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Critiques de Tarjei Vesaas (144)
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Le vent du nord

Dans ces textes aux allures de contes nordiques, la mort voisine avec la folie. Les drames sont imminents, qu’ils soient minuscules ou terribles. Chaque protagoniste se tient au seuil du changement, et ce dernier est rarement pour le mieux. Les malheurs sont tonitruants, mais les chagrins restent muets.



La vie et la mort d’une fourmi illustrent cruellement ce que sont l’obstination et la prédestination.

Un enfant malade se réjouit du grand voyage qu’il entreprend à la ville avec son père inquiet.

Que signifie demain pour un bonhomme pain d’épices accroché à l’arbre décoré, le soir de Noël ?

Une journée d’anniversaire fait passer du ravissement au désespoir une enfant coquette.

L’inspection de la classe n’est pas difficile que pour la jeune maîtresse d’école.

Une journée d’abattage en forêt est l’occasion de rendre grâce pour les bénédictions quotidiennes.

Qu’est-ce qu’une vie de labeur face à l’insouciance des enfants ?

Un meunier épuisé est tourmenté par une sinistre apparition dans son moulin.

Un nouveau-né attend, certain que le monde est amical, inconscient du grand malheur qu’est son existence.

Un voyageur de nuit est saisi d’angoisse à l’idée d’être seul dans son compartiment de train.

Une enfant s’impatiente devant sa chatte qui tarde à accoucher.

Un voyage en autocar devient le premier pas vers l’amour.

Un homme idiot se voit confier l’abattage de grands arbres, seul sur une île.



Par moment, ces récits anodins flirtent avec le fantastique quand ils ne plongent pas allègrement dans l’horreur. Pas besoin de monstres terribles pour cela : c’est le quotidien, l’humanité même qui sont les menaces. « Il est là, celui qui n’a pas de nom, et qu’elle a abandonné dans un pays profané et taciturne. Jamais personne n’a été aussi seul, aussi abandonné. Il vient d’arriver dans ce monde et il est couché dans la lumière du jour. […] Nul n’est jamais sorti aussi nu du sein de sa mère. » (p. 141) Mais toujours, inexorable, la vie revient, surmonte, triomphe. Chaque fin porte en elle une vitalité nouvelle. Le dernier texte rappelle furieusement Les oiseaux puisque l’on retrouve Mattis, imbécile obstiné qui doute tant de lui et des autres. Une fois encore, Tarjei Vesaas m’émeut avec sa poésie de la nature et son regard porté sur les humains.

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Palais de glace

Les lectures récentes de Jon Fosse et de Karl Ove Knausgaard m'ont donné envie de continuer d'explorer les chefs d'oeuvre de la littérature norvégienne. Mon choix s'est porté sur les livres de Tarjeï Vesaas, nouvelliste poète norvégien du début du 20ème siècle. Parmi ses livres, deux romans semblaient particulièrement ressortir, deux romans d'après-guerre : Les oiseaux et Palais de glace.



Palais de glace, paru en 1963, est une très belle histoire, d'une grande poésie, celle d'une amitié absolue entre deux fillettes de onze ans dans un univers onirique, à la fois très réaliste mais aussi mythique.



«On était encore en plein après-midi, en fait. Pourtant tout était plongé dans la nuit en cette fin d'automne figée par le gel. Des étoiles mais pas de lune, pas de neige susceptible de produire des reflets nacrés – l'obscurité n'en était que plus dense, en dépit des étoiles.»



Unn arrive dans le petit village de sa tante à la fin de l'été. Ayant perdu sa mère, ne connaissant pas son père, la petite orpheline vit désormais chez cette vieille tante qui l'a accueillie.

La nouvelle écolière est particulière et se fait remarquer par la distance et la réserve qu'elle maintient entre elle et les autres enfants de l'école. Pourtant tous se sont efforcés de l'intégrer. Seule Siss n'a pas renoncé, obnubilée par cette fille dont l'inaccessibilité est certainement promesse d'une forte personnalité, voire d'un secret.

Elles finissent par s'inviter et à passer une soirée ensemble. Siss en apprend alors un peu plus sur Unn, dans l'intimité de sa chambre fermée à double tour. Elles se dévoilent, troublées, et tournent autour du mystère qui les attire l'une vers l'autre, mystère seulement effleuré, jamais révélé, contourné, enrobé par le silence et le trouble. Dans tous les cas, l'amitié entre les deux filles est désormais scellée.



Le lendemain de cette soirée importante, Unn décide de ne pas venir à l'école, craignant de gâcher la magie vécue quelques heures auparavant, et préférant retrouver Siss le surlendemain ce qui donnera plus de poids à leur retrouvaille. Elle décide ainsi de faire une grande balade, s'enfonce dans la forêt, remonte la rivière jusqu'à son embouchure où, là, une cascade a permis de former un palais de glace, formation hivernale dont parle toute l'école. Ce palais, aux reflets verts à l'ombre et orangés dès que le soleil y pénètre, s'avère somptueux, tarabiscoté avec ses d'alcôves et ses couloirs, ses goulets, ses dômes glacés au sommet. Unn, de pièce en pièce, va se perdre dans cette merveille labyrinthique. Elle ne reviendra pas, ne rentrera pas chez elle, emmurée.



« le soleil de leva au même moment, oblique et froid. Les rayons transpercèrent la glace, illuminèrent le fond brunâtre, la boue, les pierres, les plantes.

Aux abords de la berge, l'eau était entièrement gelée. Même la vase que recouvrait une pellicule blanche de givre et à laquelle se superposait l'épaisse couche de glace. Incarcérée dans ce bloc de glace, de larges feuilles en forme de sabre, de minces brins d'herbe, des graines, poussières et détritus descendus de la forêt, une fourmi marron aux membres écartés – le tout mélangé à des bulles d'air qui s'étaient formées dans la glace-acier et prenaient l'apparence de perles quand les rayons du soleil les atteignaient. Des galets noirs avaient roulé de la rive pour mieux se fixer dans cette masse, aux côtés de bâtons dépourvus d'écorce. Des fougères à la tige pliée, figées elles aussi, évoquaient des croquis d'une grâce infinie ».





A partir de ce moment, la disparition de la fillette va mobiliser tout le village qui organise le soir même des battues malgré le froid et la nuit. Siss étant la dernière à lui avoir parlé est particulièrement sollicitée dans cette recherche. Mais la fille ne peut révéler ce qu'elles ont partagé dans la chambre.



Alors que Unn est enfermée dans son imposant palais de glace, Siss sera elle enfermée dans le palais immatériel du souvenir, se promettant d'attendre son amie, et ainsi de ne plus se lier à d'autres enfants pour ne pas trahir leur amitié. le silence, le repli sur soi, le rejet est sa manière à elle de refuser de faire le deuil de l'absente…Promesse qui va se révéler de plus en plus lourde à porter au fil des jours et des semaines.





J'ai particulièrement aimé les descriptions de ces paysages hivernaux en froid extrême et figés par le gel. Ce sont des visions envoutantes, angoissantes aussi, lorsque le silence est entrecoupé de craquements qui montrent la progression de la glace.

Par ailleurs, la façon dont l'auteur met en valeur la sensibilité des deux filles, tout en retenue, pudeur, nuances, est d'une grande délicatesse et d'une étonnante singularité. Le lecteur doit deviner certains secrets, certains sentiments laissant libre cours à notre propre imagination, à notre propre interprétation. Cela peut être déstabilisant et agaçant, ou au contraire être la clé du charme qui se dégage du livre, selon les lecteurs.



La plume de Tarjeï Vesaas, qui sait saisir les subtiles nuances de la lumière, les transformations progressives du paysage, qui sait capter les plus insaisissables mouvements de l'âme, construit dans tous les cas une dentelle d'une pureté absolue, à l'image de ce palais aussi beau que dangereux, source d'émerveillement, de communion, d'amour, mais aussi de douleur et de mort. Il a une dimension à la fois réaliste et symbolique. Un monument qui d'un palais d'images magnifiques se fait mausolée du souvenir. Aussi beau que mortifère.



Un voyage en terres norvégiennes très dépaysant où l'indicible narré avec élégance et délicatesse, entre en résonance en nous de façon troublante !



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Palais de glace

Au coeur de l'hiver scandinave, deux jeunes filles de 11 ans, Sis et Unn, se rencontrent et se perdent au milieu d'un village isolé et de froides forêts où les craquements des lacs gelés résonnent dans l'obscurité. C'est un joli petit roman qui semble présenter une histoire d'amitié, de deuil et d'apprentissage.



Mais n'y voir que cela reviendrait à ignorer (par inconfort ?) un thème spécifique qui me parait pourtant central. Attention je vais divulgâcher dans les grandes largeurs. Comment faire abstraction de la scène séminale (si l'on peut dire) où Sis et Unn se dévêtissent dans la chambre de cette dernière ? Elles portent l'une sur l'autre un regard fasciné où germe un « désir ». le mot est écrit noir sur blanc. Et c'est bien en raison de ce trouble, de cet émoi, que Unn prend la fuite et va mourir de froid dans ce que les jeunes filles appellent le « palais de glace ». Tout part de là, de ce désir qui s'avère mortifère.



Le « palais des glaces » sera d'ailleurs décrit avec les champs lexicaux de la mort et du désir. Cette cascade gelée (dont le nom lui-même et les couleurs chatoyantes reflètent les fantasmes de l'enfance) constitue le symbole central du roman. Elle saille depuis les flancs de la terre et on y entre par une fente, vers un intérieur suintant. le désir actif de Unn pour Sis se confond avec son désir d'entrer dans ce palais, de l'explorer. Mais son rapport avec le palais ne pourra se concevoir sur un autre plan que celui d'une beauté frigide, qui se referme éternellement sur l'enfant, et se ferme aussi aux hommes lors d'une autre scène très importante, où ces derniers, partis à la recherche d'Unn, se retrouvent pris d'un effroi ontologique devant ce palais dont ils ne trouvent pas l'entrée. Angoisse de l'enfance perdue ou effroi de faire face à une féminité qui les exclut ? le récit mêle habilement ces deux dimensions, saupoudrées d'allusions chrétiennes, notamment cette scène d'assomption où Sis entraperçoit à travers la glace (en croyant rêver) le corps congelé et nimbé de soleil d'Unn, comme purifié. Cela semble apporter un démenti flamboyant aux craintes qu'Unn exprimait de ne pas aller au paradis, à cause de son « secret », dont on aura deviné la nature. de là à déduire que sa mort a évité le péché et préservé la pureté de l'enfance…



Dans le même ordre d'idée, la tante d'Unn délivrera ensuite à Sis un discours incitant cette dernière à oublier Unn, à ne pas finir seule comme elle (la tante), et à se tourner plutôt vers ses camarades, notamment un garçon qui lui fait de l'oeil. Convaincue par ces paroles, Sis acceptera donc de regarder de l'avant au moment où le printemps fait fondre le palais des glaces : la cascade fertile jaillira de nouveau entre ces falaises libérées, les pulsions délétères seront oubliées et Sis pourra devenir une femme accomplie et « guérie » (avec tout ce que ce mot peut sous-entendre).



Bien sûr, il est certain que Vesaas éprouve beaucoup de tendresse (paternaliste ?) pour ses deux héroïnes. Dans l'ensemble, beaucoup est suggéré, car nous avons affaire à une oeuvre littéraire. Vesaas s'exprime donc surtout par images et sensations, via une langue simple et agréable, quoique parfois un peu simplette et répétitive. Nul « message » agressif et militant, juste une vison… qui en dit beaucoup sur le trouble des mentalités en Norvège, à une époque où s'élevait un débat sur la dépénalisation de l'homosexualité.
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Les Oiseaux

Voici ma seconde lecture pour mon voyage en Norvège pour le challenge #1mois1paysenlivres organisé par Camille et Valérie.



Voici une lecture qui ma touchée. En effet, Tarjei Vesaas, nous présente un personnage, Mathis, surnommé « Le Benêt » avec une telle tendresse et avec un immense respect. Mathis à trente-sept ans et vis avec sa sœur Hege dans une modeste petite maison au bord d’un lac. Il a sa propre perception du monde, de son monde. Il est envahi par ses rêves et ses pensées.



J’ai aimé cette façon qu’à l’auteur de nous faire comprendre que Mathis vit un peu entre deux mondes, le siens et celui qui l’entoure. C’est tellement bien écrit que pour moi en tant que lecteur, la frontière entre ces deux mondes fut parfois bien fine. J’ai aimé me retrouvé coincé dans la tête de Mathis… Qui n’a jamais eu l’impression d’être physiquement à un endroit mais tellement loin coincé dans ses pensées ? C’est ce que vit en permanence Mathis. Il est donc mis à l’écart, exclu… Pourtant le regard qu’il porte sur le monde est emprunt de respect et de sagesse.



C’est surtout le regard qu’il porte sur la nature qui l’entoure, le lien qu’il a avec elle. Les signes qu’il voit, là ou personne d’autre n’ouvre assez grand les yeux pour les voir. Des signes qui peuvent être autant positifs et négatifs, mais il les voit, il les entends et il en tient compte. Comme lorsqu’une bécasse décide tout à coup, tous les soirs de venir voler au-dessus de sa maison. Il se lie d’amitié avec cet oiseau, il y a un côté un peu mystique. Ce que je disais un peu plus haut. Ce que je lis se passe t’il dans le monde concret ou dans celui de Mathis ? Cette question, on peut se la poser tout du long de cette lecture.



Voilà donc une autre belle lecture qui cette fois m’a moins emmené sur les terres norvégiennes, nous ne savons même pas où se situe cette histoire, mais qui m’a permis de découvrir un grand auteur norvégien et un classique de la littérature de ce pays.
Lien : https://readlookhear.blog/20..
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Palais de glace

[Note : ma critique porte sur ma lecture de l’édition GF-Flammarion établie par Régis Boyer, traduction d’Elisabeth Eydoux]



Sentiment étrange à la fin de ma lecture, l’impression d’être passée à côté de ce roman à l’atmosphère mystérieuse et envoûtante qui raconte l’histoire d’une amitié absolue entre deux fillettes de onze ans Siss et Unn.



Aimer ou non un roman tient parfois à peu de choses. En lisant « Palais de glace », je crois n’avoir jamais réussi à me défaire de mon sentiment d’incompréhension concernant la soirée durant laquelle un lien indéfectible s’est noué entre Siss et Unn. Beaucoup de mystères, de secrets et de non-dits entourent ces quelques instants durant lesquels les deux fillettes scellent leur amitié. C’est troublant, déroutant et j’ai eu l’impression d’être passée à côté de certains évènements.



Le lendemain, Unn disparaît. Le récit en abordant alors les thèmes de la perte et du deuil est devenu pour moi plus accessible, plus émouvant.



Mais ce qui fait la force du texte tient surtout dans ce palais de glace qui donne son nom au roman. Grandiose, tantôt merveilleux et féérique, d’autres fois étrange et inquiétant, j’ai été subjuguée par ce lieu dans lequel Tarjei Vesaas a su insuffler aussi magie et poésie.



« Aux yeux d’Unn, un monde ensorcelé se révélait, composé de monticules de voûtes, de coupoles givrées, de courbes harmonieuses et de dentelures complexes. Rien que de la glace, sur laquelle l’eau, éclaboussant sans cesse, continuait son œuvre de construction. Les glaces, ayant barré certaines parties de la cascade, d’autres branches s’étaient créées, où se forgeaient de nouvelles improvisations. Malgré l’absence du soleil, c’était un éblouissement de couleurs, des jaillissements de bleus et de verts. Un froid de mort y régnait. »



N’ayant pas envie de rester sur cette première impression en demie teinte, je pense lire prochainement un autre roman de Tarjei Vesaas, sans doute « Les oiseaux ».
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Les Oiseaux

Les Oiseaux est le portrait d’un homme enfant, écorché vif et complètement désarmé dans ses relations avec les adultes mais doué d’une hypersensibilité au vivant. Depuis la mort de leurs parents, Mattis vit avec sa sœur Hege dans une modeste maison au bord du lac, à l’écart du village. Hege subvient à leurs besoins en tricotant des chandails à longueur de journée. Ses pensées, en flux continu, l’empêchent de se livrer à toute activité demandant de la concentration. Tout évènement imprévu le confronte à ses limites et le plonge dans l’angoisse. Seule sa sœur parvient à le comprendre mais l’épuisement et la lassitude la coupent parfois de ce frère exigeant toute son attention. L’arrivée d’un étranger vient jeter le trouble dans leur relation. Peu à peu, entre ces deux êtres se creuse un abîme d’incompréhension.

Tarjei Vesaas nous immerge dans l’esprit de Mattis et au fil des pages, nous nous identifions à lui et ressentons ses angoisses, ses doutes, sa peur d’être moqué, rejeté, abandonné. Nous frémissons avec lui à la vue de l’orage qui se profile à l’horizon. Nous partageons son enthousiasme pour la découverte de la parade de la bécasse au-dessus de sa maison. Comment ne pas être ému par Mattis, sa sensibilité à fleur de peau, sa quête d’amour continuellement rejetée par ses semblables ? Un personnage inoubliable.

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Palais de glace

Le palais de glace, en tant que roman, est aussi mystérieux et ensorcelant que celui dont il est question dans le récit. Aussi scintillant que mortifère, aussi déroutant que fantastique.

Comment exprimer l’indicible, décrire la fin de l’enfance, la naissance du désir, la valse des questions sans réponses et les serments les plus sacrés… ?
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Palais de glace

Un magnifique roman, étincelant comme de la glace au soleil. Un roman pour avoir froid, puis chaud, pour se laisser porter, pour être déboussolé, pour que ça parle à notre cœur.



J’avais vu Le Palais de glace sur le site des éditions Cambourakis et j’ai été très heureuse de le trouver à la médiathèque. À noter qu’il existe plusieurs traductions, j’ai lu celle de Jean-Baptiste Coursaud.



Nous sommes quelque part au début de l’hiver, dans un petit village entouré par un lac et la forêt. Unn a emménagé chez sa tante il y a peu. Siss vit avec ses parents. Devant un miroir, elles se font la promesse à demi-muette de s’aimer.



J’ai été extrêmement touchée par l’histoire de ces fillettes, leur solennité et leur dévotion. L’auteur retranscrit à merveille les sentiments de l’enfance et cette espèce de vérité que l’on perd en grandissant. Le début est aussi déroutant que le résumé en quatrième de couverture, il faut se laisser guider par l’hiver qui s’installe.



L’écriture est fine et ciselée, c’est un véritable travail d’orfèvre. Jamais je n’avais lu un livre semblable, qui raconte aussi bien l’hiver et l’enfance. On est à la frontière du minéral et du végétal, encerclé par l’immensité de la nature. J’ai aimé sentir l’hiver arriver puis repartir.



Tarjei Vesaas dote son récit d’une grande force symbolique, qui parlera sûrement différemment à chaque lecteur. Le Palais de glace est en tout cas une pépite à découvrir. Le livre est paru en poche dans la collection Babel des éditions Actes Sud.
Lien : https://monrockingchair.word..
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Les Ponts

C'est un livre très étrange, lumineux, touffus, sombre, inexpliqué. Trop de mots, pas assez de mots.

Un cadre tellement limpide, des parents si calmes, si "normaux", un temps qui s'étire tellement que je suis allée voir l'année de parution : 1966, ah oui, je comprends mieux.

Ce livre est un tour de force. Il réussit à faire ressentir les émotions qui affleurent, contraires, changeantes, tourbillonnantes, parfois vibrillonnantes, qui explosent et redescendent aussitôt. C'est surprenant. Tout est décrit, et en même temps non-dit.

Dans une ambiance sourde et inquiétante, la nature omniprésente, toute puissante recèle et révèle les secrets qui ne peuvent être énoncés.

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Nuit de printemps

Hallstein et Sissel profitent d'une fin de journée et d'une nuit sans leurs parents, exceptionnellement absents. Tout semble possible dans cet intervalle de temps libéré. Soudain une voiture cale au bas de la maison et cinq étrangers exigeants en sortent. « Où que nous allions nous sommes une nuisance. Voilà ce que nous sommes. » (p. 258) Une femme en couches, une autre paralysée et paranoïaque, un homme intranquille et frénétique, une jeune fille inquiète et un futur père explosif. En quelques heures étouffantes, les émois et les crises se succèdent. « Puisque cette nuit rime avec fièvre. » (p. 146) La situation est trop galvanisante et extraordinaire, surtout pour Hallstein qui soulève avec excitation et frayeur le voile qui le sépare du monde adulte. Le garçon est tiraillé par des promesses contradictoires faites aux inconnus. . « Je crois que personne n'arrivera à dormir cette nuit. [...] Il va sûrement se produire tout un tas de choses. » (p. 115) De fait, dans la pénombre chaude d'un crépuscule qui refuse de s'éteindre complètement, la vie et la mort se côtoient et les événements se précipitent. « Des choses inouïes se produisaient avant qu'on les ait pensées. » (p. 223)



Je retrouve avec plaisir l'auteur norvégien qui sait si bien peindre la panique des sentiments face à la nature impassible. Après Les oiseaux (que je compte relire prochainement), Tarjei Vesaas propose une autre version des relations fraternelles. Hallstein/Sissel et Gudrun/Karl sont des paires aux fonctionnements différents, au sein desquelles la tendresse ruisselle avec plus ou moins de force. La fin du roman m'a semblé abrupte à la première lecture, mais en y revenant quelques heures après, j'y vois plutôt une formule qui clôt un conte, qui ramène à la réalité et qui ferme une parenthèse impossible. Voilà un très grand roman de Tarjei Vesaas !
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Les Oiseaux

Les Oiseaux est un livre très touchant, qui nous offre une opportunité de nous mettre pour quelques instants dans la peau de Mattis. Mattis n'est pas comme la plupart des autres habitants de son village, ni comme sa sœur. A ses yeux, ils sont tous très "futés", et c'est quelque chose qui l'impressionne. On comprend assez vite, bien sûr, que Mattis souffre d'un handicap, bien que l'on ne sache pas lequel et que, dans le fond, cela n'importe pas vraiment.



L'écriture est extrêmement fluide, poétique, et permet sans aucune difficulté de se projeter dans le quotidien de Mattis, et de percevoir depuis ses yeux le jugement de la société, la peur de l'inconnu, la perte de repères, son analyse des émotions et de son environnement.



J'ai trouvé Les Oiseaux très beau et plein d'humilité. Difficile de ne pas ressentir beaucoup d'émotions pour Mattis comme pour Hege, sa sœur (très) dévouée. J'ai aussi beaucoup aimé la présence de la nature dans le livre, qui est presque un personnage à part entière, avec lequel Mattis dialogue énormément. Je l'ai refermé avec un bouillonnement d'émotions et, je le crois, un regard différent sur le handicap.
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Palais de glace

J'ai beaucoup aimé ce livre (lu juste après mon premier livre de cet auteur, magnifique : « Les oiseaux »). Poétique, très subtil, tout en métaphores magnifiques, avec ces émotions pures de l'enfance, spontanées, presque « brutes », tout juste esquissées mais si intenses. Pourtant, je n'ai pas lu la première traduction qui, à ce qu'en disent les Babeliots et Babeliottes, devait être encore plus belle…



Si je me permets une critique, moi qui ai du mal à « donner mon avis » sur mes lectures, c'est surtout pour en proposer une brève analyse (attention : je vais DEVOILER l'histoire ci-après !). Car je suis venue ici pour mieux comprendre cette histoire (où rien n'est vraiment dévoilé) et tous les commentaires m'indiquent que personne n'a compris l'histoire comme moi ! Aussi, je ne puis trouver les réponses à mes questions… Alors je vous propose ma « vision », comment j'ai ressenti cette histoire…



Peut-être l'ai-je surinterprétée, toujours est-il que très vite, dès les premières pages, j'ai senti que... (je supprime 24 heures après publication, la suite de mon long commentaire, qui révèle TROP la véritable, me semble-t-il, intrigue de cette histoire). Me contacter en privé, si vous souhaitez la suite. Car une analyse n'a hélas pas sa place sur Babelio.
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Palais de glace

Une couverture et un titre m’attirent tandis que je flâne à la librairie du musée d’Orsay, sortant de l’exposition Munch cet hiver à Paris. Et j’entends « n’hésitez pas, c’est un chef d’œuvre » et un autre homme de surenchérir « très grand classique de la littérature norvégienne ».

Merci à ces deux inconnus. Qu’ils ont raison ! Ce roman explore l’amitié fulgurante entre deux filles de onze ans, le trouble du secret et le drame de la perte, tout ceci dans le cadre grandiose de l’hiver scandinave et son décor fascinant de givre et de glace.



Dès le premier regard, « une étincelle étrange » crépite entre Unn et Siss et allume une passion fusionnelle doublée d’une complicité « inexplicable, mais incontestable ».

Le talent de Tarjei Vesaas est de nous placer à hauteur d’enfant et d’approcher de près la solennité des promesses, l’intensité des émotions et la gravité des sentiments, parfois si déconcertantes à cet âge.



Nous traversons les saisons, ou plutôt nous les ressentons intensément, métaphores du lent processus de deuil et du temps nécessaire pour dénouer les liens invisibles qui nous attachent aux autres.

A quelles loyautés, parfois mortifères, sommes-nous enchainés ? Quelles dettes, promesses ou fidélités, scellées souvent dans le silence, nous enferment ? Comment les délier ?



L’auteur cerne l’hiver noir et glacial de la solitude, l’eau figée en glace du secret, la nuit obscure et menaçante des peurs, le lieu verrouillé de l’isolement, le froid pétrifiant de l’incompréhension.

Reste l’immobilisme à opposer à ceux qui, avec maladresse, exhortent à tourner la page et leurs « Va prendre un bain. (…) L’eau chaude te fera du bien ».



Puis, le printemps s’installe, l’air se fait plus doux et se gorge de senteurs. Mais « on ne se libère pas facilement ». Quitter ce point d’ancrage « sévère, mais au moins on savait où on était » et courir rejoindre les autres s’avèrent des gestes impossibles. Soudain, « on ne sait plus quelle place on doit occuper ».



Avec la chaleur de l’été, le château de glace s’effondre. L’eau coule de nouveau et avec elle, l’« incessante nouveauté, dans un mouvement incessant » et le sentiment d’être délivré.



Le Palais de glace, publié en 1963, est envoûtant, poétique, symbolique.

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Nuit de printemps

La lecture de ce roman a été dérangeante, non pas dans le sens de surprenante. Non, alors je serais davantage dans le malsain.

Je poserai en avant-propos que je n'ai peut-être rien compris au livre et à son sujet.

Le début était plutôt intéressant et nous préparait à un huis clos, quoique si on y réfléchit bien, n'est en rien original.

L'originalité consistait donc en les personnages ainsi enfermés ou mis les uns sur les autres malgré eux.

Cela pouvait devenir intéressant, en tant qu'oeuvre romanesque.

Que nenni ! on tourne court, les personnages superficiels ont la prétention de prendre de la profondeur, oh, horreur, ils demeurent dans leur faiblesse.

L'histoire part à vau l'eau, la folle reste folle, le méchant reste méchant, bref, j'ai eu à la fin une désagréable impression d'imposture.
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Palais de glace

Ce roman paru en 1963 est un classique de la littérature norvégienne. Siss est une petite fille populaire mais un jour une nouvelle arrive dans la classe et vient bouleverser son quotidien. En effet, l'énigmatique Unn devient son amie, or elle disparaît du jour au lendemain, sans doute partie seule vers le palais de glace...

Ce roman est bien écrit et prenant, la psychologie des personnages est très juste. En revanche je ne m'attendais pas à une histoire si sombre pour un "classique" en fait on est pas loin du polar avec une histoire type fait-divers. Étant très peureuse, cela m'a mise mal à l'aise et je n'ai pas ressenti de poésie particulière dans l'écriture qui fait que certains rapproche ce texte du conte. C'est un bon livre mais pourquoi est-ce devenu un classique? Cela m'échappe! J'aurais aussi aimé ressentir plus d'empathie pour Siss or c'est plutôt le contraire, seule la tante dans sa petite maison nous attendri.
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La barque le soir

Au fil des saisons, divers personnages évoluent dans la nature norvégienne. « Forêt aveugle – sans limite – parce que l'horizon aujourd'hui a disparu dans le doux temps de neige mêlé de brouillard. » (p. 10) Le père et son fils tracent un chemin dans la neige, derrière le cheval qui souffle et répète son chant intérieur. Un homme couché dans le marais observe la danse des grues. « Elles sont nées farouches. La tête plus haute que jamais. » (p. 30) Par une nuit de neige, une jeune fille attend un homme qui ne viendra pas. Dans le courant, un homme agrippé à un tronc dérive au son des aboiements d'un chien. La fuite des jours n'en finit pas, et bien fou serait celui qui voudrait l'entraver.



Fallait-il vraiment que cela arrive ? J'ai abandonné ce texte de Tarjei Vesaas, auteur que j'apprécie pourtant immensément. Ce roman est son ultime texte. Entre poème et autobiographie, la préface ne tranche pas. Le symbolisme déborde de chaque page, nourri du même lyrisme naturaliste qui porte toute l'œuvre de l'auteur. « Il est juste de marcher ici, mais on est tellement en peine de savoir pourquoi on le fait. Est-ce que je rêve cela ? Est-ce que je ne suis pas là, à marcher ? » (p. 23) Tout cela est très beau, mais hélas impénétrable pour moi, inaccessible comme un code que je ne sais pas déchiffrer. Par chance, il me reste d'autres titres de l'auteur à découvrir.
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L'arbre de santal

Hilde, la Mère, est enceinte de son troisième enfant. Les jeunes Egil et Margit surveillent cette arrivée avec circonspection, car leur mère change. Souvent, son regard se fige et elle semble absente au monde. Magnus, le Père, est impuissant à retenir son épouse et à la sauver de ce désespoir qui la saisit. « Nous ferons ce qu'elle désire. Elle croit qu'elle est condamnée. » (p. 9) En dernier recours, pour tenter de distraire Hilde, Magnus embarque les siens dans un voyage dont aucun ne reviendra indemne. Jusqu'à la ruine et l'épuisement, les membres de cette famille cheminent, solitaires, incapables de se retrouver. « Venez, rentrons. Tout ce que nous offrons ne sert à rien. » (p. 94) Seule Hilde s'épanouit à mesure que les mois passent : toutes les portes lui sont ouvertes et personne ne résiste à son charme quasi surnaturel. « Elle était un arbre, alourdi par son propre fruit, et aspirant ce que fournissaient le ciel et la terre. » (p. 85) La naissance, enfin, intervient comme une double délivrance.



Ce court roman de l'auteur norvégien est autant sombre que lumineux. Hilde est plus qu'un personnage, c'est une entité. Elle survole l'histoire, détachée des siens et du monde. Quant aux enfants, ils ont une conscience fine, voire incisive, des événements et des choses non dites : tout résonne cruellement dans leurs jeunes âmes et, déjà, ils n'ont plus le droit à l'innocence. Tarjei Vesaas excelle dans les descriptions de la nature : ici, nous passons de l'hiver à l'automne dans un mouvement majestueux, un glissement imperceptible où les changements sont des évidences. L'auteur fait de Hilde un élément presque totémique, une manifestation prophétique de la course du monde. Les quelque cent pages sont lourdes de symbolisme et de poésie, et c'est un enchantement de les parcourir.
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Palais de glace

Je me trouve bien bête quand je lis tous ces avis plus que positifs alors que malheureusement je n'ai pas aimé ma lecture.



Deux fillettes, Unn et Siss se prennent d'amitié de façon instantanée. Elles sont attirées irrémédiablement l'une envers l'autre. Un soir, Unn invite Siss chez elle. Même si le rendez-vous est fugace, les deux fillettes sont émerveillées. Unn confie un début de secret à Siss et cette dernière part rapidement à la suite de cette confidence. Le lendemain Unn est introuvable.

Rapidement des recherches sont menées, Siss en première ligne, dans un paysage hivernal, glacial, où la neige et le froid recouvrent tout. Les recherches se centrent sur une cascade gelée, "un palais de glace" qui sera le centre de tout le roman.



Au niveau du résumé c'est très accrocheur et pourtant... j'ai eu beaucoup de mal avec la façon dont l'histoire était écrite. Je me suis perdue dans les descriptions, ai trouvé des passages étranges, des situations bizarres. Siss est très attachante et à mon sens c'est la vraie force de ce roman. Je n'ai pas compris certains passages, je me suis même ennuyée alors que le livre est court.

Malheureusement je suis passée totalement à côté de cette histoire qui a su charmer bon nombre de lecteurs. La magie n'a pas opéré avec moi.
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Les Oiseaux

Entre dévouement et lassitude, Hege, jeune femme de 40 ans, s'occupe de son frère handicapé de 37 ans, Mattis. Dans un style dépouillé et poétique, Tarjei Vesaas nous raconte le virage que va prendre leur existence suite à la succession de quelques événements en apparence anodins mais particulièrement porteurs de sens aux yeux de Mattis : la parade d'une bécasse au-dessus de leur toit, un arbre terrassé par la foudre ou encore une après-midi passée avec deux jeunes femmes en maillot de bain. Sobre, beau et hypnotique.

Première édition : 1957. La nouvelle traduction (2022) est de Marina Heide, aux éditions Cambourakis !
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Palais de glace

Le palais de glace est plein de craquements et de bruits mystérieux. Il est formé des cavernes d’une cascade prise par le gel. C’est là qu’une petite fille va disparaitre, laissant seule sa compagne, celle à laquelle elle venait de se lier dans la plus belle et la plus forte des amitiés. Entre conte hypnotique et roman d’apprentissage, l’écriture nous invite à lâcher prise pour se connecter à son univers onirique et délicat.
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