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Citations de Umberto Eco (1507)


ans Opération Tonnerre, la description de la cure naturiste suivie par Bond en clinique occupe un quart du volume, sans que les événements survenant en ce lieu justifient le fait de s'attarder sur la composition des repas diététiques, la technique des massages ou les bains turcs ; mais le passage le plus déconcertant est celui où Domino Vitali, après avoir raconté sa vie à Bond, au bar du Casino, met cinq pages à décrire, avec une exactitude à la Robe-Grillet, le paquet des cigarettes Players'. Il y a là quelque chose de plus par rapport aux trente pages retraçant dans Entourloupe… les préparatifs et le déroulement de la partie de bridge avec Sir Hugo Drax. Ici, même un suspens indéniablement magistral s'installait, même pour unlecteur ignorant tout des règles de ce jeu ; là, au contraire, le passage est interlocutoire et il semble superflu de caractériser l'esprit rêveur de Domino en montrant avec une telle richesse de nuances sa tendance à la phénoménologie sans but.

"Sans but" est le mot juste. C'est sans but que Les diamants sont éternels, pour nous présenter la contrebande de diamants en Afrique du Sud, s'ouvre sur l'apparition d'un scorpion qui évoluerait sous le verre grossissant d'une loupe, macroscopique comme un animal préhistorique, interrompu par un être humain qui fait irruption, écrase le scorpion et donne le départ de l'action, comme si tout ce qui avait précédé ne constituait que le générique, élaboré par un graphiste raffiné, d'un film continuant ensuite avec un autre style.
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Pourquoi le mythe refleurit-il en France ? Comment s'est-il refait une virginité ? Je ne saurais le dire. Il s'agit probablement d'une exploitation de la nostalgie du quadragénaire en mal d'aventures. Mais je ne crois pas que les Italiens soient particulièrement attirés par Tarzan en tant que tel. Le retour à la nature ? Nous sommes un peuple qui tue les petits oiseaux. Alors, les singes, vous pensez...
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En 1962, le Centre international des études humanistes et l'Institut des études philosophiques de Rome avaient organisé un congrès sur "Démythification et image". Je ne m'étendrai pas sur le thème de cette rencontre (les actes sont publiés sous le même titre par la Cedam de Padoue, 1962) ; je me contenterai de signaler qu'y participaient des philosophes comme Paul Ricœur, des mythologues comme Karl Kerényi, des iconologues comme Robert Klein et Eugenio Battisti, des spécialistes d'herméneutique et d'histoire des religions. On comprendra donc l'intention provocatrice avec laquelle, jeune universitaire de trente ans, j'avais présenté une communication sur les BD de Superman. Afin d'étayer mon propos "scientifique", j'avais émaillé mon texte de réflexions philosophiques et sociologiques, tout en étalant sur la table un recueil complet des comic books de Superman. J'ai souffert en tant que collectionneur mais ai savouré un grand triomphe en tant que sémioticien lorsque je me suis aperçu qu'à l'issue de ma communication, sous prétexte de me poser des questions et de me féliciter, de sévères pères dominicains avaient escamoté dans leurs amples manches plusieurs exemplaires de mes comic books, tandis que les laïcs avaient eu recours à de profondes serviettes de cuir.
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Tout ce que nous avons énoncé jusqu'à présent nous pousse à croire, au contraire, qu'il n'y a jamais de purs cas d'invention radicale, pas plus, probablement, que de pure invention modérée, étant donné que (et nous y avons déjà fait allusion), pour que naisse la convention, il faut que l'invention de ce qui n'a pas encore été dit soit soutenue de ce qui a déjà été dit. Les textes 'inventifs' sont des structures labyrinthiques où sont tissées et entremêlées les inventions, répliques, les stylisations, les ostensions et ainsi de suite. La sémiosis ne surgit jamais ex novo ni ex nihilo. Ce qui revient à dire que toute nouvelle proposition culturelle se profile toujours sur un fond de culture déjà organisée. Il n'y a jamais de signes en tant que tels, et beaucoup de soi-disants signes sont des textes ; et les signes et les textes sont le résultats de corrélations où entrent divers modes de production. Si l'invention était une catégorie de la typologie des signes, il serait alors possible de trouver des signes qui, en tant qu'inventions absolues et radicales, seraient la preuve tangible d'un état primordial du langage, conception qui est la grande découverte et la voie sans issue de la linguistique idéaliste.

Mais si nous proposons une définition de l'invention comme n'étant qu'un des modes de production sémiotique parmi beaucoup d'autres, collaborant à la formulation des fonctifs et à leur corrélation en fonctions sémiotiques, nous exorcisons la tentation idéaliste.

Si les hommes instituent et réorganisent sans cesse les codes, c'est seulement parce qu'il en existe déjà. L'univers sémiotique ne connaît ni héros ni prophètes. Même les prophètes doivent être acceptés par la société pour dire "vrai" ; sinon, ce sont de faux prophètes.
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D'autre part, que veut dire, pour un signe, être 'semblable' à son propre objet ? Les ruisseaux et les cascades que l'on voit sur le fond des tableaux de l'École de Ferrare ne sont pas fait d'eau, comme dans certaines crèches de Noël : mais certains stimuli visuels, des couleurs, des rapports spatiaux, l'incidence de la lumière sur la matière picturale déclenchent une perception à bien des égards 'semblable' à celle que l'on aurait en présence du phénomène physique que la peinture imite, à la différence près que ces stimuli sont de nature diverses. Nous pourrions alors affirmer que les signes iconiques ne possèdent pas les mêmes propriétés physiques que l'objet, mais mettent en œuvre une structure perceptive 'semblable' à celle que déclenche l'objet. Il s'agit maintenant d'établir, étant donné la transformation des stimuli matériels, ce qui reste inchangé dans le système de relations qui construit la Gestalt perçue. Ne peut-on pas supposer que, sur la base d'un apprentissage préalable, on soit amené à voir comme 'semblable' ce qui de fait est un perçu différent ?

Observons le dessin élémentaire d'une main : l'unique propriété qu'a le dessin de la main, une ligne noire continue sur une surface bidimensionnelle, est l'unique propriété que la main n'a pas. Le tracé du dessin sépare l'espace 'dedans' de la main de l'espace 'dehors' de la main, alors qu'en réalité la main constitue un volume précis qui se détache sur le fond de l'espace environnant. Il est vrai que, lorsque la main réelle se détache sur une surface claire, par exemple, le contraste entre les limites du corps qui absorbe le plus de lumière et celui qui la reflète ou l'éclaire, peut apparaître en certaines circonstances comme une ligne continue. Mais le processus est plus complexe, les limites ne sont pas aussi précisément définies, la ligne noire du dessin constitue donc la simplification sélective d'un processus beaucoup plus compliqué. Par conséquent, une convention graphique permet de TRANSFORMER sur le papier les éléments schématiques d'une convention perceptive ou conceptuelle qui a motivé le signe.
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Un objet fonctionnellement et mécaniquement complexe, comme le corps humain, n'est pas reproductible justement parce qu'un très grand nombre de ses lois fonctionnelles et organiques demeurent inconnues pour nous, en premier lieu celles qui régissent la formation de la matière vivante. C'est à cette particularité que l'on doit les difficultés et les désillusions affrontées tant par le rabbin Loew, auteur du Golem, que par le docteur Frankestein...
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Alfred Kazin raconte qu'un jour Einstein, à qui Thomas Mann avait prêté un roman de Kafka, le lui avait rendu en disant : "Je n'ai pas réussi à le lire : le cerveau humain n'est pas complexe à ce point !"
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[...] la science ne consiste pas seulement à savoir ce qu'on doit ou peut faire, mais aussi à savoir ce qu'on pourrait faire quand bien même on ne doit pas le faire.
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Je me sens peu sûr de ma vérité, même si j'y crois.
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Rien ne communique plus de courage au peureux que la peur d'autrui.
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[...] la logique pouvait grandement servir à condition d'y entrer et puis d'en sortir.
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Cependant, pour que l'Âge d'or se réalise, il faut que les animaux se plient à l'observance d'un contrat : en échange ils auront la nourriture qui les exemptera de la prédation et les hommes les aimeront et les défendront contre la civilisation. Le Marine World semble nous dire que s'il y a de la nourriture pour tous, la révolution sauvage n'est plus nécessaire, mais pour avoir de la nourriture, il faut accepter la pax offerte par le conquérant. A y regarder de près, il s'agit d'une énième variation sur le thème du "fardeau de l'homme blanc". Comme dans les récits africains de Wallace, le commissaire Sanders assurera la paix sur le grand fleuve, pourvu que Bozambo ne pense pas à organiser un "conciliabule" avec les autres chefs sans en avoir l'autorisation. Autrement le chef est déposé et pendu.

Curieusement, dans ce théâtre écologique , le visiteur n'est pas du côté du dompteur humain mais du côté des animaux : comme eux, il doit suivre des itinéraires fixés, s'asseoir au bon moment, acheter des chapeaux de paille, des lollilops et les diapositives qui célèbrent la liberté sauvage et inoffensive. Les animaux gagnent le bonheur en s'humanisant et les visiteurs en s'animalisant.
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Comment un homme riche et amateur d'art peut-il se souvenir des émotions qu'il a éprouvées un jour à Herculanum ou à Versailles ? Et comment peut-il aider ses concitoyens à comprendre ce qu'est l'Europe ? Il est facile de dire : alignez tous les objets avec de petites fiches explicatives dans un cadre neutre. En Europe, le cadre neutre s'appelle Louvre, château des Sforza, Offices, Tate Gallery à deux pas de l'abbaye de Westminster. Il est facile de donner un cadre neutre à des visiteurs qui respirent le passé tous les deux pas, qui arrivent au cadre neutre après avoir parcouru avec émotion des itinéraires au milieu des pierres vénérables. Mais en Californie, avec le Pacifique d'un côté et Los Angeles de l'autre, avec les restaurants en forme de chapeau melon et de hamburger, les autoroutes à quatre niveaux et dix mille échangeurs, que fait-on ?
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Le Palace est placé sous l'enseigne de Don Quichotte (lui aussi est là, même s'il n'est pas un tableau) qui "représente la nature idéaliste et réaliste de l'homme : c'est pour cette raison qu'il est élu symbole du lieu". J'imagine que par "idéaliste" on entend la valeur éternelle de l'art ; par "réaliste" le fait qu'ici on peut satisfaire un désir ancestral, c'est-à-dire regarder au-delà du cadre, voir aussi les pieds du buste. Toutes choses que de nos jours la technique la plus élaborée de la reproduction par le laser, l'holographie, obtient à partir du sujet réalisé exprès, et que le Palace of Living Arts réalise à partir des chefs-d'oeuvre du passé.

L'unique chose qui étonne est le fait que dans la reproduction parfaite de Portrait des époux Arnolfini de Van Eyck, tout est réalisé en trois dimensions, sauf la seule chose que le tableau représentait avec un surprenant artifice illusionniste et que les artisans du Palace auraient pu insérer sans aucun effort : le miroir convexe qui sur le fond restitue de dos la scène peinte, comme vue au grand-angle. Ici, au royaume de la cire tridimensionnelle, le miroir est simplement peint. Il n'y a pas à cela de raisons plausibles sinon d'ordre symbolique. Face à un cas où l'art a joué consciemment avec l'illusion et s'est mesuré à la vanité des images à travers l'image d'une image, l'industrie du Faux Absolu n'a pas osé tenter la copie parce qu'elle aurait effleuré la révélation de son propre mensonge.
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