Citations de Valérie Rossignol (56)
Ne crois pas que c’est ton corps que j’aime. J’aime ton esprit à travers ton corps. Ton esprit a su rejoindre les espaces les plus profonds de mon être, ton corps de même.
C'est vraisemblablement qu'il y a une vérité dans la misère, qu'il y a une façon très singulière de l'appréhender. La misère n'est pas ce drame de l'existence qui tue.
Vous donnez tous les indices pour qu'un vaincu se relève.
Et ce redressement est d'une beauté infinie.
C'est un chant de consolation d'une incroyable douceur.
Vous faites vibrer en moi la note de la mélancolie.
Il ne faut pas du courage pour sortir de la misère.
Il faut de la pureté au cœur et des larmes.
Vous êtes mes larmes, Louis.
Et ce chant mélodieux vient de loin.
Il se soulève comme une vague, il emporte tout, loin des jugements.
Peut-être en sentez-vous les vibrations.
Il fallait une caisse de résonance.
Il faut du temps pour que l'humanité intègre en elle un événement aussi puissant. Aussi intime, personnel et puissant.
Vous avez réussi cela, à faire de l'expérience la plus intérieure et la plus grave un phénomène dont on n'a pas encore mesuré l'ampleur.
Ainsi, il y aurait un revers à la violence du présent, ce serait les larmes qui coulent doucement dans les âmes à venir.
Puissent mes yeux voir encore.
Quand Parrhasios, peintre grec de l'Antiquité, achète un vieillard prisonnier de guerre pour en faire son modèle, qu'il choisit comme thème Prométhée cloué, faisant du supplice la condition à la réalisation de son tableau, il nous met face à un dilemme : choisir entre la compassion et l'œuvre d'art. Parrhasios décide de torturer son modèle afin de saisir la juste expression de l'agonie, puisqu'il ne le trouve pas assez 'triste', et l'entourage du peintre a beau avoir pitié, il rétorque à ceux qui tentent de l'en dissuader : 'Je l'ai acheté'. Cris déchirants du vieillard, protestations des témoins ne changeront rien à l'indifférence du peintre qui tire une jouissance particulière à traduire la douleur, non pas supposée mais réelle.
(p. 31)
Je ne crois pas que la façon d'aimer change. Je t'aime comme je t'ai aimé il y a deux mille ans et comme je t'aimerai dans deux mille ans. J'aime le passeur qu'il y a en toi.
Une fois de plus, j'ai l'intime conviction que l'objet de l'art n'est ni l'idée, ni le résultat, mais ce qui se passe entre les deux(...) Je suis toujours étonnée du pouvoir de renouvellement que contient l'acte créateur.
Le modelage me permet d'appréhender un homme que personne n'a connu et ne connaîtra jamais, un être soustrait à toute norme, un être de chair pris dans un instant vécu. Je le vois dans sa nudité, dans sa façon de respirer, de regarder, de faire face à l'instant présent.
La femme n'est pas une féministe qui aurait des comptes à régler dans son rapport à l'homme. Elle est sortie de toute injonction de penser ou de juger selon des valeurs véhiculées par la société. L'homme et la femme osent une rencontre inaugurale.
Il n'en est pas toujours ainsi. Ce qu'on appelle le désir n'est pas inné. On peut le perdre, sans savoir pourquoi. Souvent, on abîme cet élan en l'associant à un mouvement de plaisir et de liberté. Le désir est fragile et crée la dépendance à l'autre. Nous sommes vulnérables face à l'incertitude de ce qu'il en fera. Je me suis rendue inaccessible aux hommes pour ne pas leur accorder ce pouvoir sur moi.Je ne voulais pas dissocier la chair et l'esprit. Contrairement à ceux qui ont voulu me faire admettre que cette dissociation était ordinaire...
Il s'en remettait à moi et je m'en remettais à lui, qui regardait au-delà. Il attendait de moi que je matérialise son corps alors que j'étais précisément dans l'instant où il est possible d'en sortir. J'attendais de lui qu'il soit un modèle et il quittait son enveloppe corporelle pour atteindre d'autres sphères, déjouant mes projets, m'incitant à relier ces mondes entre eux. Nous étions à la jonction entre deux états, dans le courant qui permet une compréhension aimante de la réalité. Le désespoir qu'impose la certitude d'une mort imminente était distancé par l'expérience de la lumière.
Une fois de plus, j'ai l'intime conviction que l'objet de l'art n'est ni l'idée, ni le résultat, mais ce qui se passe entre les deux.
Je n'érige aucune image.
Je ne définis aucun concept.
Mon histoire d'hommes sculptés n'est pas même une histoire. Elle est une visite dans l'infiniment petit qui nous habite. C'est l'aventure de l'esprit tombé en soi et qui, parce qu'il est inerte et lourd, reste aux aguets, prêt à suivre les variations que lui imposent les signes non encore déchiffrés, l'apprentissage d'une langue qui ne s'entend que lorsqu'on a été vaincu.
La communion est rendue possible par l'oubli de soi dans la contemplation de l'autre, qui n'est plus un être social mais un humain prêt à briser les distances du corps.
Homme de chair
Nous ne savions pas alors que, sans cet amour illimité qui s'incarne une fois dans la vie, rien d'essentiel n'est vécu. Je pense à toutes les formes d'amour. On peut aimer sans limites un frère, une soeur, un ami, un enfant. Mais l'amour entre nous permet de vivre l'unité des corps et le débordement de l'esprit. (p. 83)
J'ai parfois peur qu'on devienne fous ou qu'on ne revienne jamais. pas étonnant qu'on appelle cela-la petite mort-Nous avons cette possibilité d'éprouver les limites de l'humain, le moment à partir duquel la perte de contrôle est telle que nous sommes réduits en poussière. C'est le seul moment de la vie où le sentiment de puissance et notre profonde vulnérabilité sont complètement assumés. (p. 82)
Homme de chair
J'ai dû me défaire des pensées de ma mère, de mes grand-mères, de mes tantes, rejeter aussi le sort que réservaient les hommes aux femmes de la famille et aux autres présences féminines. Rien de ce que j'observais n'avait de sens pour moi. Il a fallu que je rejoigne cet espace de silence pour sentir que loin, au fond de moi. Il a fallu que je rejoigne cet espace de silence pour sentir que loin, au fond de moi, existait une forme d'union sur laquelle la société n'avait aucune prise. (p. 79)
Je me suis familiarisée avec ta présence, tantôt physique, tantôt spirituelle. Et la joie naît du sentiment que je ne m'y habituerai pas. (...) L'amour spirituel est charnel et l'amour charnel est spirituel (...) (p. 75)
Plus nous avançons ensemble, plus la pudeur s'accroît. (p.77)
Homme de chair
Le désir est fragile et crée la dépendance à l'autre. Nous sommes vulnérables face à l'incertitude de ce qu'il en fera. Je me suis rendue inaccessible aux hommes pour ne pas leur accorder ce pouvoir sur moi. Je ne voulais pas dissocier la chair et l'esprit. Contrairement à ceux qui ont voulu me faire admettre que cette dissociation était ordinaire. (p.77)
Heureux celui qui sait se déprendre de ce qu'on lui a fait admettre à force d'images, de slogans, de poncifs formulés et reformulés quotidiennement, comme si tout allait de soi et était la vérité.
L'amour est une méditation à deux, un chant de grâce, la gratitude ressentie face à ce qu'il nous est donné de vivre.