.



Je voyais difficilement la série se renouveler et tenir le long des 12 tomes qui la composent la dernière fois, je l'avoue. J'ai bien plus confiance désormais dans les capacités de l'auteur. Comme sa couverture l'annonçait l'histoire prend un tournant moins sombre dans ce tome même si on reste dans un récit particulièrement âpre.



Fini la planque dans les grottes, place à l'arpentage de l'île à la recherche de nourriture, nouveau nerf de la guerre. Pour ce faire, les héros en rencontrent d'autres et des relations intéressantes se nouent, ce qui dynamise la lecture. De nombreuses aventures leur arrivent qui sont une nouvelle le reflet de cette terrible guerre sur cet îlot isolé. L'auteur fait preuve d'un mélange d'espoir, de camaraderie et de fatalité qui fait mal. Certaines scènes sont particulièrement dures à lire et d'une grande brutalité, normal, c'est la guerre. J'aime qu'on ne nous prenne pas pour les perdreaux de l'année et qu'on ose nous montrer l'horreur de celle-ci.



Une fois de plus, le discours est plutôt neutre. Il nous montre la terrible efficacité des Américains, leurs tentatives de séduction pour que les Japonais se rendent, mais leur implacabilité aussi. Il n'hésite pas à mettre en scène le patriotisme extrême des Japonais avec les dérives que cela occasionne. Mais jamais il ne met l'un ou l'autre sur un piédestal. A l'inverse, il semble plutôt porter un éclairage singulier sur les moyens ordinaires de survivre des troupiers, mettant en avant leur inventivité ou encore leur volonté à toute épreuve, mais il ne dénigre pas pour autant leur fragilité ou leurs peurs. Il les prend vraiment dans leur entièreté à l'image du héros et de son ami, c'est ce qui me plaît ici. L'auteur sublime vraiment le personnage du "héros ordinaire".



Avec un tome plus porté sur la survie, on l'on passe plus de temps dehors dans la nature, l'espoir renaît un peu après des heures sombres sous terre. Cependant l'horreur de la guerre est toujours là et se rappelle souvent brutalement à nous. Malgré tout quelques brefs moments d'humanité mettent vraiment du baume au coeur, à l'image de ces dessins que fait le héros. C'est vraiment un très beau titre !
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Peleliu, tome 1

Un de premiers titres sortis par l'éditeur Vega en 2018 mais avec son dessin atypique, je n'avais pas osé me lancer dans l'aventure. Il aura fallu attendre une réédition très avantageuse de celui-ci sous la houlette de Vega et Dupuis qui travaillent ensemble désormais pour me faire embarquer et à 3€ le tome, ça ne se refuse pas !



Le thème, je le connais. C'est celui de la Guerre du Pacifique qui a été très bien traitée dans l'excellente série Band of Brothers : L'enfer du Pacifique et le diptyques de films Mémoire de nos pères et Lettres d'Iwojima signés par le grand réalisation Clint Eastwood. Je n'étais donc pas en terrain inconnu. Sauf que contrairement à ces médias, c'était la première fois que je lisais une oeuvre en parlant écrite par un japonais et ça apporte un tout autre éclairage au récit.



En effet, on nous a souvent présenté, à nous Occidentaux, les Japonais comme des gens qui n'ont jamais vraiment digéré leur défaite, ni reconnu forcément leurs crimes et encore moins réfléchi à leurs erreurs. Voilà le biais avec lequel souvent on les voit. Alors pouvoir lire un titre qui va à l'encontre de cette idée fausse est un vrai plaisir.



Car Kazuyoshi Takeda dans sa série Peleliu : Guernica of Paradise, qui va compter 12 volumes, ne se gêne pas pour critiquer l'absurdité de cette guerre à laquelle son propre grand-père a participé. Avec un trait très naïf et des personnages tout droit sortis des Peanuts - on jugera de la cocasserie de cela face à l'ennemi invoqué ici -, il ne se gêne pas pour dépeindre toute l'horreur de cette guerre qui aura lieu sur l'ilot stratégique de Peleliu, petite île au sud des îles Palaos, près des Philippines.



J'ai beaucoup aimé suivre cette guerre sale de l'intérieur en me mettant dans les pas d'un soldat banal, enfin pas si banal puisqu'il dessine des mangas ce qui va lui valoir d'avoir un poste et un regard particulier sur ce qu'il se passe. Le quotidien des soldats est bien rendu lors de petites scénettes qui oscillent entre drôlerie et dure réalité quand celle-ci finit par les rattraper. Les décors sont d'ailleurs bien rendus malgré les choix faits par l'auteur pour simplifier et donc modifier certains détails en s'éloignant de la réalité comme il l'explique lui-même en fin de volume. Mais on reconnait bien la précarité de la vie sur cet ilot avec ses abris de fortune, son travail de forçat et son insécurité permanente.



J'ai juste trouvé que c'était déjà un peu répétitif par moment mais c'est normal en même temps vu ce que décrit le titre. L'auteur tente quand même de mettre en place une vraie histoire avec une narration évolutive, puisqu'on passe de premiers temps presque paisibles où les soldats s'installent, aux premières attaques gentillettes, avec que les américains lancent vraiment l'offensive et qu'on rentre dans le lourd.



J'ai vraiment apprécié de voir l'auteur nous livrer des informations historiques véridiques tout au long du récit, ainsi que lors d'encarts entre les chapitres. Il garde de plus un ton assez neutre dans l'ensemble, présentant la façon dont les japonais voyaient leurs ennemis, mais tentant à son tour de les mettre sur un pied d'égalité comme lors de la scène avec "maman / mommy". De plus, en filigrane, on sent bien qu'il a un discours tout sauf complaisant avec les décideurs d'alors et la situation. Il a réfléchi sur ce qu'il s'est passé, il en voit l'absurdité avec notre recul actuel, mais il se met également à la place des troupiers d'alors pour essayer de voir les choses de leur point de vue. Cela donne un récit vraiment réussi, plein de nuances et d'humanité qui prend vraiment vie dans les derniers chapitres où le conflit démarre vraiment.



Alors que je n'étais pas sûre d'aimer le titre car j'avais peur que le trait me fasse sortir du récit ou encore que celui-ci ne présente pas le recul que j'attendais, j'ai trouvé en Peleliu, au contraire, un récit maîtrisé, bien pensé, bien écrit, et tout en nuances où les réflexions sur la guerre vue par ceux qui l'ont faite m'ont interpelée. C'est exactement le genre de titre que j'aime lire sur cette époque, comme je l'avais fait avec Dans un recoin de ce monde ou Le pays des cerisiers de Fumiyo Kouno.
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Mon cancer couillon

Je dois avouer que je ne suis pas franchement adepte de la littérature « témoignage » où des gens, parfois connus, racontent un épisode de leur vie, que ce soit un deuil, la maladie ou autre. Je ne saurai vraiment expliquer pourquoi, mais ce n’est vraiment pas quelque chose qui m’attire, et ce que ce soit sous la forme témoignage ou romanesque. Et pourtant, lorsqu’il s’agit de manga, l’idée ne me dérange pas, quand bien même je ne crois pas avoir lu énormément d’œuvres qui appartiennent à ce domaine. Ainsi, je me demande si Mon Cancer Couillon, de Kazuyoshi Takeda n’est pas ma première lecture du genre.



Pour resituer l’œuvre, Mon Cancer Couillon est un seinen prépublié dans le magazine Evening en 2013, et est par ailleurs le premier manga de l’auteur, qui jusqu’alors était assistant (on le connaît aujourd’hui pour la série Peleliu, éditée par Vega). En France, l’œuvre est disponible chez Pika dans la collection Graphics sous la forme d’un One Shot très beau, dans la lignée de ce qui est fait dans cette collection, qui a d’ailleurs d’autres récits autobiographiques qui m’ont l’air intéressants, je pense en particulier à Solitude d’un autre genre que j’aimerai beaucoup lire.



Et donc, de quoi est-il question ? On le devine aisément au titre français très bien trouvé, il s’agit donc d’un manga dans lequel l’auteur, alors qu’il n’a que 35 ans, découvre qu’il a un cancer du testicule. Nous allons donc le suivre durant le parcours de soins, l’occasion de revenir sur toutes les difficultés liées à la situation, mais également de parler plus largement de manga, de chien, et d’amour…



Le fond et la forme



Il est important de signaler d’emblée que le récit, bien qu’il présente une évolution constante (et chronologique) dans l’évolution du parcours de soin de l’auteur, est structuré en courts chapitres qui eux-mêmes sont plutôt des petites pastilles sous forme de petites moments de vie et d’anecdotes. L’idée est que les chapitres font plus ou moins une dizaine de pages, et la plupart du temps, plusieurs scénettes sont mises en avant dans chaque chapitre.



Et l’ambiance globale du titre est plutôt positive, quand bien même on se situe dans un cadre anxiogène d’hôpital, dans lequel les patients subissent des traitements lourds. Mais ce qui n’est pas lourd, au contraire, c’est la façon dont l’auteur arrive à donner des explications sur la maladie et les traitements mis en place, afin que l’on comprenne un peu ce qui se passe, sans que l’on ne trouve ça trop compliqué et ennuyeux à lire. Ainsi, entre deux vomis liées au traitement, on partage de nombreux moments joyeux, parfois plus difficiles, mais avec toujours une forme de positivité qui fait du bien, et qui surtout ne semble pas forcée, mais au contraire, est amenée naturellement et est facilement acceptable pour le lecteur.



J’entends par là que les récits de vie ont parfois cette tendance, en tout cas dans l’idée que je m’en fais et dans le peu que j’ai pu lire, à nous dire que malgré tout la vie c’est beau, il faut rester positif, etc… Sauf que dans de nombreux cas, je ne vois pas comment c’est possible. Et dans Mon Cancer Couillon, l’auteur nous montre bien qu’on ne peut pas toujours rester positif, mais que le rapport aux autres, notamment à notre petit chien ou à notre femme, peut nous y aider énormément.



Un manga sur le manga



J’ai précisé que le manga parlait de la maladie, mais pas que. En effet, l’auteur étant mangaka, et cette histoire étant la première série qu’il a signé, cet élément est très important dans le développement du récit. Car on commence alors qu’il est toujours assistant à 35 ans (on comprends qu’il travaille sur Gantz), et cette convalescence forcée sera l’occasion pour lui de travailler sur SA série. Et c’est tout naturellement qu’il s’inspire de ce qu’il vit pour ce premier manga.



Ainsi, le processus créatif est un élément que l’on retrouve durant la totalité de l’histoire, jusqu’à la conclusion qui confirme la sérialisation du manga. De ce fait, au gré des chapitres nous aurons l’occasion d’en apprendre un peu plus sur comment l’équipe va composer avec son absence, son retour au travail mais surtout comment la maladie va influer sur sa façon de travailler, qui est peut-être également en partie responsable de son style visuel si particulier.



Car si j’ai parlé de la forme précédemment, j’ai volontairement éludé l’esthétique du manga, qui est pourtant primordiale. Et ici, le trait de l’auteur est très arrondi, ne cherchant pas un visuel réaliste ou détaillé, qui donne un côté doux bienvenu, surtout quand il s’agit de traiter de choses plus difficiles ou pesantes. C’est en partie grâce à cela qu’on évite les ambiances trop lourdes par ailleurs. Et je ne vais pas vous expliquer de quoi il en retourne, mais la maladie va avoir un impact sur la façon de dessiner de l’auteur, et il est donc possible que son style ait été travaillé et adapté en fonction de cela.



Mais du coup, pourquoi ce récit de vie est bien ?

J’ai déjà signalé à plusieurs reprises que les récits de vie n’étaient pas mon truc, et vous aurez compris que malgré cela, ce manga m’a conquis. J’ai déjà en partie expliqué pourquoi dans les paragraphes qui précèdent, et je vais tenter d’approfondir ici. Tout d’abord je pense réellement que ce côté « regard d’artiste » que l’on trouve dans le manga me parle davantage qu’un roman écrit à la première personne qui parfois, donne l’impression d’avoir été écrit pour soi-même uniquement. Il est possible que le modèle éditorial du manga y soit pour quelque chose, puisqu’il y a des responsables au-dessus de l’auteur qui viennent donner des indications pour retravailler l’œuvre, donnant un aspect plus construit et artistique au récit. En tout cas, c’est une interprétation que je propose.



De plus, comme j’ai essayé de le montrer, Takeda ne se borne pas à raconter son parcours de malade, mais met tout ça en perspective avec son travail, sa vie de couple et également son chien. Ça peut paraître bête dit comme ça, mais ce sont ces éléments qui sont le cœur, en particulier émotionnel, de l’histoire et qui lui donnent une certaine forme d’universalité. Car si le cancer est malheureusement de plus en plus banal, cela reste quelque chose de très particulier. Par contre, avoir quelqu’un dans sa vie, ainsi qu’un animal de compagnie que l’on considère comme notre enfant, c’est beaucoup plus naturel.



Ainsi, au fil de son histoire, l’auteur égrène ça et là des petites moments de vie qui arrivent à toucher, que ce soit dans la relation à sa femme et cet amour très fort qui les unit et leur permet d’avancer ensemble, ou son rapport si touchant avec son petit chien, Big (oui, c’est sûrement dû au fait que je me sois beaucoup reconnu là-dedans, surtout que Big ressemble à mon chien). Ces moments, tout comme ceux concernant son travail de mangaka, sont au final ceux qui m’ont le plus touché et le plus marqué dans l’histoire.



En conclusion, Mon Cancer Couillon est vraiment une très belle surprise, dans une édition de très belle qualité qui plus est, qui m’a touché par le traitement de ses diverses thématiques et par la positivité qui s’en dégage. J’ai de ce fait le sentiment d’avoir finalement ressenti ce que ressentent les gens qui apprécient les récits de vie en général, mais c’est vraiment le fait qu’on ait droit à une vision d’artiste qui m’a permit de vraiment entrer dans ce récit, qui nous rappelle que c’est grâce à ceux qui nous entourent qu’on arrive à traverser les épreuves de la vie, que ce soit notre conjoint(e), notre animal de compagnie, ou encore nos enfants.
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Peleliu, tome 1

Critique commune aux tomes 1 et 2.



Comme ses prédécesseurs, le n° 8 de l’excellente revue Atom m’a fait découvrir un certain nombre de mangas ayant l’air intéressants, dont, dans l’actualité, cette série qu’est Peleliu, Guernica of Paradise, due à Takeda Kazuyoshi, et dont la publication française vient d’être entreprise par un nouvel éditeur de manga, Vega. Les deux premiers volumes sont parus d’emblée, et ce sont ceux dont je vais vous parler aujourd’hui, mais la série est en cours de publication au Japon, où il y a au moins trois autres volumes, qui devraient être traduits relativement rapidement, ai-je cru comprendre.







Peleliu, Guernica of Paradise est un manga de guerre, centré sur le récit de la sanglante bataille de Peleliu, une paradisiaque (donc) petite île de corail dans l’archipel des Palaos. Cette bataille, semble-t-il méconnue des Japonais contemporains (tout particulièrement à en croire Hiratsuka Masao, un spécialiste de la guerre du Pacifique qui a conseillé Takeda Kazuyoshi dans la conception de cette BD), cette bataille donc a eu lieu entre septembre et novembre 1944, et a été particulièrement meurtrière. Elle a opposé, pendant près de deux mois (là où le commandement américain pensait régler l’affaire en quelques jours...), dans les 40 000 soldats américains et 10 000 soldats japonais. Si la bataille a autant duré, c’est que les Japonais avaient aménagé tout un réseau de grottes, dans l’optique de tenir le plus longtemps possible, et de rendre la victoire particulièrement coûteuse aux Américains – un scénario anticipant la (plus célèbre car hautement symbolique) bataille d’Iwo Jima (hop), quelques mois plus tard. Cet acharnement à défendre cette île minuscule, dans une opération clairement suicidaire et, funeste originalité, pour la première fois semble-t-il véritablement conçue comme telle au plan stratégique (le contingent japonais, constitué de troupes de réserve, en infériorité numérique marquée, mal équipé, mal approvisionné, et qui ne pouvait pas espérer de renforts, n’avait absolument aucune chance de l’emporter, et se rendre était inacceptable – 97 % des soldats japonais de Peleliu sont morts durant la bataille), cet acharnement, donc, tenait à ce qu’il s’y trouvait un aéroport, qui pourrait constituer un atout déterminant pour les bombardiers américains, à même depuis cette base de menacer directement le Japon, ou de fournir un support dans la campagne visant à reprendre les Philippines – de fait, la guerre dans les Palaos, et notamment à Peleliu, était associée au théâtre d’opérations philippin ; et la victoire décisive des Américains dans le Golfe de Leyte, fin octobre, avait considérablement diminué l’intérêt stratégique de la petite île de corail et de son aéroport… La bataille n’en continuerait pas moins, une des plus meurtrières de la guerre du Pacifique.







Il existe un certain nombre de mangas traitant de la Deuxième Guerre mondiale – ce même numéro d’Atom en dresse d’ailleurs un intéressant panorama (j’en aurais bien repris du rab, à vrai dire). Et le traitement de ce sujet varie considérablement… De manière périodique, le regard des Japonais sur cet affrontement est tour à tour imprégné d’héroïsme, au point parfois du révisionnisme (est-ce si étonnant, dans un pays où Abe Shinzô est Premier Ministre ?), et violemment critique ; dans les évocations de la guerre en manga, dans ce dernier registre, on pensera aussitôt à Mizuki Shigeru (notamment dans Opération Mort et les tomes 1 et, surtout, 2 de Vie de Mizuki), qui était non seulement soldat alors, mais a véritablement combattu sur le front, est passé à deux doigts de mourir à maintes reprises, et y a perdu un bras… Peleliu, Guernica of Paradise s’inscrit clairement dans la filiation de Mizuki – avec bien sûr cette différence essentielle que le jeune Takeda Kazuyoshi n’a quant à lui pas combattu, de toute évidence, mais revient sur des événements passés (et désormais lointains) avec l’assistance d’un historien.







Peleliu est le récit d’une guerre absurde et horrible, dans un cadre initialement paradisiaque ; le sort des soldats japonais émeut, mais l’inhumanité du commandement japonais, et ses innombrables brimades et mensonges, révoltent. À vrai dire, Takeda Kazuyoshi semble priser tout particulièrement l’évocation de morts parfaitement absurdes et anti-héroïques au possible : tel soldat qui trébuche et s’ouvre le crâne sur une pierre, avant même la bataille, tel autre qui est abattu par un des siens en train d’agoniser et dont le doigt était malencontreusement crispé sur la gâchette de son fusil… et quantité d’anonymes qui sont instantanément pulvérisés par une bombe tombée suffisamment près pour que la protection supposée de la grotte ne les sauve pas le moins du monde – sans même parler des charges suicides : appréciable ironie, la mort conne du sous-officier qui l’ordonne autorise ses subalternes à survivre encore quelques heures, quelques jours peut-être…







Cet accent mis sur les morts absurdes ressort tout particulièrement de la tâche confiée à notre (principal) héros et personnage point de vue, le soldat de première classe Tamaru : le jeune homme chétif et peureux, petit binoclard incapable de faire du mal à une mouche (au départ, du moins…), a (ou avait…) pour ambition de devenir mangaka – ses supérieurs le savent, et il craint tout d’abord que cela ne lui joue un mauvais tour, un énième déluge de baffes, la méthode disciplinaire par excellence de l’armée impériale… Mais les officiers entendent bien au contraire en profiter : ils ont besoin d’un « attaché au mérite », qui a pour tâche de rédiger les lettres envoyées aux parents des soldats qui ont trouvé la mort sur Peleliu (ce dès avant la bataille – à vrai dire, une fois les Américains débarqués, la simple idée que ces lettres puissent parvenir à leurs destinataires relève à son tour de l’absurde, à moins de procéder, là encore, comme dans Lettres d'Iwo Jima) ; cette mort ne peut tout simplement pas se permettre d’être « ridicule » et « gratuite » – l’office de « l’attaché au mérite » est donc d’enjoliver les faits, pour témoigner, avec ardeur patriotique et révérence pour l’empereur, d’un nécessaire ultime acte de bravoure : ce camarade, qui s’est connement fendu le crâne en trébuchant ? Le vaillant soldat de l’empereur a bien évidemment abattu des avions ennemis en s’emparant d’une mitrailleuse, geste héroïque qui coûta la vie à des Ricains en même temps qu’il sauvait celle de ses bons amis du régiment ! Banzaï ! Tamaru s’acquitte du mieux qu’il peut de sa tâche – même en comprenant alors, illumination cruelle, que le désir de ce camarade de mourir « dans un ultime acte de bravoure, comme son père » n’avait jamais été fondé sur autre chose qu’un odieux mensonge… Un même mensonge qui se répète de génération en génération. Le message est assez clair, pour le coup, et les résonances très actuelles.







Rien n’est épargné aux soldats de Peleliu – et, sans que l’on puisse pour autant parler de complaisance, Takeda Kazuyoshi ne cache rien. La terreur des interminables bombardements préliminaires, la découverte de ce qu’ils ont ravagé la si jolie petite île paradisiaque de Peleliu pour en faire un no man’s land lunaire, les terribles premières heures de la bataille, où d’innombrables vies japonaises comme américaines sont fauchées en quelques minutes, le repli dans les grottes, les blessés qui agonisent, les ressources d’ores et déjà épuisées, en eau tout particulièrement… Non, rien ne leur est épargné. Et nous n’en sommes qu’au début…







Maintenant, il faut voir comment cette histoire est racontée – ce qui saute aux yeux en regardant les couvertures. En effet, Takeda Kazuyoshi a fait le choix de prime abord incongru d’un dessin très enfantin, naïf, tout en rondeurs, faisant plus que loucher sur le super deformed, grosses têtes et petit corps. Mais il ne faut pas s’y tromper : cela ne fait certainement pas de Peleliu une bande dessinée destinée aux pitinenfants. La naïveté du trait n’y change rien, ce récit est d’une extrême noirceur, et d’une extrême violence. En fait, d’une certaine manière, ce parti-pris archétypal renforce le sentiment de violence.







Oui, ce choix peut tout d’abord paraître étonnant, voire inapproprié, mais je le trouve en définitive tout à fait pertinent – d’autant qu’il faut lui associer un character design bien pensé : les personnages ont des traits simplistes qui devraient, dans l’absolu, les rendre indiscernables les uns des autres (ce qui, dans pareil contexte, pourrait d’ailleurs faire sens, et je suppose à vrai dire qu’il y a de cela dans la mise en scène des innombrables anonymes mourant dans un absurde anonymat), mais c’est pourtant tout le contraire qui se produit : les yeux myopes et sempiternellement plissés de Tamaru derrière ses lunettes rectangulaires (l’auteur expliquant au passage en quoi ce choix n’était pas rigoureusement historique, mais pourquoi il l’a fait quand même) sont bien sûr le premier exemple que l’on a envie de citer, mais il en va de même pour les autres – ceux du moins qui ont un nom ; la simple manière de figurer la bouche, un trait dans ce sens, une épaisseur dans l’autre, suffit à identifier le caporal Yoshiki, et à exprimer sa naïveté et son dévouement – une bouche et des yeux plus larges, il s’agit du sous-lieutenant Shimada, assez bonhomme, pas moins obligé de prendre les plus cruelles des décisions – les lunettes rondes qui masquent ses yeux désignent le caporal-chef Kosugi, homme cynique et pragmatique, rusé aussi, qui ne se leurre pas sur les chances de succès des Japonais et fera tout ce qui est en son pouvoir pour survivre, quitte à piétiner les cadavres de ses compatriotes – la casquette et la moustache, c’est le fanatique et violent sergent Namoto – cette cicatrice et cette bouche large, c’est la brute Inokuma, etc. Et si les soldats américains sont trop anonymes, dans cette optique, pour bénéficier de traits aussi précis pour les singulariser (notons tout de même, car ça n’a pas toujours été le cas dans les représentations de cette guerre de part et d'autre, que nombre de ces marines sont des noirs), ils n’en expriment pas moins tous une même humanité : Tamaru confronté à un Ricain appelant sa maman dans son agonie, cela pourrait paraître convenu, mais cela touche bel et bien au cœur. Cette figuration très subtile, en quelques traits seulement, est assez remarquable, décidément – notamment eu égard à ce paradoxe voulant que l’identification aisée de ces personnages comme distincts permette pourtant au lecteur de s’identifier lui-même à chacun d’entre eux. Je manque de références manga dans ce registre, mais, instinctivement, cela m’a fait penser à Peanuts de Charles M. Schulz – dans un contexte certes on ne peut plus différent, et certes c'est là une comparaison très laudative, mais, oui, pourquoi pas ?







Ce parti-pris pourra donc déstabiliser, mais je le trouve pour ma part tout à fait approprié et pertinent. J’ai lu çà et là des critiques y trouvant quelque chose d’un peu « bâclé », et je ne suis vraiment, vraiment pas d’accord. D’autant que ce choix s’associe bien sûr, et de manière assez classique pour le coup, à une esthétique plus ou moins « ligne claire » : passé la rondeur naïve des personnages, si le décor a souvent quelque chose d’un peu abstrait, il peut cependant se montrer plus détaillé quand cela importe – que ce soit pour sublimer le paradis de Peleliu avant la bataille, ou au contraire pour exprimer la cruauté de la guerre en exposant la nature ravagée par les combats ; le dessin se montre surtout plus précis pour les engins militaires, les barges de débarquement, les tanks, les avions… Sans jamais trop en faire (et, là encore, Takeda Kazuyoshi explique brièvement dans quels cas il a décidé de faire des entorses graphiques à la rigueur historique et pour quelles raisons – par exemple concernant l’uniforme des soldats japonais). L’association de ces diverses caractéristiques fonctionne très bien.







Vous l’aurez compris, je suis très enthousiasmé, au sortir de ces deux premiers tomes de Peleliu, Guernica of Paradise. C’est une BD rude, encore une fois, ne pas s’y tromper, mais elle fait preuve d’une certaine subtilité dans sa méthode, qui vaut pour le dessin comme pour le scénario. Et ce point de vue est très intéressant – comme un contrepoint à Tarawa : atoll sanglant, de Charlier et Hubinon, BD lue et relue quand j’étais gamin puis ado, dans laquelle le point de vue américain animalisait (ou « végétalisait » ? Faces de prune, faces de citron…) un ennemi japonais par essence indifférencié et barbare. Par ailleurs, en cette triste époque où le nationalisme et le révisionnisme semblent (re)devenir toujours plus prégnants, cette BD a quelque chose de salutaire.







Mon seul regret, pour l’heure, est une certaine nonchalance dans la traduction, parfois, et (surtout ?) la relecture – la fin du deuxième tome, tout particulièrement, est saturée de coquilles, ce qui est tout de même sacrément pénible. J’espère que les jeunes éditions Vega se montreront à cet égard plus soignées dans les tomes suivants.







Ce petit bémol mis à part, oui, j’ai vraiment apprécié ces deux premiers tomes de Peleliu, Guernica of Paradise, et ai hâte de lire la suite.
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Peleliu, tome 6

Extrait :

Même si l’histoire n’est pas complètement fidèle, mais plutôt un regroupement de témoignages transformés en récit, la série a vraiment de quoi être poignante et instructive. La première chose réalisée dans une guerre (ou avant celle-ci, pour la justifier), c’est de déshumaniser l’ennemi, en faire une bête, plus facile à tuer. C’est ce qu’il se passe tant côté nippon qu’américain (ou aujourd’hui, envers la Palestine). Pourtant, dans tous les cas, ce seront des humains qui seront tués, des êtres comme vous et moi, qui ont une famille, des projets, mais que d’autres ont envoyés mourir à leur place. Parce que oui, une guerre pourrait se dérouler uniquement entre ceux en ayant vraiment envie, mais les gouvernements ne sont pas connus pour être des braves.



Moi qui me demandais si le point de vue des civils allait être abordé dans la série, j’ai désormais ma réponse ! Même si ce n’est qu’un chapitre assez court, il montre déjà énormément de choses. Notamment, que les citoyens ne sont pas au courant de la réalité sur le front (tout comme les soldats ignorent les attaques sur le pays, faute de moyens déjà, mais aussi par souhait de leurs supérieurs). Dans le cas présent, c’est la situation des parents de Tamaru qui est présenté, sans doute pour créer un lien. La famine commence à émerger au sein de la population, il n’y a plus grand monde pour cultiver la nourriture, entraînant des pénuries. À cela s’ajoute les attaques américaines par bombes incendiaires, qui se multiplient sur tout l’archipel nippon et projette des cendres jusqu’à des villages pourtant lointain. Comme ils sont peu informer, et surtout mal informer à cause de la propagande, les parents de Tamaru ne se doutent pas une seconde que leur fils est en difficulté. Pour eux, il fait partie d’un des meilleurs régiments du Japon et doit donc être bien nourri. S’ils savaient la réalité, toute la vérité, les citoyens japonais auraient sans doute réagis face à leur gouvernement. D’ailleurs, certaines parties de l’archipel « en veux » encore au gouvernement et à l’empereur quant à certains choix durant la guerre.



Pour Tamaru et les autres, l’espoir commençait à revenir, avec les vols de nourritures et matériels aux américains, ils avaient pu se refaire une santé. Mais tout cela ne fût que de courte durée, et c’était assez prévisible. Je ne saurais dire le nombre exact qu’ils étaient au total, mais ils formaient trois groupes distincts et séparés, volant à tour de rôle, et vivant à plusieurs endroits différents. Pour ainsi dire, ils étaient donc assez nombreux, et en volant autant c’était évident qu’ils allaient finir par éveiller les soupçons et se faire avoir. Je crois que cette possibilité a été évoquée, d’où le choix de se séparer en plusieurs groupes. Mais il y avait une faille, une grosse faille : le fait de savoir la position des autres groupes. Un seul membre, il aura fallu d’un seul membre capturé par l’armée américaine pour que toutes les planques soient découvertes et attaquées. Encore beaucoup de soldats sont morts, déchiquetés par les pluies de balles, ou brûlés vifs avec les réserves de nourriture. Pour Tamaru et les autres, la survie continue, et ils se retrouvent à la case départ : sans nourriture. Alors qu’ils commencent à se regrouper, l’un d’eux propose de retourner voler aux américains… bonne ou mauvaise idée, le prochain tome le dira.



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Peleliu, tome 1

Peleliu, c’est cette pépite insoupçonnée que j’ai découverte grâce à l’offre des trois premiers tomes à 3€. Puis que j’ai dévoré ! Je ne m’attendais pas du tout à adhérer à ce récit historique aux dessins un brin enfantin, mignon.



Puis j’ai plongé aux côtés des soldats et, petit à petit, surmonté avec eux des horreurs inimaginables. Heureusement que le dessin est mignon, ai-je pensé à plusieurs reprises…

On se dit que ça ne peut pas être pire et, deux pages plus loin, un nouveau bombardement, une nouvelle attaque ou un incendie viennent frapper les soldats.



Je l’ai inclus dans cette sélection à cause de son sujet, évidemment, mais aussi parce que grâce à lui je me suis rendue compte que j’adorais vraiment les mangas historiques !

Lire un manga avec des événements aussi incroyables et se dire que c’est réellement arrivé, ça ajoute du cachet et du poids à la lecture, selon moi.



En bref, Peleliu est un excellent manga historique qui a permis à d’autres mangas biographiques, ou historique, de rejoindre ma bibliothèque !

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Mon cancer couillon

Extrait :

De plus en plus courant, on a tous déjà entendu parler du mot « cancer », pour certains on l’a vécu que se soit par le biais d’un proche ou par nous même. Mais en tant que personne extérieur, peut-on vraiment comprendre ce que ressent une personne, atteinte, en pleine périodes de soins ? C’est ce que nous propose de découvrir Takeda Kazuyoshi au travers de sa propre expérience face à la maladie. Un récit où le corps et l’esprit sont mis à rude épreuve, tant pour le diagnostiqué, que pour ses proches.



La chimiothérapie n’est pas un traitement facile à subir, l’auteur nous en fais tout du long de son témoignage. Les effets secondaires sont nombreux et plus ou moins handicapants. Pour sa part, ce traitement aura un effet secondaire sur ses mains, et donc sur sa manière de dessiner. Mais comme vous vous en doutez, ce n’est pas ça qui l’a arrêter pour autant. Mais de part ma lecture de son histoire, je comprends mieux ses dessins, et je ne les vois plus du tout pareils qu’avant. Je l’admire beaucoup pour sa persévérance dans cette voie, malgré tout les défis qu’il a eu à relever, et j’ai encore plus hâte de découvrir la suite de ses séries. Je suis juste un peu curieuse de découvrir pour qui il travaillait avant, et de voir ses dessins à ce moment là également.



[...]



En bref, ce récit m’a rappeler beaucoup de choses, mais j’ai malgré tout reçu une bonne claque en le lisant. Il peut être intéressant à lire, mais j’avoue ne pas savoir à qui la conseiller, car je pense qu’on peut tous en tirer une « idée » ou un ressenti différent.



L’auteur a du faire preuve de beaucoup de courage afin de publier son histoire, très intime et au plus proche de ce qu’il a vécu. Merci pour ce témoignage, pleins de sentiments, de détermination et de courage, je vous souhaite une bonne continuation.
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Peleliu, tome 2

Extrait :

On continue de suivre Tamaru, qui essaie de survivre coûte que coûte à cette horrible guerre, désormais perdue pour son île. Les rencontres s’enchaînent, les échanges d’opinions également, mais tout n’est que de courte durée avec les attaques incessantes de l’armée américaine.



De nouvelles scènes assez horribles sont présentés dans ce nouveau volume, notamment autour de l’idée de suicide collectif (une de ses scènes est présenté dans l’image ci-dessous). En effet, pour plusieurs raisons, les soldats japonais préférés mourir « au combat » plutôt que d’être capturé par l’ennemi, ou tout bonnement vouloir survivre. Ce n’est évidemment pas le cas de notre personnage principal Tamaru, ainsi que pour certains de ses camarades. Une fois de plus, l’horreur de la guerre et d’une idéologie extrême sont montrées au seins de ce manga. De quoi, renouveler une nouvelle fois l’idée que les soldats japonais avaient peut-être des tendances suicidaires, mais qu’ils restaient humains pour autant.



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En bref, ce deuxième tome a été tout aussi intéressant à lire que le précédent. Comme toujours le contraste entre les dessins simples et la difficulté psychologique de la guerre est saisissante.
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Peleliu, tome 1

Extrait :

Peleliu est un seinen historique, édité aux éditions Vega, son histoire nous porte aux côté de soldats Japonais durant la seconde guerre mondiale qui se déroule aussi dans l’océan Pacifique. Cette guerre, nommée guerre du pacifique, est d’ailleurs séparée de la seconde guerre mondiale que l’on connait, étant donné que l’origine du conflit est dû à l’expansion Japonaise (et l’attaque de Pearl Harbor) et non de celui de l’Allemagne Nazi. C’est ainsi, que l’on se retrouve projeté sur l’une des îles où eu lieu d’immenses combats, et surtout, de nombreux morts…



Kazuyoshi Takeda est l’auteur de ce manga, par ses dessins simplistes, on pourrait croire que le manga c’est trompé de catégorie. Mais ne vous y fiez pas ! Car malgré ses dessins très simplistes et mimi, la guerre et ses horreurs n’en sont pas pour autant plus jolis à voir ! On pourrait également douté sur la véracité du récit raconté par l’auteur, mais même si les personnages, ainsi que leur destin, ont été crée de toute pièce, la trame principale elle, est belle et bien historique ! En effet, l’auteur à pris la peine de se faire assister par un historien, spécialiste sur la guerre du pacifique, du nom de Masao Hiratsuka !



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En bref, ce premier tome est une grosse réussite à mes yeux, de quoi apprendre encore un peu, avec un point de vue différent.
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Peleliu, tome 2

L'auteur poursuit son très beau témoignage donc une suite encore plus sombre, plus rude, plus morbide et un peu plus compliquée à lire.



En effet, j'ai trouvé l'ambiance de ce tome 2 beaucoup plus lourde et donc la narration plus poussive. Alors même si ça m'a beaucoup intéressée, j'ai été moins prise par cette lecture pour laquelle j'ai dû me reprendre à plusieurs fois, faisant des pauses libératoires.



Dans cette suite l'auteur met deux thématiques complémentaires au coeur de son récit : l'importance de l'eau et l'horreur des morts. Le héros, toujours témoin privilégié de cette attaque qui n'en finit pas, se retrouve en proie à ce qu'il y a de pire : l'obsession, celle de la mort et celle de l'eau. Il faut dire que l'attaque des Américains arrive au pire moment, lors de jours où il ne pleut pas, alors entre les attaques permanentes et l'absence d'eau, dur dur pour le moral.



J'ai à nouveau trouvé que l'ambiance été parfaitement retranscrite, pesante mais réaliste. On sent bien le poids de ces longues journées, la répétition de moments monotones et terrifiants et surtout la tragédie des morts et leur omniprésence. Il est normal qu'il y ait des morts lors d'une guerre me direz-vous, mais lorsque les vivants côtoient les morts avec un tel rapport de proximité, c'est rude. La frontière entre les deux est vraiment des plus ténues et surtout une forme toute particulière de mort est mise en avant : celle du suicide, du sacrifice pour ce qu'on pense être le bien commun. C'est la plus grande tragédie ici et ça m'a retournée. Le héros, avec son rôle d'attaché à la mémoire des morts, est forcément en plein coeur de tout ça et on sent bien combien il est proche de vaciller.



Heureusement, il n'y a pas que ça. On assiste également à l'avancée des Américains, apercevant brièvement les états-majors de chacun, ce qui donne une petite place à la stratégie, ce qui ne me déplait pas. On continue à en apprendre de belles sur les détails glanés sur le quotidien de cette guerre par l'auteur qui a fait un sérieux travail de documentation comme il l'explique encore à la fin.



Pour tenter de diversifier un peu son histoire, il nous fait également rencontrer pas mal de nouveaux personnages, ce qui accentue le sentiment qu'un ami est aussi vite fait que perdu à la guerre. On voit également des hommes qui sont tous un peu focus sur ce qu'il se passe et coupés du reste, déconnecté de la vie humaine. Triste mais réaliste.



Cela reste donc une très bonne lecture mais il vaut mieux avoir sacrément le coeur accroché pour en venir à bout. Pour ma part, cela devient dur d'enchaîner les lectures et j'ai besoin de pause entre les tomes voire les chapitres ^^!
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Mon cancer couillon

Kazuyoshi Takeda raconte son parcours lorsqu'un cancer des testicules lui a été diagnostiqué alors qu'il n'avait que 35 ans, de la découverte de la maladie à son hospitalisation, ses rencontres avec d'autres patients et l'impact sur sa vie de couple. Ce n'est pas tant l'histoire à laquelle je n'ai pas adhérée mais plutôt ce format de successions de récits "tranche de vie" très courts que je n'aime pas en général. J'ai trouvé le tout assez long et répétitif, bien que ce témoignage mélange des situations ét émotions variées, avec une dominante d'humour.
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Peleliu, tome 2

J’ai découvert le tome 1 de Peleliu : Guernica of Paradise il y a plus d’un an maintenant et j’avais hâte de retrouver Tamaru et ses camarades pour savoir ce qu’il adviendrait d’eux. Ce deuxième tome m’a autant plu que le premier, j’y ai retrouvé tous les ingrédients qui m’avaient fait aimer cette série. Tout d’abord, ce manga se déroule dans le contexte historique de la seconde guerre mondiale, sur l’île du Peleliu où s’est déroulée l’une des plus horribles batailles entre Japonais et Américains. Encore une fois, j’ai aimé que la vérité nous soit dévoilée crûment. L’auteur n’enjolive pas la situation, n’essaie pas d’atténuer l’horreur du combat auquel participe Tamaru. Tout comme dans le premier tome, j’ai encore une fois aimé découvrir la guerre côté japonais. C’est une autre perspective. Ici l’ennemi n’est pas le Japonais, mais l’Américain. Enfin, cela ne change pas grand-chose au final, puisqu’ils sont tous aussi jeunes, ils ont tous été impliqués dans cette guerre parce que leur gouvernement le voulait, ils ont tous peur de la mort… Enfin, peut-être pas tous.



Ce qui est particulièrement frappant dans ce deuxième tome, c’est le nombre de personnages qui avouent ne pas avoir peur de mourir, qu’il vaut mieux ça plutôt que de rentrer au pays, dans la honte. Tamaru n’est pas de ceux-là et il est tout aussi choqué de voir que ses camarades sont prêts à risquer leur peau, voir même à commettre des imprudences si cela leur apporte les honneurs. Tamaru, lui, a peur de mourir. Il aime pourtant son pays et ses camarades, mais il veut continuer à vivre. Cet aspirant mangaka n’imagine pas sa vie se terminer sur cette île et c’est touchant de voir son désarroi. Néanmoins, il n’est pas un lâche pour autant. Il se bat comme les autres et il va se retrouver dans des situations horribles qui, encore une fois dans ce tome, sont dessinées avec maints détails (je pense, par exemple, à la scène avec les crabes et le cadavre…). Rien n’est épargné à Tamaru, ni au lecteur, c’est pour cela qu’on se retrouve vraiment plongé au cœur de Peleliu, pendant la seconde guerre mondiale.



Encore une fois, dans ce tome, on découvre le comportement des Japonais et leur mentalité du bushido. Mais si certains guerriers sont prêts à mourir pour leur patrie, sans trahir une seule once de peur, d’autres montrent leur humanité, même involontairement. Ainsi, lorsqu’on demande à Tamaru d’interroger des soldats pour savoir comment ils ont été blessés et ce qu’il est advenu de leurs camarades, on en voit certains devenir complètement fous. Il y a ceux qui n’arrivent pas à parler, ceux qui sont incohérents… En bref, on découvre le syndrome de stress post-traumatique du côté japonais, chose que je n’avais jamais vu puisque les soldats japonais sont souvent décrits comme des hommes infaillibles, qui n’ont aucune pitié voire même aucune humanité. On voit dans ce livre que c’est complètement faux et cela donne vraiment une autre dimension à la guerre du Pacifique par rapport à celle qu’on a l’habitude de voir dans nos reportages et documentaires occidentaux. Ce tome 2 a donc été un coup de cœur pour moi, comme le précédent. Je vais bien sûr continuer cette série et j’ai hâte de lire les prochaines aventures de Tamaru et ses camarades.
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Peleliu, tome 1

Dans ce manga, qui est le premier tome, on va suivre un soldat bien particulier. Il s’appelle Tamaru. Au Japon, avant que la guerre n’éclate, il dessinait des mangas en plus de son travail. À la guerre, il ne sait pas trop ce qu’il fait là. Il semble apeuré et complètement perdu dès qu’on le rencontre dans le manga (on peut comprendre vu les circonstances). Il est réprimandé par son sergent parce qu’il est toujours en train de dessiner ce qu’il vit. Quand on début l’histoire, les Américains n’ont pas encore commencé à attaquer. Les Japonais préparent le terrain. Ils ont creusé un tas de galeries et de grottes pour se protéger des bombardements, ce qui expliquera comment ils ont pu tenir face à la force de tir et le nombre plus grand de soldats américains.



Les événements s’enchaînent et les bombardements commencent. L’ami de Tamaru décède après un bombardement… Il était en train de dire à Tamaru qu’il voulait mourir héroïquement, mais il finit par tomber et se cogner à la tête en tentant de fuir les bombardements. C’est après ça que Tamaru se voit confier une nouvelle mission par son sous-lieutenant. Attaché au mérite. C’est lui qui rédigera les lettres pour annoncer aux familles que leurs proches sont morts héroïquement. Puisqu’il savait inventer des histoires avant, il peut encore le faire pour l’honneur de ses camarades.



J’ai vraiment beaucoup apprécié la lecture de ce premier tome. Tamaru est attachant et le fait de voir la guerre à travers ses yeux fait que l’on en ressent l’horreur tout en notant les petites choses qu’il relève aussi : un arc-en-ciel, les étoiles dans la nuit noire. J’ai trouvé le tout très juste. L’approche pour aborder cette bataille est plutôt réussie. Il faut savoir que le grand-père de l’auteur du manga était à la bataille de Peleliu, et même s’il est annoncé qu’il s’agit d’une fiction qui se base sur ces événements tragiques, on sent qu’il y a une réelle envie de chercher à partager ce qu’il s’est passé pour ces soldats japonais. J’ai hâte de découvrir la suite !
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Peleliu, tome 2

Critique commune aux tomes 1 et 2.



Comme ses prédécesseurs, le n° 8 de l’excellente revue Atom m’a fait découvrir un certain nombre de mangas ayant l’air intéressants, dont, dans l’actualité, cette série qu’est Peleliu, Guernica of Paradise, due à Takeda Kazuyoshi, et dont la publication française vient d’être entreprise par un nouvel éditeur de manga, Vega. Les deux premiers volumes sont parus d’emblée, et ce sont ceux dont je vais vous parler aujourd’hui, mais la série est en cours de publication au Japon, où il y a au moins trois autres volumes, qui devraient être traduits relativement rapidement, ai-je cru comprendre.







Peleliu, Guernica of Paradise est un manga de guerre, centré sur le récit de la sanglante bataille de Peleliu, une paradisiaque (donc) petite île de corail dans l’archipel des Palaos. Cette bataille, semble-t-il méconnue des Japonais contemporains (tout particulièrement à en croire Hiratsuka Masao, un spécialiste de la guerre du Pacifique qui a conseillé Takeda Kazuyoshi dans la conception de cette BD), cette bataille donc a eu lieu entre septembre et novembre 1944, et a été particulièrement meurtrière. Elle a opposé, pendant près de deux mois (là où le commandement américain pensait régler l’affaire en quelques jours...), dans les 40 000 soldats américains et 10 000 soldats japonais. Si la bataille a autant duré, c’est que les Japonais avaient aménagé tout un réseau de grottes, dans l’optique de tenir le plus longtemps possible, et de rendre la victoire particulièrement coûteuse aux Américains – un scénario anticipant la (plus célèbre car hautement symbolique) bataille d’Iwo Jima (hop), quelques mois plus tard. Cet acharnement à défendre cette île minuscule, dans une opération clairement suicidaire et, funeste originalité, pour la première fois semble-t-il véritablement conçue comme telle au plan stratégique (le contingent japonais, constitué de troupes de réserve, en infériorité numérique marquée, mal équipé, mal approvisionné, et qui ne pouvait pas espérer de renforts, n’avait absolument aucune chance de l’emporter, et se rendre était inacceptable – 97 % des soldats japonais de Peleliu sont morts durant la bataille), cet acharnement, donc, tenait à ce qu’il s’y trouvait un aéroport, qui pourrait constituer un atout déterminant pour les bombardiers américains, à même depuis cette base de menacer directement le Japon, ou de fournir un support dans la campagne visant à reprendre les Philippines – de fait, la guerre dans les Palaos, et notamment à Peleliu, était associée au théâtre d’opérations philippin ; et la victoire décisive des Américains dans le Golfe de Leyte, fin octobre, avait considérablement diminué l’intérêt stratégique de la petite île de corail et de son aéroport… La bataille n’en continuerait pas moins, une des plus meurtrières de la guerre du Pacifique.







Il existe un certain nombre de mangas traitant de la Deuxième Guerre mondiale – ce même numéro d’Atom en dresse d’ailleurs un intéressant panorama (j’en aurais bien repris du rab, à vrai dire). Et le traitement de ce sujet varie considérablement… De manière périodique, le regard des Japonais sur cet affrontement est tour à tour imprégné d’héroïsme, au point parfois du révisionnisme (est-ce si étonnant, dans un pays où Abe Shinzô est Premier Ministre ?), et violemment critique ; dans les évocations de la guerre en manga, dans ce dernier registre, on pensera aussitôt à Mizuki Shigeru (notamment dans Opération Mort et les tomes 1 et, surtout, 2 de Vie de Mizuki), qui était non seulement soldat alors, mais a véritablement combattu sur le front, est passé à deux doigts de mourir à maintes reprises, et y a perdu un bras… Peleliu, Guernica of Paradise s’inscrit clairement dans la filiation de Mizuki – avec bien sûr cette différence essentielle que le jeune Takeda Kazuyoshi n’a quant à lui pas combattu, de toute évidence, mais revient sur des événements passés (et désormais lointains) avec l’assistance d’un historien.







Peleliu est le récit d’une guerre absurde et horrible, dans un cadre initialement paradisiaque ; le sort des soldats japonais émeut, mais l’inhumanité du commandement japonais, et ses innombrables brimades et mensonges, révoltent. À vrai dire, Takeda Kazuyoshi semble priser tout particulièrement l’évocation de morts parfaitement absurdes et anti-héroïques au possible : tel soldat qui trébuche et s’ouvre le crâne sur une pierre, avant même la bataille, tel autre qui est abattu par un des siens en train d’agoniser et dont le doigt était malencontreusement crispé sur la gâchette de son fusil… et quantité d’anonymes qui sont instantanément pulvérisés par une bombe tombée suffisamment près pour que la protection supposée de la grotte ne les sauve pas le moins du monde – sans même parler des charges suicides : appréciable ironie, la mort conne du sous-officier qui l’ordonne autorise ses subalternes à survivre encore quelques heures, quelques jours peut-être…







Cet accent mis sur les morts absurdes ressort tout particulièrement de la tâche confiée à notre (principal) héros et personnage point de vue, le soldat de première classe Tamaru : le jeune homme chétif et peureux, petit binoclard incapable de faire du mal à une mouche (au départ, du moins…), a (ou avait…) pour ambition de devenir mangaka – ses supérieurs le savent, et il craint tout d’abord que cela ne lui joue un mauvais tour, un énième déluge de baffes, la méthode disciplinaire par excellence de l’armée impériale… Mais les officiers entendent bien au contraire en profiter : ils ont besoin d’un « attaché au mérite », qui a pour tâche de rédiger les lettres envoyées aux parents des soldats qui ont trouvé la mort sur Peleliu (ce dès avant la bataille – à vrai dire, une fois les Américains débarqués, la simple idée que ces lettres puissent parvenir à leurs destinataires relève à son tour de l’absurde, à moins de procéder, là encore, comme dans Lettres d'Iwo Jima) ; cette mort ne peut tout simplement pas se permettre d’être « ridicule » et « gratuite » – l’office de « l’attaché au mérite » est donc d’enjoliver les faits, pour témoigner, avec ardeur patriotique et révérence pour l’empereur, d’un nécessaire ultime acte de bravoure : ce camarade, qui s’est connement fendu le crâne en trébuchant ? Le vaillant soldat de l’empereur a bien évidemment abattu des avions ennemis en s’emparant d’une mitrailleuse, geste héroïque qui coûta la vie à des Ricains en même temps qu’il sauvait celle de ses bons amis du régiment ! Banzaï ! Tamaru s’acquitte du mieux qu’il peut de sa tâche – même en comprenant alors, illumination cruelle, que le désir de ce camarade de mourir « dans un ultime acte de bravoure, comme son père » n’avait jamais été fondé sur autre chose qu’un odieux mensonge… Un même mensonge qui se répète de génération en génération. Le message est assez clair, pour le coup, et les résonances très actuelles.







Rien n’est épargné aux soldats de Peleliu – et, sans que l’on puisse pour autant parler de complaisance, Takeda Kazuyoshi ne cache rien. La terreur des interminables bombardements préliminaires, la découverte de ce qu’ils ont ravagé la si jolie petite île paradisiaque de Peleliu pour en faire un no man’s land lunaire, les terribles premières heures de la bataille, où d’innombrables vies japonaises comme américaines sont fauchées en quelques minutes, le repli dans les grottes, les blessés qui agonisent, les ressources d’ores et déjà épuisées, en eau tout particulièrement… Non, rien ne leur est épargné. Et nous n’en sommes qu’au début…







Maintenant, il faut voir comment cette histoire est racontée – ce qui saute aux yeux en regardant les couvertures. En effet, Takeda Kazuyoshi a fait le choix de prime abord incongru d’un dessin très enfantin, naïf, tout en rondeurs, faisant plus que loucher sur le super deformed, grosses têtes et petit corps. Mais il ne faut pas s’y tromper : cela ne fait certainement pas de Peleliu une bande dessinée destinée aux pitinenfants. La naïveté du trait n’y change rien, ce récit est d’une extrême noirceur, et d’une extrême violence. En fait, d’une certaine manière, ce parti-pris archétypal renforce le sentiment de violence.







Oui, ce choix peut tout d’abord paraître étonnant, voire inapproprié, mais je le trouve en définitive tout à fait pertinent – d’autant qu’il faut lui associer un character design bien pensé : les personnages ont des traits simplistes qui devraient, dans l’absolu, les rendre indiscernables les uns des autres (ce qui, dans pareil contexte, pourrait d’ailleurs faire sens, et je suppose à vrai dire qu’il y a de cela dans la mise en scène des innombrables anonymes mourant dans un absurde anonymat), mais c’est pourtant tout le contraire qui se produit : les yeux myopes et sempiternellement plissés de Tamaru derrière ses lunettes rectangulaires (l’auteur expliquant au passage en quoi ce choix n’était pas rigoureusement historique, mais pourquoi il l’a fait quand même) sont bien sûr le premier exemple que l’on a envie de citer, mais il en va de même pour les autres – ceux du moins qui ont un nom ; la simple manière de figurer la bouche, un trait dans ce sens, une épaisseur dans l’autre, suffit à identifier le caporal Yoshiki, et à exprimer sa naïveté et son dévouement – une bouche et des yeux plus larges, il s’agit du sous-lieutenant Shimada, assez bonhomme, pas moins obligé de prendre les plus cruelles des décisions – les lunettes rondes qui masquent ses yeux désignent le caporal-chef Kosugi, homme cynique et pragmatique, rusé aussi, qui ne se leurre pas sur les chances de succès des Japonais et fera tout ce qui est en son pouvoir pour survivre, quitte à piétiner les cadavres de ses compatriotes – la casquette et la moustache, c’est le fanatique et violent sergent Namoto – cette cicatrice et cette bouche large, c’est la brute Inokuma, etc. Et si les soldats américains sont trop anonymes, dans cette optique, pour bénéficier de traits aussi précis pour les singulariser (notons tout de même, car ça n’a pas toujours été le cas dans les représentations de cette guerre de part et d'autre, que nombre de ces marines sont des noirs), ils n’en expriment pas moins tous une même humanité : Tamaru confronté à un Ricain appelant sa maman dans son agonie, cela pourrait paraître convenu, mais cela touche bel et bien au cœur. Cette figuration très subtile, en quelques traits seulement, est assez remarquable, décidément – notamment eu égard à ce paradoxe voulant que l’identification aisée de ces personnages comme distincts permette pourtant au lecteur de s’identifier lui-même à chacun d’entre eux. Je manque de références manga dans ce registre, mais, instinctivement, cela m’a fait penser à Peanuts de Charles M. Schulz – dans un contexte certes on ne peut plus différent, et certes c'est là une comparaison très laudative, mais, oui, pourquoi pas ?







Ce parti-pris pourra donc déstabiliser, mais je le trouve pour ma part tout à fait approprié et pertinent. J’ai lu çà et là des critiques y trouvant quelque chose d’un peu « bâclé », et je ne suis vraiment, vraiment pas d’accord. D’autant que ce choix s’associe bien sûr, et de manière assez classique pour le coup, à une esthétique plus ou moins « ligne claire » : passé la rondeur naïve des personnages, si le décor a souvent quelque chose d’un peu abstrait, il peut cependant se montrer plus détaillé quand cela importe – que ce soit pour sublimer le paradis de Peleliu avant la bataille, ou au contraire pour exprimer la cruauté de la guerre en exposant la nature ravagée par les combats ; le dessin se montre surtout plus précis pour les engins militaires, les barges de débarquement, les tanks, les avions… Sans jamais trop en faire (et, là encore, Takeda Kazuyoshi explique brièvement dans quels cas il a décidé de faire des entorses graphiques à la rigueur historique et pour quelles raisons – par exemple concernant l’uniforme des soldats japonais). L’association de ces diverses caractéristiques fonctionne très bien.







Vous l’aurez compris, je suis très enthousiasmé, au sortir de ces deux premiers tomes de Peleliu, Guernica of Paradise. C’est une BD rude, encore une fois, ne pas s’y tromper, mais elle fait preuve d’une certaine subtilité dans sa méthode, qui vaut pour le dessin comme pour le scénario. Et ce point de vue est très intéressant – comme un contrepoint à Tarawa : atoll sanglant, de Charlier et Hubinon, BD lue et relue quand j’étais gamin puis ado, dans laquelle le point de vue américain animalisait (ou « végétalisait » ? Faces de prune, faces de citron…) un ennemi japonais par essence indifférencié et barbare. Par ailleurs, en cette triste époque où le nationalisme et le révisionnisme semblent (re)devenir toujours plus prégnants, cette BD a quelque chose de salutaire.







Mon seul regret, pour l’heure, est une certaine nonchalance dans la traduction, parfois, et (surtout ?) la relecture – la fin du deuxième tome, tout particulièrement, est saturée de coquilles, ce qui est tout de même sacrément pénible. J’espère que les jeunes éditions Vega se montreront à cet égard plus soignées dans les tomes suivants.







Ce petit bémol mis à part, oui, j’ai vraiment apprécié ces deux premiers tomes de Peleliu, Guernica of Paradise, et ai hâte de lire la suite.
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Peleliu, tome 1

C’est sur les conseils d’une vendeuse spécialisée « mangas » que j’ai découvert ce 1er tome de Peleliu.

Je ne connaissais absolument pas cette tragédie historique de la seconde guerre mondiale, et suis bluffé par l’intensité du scénario et des dialogues. Si le dessin paraît minimaliste (pour les soldats) il n’en reste pas moins d’une incroyable force.

J’ai adoré ! Vivement la suite…
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Peleliu, tome 4

Extrait :

Je reprends enfin ma lecture de cette série dramatique, parce que j’ai désormais la série complète, et surtout, parce que le spin off vient de sortir. Dès les premiers tomes, la série a su marquer mon esprit, ses dessins étant en totale oppositions avec l’horreur des actions. C’est typiquement le genre de titre auquel on ne s’attend pas, et donc… le genre de titres qui peut être mis entre les mains d’enfants trop jeunes pour son contenu. Je le redis donc (sûrement), mais il s’agit d’une lecture pour un lectorat avec un certain âge.



Ce tome est tout aussi puissant que les précédents, le moral des troupes japonaises est au plus bas. Comme si cela ne suffisait pas, ils sont aussi en manque de nourritures et poursuivis par l’armée ennemi. Celle-ci semble également assez peu concilient et tue les soldats nippon à vue. Allant parfois même, jusqu’à les enfermer vivant dans les grottes où ils se cachent. Il faut dire qu’ils voient les soldats japonais un peu comme des barbares, puisqu’ils n’hésitent pas à pendre les cadavres des soldats américains. Ces actes peu glorieux viennent impacter tous les soldats, y compris ceux qui ne souhaitent pas combattre, mais juste vivre. Pour Tamaru, les morts s’accumulent et il commence à être fortement hanté par eux. Son esprit est d’ores et déjà marqué à vie par cette guerre. Cette blessure, on peut toujours la voir aujourd’hui chez certains soldats, c’est pour cela qu’il y a un suivi psychologique. Tamaru semble victime du syndrome du survivant, entendant les morts lui reprocher d’être toujours en vie et de fuir.



Je serais curieuse de savoir combien de japonais souhaitait cette guerre. Je suppose que beaucoup ont eu leur cerveau lavé par la propagande, comme de partout. Malheureusement, la réalité est souvent tout autre. Alors même que leur première attaque, de Pearl Harbor, reste une prouesse tactique, une prouesse mortelle, elle semble être aussi la seule ayant réellement servi à leur armée. On pense également souvent à l’aviation japonaise et ses « kamikazes », mais on oublie que cette même stratégie était aussi utilisée par les autres soldats. La série montre bien qu’il y a différent type de soldats, ceux prêts à se battre jusqu’à la mort pour l’honneur (mon œil), ceux mettant fin à leur joue pour ne pas finir dans le déshonneur, et ceux pensant juste à vivre (les saints d’esprit quoi). Sur Peleliu, l’armée japonaise est fragmentée et décimée petit à petit par les ricains. Certains soldats continuent malgré tout de combattre jusqu’au bout, tant leur folie est grande. Peut-être que la fin les empêche de vraiment poser le pour et le contre, ou bien, ils ont tellement peu d’informations qu’ils ignorent leur défaite facilement prévisible. Je dis toujours que la Guerre du Pacifique était prévisible, parce que ça l’est. Elle a lieu de manière proche du Japon, la pression n’est donc pas la même que pour les USA qui est protégée. Les usines américaines tournent à pleins régime, et je ne parle même pas de la population qui devait être aussi d’un nombre bien différent.



[...]
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Peleliu, tome 8

Le rythme s’essouffle. Je me demande pour le moment si 11 tomes de ce manga ne sont pas trop. Depuis le 6eme déjà je me demande ce qui peut être raconté de plus. Les tomes précédentes avaient un cachet particulier, ici les dialogues me paraissent de plus en plus vides. Du moins je ressens une certainement frustration à la fin de cette lecture. C’est certainement lié au manque de charisme du protagoniste.



Je comprends que le but est de certainement montrer une attente insoutenable. La guerre est finie, les combats ont cessé et une période de flou, de transition suite à la fin du conflit prend place.. mais justement, j’attends que quelque chose se passe ! Le doute s’immisce et la lutte est remise en question. Enfin une prise d’initiative qui promet un 9eme opus plus palpitant !
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Peleliu, tome 6

« On a donc tous été attaqués, aujourd'hui ...»



Île de Peleliu, 1945. le soldat japonais Tamaru et ses compagnons d'armes reprennent des forces grâce à la nourriture qu'ils volent au camp américain. Malheureusement, le répit est de courte durée ! Après avoir capturé et obligé le lieutenant Takenouchi à révéler l'emplacement secret de l'abri nippon, l'armée américaine lance alors une « grande opération de nettoyage » visant à détruire toute résistance dans le camp adverse.



Plus on avance dans la série, plus le mangaka Takeda met en relief la cruauté des combats de cette bataille méconnue de la Seconde Guerre mondiale et la disproportion des forces (zéro perte du côté américain/ grand nombre de morts et de blessés du côté du pays du Soleil Levant). Il montre aussi les crimes de guerre et les différences de comportement au sein des soldats :certains restent très humains tandis que d'autres, insensibles, cèdent à la haine et à la barbarie.



Le tome 6 dévoile les conditions de vie dramatiques des civils restés au Japon avec le passage sur les parents de Tamaru souffrant du rationnement, conséquence du conflit.



Les encarts « souvenirs des champs de bataille » apportent une vraie valeur qualitative au manga : mention spéciale à celui sur « les bombardements de Tokyo » où Masao Hiratsuka, 8 ans au moment des tragiques évènements du 10 mars 1945, revient sur ce sombre épisode.



Ce sixième volume nous plonge également dans le quotidien et l'intimité des soldats : Tamaru découvre ainsi le secret d'Izumi, secret qu'il va protéger. Par ailleurs, aucun fait ne nous est caché : dissensions entre les soldats, excréments devant être déposés loin de l'abri pour ne pas se faire repérer, soldats ensevelis vivants ayant dû manger leurs camarades morts, initiation à la langue américaine avec le militaire Iriki pour trouver les rations alimentaires lors des intrusions dans le camp ennemi...



Dans la postface, nous apprenons que chaque année au mois de novembre, au sanctuaire Gokoku, département d'Ibaraki, se tient une commémoration en hommage aux militaires morts de l'infanterie II de Mito et de la garnison de Peleliu.



Vite le tome 7 pour savoir ce qu'il advient du courageux soldat Tamaru et de ses amis !

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Peleliu, tome 5

« Cette opération consiste à en finir avec le problème du ravitaillement, afin de nous rassembler et nous relever, nous les survivants ! C’est le premier pas pour arriver un jour à vaincre l’armée américaine ! ».



Janvier 1945. Après avoir été mise à mal par les bombardements intempestifs de l’armée américaine, l’île de Peleliu renaît de ses cendres. Tamaru, Yoshiki et le caporal-chef Kosugi vadrouillent prudemment à la recherche de nourriture et d’éventuels survivants. Les conditions de vie sont toujours aussi éprouvantes. Un jour, ils découvrent des boîtes de conserve de l’armée américaine ainsi qu’un message gravé sur le sol encourageant les soldats japonais à dérober du matériel à l’armée américaine et à se rassembler à l’ancien camp. Arrivés près du lieu de rendez-vous, ils retrouvent d’autres survivants ainsi qu’Izumi et le sous-lieutenant Shimada. Ce dernier a élaboré une stratégie pour s’introduire et voler de la nourriture dans le camp ennemi sans devoir sacrifier aucun combattant japonais. Mais le sous-lieutenant poursuit également un autre objectif…



Passionnant cinquième opus de la série Peleliu-Guernica of Paradise !



Le mangaka Kazuyoshi Takeda met en relief la sagesse et la lucidité du héros Tamaru qui a beaucoup évolué depuis le premier tome. Toutefois, ce personnage continue de s’adresser fictivement à sa mère pour confier sa peine et ses doutes : on mesure ainsi à quel point cette guerre a dû être éprouvante pour les jeunes soldats japonais livrés à eux-mêmes.



Le mangaka souligne aussi l’ingéniosité du sous-lieutenant Shimada dans la conduite de l’opération ravitaillement ainsi que la solidarité des soldats lors du sauvetage harassant du caporal-chef Katakura et de ses hommes.



Ce tome met aussi en valeur les relations complexes au sein de la troupe : le lieutenant Takenouchi prenant ombre de la popularité du sous-lieutenant Shimada, les interrogatoires tendus des soldats à cran.



Présents dans chaque album, les encarts explicatifs apportent beaucoup d’informations historiques sur ce conflit méconnu de la Seconde Guerre mondiale.



Le dessin faussement kawaii de Takeda ne cache pas l’horreur de ce qu’ont vécu les soldats japonais et américains durant cette bataille qui s’est éternisée. Mention spéciale à la planche bouleversante où le sous-lieutenant Shimada et Izumi se recueillent.



Ce cinquième volume se termine sur une planche sinistre qui donne terriblement envie de lire la suite !
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