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Critiques de Tierno Monénembo (148)
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Les crapauds-brousse

Publié à la fin des années soixante-dix, ce roman décrit les effets délétères de la dictature de Sekou Touré sur la Guinée de son époque.

Le pays n'est pas nommé, le dictateur joliment (?) renommé Sâ Matrak, le sinistre Camp Boiro de la banlieue de Conakry mentionné par un surnom « le Tombeau », mais c'est bien de cela dont il s'agit.



Il en profite aussi pour dénoncer l'hypocrisie religieuse des marabouts musulmans et la pression sociale qu'ils exercent.



Mais c'est surtout une peinture cruelle de la façon dont la dictature commence par ruiner les espérances de la jeune élite intellectuelle qui avait été envoyée étudier en Europe pour construire un pays nouveau après l'indépendance. Comment ces jeunes enthousiastes se voient d'abord poussés à la pusillanimité alcoolisée faute d'être employés, avant d'être éliminés physiquement par la paranoïa du régime.



Tout ça ne laisse que peu ou pas d'espoir, ce qui explique probablement les notes très moyennes du livre. Quant à l'auteur, c'est depuis son exil en France qu'il avait écrit cette dénonciation sans compromis.



Ce régime et ses homologues, nés de la dérive des premiers dirigeants africains post-indépendance, sont désormais révolus. Mais il reste un peu de cette atonie prudente dans les pays encore sous la coupe d'un régime autoritaire ou, avanie plus récente, de bandes armées islamistes ou autres. Bref, tout cela est malheureusement encore d'actualité.



À lire pour comprendre la face sombre du continent, mieux, la ressentir à travers les destins adverses des protagonistes de ce roman très fort.
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Le roi de Kahel

Quand j’ai choisi ce roman à la bibliothèque, Le roi de Kahel, je m’attendais à une chronique d’un roi peul d’une autre époque, médiévale, d’un quelconque parent de Kanga Moussa. Depuis peu, j’ai développé un intérêt pour l’Afrique de l’Ouest alors j’avais grande hâte de le lire. Vous comprendrez ma surprise quand Olivier de Sanderval fit son apparition, fin dix-neuvième siècle, avec son projet loufoque de conquérir le Fouta-Djalon. Puis ma stupéfaction en découvrant qu’il s’agissait d’un personnage historique.



Ainsi, cet homme traça la voie au dialogue avec les différentes peuplades de la Guinée actuelle, et plus loin encore. Pour tout dire, il jeta les bases de la colonisation. Et l’auteur Tierno Monénembo nous en fait un portrait touchant. Son personnage, visionnaire, ne baisse jamais les bras, il lutte contre tous, explorateurs anglais, administrateurs français, chefferies peules, etc. Parfois même contre lui-même… C’est ce qui le rend attachant. Heureusement parce que, sinon, il n’en resterait qu’un héros picaresque.



J’ai beaucoup appris sur l’Afrique de l’Ouest et la colonisation française (ce ne sont pas des sujets au programme scolaire ni prisés en Amérique) : climat difficile, chaleur suffocante, maladies, etc. Mais c’est contrebalancé par les riches coutumes des peuples Peuls et la beauté des paysages. J’avais l’impression de lire un carnet de voyage d’une autre époque, surtout dans les cent premières pages. Surtout, on sent l'amour (tant de l'auteur que de son personnage) pour cette contrée.



Toutefois, j’ai surtout ri. Ou plutôt, j’ai beaucoup souri. C’est que, ce Sanderval, il est plutôt coloré. Bien intentionné, mais naïf et ignorant des coutumes (c’est normal, vous direz !), provoquant quelques épisodes burlesques. Par moment, il semblait un peu caricatural. Heureusement, il est compensé par une détermination et un sens politique incroyables. Pareillement pour son interprète Mâly et son cuisinier Mâ-Yacine, ainsi que pour quelques Peuls, chefs et griots, qui, à d’autres moments, paraissaient plus justes.



C’est ce constant va-et-vient dans le ton, allant de l’humoristique et le réaliste, qui m’a surtout déstabilisé. Après tout, n’est pas une grande épopée (héroïque ?) que celle des débuts de la colonisation, même si l’on peut se mettre d’accord sur ses dérives ? Ça m’a détourné de Sanderval. Ainsi, passé l’enchantement de la nouveauté et de la découverte, le roman semblait se transformer en un cumul de péripéties prévisibles et redondantes. Malgré cela, j’ai persisté et j’en suis tout de même content. Ça donne le goût d'y voyager...
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Les coqs cubains chantent à minuit

Ignacio vit à LaHavane. Il gagne sa vie en cueillant à l’aéroport des touristes à arnaquer mais, cette fois-ci, ce n’est pas un richard de Blanc qu’il rencontre mais El Palenque, un Noir de Guinée. Mais, contre mauvaise fortune bon cœur, il lui sert de guide et une amitié se développe entre les deux. C’est que le nouvel arrivant a, malgré ses origines, des racines cubaines. Et, à travers leurs pérégrinations dans la capitale, on découvre ce magnifique pays.



Aussi succinctement résumé, Les coqs cubains chantent à minuit semble plutôt ordinaire. Et pourtant ! J’ai bien aimé, beaucoup même. Peut-être parce que je n’avais pas d’attentes particulières. Surtout parce que son rythme, semblable à celui d’une danse ou d’un air entrainait, ne pouvait que m’inciter à poursuivre ma lecture. Et ce Cuba coloré, à l’image de ses habitants souriants et festifs malgré les circonstances, on ne peut que l’aimer !



Peut-être la narration y est-elle pour quelque chose ? Tout au long du roman, le lecteur doit écouter le long monologue d’Ignacio. En fait, il s’adresse à El Palenque, pendant qu’il lui fait traverser la ville, rencontrer des gens et qu’il lui raconte son pays. Mais, tout le temps, j’avais l’impression que c’est à moi qu’il s’adressait.



Quand je dis qu’Ignacio raconte son pays, c’est un peu réducteur car son récit est d’une portée universelle. Le sien et celui de son ami, le poète qui ne jure que par Omar Khayyam. Et puis il y a toutes ces références à tant de grands noms de la littérature (Hedayat, Nabokov, Proust, etc.) et même des artistes de tous genres comme Méliès.



Les coqs cubains chantent à minuit, c’est également une ôde à ces cultures qui ont formé ce peuple. Espagnols, Amérindiens et Noirs. Les métis qui en sont le résultat mais aussi des vagues d’immigrations plus tardives de Blancs et d’Asiatiques. Ces mélanges constituent une richesse. Je pense tout de suite à la vie sous le soleil, les clubs, les belles femmes, la musique, les saxophonistes, la danse, l’exotisme, etc. C’est peut-être pour cela que les Cubains, résiliants, gardent le sourire malgré les malheurs et même si la vie n’y est pas toujours facile.



Ce roman permet de tisser des liens entre Cuba, les Russes, des pays d’Afrique comme la Guinée mais aussi l’Angola, le Congo, l’Algérie et, de là, à la France. Ces apports, on n’y pense pas toujours à nos lattitudes. Heureusement que Tierno Monénembo, lui, y a pensé. Cette quête d’El Palenque, c’est une recherche des racines (sa mère et, indirectement, aussi son identité) mais surtout une célébration de la vie. Tout simplement la vie !



En terminant, j’ai eu l’opportunité de visiter La Havane il y a deux ans. Au fil des pages, uen multitude d’images me revenaient en tête. Je pouvais visualiser les lieux évoqués, ceux où je me suis retrouvé ou que j’ai pu voir de loin. L’Hotel Nacional, le Paséo, le Malecon, etc. J’ai vécu à nouveau mon voyage et c’était précieux.
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Les coqs cubains chantent à minuit

Les coqs cubains chantent à minuit est un véritable pied de nez à tout éloge de la lenteur. Avec une narration tonique, une plume exaltée et vaine, l'auteur nous projette dans un récit emballé qui n'a rien d'une ballade.

D'abord parce qu'on a affaire à Ignacio, pauvre bougre qui interpelle le lecteur comme il intercepte les touristes à leur descente d'avion à l'aéroport de la Havane. Conteur inlassable à la parole insatiable, il nous prend par le bras sans que l'on sache exactement où on va. Les quelques indices disséminés dans le flot de paroles laissent deviner une mystérieuse quête des origines pour un parisien natif de Guinée presque invisible pendant tout le récit.

Il faut du temps pour voir le rythme du récit se détendre et se dérouler une histoire douloureuse qui fait le pont entre Cuba et l'Afrique.

Ensuite parce que Tierno Monénembo délivre un récit qui épouse les contours de l'île cubaine. Autour d'une ronde de mots, de chansons et de vies, jaillissent des couleurs bigarrées, des rythmes chauds et sensuels, des saveurs lointaines...un tableau chatoyant qui ne parvient toutefois pas à masquer des vies faites d'improvisation et de débrouillardise «en prévision des mauvais jours qui, ici, occupent toutes les pages du calendrier».

Roman court laissant le sentiment d'avoir été écrit avec une impulsion puissante, il faut du souffle pour parvenir à bout de ce récit baigné d'un feu particulier. Quelque peu étourdie par le début du roman ,il m'a fallu du temps pour apprivoiser cette histoire qui, avec la quête d'un africain venu remuer le passé, ravive l'africanité oubliée de Cuba. Et refléter ainsi un monde décloisonné, loin des frontières géographiques et mentales.

Mais l'exubérance verbale n'aidant pas à rendre l'encre indélébile, ce roman risque d'être vite oublié.

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Bled

Découverte imprévue et réussie lors de mes pérégrinations dans ma médiathèque de cet écrivain guinéen, Tierno Monénemno…



Au centre du récit, une jeune femme,Zoubida, avec un père taiseux mais aimant… se renfermant et faisant mettre le voile à sa fille adorée, dès qu'elle aborde l'adolescence…



« Je l'ai toujours vu ainsi, en chasseur de dragons. Il était le guerrier effarouché qui prenait les autres, tous les autres, pour les ennemis à abattre. Mais je ne voulais pas un guerrier. J'avais besoin d'un père. Quelqu'un qui parle, quelqu'un qui rit, quelqu'un qui aime. Il nous aimait, nous n'en doutions pas, mais à sa manière, c'est-à-dire de loin, dans le réduit du silence. Ses mots étaient aussi rares et ses gestes aussi sobres que ceux d'un étranger de passage. » (p. 139)



Zoubida , dans un pays où les femmes n'ont aucun droit de cité, soumises aux diktats masculins, va subir de plein fouet toutes ces maltraitances…La catastrophe survient , puisqu'elle a osé avoir un bébé hors mariage, avec en plus un européen, un breton, fils d'un colonel, Loïc, qui , même si il éprouve des sentiments à son égard, ne veut surtout pas d'attaches, et encore moins d'une « paternité »… ayant été traumatisé par un père despote et violent !



Zoubida veut garder son enfant… elle devra donc supporter de lourdes épreuves dont la prostitution, et les viols quasi légaux de Mounir, son proxénète « et « protecteur »…

Zoubida, fort courageuse , décide de fuir pour échapper aux violences des hommes, décidés à la punir et à la soumettre..!



« -Explique-moi !

-Que veux-tu savoir ?

-Où suis-je ? Une prison, un lupanar, un harem ?

-Tout cela à la fois !

-Et pourquoi ?

-Pour nous apprendre à vivre !

- On ne peut rien apprendre enfermé dans une cage.

-Ne me parle pas de liberté ! Les chaînes seront toujours là. Longues ou courtes, visibles ou invisibles.

-Je m'évaderai

-Ils te rattraperont. Impossible d'éviter celles que l'oeil ne peut pas voir.

-Je les briserai toutes, même celles que mon oeil ne peut pas voir.

-Avec tes songes ? »(p. 43)



Elle ne baisse pas les bras, se refuse à se soumettre à son destin de « femme souillée », rejetée… elle tuera son « tortionnaire », se retrouvera en prison, ne réalisant pas qu'elle a été condamnée à la perpétuité… Mais enfin, sur son chemin, une lumière magnifique se présentera à travers Arsane, un visiteur de prison et ses Livres ! Je ne dirai pas un mot de plus !!!



La prison sera curieusement… grâce aux livres un début de « libération » et d'ouverture des horizons pour Zoubida…



« Lis-les comme ils arrivent. N'obéis qu'à ton appétit ! Ne t'occupe point de ranger. Surtout pas de rayonnages dans ta jolie petite tête ! Laisse ça aux ébénistes et aux érudits ! Dis-toi que la littérature est un extraordinaire festin, un délicieux fourre-tout. Goûte à tous les plats, pêle-mêle selon tes goûts, selon tes envies ! Lis tout... Voltaire, Flaubert, Camus, Le Clézio, mais il n'y a pas que les Français... Pouchkine, Gogol, Soljenytsine, mais il n'y a pas que les Russes... Faulkner, Caldwell, Salinger, Roth, mais il n'y a pas que les Américains... Sassine, Achebe, Hampâte Bâ, Kourouma, Lanou Tansi mais il n'y a pas que les Africains, Maalouf, Darwich, Abû Nuwâs, mais il n'y a pas que les Arabes... Plus tu varieras les lectures, plus cette pièce s'élargira, plus ton esprit s'illuminera. Alors, tu n'habiteras plus une prison mais un ciel plein d'étoiles... »



Un style très fluide, léger, poétique que celui de cet écrivain guinéen pour raconter le sort peu enviable réservé aux femmes… les violences, humiliations courantes, qui leur sont faites … Toutefois, Zoubidane est un personnage solaire, qui adore la vie…se bat envers et contre tout… se refuse à être enfermée dans une sorte de fatalité !



Après cette première lecture appréciée, je vais poursuivre la connaissance de cet auteur, avec la lecture du « Terroriste noir » !

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Le roi de Kahel

A la suite de René Caillé, l’explorateur de Tombouctou , Olivier de Sanderval a un objectif : être le premier à aller jusqu’au Fouta Djalon, le pays des eaux vives et des fruits, du lait pur et des érudits, les cascades, les contreforts et les vallons à l’intérieur des terres de l’actuelle Guinée(ex Conakry). Même et surtout si c’est dangereux et que les premiers Peuls qu’il rencontre le dissuadent.



Tierno Monénembo, en bon Peul, non seulement raconte ces dangers, « la sournoiserie des habitants, les caprices des princes, les aléas du ravitaillement, les défections des porteurs, les coliques et les crises de palu », mais aussi l’aide absolue qu’ Olivier notre héros reçoit de ses traducteurs ( qui parfois, pour lui éviter de se faire couper la tête, affirment le contraire de lui et inventent sa parenté avec le roi de France!) et qui lui expliquent cette culture , un peu florentine, où la ruse et l’esquive sont des manières de déjouer les pièges et de faire de la politique.



Les Peuls sont les Anglais de l’Afrique, dit il, « tous les défauts et toutes les qualités de la terre : radins, perfides, ombrageux ; intelligents, raffinés, foncièrement nobles », sournois, tordus, valeureux, tout à fait fascinants. Leur communauté fondée sur l’islam lutte contre la traite esclavagiste, c’est un islam de sages, de mystiques et de prophètes, un islam de grands seigneurs, avec,( démocratie oblige bien que le Fouta Djalon soit étiqueté comme théocratie) alternance des princes.



Olivier de Sanderval a réellement existé, au moment où rêver d’apporter le progrès sous la forme d’un chemin de fer, le rayonnement de la science , bref de faire de ce pays de cocagne une nouvelle Rome, une nouvelle Athènes est juste passé de mode. Les pays européens imaginent ( à tort) que le temps des explorations est terminé et qu’il faut coloniser, et leur pré carré dont ils définiront chacun les frontières à la conférence de Berlin de 1884, donne lieu en réalité à des guérillas entre pays colonisateurs, et contre les pays qu’ils veulent conquérir. Longtemps, l’intérieur du continent africain ne les a pas intéressé, par peur et par ignorance et ils se sont contentés de comptoirs côtiers, des factoreries. Moins de risques, et des gros sous.

Ayé, c’est décidé, ils y vont.



Sanderval ne veut pas conquérir, on pourrait presque dire qu’il veut vivre en paix, supporter tous les inconvénients, la faim la prison, le palu, les maux divers et jusqu’au coma, à la condition d’ être reconnu comme Peul, cette grande civilisation, venue sans doute d’Egypte, comme la beauté longiligne de ses habitants le montrent, et cultiver, se repaitre chaque jour de la splendeur des vallées, du vert des montagnes, de l’Eden terrestre, qu’est cette terre isolée.



Construire un chemin de fer, en 1879, c’est un peu nouveau, cependant à cette date le premier à être envisagé sera Dakar/ Saint-Louis, donc le rêve commence à être crédible.



Tierno Monénembo , avec la figure d’Olivier de Sanderval , dont il a consulté les archives de famille, nous présente un aventurier un peu moins « explorateur » qu’un Mungo Park ou qu’un René Caillé, et parallèlement un peu moins proche au niveau humain que ces nouveaux ignorants/ commerçants /administrateurs qui décident en 1884 d’annexer la Guinée, et d’y faire régner le travail forcé.

De chemin de fer, nenni.



Il voulait être roi de Kahel, c’est à dire du paradis sur terre.

Mais.

Les crocodiles d’Afrique ont infestés les ministères français.



Je ne peux m’empêcher d’évoquer les Peuls du Niger, les Wodaabés, qui venaient danser à Niamey après leur fête du Geerewol, les hommes maquillés de jaune et de rouge, avec plumes et perles sur la tête, la bouche peinte en noir, et derrière, ne dansant pas, les femmes habillées de gris : c’est le moment où chaque femme choisit un homme, pour la nuit, la semaine, ou pour toujours, s’il est gentil, ah, il faut qu’il soit à la hauteur et gentil, et les hommes se laissent choisir en faisant de leur mieux pour plaire avec leurs sauts, leurs mimiques, leurs magnifiques bijoux. Ils sont splendides, et à la différence des Peuls de Guinée, ils sont nomades.

( cf le livre de Carol Beckwith : Nomades du Niger).



Les peuls de Guinée, eux, se sont sédentarisés il y a des siècles.

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L'aîné des orphelins

Le hasard crée souvent de belles rencontres... C'est au détour d'un rayonnage, lors d'une fameuse opération de désherbage de fin d'année, que j'ai fait la connaissance de Faustin, "L'aîné des orphelins", de Tierno Monémembo.



Du fond de sa cellule de la prison centrale de Kigali, Faustin Nsenghimana, 15 ans, attend son procès au cours duquel il risque la peine de mort. Il raconte son cheminement depuis les fameux "avènements" survenus au Rwanda en 1994.

Au moment du génocide, Faustin, petit campagnard, venait d'avoir 10 ans, "10 ans pour rien". Perdu sur les chemins, entre son village natal de Nyamata et Kigali, il cherche ses parents qui ont fui. Est-il hutu, est-il tutsi ? On ne le sait pas.

Capturé par le FPR, le front patriotique rwandais, il s'échappe pour devenir un enfant des rues dans un Kigali où chacun tente de retrouver un semblant de vie normale. Au QG, Faustin retrouve une bande d'orphelins qui survit grâce à des escroqueries et des petites combines.



Si ce livre se déroule juste après le génocide rwandais et en évoque certains épisodes, nous sommes loin des récits autobiographiques et témoignages divers qui fleurissent autour de ces événements. Comme le rappelle l'auteur au début, "si le génocide rwandais est irréfutable, les situations et les personnages de ce roman sont, eux, fictifs pour la plupart". Pourtant , c'est bien l'imagination de l'auteur qui fait revivre au plus près de la réalité le quotidien de ces orphelins de l'après génocide.



Dans une justesse de ton impeccable, deux récits s'alternent, celui au présent de Faustin en prison et celui du passé qui nous dévoile progressivement qui est le jeune garçon et comment il en est arrivé là.

A travers son périple se déroule un monde bigarré, une ville où se côtoient anciens génocidaires, parents de victimes, enfants perdus, des mères de famille qui vendent leur corps pour nourrir leurs enfants, Européens profiteurs et voyeuristes d'un côté et de l'autre, Blancs humanitaires ne comprenant rien au pays ou ils débarquent avec beaucoup de condescendance.



Tierno Monémembo, dans un style clair et simple, donne la parole à son jeune personnage pour nous décrire les lendemains d'une barbarie sans nom où les gens semblent comme hébétés. Il nous montre un jeune garçon qui a vécu l'horreur et qui l'a occultée pour mieux y survivre, rappelant que même lorsque l'on a vécu le pire, la vie continue : on aime, on désire, on tue. Surtout lorsque l'on est un enfant.



"L'aîné des orphelins" est une fiction qui se fond dans la réalité. le personnage de Faustin porte en lui la mémoire de tous ces enfants qui en quelques jours ont vu leur vie éclater en morceaux.

Les dernières pages nous prennent aux tripes. C'est la fin et le début de Faustin. Un petit Faustin que je n'oublierai pas avec son cerf-volant...

" Y a toujours de la vie qui reste, même quand le diable est passé".

Coup de coeur.
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Le terroriste noir

Le film "Tirailleurs”, sorti en ce début d’année 2023, porte un éclairage sur ce qu'ont vécu les Africains durant la première guerre mondiale, arrachés à leur famille (lire également “Monsieur Sénégal” d’Antoine Rault).



Avec “Le terroriste noir”, nous changeons de guerre mais l’histoire des services (servitudes !) à la France se répète !



Germaine, 17 ans, nous raconte la vie d’Addi Bâ, un tirailleur guinéen fait prisonnier par les nazis, évadé et réfugié dans les Vosges.

Résistant, il fut le seul chef noir d'un maquis de la Résistance en métropole.



Dans son livre “Mes étoiles noires”, Lilian Thuram (oui, le footballeur !) rend hommage à cet homme resté dans l’ombre, au milieu d’autres portraits, de Lucy à Barack Obama.



Tierno Monénembo a fait de l’histoire de cet homme un roman mais il casse la chronologie dans son récit, faisant perdre un peu d’intensité à sa narration et un peu le lecteur que je suis.

Il réussit tout de même à sortir de l’ombre sans le magnifier outre mesure “der schwarze Terrorist”.



Comme souvent l'œuvre a donné lieu à une adaptation cinématographique et c'est Gabriel Le Bomin qui s’y est collé sous le titre “Nos Patriotes“, en 2017.

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Le terroriste noir

Qui est ce terroriste noir ? Un gros vilain méchant des cités poursuivit par nos forces de l'ordre ? Eh bien, non. Simplement un tirailleur (Guinéen) fait prisonnier par les nazis, échappé (grâce à un gendarme) et réfugié dans les Vosges. Résistant puis arrêté. C'est Germaine, 17 ans à l'époque, qui raconte au neveu venu d'Afrique.

Décidément, les Vosges ne cesseront de me surprendre. Accueillir un "nègre" en pleine France occupée, comme s'il avait toujours été là (alors qu'aucun d'eux, ou presque, n'en avait jamais vu), voilà qui est bien loin de l'image que l'on se fait souvent de la France "profonde" et de ses "pailloux". Il fut soigné, nourrit, logé, trahi, regretté. Aujourd'hui le village de Tollaincourt à une rue à son nom, grâce à l'acharnement de quelques uns et la médaille de la Résistance (il créa le 1er maquis vosgien, le Maquis de la Délivrance).

J'ai vraiment aimé découvrir ce personnage par le biais de cette biographie romancée. Un seul petit reproche : la chronologie éclatée des souvenirs de Germaine, qui fait que parfois on se perd un peu. L'écriture, un rien enlevée, est vraiment très plaisante. Je crois que je me suis découverte un nouvel auteur à suivre. Et peut-être croiserai-je les mânes d'Addi Bâ au cours d'une rando...



http://addiba.free.fr/galerie_addi/index.html
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Le terroriste noir

Addi Ba est né en 1916 en Guinée alors colonie française. A 10 ans, adopté par un Blanc, il arrive à Langeais où il grandira.

Avec la guerre le voilà "tirailleur sénégalais" envoyé sur le front pour défendre la France. La Débâcle le cueille en Lorraine. Arrêté, il arrive à s'évader grâce à un gendarme (échappant ainsi aux massacres commis par les allemands contre les soldats noirs) et arrive dans les Vosges, affamé, blessé, moribond.... Sauvé par un jeune garçon et sa mère, requinqué, il va s'intégrer dans ce village vosgien, et finalement créer un réseau de Résistance. Il devient "der schwarze Terrorist". Ce réseau va réussir les missions données par Londres jusqu'à l'arrestation de ses chefs, dont Addi Ba. Chefs qui seront torturés, condamnés à mort, et exécutés.

Une stèle indique le lieu de leur exécution.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Addi_B%C3%A2

.

Avec un "matériau" pareil, je m'attendais à un livre traversé par un souffle épique, un livre centré sur ce héros (dans tous les sens du terme).

En fait ce livre est décousu, tourne trop autour des rivalités familiales locales et malheureusement vous n'en apprendrez pas beaucoup plus que le résumé ci-dessus. Je pense qu'Addi Ba aurait eu besoin de quelqu'un qui s'intéresse davantage à lui.

Au final une petite déception, mais sur le fond merci à l'auteur d'avoir rappelé l'existence de ces courageux hommes.
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Bled

Elle court Zoubida . Elle court parce qu'elle fuit. Elle court dans le désert, son bébé dans les bras. Elle fuit son village, sa famille, la honte , la lapidation, la vindicte populaire . Elle fuit son passé et court sans penser à son avenir, juste à sauver sa peau.

Elle ne sait pas qu'en fuyant tout cela, elle va rencontrer les hommes et leur bite avide de son cul. Ce n'est qu'une femme , objet des hommes dans l'Algérie de 1980. Ce n'est même pas une femme . Tout juste une salope, une pute. Elle va finir au bled chez Karla, après souffrances et beaucoup de courage Mais pour quel avenir ?



Quel beau roman ! A la structure un peu décousu, sans que cela soit gênant, mais avec une humanité profonde dans cette Algérie des années 80.

Algérie, ce carrefour des peuples , arabes, turcs, français, sub saharien.. (il n'y avait pas encore de chinois :) !)

L'auteur , à travers Zoubida, nous offre une belle tranche d'humanité , dans le combat pour survivre, le courage de son héroïne.

Ce livre est tout en contraste. Les hommes ne pensent qu'à baiser Zoubida.

En toute impunité, puisqu'avant d'être une femme, c'est au mieux une salope et au pire une pute .

Les femmes sont soumises. Pas Zoubida . Elle veut vivre pour l'amour de son fils .Elle est prête à tout.

Ce livre est un carrefour du monde. On y croise Alfred le bantou, Salma la beurette qui déboule de Bourgoin, Arsanne le Kabyle, Loïc le breton. Tous ont leur culture , leur croyance, leur espoir , leur criante. Tous cohabitent, malgré les guerres, les différences, les incompatibilités. Cela donne un roman dense, plein de belles histoires et de conception de la vie.

C'est un roman que l'on lit trop vite. On n'a presque pas le temps de s’imprégner de la lumière du désert, de la beauté des oasis. On aimerait poursuivre avec Zoubida, côtoyer un peu plus Alfred, égorger Mounir et laver l'affront des parents de Zoubida.

Je finirai par une citation de ce livre :

"Plus tu varieras tes lectures, plus cette pièce s'élargira,plus ton esprit s'illuminera. Alors, tu n'habiteras plus une prison mais un ciel plein d'étoiles... Tes avocats n'y pourront rien, seules tes lectures te sauveront."

Belle, très belle lecture.

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Bled

Un petit moment de lecture agréable! Un portrait de femme émouvant dans une Algérie des années 80 où la vie de la femme n'est qu'une ligne tracée par tout homme qui croise sa route. Quel parcours que la vie de notre héroïne Soubida! Rejetée, humiliée, elle fuit son village avec son bébé au bras, qu'elle a eu avec un Européen hors mariage, ce qui est un crime, aussi pour ses parents que pour sa tribu, et pourquoi pas pour tout le village. Ca n'en finit pourtant pas , cette humiliation! Pendant toute sa fuite, elle se présentera comme une proie facile, comme une victime toute accommodée pour des bourreaux....

Ce livre décrit certaines réalités vraiment choquantes, telle la pratique de l'esclavage, surtout pour des femmes déjà affaiblies par les vicissitudes de la vie, ou par certaines contrainte des traditions ou de la religion. Bien que le livre nous relate des atrocités, l'écriture est plaisante, légère, vivante, si bien que ça se lit d'une seule traite!
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Saharienne indigo

A Paris, Mme Corre, prétendument diseuse de bonne aventure, aborde dans la rue Véronique Bangoura, une auxiliaire de vie guinéenne qui pousse un tétraplégique dans son fauteuil roulant.



Laquelle Véronique raconte à Mme Corre son histoire qui remonte jusqu’à l’enfer des geôles de Sékou Touré.



Avec son nouveau roman, Tierno Monénembo (Prix Renaudot 2008) livre une chroniqueur vigoureuse et vivifiante entre Paris et Conacrky



Il nous dévoile par ailleurs tout un pan méconnu de l’histoire contemporaine de la Guinée.



Les descriptions des camps de torture de Sekou Touré où 50 000 personnes ont trouvé la mort font notamment froid dans le dos.



Dans cet éloge de la mixité culturelle, très lyrique, tres sensuel (avec de belles scènes de boite de nuit et également de belles pages sur Paris et le 5e arrondissement ), se détachent de beaux portraits de femmes , qui se dissimulent sous des identités diverses.



Dans ce récit qui peut sembler décousu de prime abord mais qui se reconstitue peu à peu sus la plume brillante et flamboyante de Monenenmbo, se recompose l'histoire de la Guinée et de sa relation particulière avec la France.
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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Le roi de Kahel

La littérature francophone africaine en temps normal j’adhère. Alain Mabanckou m’avait enchantée avec Verre cassé, Yasmina Khadra et Tahar ben Jelloun font partie de mes références. Bon alors que pasa avec ce Roi de Kahel ? Bah pasa que je n’ai pas beaucoup accroché, on ne va pas se le cacher.



Décidemment l’année 2016 débute mal chez moi : aucun roman ne trouve grâce à mes yeux, c’est un drame. Je passe à côté, oscillant entre profond désintérêt et simple apathie, je suis une déprimée de la lecture.



Alors que reproche-je à notre auteur guinéen ? Ce qu’il faut savoir c’est que j’ai acheté ce roman emballée par la perspective de découvrir A) un auteur guinéen B) un roman picaresque guinéen C) les dessous de la conquête de la Guinée par les Français au XIX.



Le sujet de notre roman m’avait ferrée dès la 4e de couverture : l’histoire vraie d’Olivier de Sanderval, utopiste aventurier fasciné par l’Afrique, riche industriel dont l’unique obsession fut de conquérir le royaume Peul du Fouta Djalon et d’y posséder un empire. Je m’imaginais les pérégrinations en terre peule d’un homme de son siècle, lourd du poids de ses préjugés concernant la population africaine et la mission civilisatrice de la France (de ce côté-là on est servis), frétillant gardon qui irait de déconvenues en déconvenues sur un rythme effréné. Alors côté déception et déconfiture y’a de quoi faire (je vous passe le nombre de fois où notre héros est atteint de diarrhées ou échappe de peu à la mort). En revanche côté rythme effréné on repassera.



Tout est fastidieux : j’ai peiné à poursuivre ma lecture, l’enthousiasme des débuts se muant irrémédiablement en ennui. Les personnages sont pourtant truculents, la palme revenant à Olivier de Sanderval qui incarne l’esprit européen condescendant par excellence et en devient presque touchant de bêtise. J’ai engrangé moult savoir sur l’histoire de la conquête du royaume Peul par la France et comment en quelques années la France est passée du désintérêt pour ce continent à une véritable frénésie colonisatrice. De ce côté-là, Tierno Monemembo a effectué un travail de recherche louable qui fait tout l’intérêt de ce roman. Il renseigne aussi sur l’organisation de la hiérarchie en territoire peul : un royaume central duquel dépend des royaumes vassaux, sorte de fédération de trônes. Et l’esprit peul, fier et roublard (c’est pas moi qui le dis c’est l’auteur) est des plus saisissants.



Le roi de Kahel est un récit historique intéressant mais un brin rébarbatif qui vaut le détour si on est curieux de cette époque et du peuple peul si mystérieux. A vous de voir.
Lien : http://www.livreetcompagnie...
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Le roi de Kahel

Qu'est-ce-qui animait Olivier de Sanderval quand il décida de s'installer en territoire africain et d'y apporter une part de modernité ? le goût de l'aventure, l'amour de la gloire, un désir de conquête ? La dernière raison semble l'emporter, au fur et à mesure que l'on découvre le périple de ce personnage qui a réellement existé.



Comme le lecteur, il est loin d'imaginer ce qu'il va rencontrer dans cette Afrique encore méconnue, y compris des futurs colons. C'est tout l'intérêt du livre, même s'il s'agit essentiellement du vécu d'un explorateur européen.



Son rêve d'édification le poussera à composer avec les us et coutumes de ceux qui occupent déjà la terre convoitée ( les Peuls) et bientôt, de se confronter à ceux qui projettent de la soumettre, Français en tête.



Un ouvrage instructif sur la période précoloniale française et sur un des peuples d'Afrique.

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Saharienne indigo

Déception que ce roman pour moi. La quatrième de couverture m'avait allechée, me projetant en Guinée, dans une histoire de meurtre, de fuite, avec un énigmatique personnage en saharienne indigo.

En débutant la lecture, qu'elle ne fut pas ma surprise de me retrouver dans le 5e arrondissement parisien avec deux femmes qui font peu à peu connaissance.

Le roman, conçut en une alternance de scènes en Guinée et en France, qui m'ont permis par moment de raccrocher les wagons. Mais finalement l'ennui, l'incompréhension et l'absence quasi permanente de Saharienne indigo ont eu raison de moi. J'aime les surprises, mais je n'aime pas être trompée sur la "marchandise".
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Les coqs cubains chantent à minuit

Après un long exil français,Tierno Monénembo est revenu vivre dans son pays natal, à Conakry. En attendant d'écrire à nouveau sur la Guinée, son dernier livre, Les coqs cubains chantent à minuit, explore l'africanité de Cuba à travers une histoire passablement embrouillée dans ses débuts avant de révéler sa vraie nature au fil des pages. L'occasion pour le romancier de tracer un portrait chaleureux et moqueur d'une île dont les racines noires sont souvent peu évoquées (si ce n'est dans le récent Negra de Wendy Guerra). Récit haut en couleurs qui, mine de rien, capte la singulière atmosphère de Cuba : sensualité de la salsa et des corps, amour immodéré pour le rhum, liberté surveillée dans un climat paranoïaque, pénurie de vivres et optimisme mélancolique d'habitants qui ont fait de la survie un réflexe quotidien. On y croise un poète qui ne jure que par Omar Khayyam, un détrousseur de touristes qui espionne pour le compte du régime et même, le temps d'un flashback ironique, Castro au milieu de ses barbudos en route vers le pouvoir. Il ne faut pas se laisser tromper par l'apparente confusion qui règne dans les premières pages de Les coqs cubains chantent à minuit, le talent de conteur de Tierno Monénembo ne se dément pas, une fois de plus.
Lien : http://cin-phile-m-----tait-..
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Le terroriste noir

Gabriel Le Bomin, est un passionné d'histoire qui s'est déjà penché sur les deux Guerres mondiales : pour son nouveau film, sorti le 14 juin dernier réalisateur de Nos Patriotes, il adapte librement le roman Le Terroriste noir de Tierno Monénembo, publié chez Seuil en août 2012.



Addi Bâ campé à l'écran par le Belge Marc Zinga, était le seul chef noir d'un maquis de la Résistance en métropole. Trop peu connu du grand public, Tierno Monénembo l'a remis au cœur de l'histoire dans "Le terroriste noir".Addi Bâ était le seul chef noir d'un maquis de la Résistance en métropole.



Trop peu connu du grand public, Tierno Monénembo l'a remis au cœur de l'histoire dans "Le terroriste noir".



Tierno Monénembo, écrivain né en Guinée et probablement l'un des grands romanciers africains francophones, sort de l'oubli ce héros .



« Le terroriste noir », est paru en édition de poche chez POINTS à l'occasion de la sortie du film et on vous offre en ce mercredi matin la possibilité de gagner ce beau livre de Tierno Monénembo.
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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Le terroriste noir

En plein cœur de la Seconde guerre mondiale (oui encore un roman sur ce thème, la rentrée en est pleine !), les habitants d’un petit village des Vosges découvrent un soldat « nègre » réchappé de la débâcle de 1940. Ce Guinéen, adopté en France à l’âge de 13 ans, va faire sensation auprès des villageois.



« Il y a un nègre dans la rue Jourdain

- Et qu’est-ce qu’il fait là, ce nègre ?

- Rien, il est juste en train de mourir. »



Petit à petit, il s’intègre à la vie du village, séduit. Et puis, en 1942, il entre dans la Résistance, créant le premier maquis des Vosges, et entraînant avec lui quelques-uns des habitants. Véritable diable noir, les Allemands le pourchassent et l’appellent « le terroriste noir », « Der schwarze Terrorist ! »



Le roman se construit comme un monologue répondant à un interlocuteur imaginaire, qui serait le neveu d’Addi Bâ, venu visiter le village en question alors que ce dernier veut rendre hommage à son « nègre » en donnant son nom à une rue … Une décision qui permet à la narratrice de revenir sur l’histoire d’Addi Bâ, rétrospectivement, jusqu’au jour où il a été trahi … Une décision qui ravive les tensions existant alors dans le village … Germaine, nièce adoptive, amoureuse, admirative de ce grand Noir, raconte le village, ses querelles, ses petites sournoiseries et cet étonnant personnage, qui a marqué à jamais sa vie et l’histoire des siens. Pas de long portrait mais une esquisse en creux, à travers les propos de Germaine.



« Il n’aura passé que trois ans avec nous, seulement trois ans, mais maman déclarait qu’elle avait l’impression qu’il était là depuis toujours, à notre insu, un peu comme ces nuages qui se forment sous vos yeux alors que vous vous demandez d’où ils ont bien pu sortir. »



A partir de la vie de ce soldat peu ordinaire, Tierno Monemembo crée une figure romanesque fascinante, insaisissable, un peu agaçante mais finalement terriblement attachante. Il rajoute une touche de couleur au cœur d’un village traditionnel déjà bouleversé par la guerre. Il les pousse à l’action, avec sa gouaille toute africaine.



En bref, un beau cocktail historique et romanesque, qui en fait une œuvre originale, à la fois drôle, émouvante et poétique.



Pour en savoir plus sur Addi Bâ, vous pouvez vous rendre sur ce site, réalisé par un passionné.
Lien : http://missbouquinaix.wordpr..
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Le terroriste noir

Livre hommage aux tirailleurs sénégalais morts pour la France, dans une guerre qui ne leur appartenait pas, presque aussi mal considérés par les Français eux-mêmes que par les Boches, Le terroriste noir évoque donc une tranche de l'histoire de la seconde guerre mondiale peu abordée.



Malheureusement, l'aspect à la fois "drôle, émouvant et poétique" promis en couverture ne m'a personnellement pas touchée. Je n'ai du reste pas du tout pénétré ni l'histoire ni les personnages qui me sont restés indifférents.



Il m'a manqué une trame narrative plus structurée, une profondeur dans la psychologie des personnages, davantage de rythme...



Je le regrette pour l'auteur dont je ne remets pas en cause la qualité d'écrivain et dont je loue l'intention de rendre hommage "aux oubliés de l'Histoire".



Mais parfois, il arrive qu'un livre ne soit pas fait pour nous... dommage.
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